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T-395-80
John A. Carruthers (demandeur)
c.
La Reine (défenderesse)
Division de première instance, juge Walsh— Ottawa, 20 décembre 1982.
Pratique Frais et dépens Témoin-expert Demande visant à obtenir une directive spéciale ainsi qu'une prorogation de délai prévue à la Règle 337(5) Il s'agit de savoir si »on a négligé ou accidentellement omis de traiter d'une question dont on aurait traiter» Une directive aurait été accordée Le fait que la Cour rejette le rapport d'un expert ne justifie pas le non-paiement de ses honoraires La rémunération prévue à l'art. 4(1) du tarif A est insuffisante et déraisonnable
Expertise nécessaire Montant raisonnable habituelle- ment versé à titre d'honoraires Le refus de donner une directive spéciale créerait une injustice car il priverait le demandeur qui a obtenu gain de cause des bénéfices du procès
Bien que le retard avec lequel la demande a été présentée soit inexcusable, la Règle doit être interprétée libéralement Distinction entre une directive spéciale concernant les frais d'expert et une directive qui porte sur les honoraires d'avocat
Demande accordée Règles de la Cour fédérale, C.R.C., chap. 663, Règles 324, 337(5), 344(7), 1204; Tarif A, art. 1(3)6),c), 4; Tarif B, art. 2(2)a).
Le demandeur a obtenu partiellement gain de cause en première instance. Le montant imposable de son gain en capital a été réduit de 5 966 $, même si la méthode d'évaluation de certaines actions utilisée par les experts de la défenderesse a été préférée à celle de l'expert du demandeur. Le jugement a été rendu le 3 décembre 1981. Aucune directive spéciale concer- nant les dépens n'a été donnée ni demandée. Le 30 décembre, le demandeur a déposé un avis d'appel (portant la date du 24 décembre). Le 28 juin 1982, le demandeur a reçu un compte d'honoraires de son témoin-expert au montant de 7 684 $. Il y a eu un désistement d'appel le 12 octobre 1982 et la présente demande a été produite le même jour. Le demandeur a sollicité, en vertu de la Règle 324, une directive spéciale concernant les frais de son témoin-expert, ainsi qu'une prorogation du délai de présentation de cette demande.
Jugement: la prorogation du délai et la directive spéciale sont accordées. La Règle 337(5) dont il est fait mention à la Règle 344(7) est la disposition applicable lorsqu'il s'agit d'une demande de prorogation. On peut l'invoquer pour obtenir une prorogation et une modification du prononcé du jugement, uniquement pour certains motifs—notamment (comme le pré- voit la Règle 337(5)b)) lorsque «on a négligé ou accidentelle- ment omis de traiter d'une question dont on aurait traiter». Si on avait demandé, au cours du procès, une directive spéciale concernant les frais du témoin-expert, le juge aurait sans aucun doute fait droit à cette demande. Ce n'est pas parce que la Cour rejette, en tout ou en partie, le rapport d'un expert que celui-ci ne peut être remboursé des frais qu'il a engagés pour la préparation de son rapport, à moins que celui-ci ne soit tout à fait inutile ou inutilisable, ce qui n'était pas la situation en l'espèce. De plus, la rémunération d'un témoin-expert prévue à l'alinéa 4(1) du tarif A est nettement insuffisante et déraison-
nable. Néanmoins, étant donné que le juge de première instance n'est pas tenu de décider s'il doit donner une directive spéciale concernant les frais d'un témoin-expert, il est difficile de con- clure qu'une telle directive répond au critère de la Règle 337(5)b). D'autre part, l'action soulevait une question qui nécessitait le recours à des témoins-experts. En outre, lorsque aucune directive spéciale n'est donnée, il est d'usage de verser à un témoin-expert un montant raisonnable à titre d'honoraires. Enfin, il serait injuste de priver un demandeur qui a obtenu gain de cause des bénéfices du procès en lui faisant payer les honoraires de son témoin-expert. En réalité, le retard avec lequel le demandeur a produit la présente demande était inex cusable; son appel ne mettait pas en danger les dépens qui lui ont été déjà adjugés et il ne constitue donc pas une excuse. La Règle 337(5)b) doit quand même être interprétée libéralement et une directive spéciale sera considérée comme conforme aux termes de cette disposition. Il faut cependant établir une dis tinction claire entre une directive spéciale concernant les frais d'experts et une directive portant sur les honoraires d'avocat (et entre les prorogations de délai relatives à ces différentes ques tions). Ce n'est qu'en des circonstances exceptionnelles que les dépens taxés entre parties peuvent différer du tarif, même lorsque celui-ci est imparfait, et le juge aurait rejeté la demande si on avait tenté d'obtenir des honoraires d'avocat plus élevés.
