Chambre de la sécurité financière (Québec)

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Contenu de la décision

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N°:

CD00-0796

 

DATE :

15 décembre 2010

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LE COMITÉ :

Me Janine Kean

Présidente

M. André Chicoine, A.V.C.

M. Jacques Denis, A.V.A., Pl. Fin

Membre

Membre

 

 

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CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

RÉAL FORTIN, conseiller en sécurité financière et représentant de courtier en épargne collective (Certificat 149 843)

Partie intimée

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DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

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[1]          Le 13 octobre 2010, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s'est réuni au siège social de la Chambre situé au, 300, rue Léo-Pariseau, 26e étage à Montréal, et a procédé à l’audition de la plainte suivante portée contre l’intimé.

LA PLAINTE

À L’ÉGARD DE SA CLIENTE MADELEINE SAUVAGEAU   

1.            À Pointe-Claire, le ou vers le 16 février 2004, l’intimé RÉAL FORTIN a fait défaut d’agir en conseiller consciencieux et n’a pas cherché à avoir une connaissance complète des faits à l’égard de sa cliente, Madeleine Sauvageau, en lui conseillant de transférer et lui faisant transférer 123 189,57 $ de son compte #00040265225 non enregistré détenu à la Banque de Montréal vers son compte REER chez Industrielle Alliance sans avoir d’abord vérifié le traitement fiscal de ses placements, contrevenant ainsi aux articles 12 et 15 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q., c. D-9.2, r.1.01);

2.            À Pointe-Claire, le ou vers le 4 mars 2004, l’intimé RÉAL FORTIN a fait défaut d’agir avec compétence et professionnalisme en conseillant et faisant souscrire à sa cliente, Madeleine Sauvageau, une marge de crédit hypothécaire de 115 000 $ pour placements hors REER alors que cette transaction n’était pas dans l’intérêt de sa cliente et ne convenait pas à sa situation financière, contrevenant ainsi aux articles 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q., c. D-9.2, r.1.01);

3.            À Pointe-Claire, le ou vers le 14 septembre 2004, l’intimé RÉAL FORTIN a fait défaut d’agir avec compétence et professionnalisme en conseillant et faisant souscrire à sa cliente, Madeleine Sauvageau, une police d’assurance vie MERIDIA-vie universelle et une police d’assurance vie T20RT (temporaire 20 ans renouvelable et transformable) pour un capital décès total de 400 000 $ alors que ce besoin de couverture n’était pas dans l’intérêt de sa cliente et ne correspondait pas à sa situation financière, contrevenant ainsi aux articles 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q., c. D-9.2, r.1.01);

À L’ÉGARD DE SA CLIENTE MIREILLE SOUDRE

4.            À Saint-Lambert, le ou vers le 11 mai 2006, l’intimé RÉAL FORTIN a fait défaut de prendre les mesures raisonnables afin d’assurer l’exactitude et l’intégralité des renseignements transmis à sa cliente, Mireille Soudre, sur le fonds Focus équilibré INA 625 à l’intérieur du produit de fonds distincts Ecoflex en lui représentant un rendement annuel de 8% sans que cette prévision ne soit supportée par des statistiques concordantes, contrevenant ainsi aux articles 7 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q., c. D‑9.2, r.1.1.2), 13 et 14 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (L.R.Q., c. D‑9.2, r.1.3) et 12, 13, 14, 16 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q., c. D-9.2, r.1.01);

5.            À Saint-Lambert, le ou vers le 11 mai 2006, l’intimé RÉAL FORTIN a fait défaut d’agir avec compétence et professionnalisme en n’informant pas sa cliente, Mireille Soudre, des risques liés à l’effet de levier lors de l’achat de titres du Fonds INA625 Focus équilibré pour 202 000 $, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 19 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q., c. D-9.2, r.1.1.2);

6.            À Saint-Lambert, le ou vers le 11 mai 2006, l’intimé RÉAL FORTIN a fait défaut d’agir avec compétence et professionnalisme en conseillant et faisant souscrire à sa cliente, Mireille Soudre, un prêt levier de 202 000$ qui ne convenait pas à sa situation financière ni à ses objectifs de placement, contrevenant ainsi aux articles 16 et 51 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 6 du Règlement sur la pratique du domaine des valeurs mobilières (L.R.Q., c. D‑9.2, r.3.01);

