Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

No:

2012-05-02(A)

 

DATE :

23 janvier 2013

 

 

LE COMITÉ :

Me Patrick de Niverville, avocat

Président

Mme Christine Roy, agent en assurance de dommages

Membre

Mme Carole Demeule, agent en assurance de dommages

Membre

 

 

CAROLE CHAUVIN, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

 

Partie plaignante

c.

 

PAUL-ARMAND BRUNEAU, agent en assurance de dommages

 

Partie intimée

 

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

 

 

[1]       Le 21 novembre 2012, le Comité de discipline se réunissait pour l’audition de la plainte no 2012-05-02(A);

[2]       L’intimé était alors représenté par Me Pierre Gourdeau et la syndic par Me Claude G. Leduc;

[3]       L’intimé fait face à une plainte amendée lui reprochant les chefs suivants :

1.               Aux mois de février et mars 2010, lors d’une soumission d’assurance des entreprises, n’a pas recueilli les renseignements nécessaires pour lui permettre d’identifier les besoins de l’assuré Transport d’A.C. Enr. / C.C. afin de lui proposer le produit d’assurance lui convenant le mieux et/ou avant la conclusion d’un contrat d’assurance des entreprises en faveur de l’assuré Transport d’A.C. Enr. / C.C., n’a pas décrit à l’assuré le produit proposé en relation avec ses besoins, n’a pas précisé la nature de la garantie offerte, omettant d’inclure la garantie responsabilité civile du transport d’animaux et offrant une garantie excluant le transport d’animaux appartenant à autrui, le tout en contravention avec les articles 16, 27 et 28 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment les articles 37(1) et 37(6) dudit code;

2.         (…)

3.         Aux mois de février et mars 2011, lors du renouvellement du contrat d’assurance de Groupe Ledor portant le numéro E34100 832501-001 pour la période du 22 mars 2011 au 22 mars 2012, n’a pas pris les moyens requis pour s’assurer que cette protection d’assurance réponde aux besoins de l’assuré, le tout en contravention avec les articles 16 et 39 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment les articles 37(1) et 37(6) dudit code;

4.         Entre les mois de février 2010 et mars 2011, a négligé ou permis que soient négligés ses devoirs professionnels reliés à l’exercice de ses activités en n’ayant pas une tenue de dossier que l’on est en droit de s’attendre de la part d’un représentant en assurance de dommages, notamment en ne notant pas au dossier les différentes communications téléphoniques, en n’ayant aucune confirmation écrite des instructions reçues, des conseils donnés et des décisions prises le tout, en contravention avec l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment les articles 9 et 37 (1) dudit code;

L’intimé s’étant ainsi rendu passible pour les infractions ci-haut mentionnées des sanctions prévues à l’article 156 (c) du Code des professions

[4]       Quelques semaines auparavant, l’intimé avait présenté une requête pour arrêt des procédures qui fut abandonnée par la suite;

[5]       Il y a lieu de souligner que l’intimé et son procureur ont participé à l’audition par le biais d’une conférence téléphonique;

[6]       Il en fut de même pour l’un des membres du Comité de discipline, soit Mme Christine Roy;

[7]       Après le dépôt de consentement de la plainte amendée, l’intimé a enregistré un plaidoyer de culpabilité;

[8]       En conséquence, il fut déclaré, séance tenante, coupable des chefs nos 1, 3 et 4 de la plainte amendée;

I.          Recommandations communes

[9]       Me Leduc, après avoir déposé les pièces pertinentes à la plainte amendée, fit part au Comité des sanctions suggérées par les parties, soit :

                Une  amende  de  2 000 $  sur  chacun  des  chefs nos 1, 3 et 4, pour  un total de 6 000 $;

                Le total des amendes devant être réduit à un montant global de 4 000 $;

                Une recommandation de suivre et de réussir un cours de formation, soit le cours ACF-6252 intitulé « Le représentant et sa responsabilité civile et professionnelle, comment se protéger »;

                Le paiement de tous les déboursés;

                Délai de paiement de trente (30) jours.

