Jugements

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Référence :

a&r dress co. inc. c. canada, 2009 CF 27, [2009] 4 R.C.F. 192

T-944-07

A&R Dress Co. Inc. (demanderesse)

c.

Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile (défendeur)

Répertorié : A&R Dress Co. Inc. c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile) (C.F.)

Cour fédérale, juge de Montigny—Montréal, 16 septembre 2008; Ottawa, 9 janvier 2009.

Douanes et Accise — Tarif des douanes — Contrôle judiciaire d’une décision rejetant la demande de remboursement des droits de douane à l’égard de retailles de tissu — L’art. 110b) du Tarif prévoit le remboursement de tous les droits payés sur les marchandises importées et transformées au Canada si les marchandises découlant de la transformation deviennent des marchandises surannées ou excédentaires — Les retailles en l’espèce découlaient de la fabrication au Canada, grâce au tissu importé, de robes vendues au Canada — Les « marchandises » doivent avoir une valeur commerciale et être destinées à être vendues — Les retailles de tissu avaient une valeur minimale et il était pratiquement impossible de trouver un acheteur — Il ne s’agissait pas de marchandises au sens de l’art. 110b) parce qu’elles n’étaient pas vendables — Même si elles avaient été vendables, les retailles étaient des résidus et des déchets — Les résidus et les déchets ne sont pas des marchandises — Les retailles n’étaient pas « surannées ou excédentaires » — L’expression « surannées ou excédentaires » fait référence à quelque chose dont on n’a plus besoin ou qui est en sus de la quantité nécessaire à la production — Les retailles de tissu n’ont jamais eu d’utilité ou de date d’origine — Le Tarif prévoit un programme distinct applicable aux « résidus » et aux « déchets ».

Il s’agissait d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision par laquelle le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile a rejeté la demande de remboursement des droits de douane présentée par la demanderesse à l’égard de retailles de tissu. La demanderesse a importé du tissu sur lequel elle a payé des droits de douane. Le tissu a été utilisé pour fabriquer au Canada des robes qui ont ensuite été vendues au Canada. Même si les retailles de tissu avaient pu être vendues, il n’était pas économiquement réalisable de le faire et la demanderesse a donc décidé de les détruire pour qu’elles soient considérées comme des « marchandises surannées ou excédentaires » au sens de l’alinéa 110b) du Tarif des douanes. L’alinéa 110b) dispose qu’un remboursement est accordé de la totalité des droits qui ont été payés sur les marchandises importées et transformées au Canada si les marchandises découlant de la transformation deviennent des marchandises surannées ou excédentaires. Le défendeur a rejeté la demande de remboursement de la demanderesse, statuant que les retailles de tissu n’étaient pas « excédentaires ou surannées », mais constituaient plutôt « des résidus ou des déchets » qui doivent être exportées pour être admissibles au drawback. Ni les robes ni les retailles de tissu ont été exportées.

La question à trancher était celle de savoir si les retailles de tissu étaient des « marchandises surannées ou excédentaires ».

Jugement : la demande doit être rejetée.

Pour établir le droit au drawback en application de l’alinéa 110b), les marchandises doivent découler de la transformation. Même si la définition du mot « marchandises » incorporée dans le Tarif des douanes a une portée assez large, elle doit nécessairement introduire une notion de qualité marchande. Les « marchandises » visées à l’alinéa 110b) doivent avoir une valeur commerciale et être destinées à être vendues. Compte tenu de la valeur minimale des retailles de tissu et du fait qu’il était pratiquement impossible de trouver un acheteur pour ces résidus, les retailles n’étaient pas destinées à la vente et elles n’avaient pas de réelle valeur commerciale. Les retailles de tissu ne constituaient donc pas des « marchandises » découlant de la transformation.

Même si les retailles étaient vendables, elles étaient un produit dérivé de la fabrication et constituaient en réalité des résidus et des déchets. Elles ne pouvaient pas être assimilées aux « marchandises » visées aux articles 109 et 110. Si le législateur avait eu l’intention de prévoir l’application d’un remboursement pour « marchandises surannées ou excédentaires » aux résidus et déchets, il aurait utilisé ces mots précisément. Le législateur était bien au fait de cette distinction et a adopté un régime particulier pour les sous-produits, les résidus et les déchets aux articles 120 à 122.