JURISPRUDENCE
DISTINCTION FAITE AVEC:
Spur Oil Limited c. La Reine, [1983] 1 C.F. 244 (1" inst.).
DÉCISIONS EXAMINÉES:
Smerchanski c. Le ministre du Revenu national, [1979] I C.F. 801 (C.A.); Hillsdale Golf & Country Club Inc. c. La Reine, [1979] 1 C.F. 809 (lte inst.).
AVOCATS:
J. A. Giffen, c.r., pour le demandeur. Ian S. MacGregor pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Giffen, Pensa, London, pour le demandeur.
Le sous-procureur général du Canada pour la défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE WALSH: Le demandeur tente d'obte- nir, sous le régime de la Règle 324 [Règles de la Cour fédérale, C.R.C., chap. 663], une ordon- nance prorogeant le délai nécessaire pour lui per- mettre de présenter sa demande et demande égale- ment à la Cour de donner une directive spéciale concernant les dépens, afin que l'action soit consi-
dérée comme une action de la classe III au sens du tarif B et que les frais du témoin-expert cité par le demandeur soient portés à 7 684 $.
La requête est appuyée d'un affidavit et d'obser- vations écrites. La défenderesse a également pro- duit, en réponse, des observations ainsi qu'un affi davit à l'appui de celles-ci. Le jugement de première instance [non publié, T-395-80] a été rendu par cette Cour le 3 décembre 1981 et un avis d'appel en date du 24 décembre 1981 a été déposé vers le 30 décembre de la même année. Suivant l'avis d'appel, la seule question que devait soulever le demandeur était de savoir si en établis- sant la juste valeur marchande des actions de Griffith Saddlery and Leather Limited au 31 décembre 1971, que le demandeur a vendues en 1976, on devait tenir compte des accords et des modalités des accords mentionnés dans les motifs du jugement. L'appelant [demandeur] a présenté des observations écrites en date du 6 janvier 1982, conformément à la Règle 324, en vue d'obtenir une ordonnance limitant le contenu du dossier d'appel afin de ne pas être obligé d'inclure des copies de la transcription des dépositions orales ou des pièces justificatives déposées au cours de l'audience, à l'exception des accords mentionnés dans les motifs du jugement. Conformément à la Règle 324, l'inti- mée [défenderesse] a produit en réponse des obser vations écrites en date du 26 février 1982, auxquel- les le demandeur a répondu le 16 mars.
Dans un jugement rendu le 8 avril 1982, le juge Ryan a rejeté la demande, sans préjudice du droit des parties de conclure, en vertu de la Règle 1204, un accord sur le contenu du dossier d'appel.
Le 28 juin 1982, le demandeur a reçu de Price Waterhouse un compte d'honoraires de son témoin-expert, Phillip W. Bowman, au montant de 7 684 $, en compensation de ce que le témoin a faire pour se préparer à déposer et pour déposer, y compris 334 $ à titre de frais et débours divers. Le procès a duré deux jours. Au sujet de la classe de l'action, le demandeur souligne que le 31 mai 1978, sa cotisation d'impôt a été établie à 34 951,- 69 $, avec intérêts au montant de 2 564,40 $. Avec les intérêts courus à partir de cette date, la somme totale s'élevait à 50 018,26 $ au 3 décembre 1981. Quelque cinq mois après le jugement du juge Ryan refusant de limiter le contenu du dossier d'appel, le
demandeur a produit, le 12 octobre 1982, un avis de désistement de l'appel, ce qu'Emma Carruthers a également fait dans la cause connexe portant le numéro A-873-81.