[10]    Pour sa part, Me Gourdeau confirme le caractère commun des recommandations et souligne que l’intimé n’a aucun antécédent disciplinaire;

II.         Analyse et décision

A)   Les faits

[11]    Le 4 février 2011, l’assuré, une compagnie de transport d’animaux, reçoit le mandat de transporter trois vaches Holstein;

[12]    Or, arrivée à destination, une des vaches est incapable de se lever et, suite à un examen par un vétérinaire, celui-ci conclut que l’animal a subi un accident traumatisant, entraînant la paralysie des membres postérieurs[1];

[13]    L’assuré se voit donc réclamer les dommages résultants de la perte de l’animal;

[14]    À sa grande surprise, il constate que sa police d’assurance est inadéquate[2] et qu’étrangement, il n’est pas couvert pour le transport d’animaux, alors qu’il s’agit de sa principale activité commerciale;

[15]    Il s’ensuit alors une série de mises en demeure et le dossier est finalement réglé hors cour;

[16]    En résumé, tel qu’indiqué aux chefs nos 1 et 3 de la plainte amendée, l’intimé a fait défaut d’offrir le produit d’assurance qui convenait le mieux au besoin de son client;

[17]    Quant au chef no 4, celui-ci concerne certaines lacunes constatées dans la tenue du dossier de l’intimé;

B)   Les sanctions

[18]    Pour les motifs ci-après exposés, le Comité de discipline entérinera les recommandations communes formulées par les parties;

 

[19]        Tel que le soulignait la Cour du Québec dans l’affaire Royer c. Chambre de la sécurité financière[3], l’objectif de la sanction disciplinaire n’est pas de punir le professionnel, mais de corriger un comportement fautif;

 

[20]        De plus, la jurisprudence enseigne, qu’à moins de circonstances exceptionnelles, la recommandation commune formulée par les parties suite à de sérieuses et intenses négociations doit être respectée par le Comité[4] ;

 

[21]        Ce principe fut réitéré dernièrement par le Tribunal des professions dans l’affaire Langlois[5] :

 

[46] La négociation du plaidoyer, il s'agit bien de l'expression maintes fois utilisée par la doctrine et la jurisprudence, qui s'accompagne inévitablement de discussions portant sur la sanction (ou peine en matière pénale) jouit depuis longtemps d'une reconnaissance quasi juridique[17]. Il n'est pas utile aux fins du pourvoi de se pencher sur toutes les considérations en faveur des plaidoyers et sanctions que les parties conviennent de présenter au tribunal compétent. Mais de manière générale, les tribunaux estiment que les suggestions communes présument d'une discussion préalable franche entre les parties à l'aune de leurs intérêts respectifs; de ce fait, elles comportent « un caractère persuasif »[18].

 

[47] Conséquemment, les suggestions communes ne devraient pas être écartées afin de ne pas discréditer un important outil contribuant à l'efficacité du système de justice tant criminel que disciplinaire, à moins qu'elles soient déraisonnables, inadéquates, contraires à l'intérêt public et de nature à déconsidérer l'administration de la justice[19].

 

(Nos soulignements)

 

[22]    Vu le plaidoyer de culpabilité de l’intimé, le Comité est d’avis que les sanctions proposées sont justes et raisonnables et qu’elles reflètent adéquatement la gravité objective des infractions;

[23]    De plus, les sanctions suggérées tiennent compte des facteurs atténuants, tels que le plaidoyer de culpabilité de l’intimé et sa volonté de s’amender;

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :

          AUTORISE le dépôt d’une plainte amendée;

          PREND acte du plaidoyer de culpabilité de l’intimé;

          DÉCLARE l’intimé coupable des chefs nos 1, 3 et 4 de la plainte amendée;

          IMPOSE à l’intimé les sanctions suivantes :

               Chef no 1 :

une amende de 2 000 $;

               Chef no 3 :

une amende de 2 000 $;

               Chef no 4 :

une amende de 2 000 $;

 

             Total :  6 000 $

RÉDUIT le total des amendes à un montant global de 4 000 $;

RECOMMANDE au Conseil d’administration de la Chambre de l’assurance de dommages d’imposer à l’intimé l’obligation de suivre et de réussir, au cours de la prochaine année, le cours no ACF-6252, intitulé « Le représentant et sa responsabilité civile et professionnelle, comment se protéger »;

CONDAMNE l’intimé à payer l’ensemble des déboursés;

ACCORDE à l’intimé un délai de trente (30) jours pour acquitter le montant des amendes et des déboursés, calculé à compter de l’expiration du délai d’appel de la présente décision.

 

 

 

 

Me Patrick de Niverville, avocat

Président du Comité de discipline

 

 

__________________________________

Mme Christine Roy
Agent en assurance de dommages

Membre du Comité de discipline

 

 

__________________________________

Mme Carole Demeule
Agent en assurance de dommages

Membre du Comité de discipline

 

Me Claude G. Leduc

Procureur de la partie plaignante

 

Me Pierre Gourdeau
Procureur de l’intimé

 

Date d’audience :

21 novembre 2012

 



[1]     Pièce P-2, p. 15;

[2]     Ibid, p. 8;

[3]     REJB 2004-69042 (C.Q.);

[4]     Malouin c. Notaires, 2002 QCTP 15;

[5]     Langlois c. Dentistes, 2012 QCTP 52;

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