Enfin, l’alinéa 110b) précise que les marchandises découlant de la transformation doivent devenir des marchandises surannées ou excédentaires au sens de l’article 109. Les retailles de tissu n’étaient pas des « marchandises surannées ou excédentaires ». Dans le contexte de l’article 110, l’expression « marchandises surannées ou excédentaires » fait clairement référence à quelque chose dont on n’a plus besoin ou qui est en sus de la quantité nécessaire à la production. Une marchandise qui n’a jamais eu d’emploi ou de date d’origine ne peut être considérée comme « surannée » ou « excédentaire ». Le mot « excédentaire » signifie quelque chose qui a été fabriqué et qui pourrait être utilisé au besoin, alors que les mots « résidus » et « déchets » signifient des matières supplémentaires qui, par définition, ne sont pas utilisées dans la fabrication du produit fini et ne peuvent être considérées comme des marchandises ni comme des sous-produits découlant de la fabrication.

Le paragraphe 122(3) vise à faire en sorte que le drawback demandé sur des marchandises surannées ou excédentaires soit réduit d’un montant équivalent au montant des droits de douane qui devraient être payés sur les résidus vendables découlant de la transformation de ces marchandises. C’est tout à fait différent que d’affirmer que les résidus et les déchets visés peuvent être considérés comme des marchandises surannées ou excédentaires.

Pour satisfaire aux exigences énoncées à l’article 109, les marchandises importées ne peuvent pas être endommagées avant leur destruction. Les retailles de tissu ne constituaient pas des marchandises qui pourraient être « endommagées »; elles constituaient déjà « des résidus et des déchets ».

Il est logique de croire que le législateur n’avait pas l’intention d’accorder un remboursement des droits de douane sur tous les résidus et déchets découlant du processus de fabrication.

    lois et règlements cités

Loi sur la taxe d’accise, S.R.C. 1970, ch. E-13, Annexe III, Partie 1, art. 1.

Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 1 (mod. par L.C. 2002, ch. 8, art. 14), 18.1 (édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5 ; 2002, ch. 8, art. 27).

Loi sur les douanes, L.R.C. (1985) (2suppl.), ch. 1, art. 2(1) « marchandises » (mod. par L.C. 1995, ch. 15, art. 24).

Tarif des douanes, L.C. 1997, ch. 36, art. 4, 89 (mod. par L.C. 2002, ch. 22, art. 349; 2005, ch. 38, art. 142, 145), 109 (mod., idem), 110, 111 (mod., idem, art. 89(F), 145), 113 (mod. par L.C. 2002, ch. 22, art. 354; 2005, ch. 38, art. 89(F), 142, 145), 120, 121, 122.

    jurisprudence citée

décisions appliquées :

A & R Dress Co. Inc. c. M.R.N., 2005 CF 681; conf. par 2006 CAF 298; Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190; (2008), 329 R.N.-B. (2e) 1; 2008 CSC 9; Entreprises Kato Inc. c. Canada (Sous-ministre du Revenu national, Douanes et Accise – M.R.N.), [1983] A.C.F. no 1064 (C.A.) (QL).

décisions examinées :

Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27; Placer Dome Canada Ltd. c. Ontario (Ministre des Finances), [2006] 1 R.C.S. 715; 2006 CSC 20.

    doctrine citée

Black’s Law Dictionary, 7e éd. St-Paul, Minn. : West Group, 1999, « suranné », « excédentaire ».

Agence des services frontaliers du Canada. Mémorandum D7-2-3, « Marchandise surannées ou excédentaires », en ligne : <http://www.cbsa-asfc.gc.ca/publications/dm-md/d7/d7-2-3-fra.pdf>.

Agence des services frontaliers du Canada. Mémorandum D7-4-2, « Programme de drawback », en ligne :
<http://www.cbsa-asfc.gc.ca/publications/dm-md/d7/d7-4-2-fra.pdf>.