À L’ÉGARD DE SA PROFESSION

7.            À Pointe-Claire, le ou vers le 13 février 2004, l’intimé RÉAL FORTIN a fait défaut d’agir avec intégrité et professionnalisme en laissant faussement croire à sa cliente, Madeleine Sauvageau, qu’il était comptable agrée alors qu’il n’est plus inscrit à l’Ordre des comptables agréés depuis le 28 mai 1998, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), et 10 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q., c. D-9.2, r.1.01).

[2]           La plaignante était représentée par Me Paul Déry-Goldberg alors que Me Sonia Paradis représentait l’intimé.

[3]           Dès le début de l’audition, l’intimé enregistra, par l’entremise de son procureur, un plaidoyer de culpabilité à tous et chacun des sept chefs d’accusation contenus à la plainte.

[4]           Le procureur de la plaignante se limita à produire une preuve documentaire composée de l’attestation du droit de pratique de l’intimé (P-1), le rapport d’expertise de M. Denis Preston portant sur les chefs 1, 2, 3 et 6 (P-2) et, concernant le chef 7, une photocopie d’une carte d'affaires de l’intimé (P-3). 

[5]           Au chapitre des sanctions, il indiqua au comité ne pas avoir de preuve additionnelle à offrir et que les parties avaient des recommandations communes à lui présenter.

[6]           Pour sa part, l’intimé témoigna sur sanction.  Il a dit reconnaitre la gravité de ses fautes et apporter depuis cette plainte plus d’attention à l’analyse des besoins de ses clients.  Il ajouta avoir réalisé que le prêt levier n’était pas un produit convenant à tous et avoir décidé de ne plus jamais offrir ce type d’investissement. 

RECOMMANDATIONS CONJOINTES DES PARTIES

[7]           Les parties proposèrent les sanctions suivantes :

Pour chacun des chefs 1 et 4, une amende de 4 000 $ pour un total de 8 000 $;

Pour chacun des chefs 2, 3 et 6, une amende de 2 000 $ pour un total de 6 000 $ ainsi qu’une radiation temporaire d’un mois à être purgée de façon concurrente;

Pour chacun des chefs 5 et 7, une amende de 2 000 $ pour un total de 4 000 $;

Le tout totalisant 18 000 $ d’amendes et une radiation temporaire d’un mois.

[8]           Elles proposèrent également de condamner l’intimé au paiement des déboursés.

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[9]   Au soutien des recommandations, le procureur de la plaignante déposa un cahier regroupant trois décisions sans, par ailleurs, les commenter.  Il ajouta que le comité, en présence de recommandations communes sur sanction, ne pouvait s’en écarter à moins de disposer de motifs sérieux démontrant qu’elles étaient déraisonnables.  

[10]        Il souligna que l’intimé, en manifestant tôt son intention d’enregistrer un plaidoyer de culpabilité, avait permis de minimiser grandement les coûts de l’enquête devant le comité.

[11]        Il réclama la publication de la décision sur radiation temporaire alléguant que la protection du public l’exigeait et qu’à défaut de motif qui permettrait de la dispenser, elle devrait être ordonnée.  

REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉ

[12]        La procureure de l’intimé déposa une série de décisions (7) qu’elle prit le soin de commenter en établissant les parallèles et distinctions à faire avec le cas de l’intimé.  

[13]        Elle insista sur les facteurs atténuants notamment l’enregistrement d’un plaidoyer de culpabilité, la reconnaissance par l’intimé de sa faute, le faible risque de récidive, le peu d’années de pratique lors des gestes reprochés et enfin, l’absence d’intention malveillante. 

[14]        Bien que reconnaissant que l’ordonnance de publication de la décision était habituelle, elle estima que la publication réclamée ne ferait qu’ajouter à la sanction et demanda d’en ordonner la dispense compte tenu des facteurs atténuants. 