Quelle que soit la date retenue, il semble que la présente requête a été produite trop tard. La Règle 344(7) de cette Cour est ainsi rédigée:
Règle 344. .. .
(7) Une partie peut
a) après le prononcé du jugement, dans le délai accordé par la Règle 337(5) pour requérir la Cour d'examiner de nou- veau le prononcé du jugement, ou
b) après que la Cour aura décidé du jugement à prononcer, au moment la requête pour l'obtention d'un jugement est présentée,
que le jugement ait ou non réglé la question des dépens, requérir la Cour de donner, au sujet des dépens, des directives spéciales aux termes de la présente Règle, y compris une directive visée au tarif B, et de statuer sur tout point relatif à l'application de tout ou partie des dispositions de la Règle 346. Une demande faite à la Cour d'appel en vertu du présent alinéa doit être faite devant le juge en chef ou un juge désigné par lui, mais l'une ou l'autre partie peut demander à un tribunal composé d'au moins trois juges de la Cour d'examiner une décision ainsi obtenue.
La Règle 337(5) dont il est fait mention est ainsi conçue:
Règle 337... .
(5) Dans les 10 jours de prononcé d'un jugement en vertu de l'alinéa (2)a), ou dans tel délai prolongé que la Cour pourra accorder, soit avant, soit après l'expiration du délai de 10 jours, l'une ou l'autre des parties pourra présenter à la Cour, telle qu'elle est constituée au moment du prononcé, une requête demandant un nouvel examen des termes du prononcé, mais seulement l'une ou l'autre ou l'une et l'autre des raisons suivantes:
a) le prononcé n'est pas en accord avec les motifs qui, le cas échéant, ont été donnés pour justifier le jugement;
b) on a négligé ou accidentellement omis de traiter d'une question dont on aurait traiter.
Dans le jugement porté en appel, aucune directive spéciale n'a été demandée ni donnée en ce qui concerne la question des dépens, qui n'a d'ailleurs pas été soulevée. S'il en avait été ainsi, il ne fait aucun doute que j'aurais alors donné une directive spéciale au sujet des frais de M. Bowman de Price Waterhouse. Le fait que dans les motifs du juge- ment, je me suis prononcé en faveur de la méthode d'évaluation des actions utilisée par M. Dalgleish, le témoin-expert de la défenderesse, et qu'en fait, je me suis fondé sur un rapport antérieur préparé par M. Clayton pour le compte de la défenderesse ne signifie pas que je mets en doute l'utilité du
rapport de Bowman ou la compétence de ce der- nier. Lorsque des experts sont cités par les deux parties et qu'ils expriment des opinions divergen- tes, la Cour doit opter pour l'une d'elles à moins qu'elle ne décide de rejeter les deux et de leur substituer sa propre opinion en se fondant sur les éléments de preuve; mais ce n'est pas parce que le rapport d'un expert est rejeté ou qu'il n'est pas accepté intégralement que celui-ci ne peut être remboursé des frais qu'il a faits pour la prépara- tion de son expertise, à moins que la Cour ne conclue que la demande d'un tel rapport était tout à fait inutile ou son contenu inutilisable. En l'es- pèce, il s'agissait au contraire d'une question com- plexe et difficile d'évaluation d'actions qui nécessi- tait le recours à des experts-comptables. Il est généralement admis que la somme de 35 $ payable à un témoin-expert en vertu de l'alinéa 4(1) du tarif A est nettement insuffisante et déraisonnable. L'alinéa (2) prévoit que la partie peut verser à un témoin qui comparaît pour déposer en qualité d'ex- pert une somme raisonnable en compensation de ce que le témoin a faire pour se préparer à déposer et pour déposer.