    DEMANDE de contrôle judiciaire d’une décision par laquelle le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile a rejeté la demande de remboursement des droits de douane présentée par la demanderesse à l’égard de retailles de tissu. Demande rejetée.

    ont comparu 

Michael D. Kaylor pour la demanderesse.

Jacques Savary pour le défendeur.

    avocats inscrits au dossier 

Lapointe Rosenstein S.E.N.C.R.L., Montréal, pour la demanderesse.

Le sous-procureur général du Canada pour le défendeur.

    Ce qui suit est la version française des motifs de l’ordonnance et de l’ordonnance rendus par

[1]     Le juge de Montigny : Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire, présentée en vertu de l’article 18.1 [édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5; 2002, ch. 8, art. 27] de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7 [art. 1 (mod., idem, art. 14)], d’une décision par laquelle le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile a, le 17 mai 2007, rejeté la demande de remboursement des droits de douane présentée par la demanderesse à l’égard de retailles de tissu.

LES FAITS

[2]     Le 11 octobre 2006, la demanderesse a importé de Corée un coupon de tissu de 852 mètres, décrit comme étant un tricot composé de 92 % de polyester et de 8 % de spandex, au prix unitaire de 1,50 $US le mètre, sur lequel elle a payé des droits de douane de 14 %.

[3]     La demanderesse a taillé le tissu importé au Canada et a fabriqué ou produit des robes à partir de ce tissu. Les robes ont été vendues par la suite au Canada. La fabrication des robes à partir du tissu importé a donné lieu à des retailles de tissu.

[4]     La demanderesse a contacté Leigh Textile, l’un des plus importants éliminateurs de déchets textiles avant consommation au monde, aux fins de vendre les retailles de tissu. On a offert à la demanderesse 0,05 $ la livre, soit 4 $ pour les 80 livres ou les 188,66 mètres carrés de déchets de tissu pour lesquels elle a présenté une demande de drawback.

[5]     La demanderesse a reconnu que le prix offert par Leigh pour les retailles de tissu était le meilleur possible. En effet, elle a admis qu’il n’existe pas de marché pour les déchets textiles. La demanderesse a admis également qu’au cours des cinq ou sept dernières années, il n’était pas économiquement réalisable de vendre les retailles de tissu pour lesquelles elle demande à présent un drawback.

[6]     Incapable de commercialiser les retailles de tissu, la demanderesse a décidé de les détruire afin qu’elles soient considérées comme des « marchandises surannées ou excédentaires » au sens de l’alinéa 110b) du Tarif des douanes, L.C. 1997, ch. 36 (la Loi), et qu’elle obtienne un remboursement des droits de douane versés par l’entremise du programme de drawback.

[7]     Même si le défendeur a refusé de donner des instructions sur la façon de détruire les retailles de tissu, la demanderesse en a disposé par la voie de la récupération habituelle des déchets.

[8]     Le 1er mai 2007, la demanderesse a déposé une demande de remboursement des droits de douane versés à l’égard des retailles de tissu par l’entremise d’une demande de drawback. La demande de remboursement comportait un certificat de destruction/exportation estampillé par le défendeur. Le certificat de destruction était accompagné à son tour de l’affidavit d’un notaire, témoin de la destruction des retailles de tissu ainsi que par l’affidavit de l’administrateur de l’édifice abritant la demanderesse.

[9]     La demande de remboursement de la demanderesse était accompagnée également de l’affidavit du président de la demanderesse et du certificat à l’égard d’importation, de vente ou de transfert; ledit certificat constitue la renonciation au drawback des droits de douane tel qu’il a été signé par l’importateur du tissu de Corée.

LA DÉCISION CONTESTÉE

[10]     Par lettre datée du 17 mai 2007, le défendeur a rejeté la demande de remboursement de la demanderesse. Après avoir examiné tous les documents déposés par la demanderesse, le décideur a estimé que ni les robes ni les retailles de tissu n’avaient été exportées. Par conséquent, il a rejeté la demande de drawback présentée par la demanderesse.

