Chambre de la sécurité financière (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-1006

 

DATE :

29 mai 2014

_____________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me François Folot

Président

M. Louis Giguère, A.V.C.

Membre

M. Serge Lafrenière, Pl. Fin.

Membre

_____________________________________________________________________

 

NATHALIE LELIÈVRE, ès qualités de syndique adjointe de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

 

YVON VALLÉE, certificat numéro 194736

Partie intimée

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DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

______________________________________________________________________

 

CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE COMITÉ A PRONONCÉ L’ORDONNANCE SUIVANTE :

                     Ordonnance de non-divulgation, de non-publication et de non-diffusion des noms et prénoms des clients dont les initiales sont mentionnées aux différents chefs d’accusation ainsi que des renseignements pouvant permettre de les identifier.

[1]           Le 28 janvier 2014, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s'est réuni aux locaux du Tribunal administratif du Québec, 575, rue St‑Amable, 3e étage, salle 3.30, Québec, et a procédé à l'audition d'une plainte disciplinaire portée contre l'intimé ainsi libellée :

LA PLAINTE

« 1.       À Grande Rivière, le ou vers le 19 décembre 2012, l’intimé a fait défaut de remettre à la Compagnie d’assurance Combined d’Amérique la somme de 105 $ qui lui avait été confiée pour fins de paiement d’une prime d’assurance pour le renouvellement des polices nº 25873470, 27487683, 26041955 et 80607893 au nom de J.B., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D‑9.2), 11, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, chapitre D‑9.2, r.3);

2.          À Newport, vers février 2013, l’intimé a fait défaut de remettre à la Compagnie d’assurance Combined d’Amérique la somme de 40 $ qui lui avait été confiée pour fins de paiement d’une prime d’assurance pour le renouvellement de la police nº 25732699 au nom de M.B., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D‑9.2), 11, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, chapitre D‑9.2, r.3);

3.          À Grande Rivière, vers janvier 2013, l’intimé a fait défaut de remettre à la Compagnie d’assurance Combined d’Amérique la somme de 104 $ qui lui avait été confiée pour fins de paiement d’une prime d’assurance pour le renouvellement des polices 23073389, 21821631, 19391735, 20551860, 17508087 et 17876949 au nom de D.V., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D-9.2), 11, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, chapitre D-9.2, r.3). »

[2]           D’entrée de jeu, la plaignante, par l’entremise de son procureur, déposa au dossier un plaidoyer de culpabilité écrit provenant de l’intimé ainsi qu’une correspondance émanant de ce dernier datée du 21 janvier 2014 où il mentionne qu’il ne « peut se présenter à l’audition le 28 janvier » mais déclare : « Je ne conteste pas la décision de radiation de cinq ans ».

[3]           Elle y versa également le procès-verbal d’une conférence de gestion tenue le 16 septembre 2013 où ce dernier indiquait son intention de plaider coupable aux chefs d’accusation portés contre lui.

[4]           Elle relata enfin une conversation téléphonique récente où l’intimé lui aurait confirmé sa volonté d’enregistrer un plaidoyer de culpabilité à tous les chefs d’accusation et réclama, dans les circonstances, l’autorisation de procéder « ex parte ».

[5]           Compte tenu de ce qui précède, le comité autorisa sa demande.

PREUVE DE LA PLAIGNANTE

[6]           À titre de preuve, la plaignante versa au dossier une importante preuve documentaire consistant essentiellement en des éléments recueillis lors de son enquête qui furent cotés P-1 à P-27.

[7]           Elle exposa ensuite brièvement les faits, déclara que l’intimé devait être reconnu coupable des trois (3) chefs d’accusation contenus à la plainte, puis soumit au comité ses représentations sur sanction.

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[8]           Elle débuta celles-ci en indiquant qu’elle suggérait au comité d’imposer à l’intimé, sous chacun des chefs, une radiation temporaire de cinq (5) ans à être purgée de façon concurrente.

[9]           Elle ajouta réclamer la condamnation de ce dernier au paiement des déboursés et la publication de la décision.

[10]        Elle résuma le contexte factuel rattaché aux infractions, en racontant que les consommateurs en cause avaient à tour de rôle, entre le ou vers le 19 décembre 2012 et février 2013, été rencontrés par l’intimé; que ce dernier avait alors recueilli d’eux en paiement de leurs primes d’assurance les sommes mentionnées aux trois (3) chefs d’accusation, mais plutôt que d’ensuite remettre celles-ci à l’assureur, il s’en était approprié à des fins personnelles. Les assurés avaient ensuite reçu un avis les informant du défaut de paiement de leur prime et avaient communiqué avec l’assureur. Ils lui avaient affirmé avoir réglé celui-ci auprès de l’intimé, spécifiant qu’ils détenaient un reçu émanant de ce dernier le confirmant. Après enquête, l’intimé aurait, le 8 mars 2013, été suspendu de ses fonctions. Le 16 mai 2013, l’assureur cessait de faire affaire avec lui.

[11]        Elle évoqua ensuite les facteurs atténuants et aggravants suivants :

Facteurs atténuants :

-               le peu d’expérience de l’intimé dans la distribution de produits d’assurance, celui-ci en étant, au moment de la commission des infractions, à ses débuts dans la profession;

-               son absence d’antécédents disciplinaires;

-               la reconnaissance par ce dernier de ses fautes, et ce, tant auprès de l’assureur qu’auprès de l’enquêteur de la Chambre;

-               l’enregistrement d’un plaidoyer de culpabilité sous tous les chefs (3) d’accusation contenus à la plainte;

-               le montant total, sans être anodin, assez minime, des sommes détournées, soit 249 $;

-               les conséquences pour l’intimé dont notamment sa perte d’emploi.