L'alinéa 2(2)a) du tarif B prévoit que tous les débours visés au tarif A peuvent être accordés; toutefois, les paiements faits à un témoin aux termes de l'alinéa 4(2) ne peuvent être accordés que dans la mesure la Cour le permet en vertu de la Règle 344(7).
Comme je l'ai mentionné, la Règle 344(7) ren- voie à la Règle 337(5) qui exige qu'une telle demande soit présentée dans les dix jours du pro- noncé d'un jugement, bien qu'il prévoie que la Cour peut accorder un délai supplémentaire avant ou après l'expiration du délai de dix jours. La Règle 337(5) précise toutefois les motifs pour les- quels le prononcé peut être modifié, notamment lorsqu'on a négligé ou accidentellement omis de traiter d'une question dont on aurait traiter. Il est difficile de conclure qu'une directive spéciale concernant les frais d'un témoin-expert est une question qu'on a négligé ou accidentellement omis de traiter puisqu'il n'y a rien qui oblige la Cour à décider qu'une telle ordonnance devrait être rendue au moment de son jugement.
La défenderesse elle-même admet cependant que l'action soulevait une question importante et
difficile qui nécessitait le recours à des témoins- experts, ce qui se produit fréquemment devant cette Cour. Je trouve donc un peu surprenant que la défenderesse ne consente pas à ce que le témoin- expert du demandeur reçoive «une somme raison- nable en compensation de ce que le témoin a faire pour se préparer à déposer et pour déposer», suivant les termes de l'alinéa 4(2) du tarif. En l'absence d'une directive fondée sur la Règle 344(7), il n'y a bien sûr aucune obligation de la part de la défenderesse mais il est néanmoins d'usage, lorsqu'un expert est cité à la barre des témoins, de lui verser un montant raisonnable, à titre d'honoraires, et cela se fait souvent d'un commun accord.
Dans le présent cas, le demandeur n'a réussi qu'à faire augmenter la valeur de ses actions au jour de l'évaluation de 7,45 $, telle qu'établie par la Commission de révision de l'impôt, à 11 $, ce qui a eu pour effet de réduire de 5 966 $ le mon- tant imposable de son gain en capital. Il serait donc tout à fait injuste si le jugement ne lui permettait que de réduire ses impôts, en vertu de la nouvelle cotisation, en supprimant l'impôt à payer sur cette somme de 5 966 $ pour l'obliger par ailleurs à verser le montant de 7 684 $ à son témoin-expert, ce qui effacerait complètement le gain tiré du jugement qui a fait droit, au moyen partiellement, à ses prétentions. Il s'agit manifeste- ment d'un cas la Cour aurait pu exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré par la Règle 344(7) et ce n'est peut-être pas aller trop loin que d'interpréter la Règle 337(5)b) d'une manière libérale et de conclure qu'il s'agit d'une question qui aurait être examinée et qui ne l'a pas été.
Dans l'affaire Smerchanski c. Le ministre du Revenu national', le juge en chef Jackett siégeant en appel a beaucoup restreint le pouvoir discrétion- naire du tribunal en ce qui concerne les dépens; voici ce qu'il a déclaré, à la page 807, en appendice de son jugement:
La Règle 344(7) autorise la présentation de requêtes deman- dant des directives spéciales au sujet de la taxation des frais. Elle n'autorise pas la présentation de requêtes tendant à faire modifier le «prononcé» d'un jugement ou un jugement déjà signé.
' [1979] 1 C.F. 801 (C.A.).
Dans l'affaire Hillsdale Golf & Country Club Inc. c. La Reine 2 , j'ai examiné en détail les répercus- sions de l'affaire Smerchanski, et je disais ce qui suit à la page 814:
La lecture des Règles 344(7) et 337(5) montre qu'une demande de directive pour hausser les frais doit être faite alors que le litige est suffisamment présent à l'esprit de la Cour de sorte qu'elle soit à même d'apprécier si oui ou non en l'espèce particulière étaient présentes des circonstances justifiant de s'écarter du tarif normal.