[11]     La lettre mentionnait également que, pour que l’on puisse accorder un drawback pour des marchandises détruites, ces marchandises doivent être considérées comme « excédentaires ou surannées ». Dans le cas de la demanderesse, le ministre a conclu que les retailles de tissu n’étaient pas « excédentaires ou surannées », mais plutôt « des résidus ou des déchets ». En outre, pour que « des résidus et des déchets » soient admissibles au drawback, les marchandises doivent être exportées. Si « les résidus et les déchets » ne sont pas exportés, ils sont assujettis aux droits de douane au taux applicable au moment de leur production aux résidus et aux déchets vendables du même type qui sont importés.

[12]     Par conséquent, le directeur des douanes, Division de la vérification de l’observation du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile, a rejeté la demande de remboursement des droits de douane présentée par la demanderesse à l’égard des retailles de tissu.

LA QUESTION EN LITIGE

[13]     La seule question à trancher dans la présente demande de contrôle judiciaire est celle de savoir si le ministre a eu raison de ne pas considérer les retailles de tissu comme des « marchandises surannées ou excédentaires » au sens de l’alinéa 110b) de la Loi et, par conséquent, de rejeter la demande de drawback de la demanderesse.

LA NORME DE CONTRÔLE

[14]     Les parties s’entendent sur la norme de contrôle applicable. Les avocats des parties ont convenu que la question à trancher, étant essentiellement une question d’interprétation de la loi, appelle la norme de la décision correcte.

[15]     En fait, la question dont la Cour est saisie en l’espèce a déjà été examinée de façon approfondie par mon collègue le juge Shore dans la décision A & R Dress Co. Inc. c. M.R.N., 2005 CF 681. Appliquant une approche pragmatique et fonctionnelle, le juge Shore a conclu que les quatre facteurs qu’il convenait de retenir selon cette approche conduisaient inévitablement à la conclusion que la norme de contrôle applicable devait être celle de la décision correcte. Cette conclusion particulière a été confirmée par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt A & R Dress Co. Inc. c. M.R.N., 2006 CAF 298.

[16]     Il est vrai qu’aucune preuve n’indiquait dans cette affaire si les retailles de tissu étaient vendables. C’est précisément la raison pour laquelle la Cour d’appel fédérale n’a pas tranché la question qui revient en l’espèce, celle de savoir si le terme « marchandises » figurant à l’alinéa 110b) de la Loi doit être interprété comme visant les résidus vendables. Cela étant dit, la nature de la question en litige dans l’affaire précitée n’était pas différente de celle soulevée en l’espèce, à savoir de décider si le ministre a commis une erreur en rejetant la demande de remboursement des droits de douane versés à l’égard des retailles de tissu. La Cour doit déterminer l’interprétation correcte de l’alinéa 110b) de la Loi.

[17]     Dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, la Cour suprême du Canada a jugé qu’il n’était pas toujours nécessaire de se livrer à une analyse de la norme de contrôle applicable; lorsque l’analyse a déjà été faite dans des décisions antérieures, la Cour peut se fier en toute confiance à son résultat. Par conséquent, je suis d’avis que la norme de contrôle applicable à la décision du ministre est celle de la décision correcte.

ANALYSE

[18]     La partie 3 de la Loi prévoit une exonération de droits à l’égard de marchandises importées dans certaines circonstances, tel qu’il est énoncé dans cette partie de la Loi et ses règlements d’application. La section 1 de cette partie traite de la réduction des taux, alors que la section 2 autorise l’importation de certaines marchandises sans le paiement intégral des droits, dans les circonstances décrites aux articles 83 à 108 de la Loi.

[19]     Ce qui nous intéresse plus particulièrement c’est la section 3 de la partie 3, intitulée « Marchandises surannées ou excédentaires ». Les dispositions pertinentes de cette section sont les suivantes [art. 109 (mod. par L.C. 2005, ch. 38, art. 142, 145), 110, 111 (mod., idem, art. 89(F), 145)] :

    109. Dans la présente section, « marchandises surannées ou excédentaires » s’entend des marchandises qui, à la fois :

a) sont jugées surannées ou excédentaires par :

         (i) leur importateur ou propriétaire, dans le cas de marchandises importées,

         (ii) leur fabricant, producteur ou propriétaire, dans les autres cas;

b) ne sont pas utilisées au Canada;

c) sont détruites selon les instructions du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile;

d) n’ont pas été endommagées avant leur destruction.