Facteurs aggravants :

-               la gravité objective des infractions, celles-ci démontrant une absence de probité chez l’intimé;

-               le nombre de consommateurs (3) visés;

-               l’incapacité pour l’assureur de récupérer les sommes détournées, et ce, malgré quelques démarches auprès de l’intimé à cet effet;

-               l’atteinte à l’image de la profession.

[12]        Elle termina ses représentations en spécifiant que les sanctions qu’elle réclamait, étaient en fait des « recommandations communes » qui respectaient, à son avis, « tant le principe d’exemplarité, le devoir de protection du public que les paramètres jurisprudentiels applicables ».

[13]        Au soutien de cette dernière affirmation, elle déposa un cahier d’autorités contenant quatre (4) décisions antérieures du comité[1] qu’elle commenta.

MOTIFS ET DISPOSITIF

[14]        L’intimé a enregistré un plaidoyer de culpabilité à l’égard de chacun des chefs d’accusation qui ont été portés contre lui.

[15]        Selon l’attestation du droit de pratique émanant de l’Autorité des marchés financiers produite au dossier sous la cote P-1, il a détenu du 28 mars 2012 au 22 mai 2013 un certificat dans la discipline de l’assurance contre la maladie ou les accidents pour le cabinet Compagnie d’assurance Combined d’Amérique.

[16]        Au moment de la commission des infractions, il avait peu d’expérience dans le domaine de la distribution de produits d’assurance.

[17]        Il est âgé de 49 ans et n’a aucun antécédent disciplinaire.

[18]        Il a collaboré à l’enquête de l’assureur ainsi qu’à celle de la syndique et leur a avoué ses fautes.

[19]        Comme conséquence de celles-ci, il a perdu son emploi.

[20]        Les sommes qu’il a détournées, sans être insignifiantes, sont plus minimes que ce à quoi le comité a généralement, par le passé, été confronté.

[21]        Il semble avoir assumé ses fautes et aurait laissé entendre au procureur de la plaignante qu’il n’avait pas l’intention de retourner à l’exercice de la profession.

[22]        Néanmoins la gravité objective des infractions qu’il a commises ne fait aucun doute.

[23]        Tel que le comité l’a déclaré à plusieurs reprises, l’appropriation de fonds est l’une des infractions les plus sérieuses que puisse commettre un représentant.

[24]        En agissant tel qu’il lui est reproché, l’intimé a trahi tant la confiance que lui portaient les clients que celle que lui témoignait l’assureur, son employeur.

[25]        Les infractions perpétrées par ce dernier, à trois (3) reprises à l’égard de consommateurs différents, témoignent d’un manque d’intégrité et portent directement atteinte à l’image de la profession.

[26]        Aussi, après considération des éléments tant objectifs que subjectifs qui lui ont été présentés, le comité est d’avis que la condamnation de l’intimé, telle que proposée par la plaignante et agréée par ce dernier, à une radiation temporaire de cinq (5) ans sous chacun des chefs contenus à la plainte, à être purgée de façon concurrente, serait en l’espèce une sanction conforme et appropriée, adaptée aux infractions, ainsi que respectueuse des principes d’exemplarité et de dissuasion dont il ne peut faire abstraction.

[27]        Le comité ordonnera donc, sous tous et chacun des trois (3) chefs d’accusation contenus à la plainte, la radiation temporaire de l’intimé pour une période de cinq (5) ans, à être purgée de façon concurrente.

[28]        Le comité ordonnera de plus la publication de la décision et condamnera l’intimé au paiement des déboursés.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé sous tous et chacun des trois (3) chefs d’accusation contenus à la plainte;

DÉCLARE l’intimé coupable de tous et chacun des trois (3) chefs d’accusation contenus à la plainte;

ET PROCÉDANT SUR SANCTION :

Sous tous et chacun des chefs d’accusation 1, 2 et 3 contenus à la plainte :

ORDONNE la radiation temporaire de l’intimé pour une période de cinq (5) ans à être purgée de façon concurrente;

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés, y compris les frais d’enregistrement conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions, RLRQ, c. C-26;

ORDONNE à la secrétaire du comité de discipline de faire publier aux frais de l’intimé un avis de la présente décision dans un journal où l’intimé a ou avait son domicile professionnel ou dans tout autre lieu où il a exercé ou pourrait exercer sa profession conformément à l’article 156(5) du Code des professions, RLRQ, c. C-26.

 

 

(s) François Folot____________________

Me FRANÇOIS FOLOT

Président du comité de discipline

 

(s) Louis Giguère   ___________________

M. LOUIS GIGUÈRE, A.V.C.

Membre du comité de discipline

 

(s) Serge Lafrenière__________________

M. SERGE LAFRENIÈRE, PL. FIN.

Membre du comité de discipline

 

 

 

Me Valérie Déziel

BÉLANGER LONGTIN, s.e.n.c.r.l.

Procureurs de la partie plaignante

 

L’intimé était absent.

 

Date d’audience :

28 janvier 2014

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1]     Champagne c. Savann, CD00-0908, décision sur culpabilité et sanction en date du 3 juillet 2012; Lévesque c. Poirier, CD00-0696, décision sur culpabilité en date du 3 septembre 2008 et décision sur sanction en date du 26 janvier 2009; Champagne c. Labonté, CD00-0878, décision sur culpabilité et sanction en date du 3 avril 2012; Champagne c. Raymond, CD00-0829, décision sur culpabilité et sanction en date du 22 juin 2011.

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