Mis à part le fait qu'il n'y avait pas eu de délai déraisonnable, le jugement précisait que l'avocat de la défenderesse avait donné son acquiescement, de sorte qu'il n'avait pas été nécessaire de présen- ter une requête en bonne et due forme en vertu de la Règle 337. Dans la présente affaire, non seule- ment l'avocat de la défenderesse n'a-t-il pas con- senti à la fixation des honoraires de l'expert à un taux juste et raisonnable, mais il s'est formelle- ment opposé à la présente requête.
Le demandeur a cité le jugement rendu le 8 juin 1982 par mon collègue le juge Cattanach dans l'affaire Spur Oil Limited c. La Reine, [[1983] 1 C.F. 244 (i fe inst.)]. Dans cette affaire, la Division de première instance [[1981] 1 C.F. 461 ] a accueilli l'action en partie et elle a adjugé à la défenderesse ses dépens taxables. Le 3 juillet 1981 [[1982] 2 C.F. 113], la Division d'appel a accueilli l'appel interjeté par la demanderesse et lui a adjugé ses dépens tant en première instance qu'en appel. Les vacances d'été arrivèrent et l'autorisa- tion d'interjeter appel devant la Cour suprême, demandée le 9 septembre 1981, a été refusée le 30 septembre de la même année. Le juge Cattanach a conclu que le délai prévu pour demander une augmentation du montant des dépens à la suite du jugement de la Cour d'appel expirait le 10 septem- bre, mais la défenderesse avait demandé l'autorisa- tion d'interjeter appel devant la Cour suprême du Canada le 9 septembre. La première version du mémoire de frais de la demanderesse n'a été sou- mise au procureur général que le 20 janvier 1982 et ce dernier s'est alors opposé à certains postes mais non, semble-t-il, aux honoraires de l'expert, de sorte que la seule question qui restait à trancher portait sur les honoraires des avocats. À la suite de ce différend, un avis de requête a été déposé le 10 mai 1982, longtemps après le 10 octobre 1981, soit la date d'expiration de la période de 10 jours à
2 [1979] 1 C.F. 809 (l'e inst.).
compter du refus, par la Cour suprême, le 30 septembre 1981, de l'autorisation d'interjeter appel. Le juge Cattanach a cependant fait remar- quer que la question de la période de temps qui s'est écoulée entre le 10 octobre 1981 et le 10 mai 1982 n'a pas été soulevée et il a simplement dit que la demande aurait être présentée avant le 10 octobre 1981. La période de vacances qui est sur- venue avant que la demande ne soit portée en appel devant la Cour suprême constituait une cir- constance exceptionnelle qui justifiait le retard avec lequel la demande d'augmentation des dépens a été présentée.
Ce jugement n'est cependant pas d'un grand secours au demandeur. L'appel interjeté par ce dernier dans la présente affaire n'a pas donné lieu à un appel incident de sorte qu'il ne risque pas de perdre les dépens qui lui ont déjà été adjugés. Même si le jugement du juge Ryan rendu le 8 avril 1982 concernant le contenu du dossier d'appel n'a pas tranché l'appel, il semble que ce soit probable- ment la raison pour laquelle le demandeur a décidé de se désister de l'appel le 20 septembre 1982. La présente requête porte la date du 23 septembre 1982, bien que cette requête et le désistement n'aient été produits que le 12 octobre. Plus de 10 mois se sont écoulés depuis le jugement du 3 décembre 1981 et il ne semble pas y avoir eu de retard qui pourrait être attribuable à la défende- resse.
Même si le retard avec lequel a été présentée la demande visant à obtenir un nouvel examen du prononcé du jugement et une directive spéciale concernant les frais de l'expert est inexcusable, je suis néanmoins disposé à exercer le pouvoir discré- tionnaire qui m'est conféré par la Règle 337(5) et à proroger le délai dans le but de permettre un nouvel examen du prononcé du jugement, pour le motif qu'il s'agit d'une question qui aurait être examinée et qui ne l'a pas été, et qu'il serait tout à fait injuste et contraire à l'usage de ne pas donner une telle directive.