    110. Sur demande présentée en conformité avec l’article 111, est accordé un remboursement de la totalité des droits qui ont été payés :

a) à l’exception de la taxe sur les produits et services, sur des marchandises surannées ou excédentaires importées;

b) à l’exception des taxes imposées en vertu de la Loi sur la taxe d’accise, sur les marchandises importées et transformées au Canada, si les marchandises découlant de la transformation deviennent des marchandises surannées ou excédentaires;

c) à l’exception des taxes imposées en vertu de la Loi sur la taxe d’accise, sur les marchandises importées — sauf le carburant, le combustible ou le matériel d’usine —, directement consommées ou absorbées lors de la transformation au Canada de marchandises qui deviennent surannées ou excédentaires.

    111. Les demandes de remboursement prévues à l’article 110 :

a) comportent les renseignements prescrits par le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile et sont présentées, en la forme qu’il prescrit, par :

         (i) l’importateur ou le propriétaire des marchandises surannées ou excédentaires, dans les cas où ces marchandises ont été importées,

         (ii) le fabricant, le producteur ou le propriétaire des marchandises surannées ou excédentaires, dans tous les autres cas;

b) comportent la renonciation visée à l’article 119, le cas échéant, et les documents réglementaires;

c) sont présentées dans les cinq ans — ou, le cas échéant, dans le délai réglementaire — suivant le dédouanement des marchandises.

[20]     L’article 4 de la Loi et le paragraphe 2(1) [mod. par L.C. 1995, ch. 15, art. 24] de la Loi sur les douanes [L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 1] sont également pertinents et prévoient ce qui suit :

    4. Sauf indication contraire, les termes et expressions utilisés dans la présente loi et définis au paragraphe 2(1) de la Loi sur les douanes s’entendent au sens de ce paragraphe.

[Loi sur les douanes]

    2. (1) [. . .]

« marchandises » Leur sont assimilés, selon le contexte, les moyens de transport et les animaux, ainsi que tout document, quel que soit son support.

[21]     Les principes fondamentaux qui régissent l’interprétation législative sont bien connus et ont été exposés de façon succincte par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27, au paragraphe 21 comme suit :

    Bien que l’interprétation législative ait fait couler beaucoup d’encre (voir par ex. Ruth Sullivan, Statutory Interpretation (1997); Ruth Sullivan, Driedger on the Construction of Statutes (3e éd. 1994) (ci-après « Construction of Statutes »); Pierre-André Côté, Interprétation des lois (2e éd. 1990)), Elmer Driedger dans son ouvrage intitulé Construction of Statutes  (2e éd. 1983) résume le mieux la méthode que je privilégie. Il reconnaît que l’interprétation législative ne peut pas être fondée sur le seul libellé du texte de loi. À la p. 87, il dit :

    [traduction] Aujourd’hui il n’y a qu’un seul principe ou solution: il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur.

[22]     Par contre, les mesures législatives fiscales ont été fréquemment appliquées à la lettre, sans doute à cause du caractère détaillé et précis de la rédaction des lois fiscales. Plus récemment, la Cour suprême a traité de la méthode appropriée d’interpréter les dispositions fiscales comme suit (Placer Dome Canada Ltd. c. Ontario (Ministre des Finances), [2006] 1 R.C.S. 715) [aux paragraphes 21 à 23] :

    Dans l’arrêt Stubart Investments Ltd. c. La Reine, [1984] 1 R.C.S. 536, notre Cour a rejeté l’approche restrictive en matière d’interprétation des lois fiscales et a statué que la méthode d’interprétation moderne s’applique autant à ces lois qu’aux autres lois. En d’autres termes, « il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur » (p. 578) : voir l’arrêt 65302 British Columbia Ltd. c. Canada, [1999] 3 R.C.S. 804, par. 50. Toutefois, le caractère détaillé et précis de nombreuses dispositions fiscales a souvent incité à mettre davantage l’accent sur l’interprétation textuelle : Hypothèques Trustco Canada c. Canada, [2005] 2 R.C.S. 601, 2005 CSC 54, par. 11. Les contribuables ont le droit de s’en remettre au sens clair des dispositions fiscales pour organiser leurs affaires. Lorsqu’il est précis et non équivoque, le texte d’une loi joue un rôle primordial dans le processus d’interprétation.