[15]        Elle demanda d’accorder à l’intimé un délai de cinq mois pour acquitter les amendes proposées, ce dernier ayant témoigné que la présente année s’annonçait particulièrement difficile financièrement.

REPRÉSENTATIONS ADDITIONNELLES DES PARTIES

[16]        Le 1er novembre 2010, le comité de discipline demanda aux parties de lui fournir des arguments additionnels quant aux sanctions recommandées pour les chefs 5 et 7.  Ces représentations supplémentaires parvinrent au comité le ou vers le 2 décembre 2010, date de reprise du délibéré.

[17]        Pour sa part, le procureur de la plaignante s’est dit en accord avec l’exposé des faits liés à ces deux chefs présenté par la procureure de l’intimé.  Alors que cette dernière réitéra notamment les arguments présentés antérieurement, le procureur de la plaignante cita trois décisions supplémentaires. Enfin, les deux parties ont souligné l’importance de considérer la globalité des sanctions pour en apprécier le caractère juste et raisonnable.  

ANALYSE ET MOTIFS

[18]        L’intimé ayant enregistré un plaidoyer de culpabilité sur tous les chefs de la plainte portée contre lui, le comité le déclare en conséquence coupable sous chacun des sept chefs d’accusation.

[19]        La suggestion d’imposer une amende de 2 000 $ pour chacun des chefs 5 et 7 parait clémente et, plus particulièrement celle du chef 7 où l’intimé a démontré un manque d’honnêteté en remettant à sa cliente, en 2004, sa carte professionnelle s’affichant comme comptable agréé malgré qu’il ne l’était plus depuis 1998.  Toutefois, le comité est d’avis, après avoir examiné l’ensemble du dossier et tenant compte de la globalité des sanctions, qu’elle n’est pas déraisonnable au point de s’en écarter.

[20]        Le comité suivra donc les sanctions proposées par les parties.  De plus, conformément à leur recommandation, le comité condamnera l’intimé au paiement des déboursés.

[21]        Quant à la publication de la décision, le comité l’ordonnera puisqu’aucun élément sérieux n’a été présenté qui permettrait d’en ordonner la dispense.  

[22]        Enfin, le comité donnera suite à la demande de l’intimé et lui accordera un délai de cinq mois pour le paiement des amendes, débutant le 31e jour de la présente décision.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé sur chacun des sept chefs d’accusation contenus à la plainte;

DÉCLARE l’intimé coupable à l’égard de chacun des sept chefs d’accusation contenus à la plainte;

Sous chacun des chefs d'accusation 1 et 4

CONDAMNE l'intimé au paiement d’une amende de 4 000 $;

Sous chacun des chefs d'accusation 2, 3 et 6

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 2 000 $ et ORDONNE la radiation temporaire de l’intimé pour une période d’un mois, à être purgée de façon concurrente;

Sous chacun des chefs d'accusation 5 et 7

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 2 000 $;

ACCORDE à l’intimé un délai de cinq (5) mois pour le paiement des amendes, au moyen de versements mensuels, égaux et consécutifs débutant le 31e jour de la présente décision sous peine de déchéance du terme et sous peine de non-renouvellement de son certificat émis par l’Autorité des marchés financiers dans toutes les disciplines où il lui est permis d’agir;

ORDONNE à la secrétaire du comité de discipline de faire publier aux frais de l’intimé un avis de la présente décision dans un journal où l’intimé a son domicile professionnel et dans tout autre lieu où il a exercé ou pourrait exercer sa profession conformément à l’article 156 (5) du Code des professions.

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions, L.R.Q. chap. C-26;

 

 

 

(s) Janine Kean

Me JANINE KEAN

Présidente du comité de discipline

 

(s) André Chicoine____________________

M. ANDRÉ CHICOINE, A.V.C.

Membre du comité de discipline

 

(s) Jacques Denis____________________

M. JACQUES DENIS A.V.A., Pl. Fin

Membre du comité de discipline

 

Me Paul Déry-Goldberg

BÉLANGER LONGTIN

Procureurs de la partie plaignante

 

Me Sonia Paradis

DONATI MAISONNEUVE

Procureurs de la partie intimée

 

Date d’audience :

13 octobre 2010

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ

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