J'ajouterai qu'en exerçant ce pouvoir discrétion- naire permettant de proroger le délai de présenta- tion de la présente requête et en rendant une directive spéciale concernant les frais de l'expert en application de la Règle 344(7), je suis d'avis qu'il faut établir une nette distinction entre une ordonnance comportant des directives spéciales au
sujet des frais d'expert et une ordonnance qui augmente les honoraires d'avocat fixés par le tarif ou qui accorde un montant forfaitaire au lieu des dépens taxés. A la suite du jugement rendu dans l'affaire Smerchanski (précitée), la Cour d'appel est maintenant d'avis que ce n'est qu'en des cir- constances très exceptionnelles que les dépens taxés entre parties peuvent différer du tarif, même lorsque celui-ci est imparfait. Si le demandeur avait tenté d'obtenir des honoraires d'avocat plus élevés que ceux qui sont prévus au tarif, j'aurais rejeté cette demande et s'il s'était agi de la seule question en litige, je n'aurais pas exercé mon pou- voir discrétionnaire pour excuser le retard avec lequel a été présentée la demande visant à faire modifier le prononcé du jugement.
Il ne faudrait pas conclure que je considère la somme de 7 684 $ comme étant nécessairement raisonnable et justifiée dans les circonstances, car il s'agit d'une question qui doit être tranchée en vertu d'un accord ou à la suite d'une taxation qui peut, le cas échéant, faire l'objet d'un appel. La défenderesse prétend que la plus grande partie du compte n'est pas vraiment attribuable à la prépa- ration du procès, mais plutôt à un rapport anté- rieur qui a précédé l'audience devant la Commis sion de révision de l'impôt.
La requête demandant que la présente affaire soit considérée comme une action de la classe III est rejetée. Les alinéas 1(3)b) et c) du tarif A sont ainsi rédigés:
(3) Sauf instructions contraires données par la Cour au sujet d'une certaine démarche ou mesure dans une procédure, ou de toutes les démarches et mesures dans une certaine procédure,
b) lorsqu'elle est faite ou prise dans une procédure qui est, ou qui était à l'origine, un appel interjeté devant la Division de première instance ou toute autre procédure engagée devant la Division de première instance qui n'a pas pour objet d'obtenir un jugement condamnant au paiement d'une somme détermi- née, la démarche ou mesure fait partie de la classe Il;
c) lorsqu'elle est faite ou prise dans une procédure et lorsqu'il s'agit, au vu du dossier, d'une somme atteignant $5,000 ou plus sans atteindre $50,000, la démarche ou mesure fait partie de la classe II;
La présente action peut difficilement être considé- rée comme une demande visant à obtenir le paie- ment d'une somme déterminée, et même s'il en était ainsi, le montant en cause est inférieur à 50 000 $. A titre d'observations, la défenderesse a
soumis différents calculs accompagnés d'affidavits, mais même si les actions avaient été évaluées à 44,70 $, c'est-à-dire le chiffre avancé par le demandeur, plutôt qu'à 7,45 $ l'unité, soit le mon- tant établi par la Commission de révision de l'im- pôt, la différence au titre du gain en capital impo- sable aurait été la différence entre 3 460,81 $ et 66 059,44 $, le montant de l'impôt étant de 30 798,23 $. À moins qu'on ne tienne compte de l'intérêt, ce qui, à mon avis, serait incorrect, même si on acceptait le chiffre avancé par le demandeur dont la nouvelle cotisation d'impôt est établie à 34 951,69 $ et que l'intérêt était accordé jusqu'à la date de l'introduction de l'action au mois de jan- vier 1980, la somme totale serait quand même inférieure à 50 000 $.
Je conclus donc qu'il s'agit d'une action de la classe II.
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