    Par contre, lorsque le texte d’une loi peut recevoir plus d’une interprétation raisonnable, le sens ordinaire des mots joue un rôle moins important et il peut devenir nécessaire de se référer davantage au contexte et à l’objet de la Loi : Trustco Canada, par. 10. De plus, comme la juge en chef McLachlin l’a fait remarquer au par. 47, « [m]ême lorsque le sens de certaines dispositions peut paraître non ambigu à première vue, le contexte et l’objet de la loi peuvent révéler ou dissiper des ambiguïtés latentes. » La Juge en chef a ensuite expliqué que, pour dissiper les ambiguïtés explicites ou latentes d’une mesure législative fiscale, « les tribunaux doivent adopter une méthode d’interprétation législative textuelle, contextuelle et téléologique unifiée ».

    Le degré de précision et de clarté du libellé d’une disposition fiscale influe donc sur la méthode d’interprétation. Lorsque le sens d’une telle disposition ou son application aux faits ne présente aucune ambiguïté, il suffit de l’appliquer. La mention de l’objet de la disposition [traduction] « ne peut pas servir à créer une exception tacite à ce qui est clairement prescrit » : voir P. W. Hogg, J. E. Magee et J. Li, Principles of Canadian Income Tax Law (5e éd. 2005), p. 569; Shell Canada Ltée c. Canada, [1999] 3 R.C.S. 622. Lorsque, comme en l’espèce, la disposition peut recevoir plus d’une interprétation raison-nable, il faut accorder plus d’importance au contexte, à l’économie et à l’objet de la loi en question. Par conséquent, l’objet d’une loi peut servir non pas à mettre de côté le texte clair d’une disposition, mais à donner l’interprétation la plus plausible à une disposition ambiguë.

[23]     C’est à la lumière de ces principes que je dois maintenant aborder l’interprétation des dispositions législatives au cœur de la présente demande de contrôle judiciaire.

[24]     Un lecture attentive de l’alinéa 110b) de la Loi révèle que, afin d’établir le droit au drawback, il faut remplir les conditions suivantes :

i) les droits doivent avoir été payés sur les marchandises importées;

ii) les marchandises importées doivent être transformées au Canada;

iii) les marchandises doivent découler de la transformation;

iv) les marchandises découlant de la transformation doivent devenir des marchandises excédentaires au sens de l’article 109.

[25]     En l’espèce, il n’y a aucun doute que les deux premières conditions ont été remplies. Les droits ont été payés à l’égard du tissu importé et les robes ont été fabriquées au Canada à partir du tissu importé. Il est beaucoup moins clair si les retailles de tissu qui ont découlé de la transformation doivent être considérées comme des « marchandises », et encore moins comme des « marchandises surannées ou excédentaires », ainsi que le prévoit l’article 109.

[26]     Lorsqu’il s’agit de l’interprétation d’une disposition législative, il faut examiner les termes utilisés par le législateur ainsi que les définitions prévues dans la Loi elle-même. À cet égard, la demanderesse a sans doute raison de souligner que le terme « marchandises » a un sens assez large. En outre, la définition prévue dans la Loi sur les douanes, à laquelle renvoie l’article 4 de la Loi, ne semble pas exhaustive; l’emploi des mots « selon le contexte » indique une définition extensive.

[27]     Cela étant dit, la Cour doit également tenir compte de l’économie générale et de l’objet de la loi, et plus particulièrement de la section 3 de la partie 3 qui traite des « Marchandises surannées ou excédentaire ». Comme il ressort du paragraphe 2 du Mémorandum D7‑2-3 publié le 31 mai 1999 par l’Agence des services frontaliers du Canada [Marchandises surannées ou excédentaires], « [c]e programme a pour but d’accroître la compétitivité de l’industrie canadienne en réduisant les coûts sur des marchandises qui ne se retrouveront pas sur le marché canadien. En permettant la destruction des marchandises surannées ou excédentaires, nous dispensons de la nécessité d’exporter les marchandises importées qui auraient été admissibles à un drawback à l’exportation. »

[28]     Il est essentiel à la notion même d’exonération de droits que les droits soient payés avant que toute exonération soit accordée. Les droits, par contre, dépendent à la fois de la valeur marchande assignée aux marchandises par le commerce international et les accords commerciaux ainsi que des décisions stratégiques prises par le législateur. Dans la majorité des cas, les droits de douane sont établis au moyen d’un pourcentage de la valeur marchande des marchandises importées.

[29]     La qualité marchande constitue le fondement de tout régime fiscal et les douanes ne font pas exception à cette règle. Par conséquent, je suis d’accord avec le défendeur pour dire que même si la définition du mot « marchandises » incorporée dans la Loi a une portée assez large, elle doit nécessairement introduire une notion de qualité marchande. Lorsqu’il a dû interpréter l’expression « marchandises non assujetties à la taxe de consommation ou de vente » de l’article 1, Partie I, Annexe III de la Loi sur la taxe d’accise, S.R.C. 1970, ch. E-13, le juge Marceau, au nom de la Section d’appel de la Cour fédérale, a adopté ce raisonnement et a écrit ce qui suit (Entreprises Kato Inc. c. Canada (Sous-ministre du Revenu national, Douanes et Accise – M.R.N.), [1983] A.C.F. no 1064 (QL)) :

    Le sens ordinaire et courant du mot « marchandises » est celui de biens en circulation sur le marché commercial, biens destinés à être vendus [. . .]

    En utilisant le mot « marchandise » et non un mot plus général comme le mot « article » (un mot qu’il utilise ailleurs dans la Loi) ou encore le mot « bien », le législateur a, à mon sens, voulu indiquer que l’exemption ne pourrait viser que les contenants devant recevoir des biens, des objets en circulation sur le marché commercial et destinés à être vendus, des biens mis en vente.

[30]     La Cour d’appel fédérale a repris clairement ce raisonnement en confirmant la décision rendue par mon collègue le juge Shore dans le contexte du litige antérieur entre les mêmes parties. Au nom de la Cour, le juge Décary a écrit ce qui suit (A & R Dress Co. Inc. c. M.R.N., précité, au paragraphe 5) :

    Lorsqu’on examine le Tarif des douanes, il faut commencer par la prémisse selon laquelle le mot marchandises (goods en anglais) signifie « des objets en circulation sur le marché commercial et destinés à être vendus, des biens mis en vente » (voir Enterprises Kato Inc. c. Canada (Sous-ministre du Revenu national, des Douanes et de l’AcciseM.R.N.) (C.A.F.), le 31 novembre 1983, A-481-82, le juge Marceau). Il nous faut recourir à une définition qui fait autorité tirée de la jurisprudence parce que, même si l’article 4 du Tarif des douanes importe les définitions contenues au paragraphe 2(1) de la Loi sur les douanes, la définition de marchandises dans ce paragraphe ne nous est d’aucun secours pour l’affaire qui nous occupe. Nous reconnaissons que l’arrêt Enterprises Kato porte sur la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. 1970, ch. E-13, mais comme le mot « droits » est défini dans la Loi sur les douanes et signifie « les droits ou taxes imposés, en vertu de la Loi de 2001 sur l’accise, de la Loi sur la taxe d’accise, [. . .] du Tarif des douanes ou de toute autre loi fédérale, sur les marchandises importées. . . » , il est raisonnable de dire que le sens ordinaire et accepté de « marchandises » est le même pour les deux lois.

[31]     Comme nous l’avons vu précédemment, la Cour d’appel fédérale n’avait pas à trancher la question de savoir si l’alinéa 110b) s’appliquait aux retailles de tissu vendables, étant donné qu’il n’y avait aucune preuve que les retailles de tissu constituaient des résidus vendables. Par conséquent, la demande de remboursement présentée par la demanderesse au titre de cet alinéa a été rejetée faute de preuves. En l’espèce, la preuve est à l’effet contraire.

[32]     L’avocat de la demanderesse ne conteste pas le fait que les « marchandises » visées à l’alinéa 110b) de la Loi doivent avoir une valeur commerciale et être destinées à être vendues. Toutefois, il a tenu pour acquis en quelque sorte que les retailles de tissu avaient une certaine valeur et qu’elles constituaient des résidus vendables étant donné qu’elles étaient [traduction] « susceptibles d’être vendues ». En toute déférence, je ne peux pas souscrire à cet argument.

[33]     Il n’y a aucun doute que le coupon de tissu importé sur lequel la demanderesse a payé des droits de douane avait une valeur marchande. Les robes fabriquées à partir du coupon de tissu importé avaient probablement une valeur marchande. Cependant tel n’est pas le cas des résidus et des déchets pour lesquels la demanderesse cherche à obtenir un drawback au titre de l’alinéa 110b) de la Loi. Le président de A&R, M. Randy Rotchin, a admis sans ménagement qu’il n’existe pas de marché pour les résidus et les déchets textiles et qu’au cours des cinq ou sept dernières années, il n’était pas économiquement réalisable de vendre les résidus et déchets textiles pour lesquels elle demande un drawback (transcription de l’interrogatoire sur affidavit de M. Randy Rothin, pages 53 et 56 du dossier de la demanderesse). Le meilleur prix que la demanderesse s’est vu offrir pour les retailles de tissu était de 0,05 $ la livre, soit 4 $ pour les 80 livres de résidus et déchets de tissu pour lesquels elle demande un drawback. Ce montant est bien inférieur à celui du drawback demandé par la demanderesse, soit 44,87 $ (dossier de la demanderesse, à la page 29).

[34]     Compte tenu de la valeur minimale des retailles de tissu, et en gardant à l’esprit qu’il semble pratiquement impossible d’abord de trouver un acheteur pour ces résidus, je ne peux conclure que ces retailles étaient destinées à la vente et qu’elles avaient une réelle valeur commerciale. Pour cette unique raison, je conclurais donc que les retailles de tissu ne remplissent pas les conditions prévues à l’alinéa 110b) de la Loi, vu qu’elle ne constituent pas des « marchandises » découlant de la transformation. Par conséquent, le défendeur a eu raison de rejeter la demande de drawback présentée par la demanderesse.

[35]     Cette raison suffirait à rejeter la présente demande de contrôle judiciaire, mais il existe une autre raison pour laquelle la demanderesse ne peut avoir gain de cause. Même si j’étais prêt à accepter que les retailles en question étaient vendables, elles ne seraient toujours pas visées par le mot « marchandises » dans le contexte de l’alinéa 110b) ni considérées comme des « marchandises surannées ou excédentaires », pour l’application de l’article 109 de la Loi.

[36]     La demanderesse ne conteste pas le fait que les retailles de tissu constituent un produit dérivé de la fabrication, et sont en réalité des résidus et des déchets. Elles ne peuvent pas être assimilées aux « marchandises » visées aux articles 109 et 110. Le législateur, eût-il eu l’intention de prévoir l’application d’un remboursement pour « marchandises surannées ou excédentaires » aux résidus et déchets, qu’il aurait utilisé ces mots précisément. En effet, le législateur était bien au fait de cette distinction et a adopté un régime particulier pour les sous-produits, les résidus et les déchets aux articles 120 à 122 de la Loi.

[37]     L’article 122 revêt un intérêt particulier étant donné qu’il traite précisément des résidus et des déchets. L’alinéa 89(1)b) prévoit une exonération des droits de douane payés sur des marchandises importées transformées au Canada et ultérieurement exportées. Les résidus et déchets découlant d’une transformation sont également admissibles à l’exonération de droits dans le cadre de ce programme lorsque les marchandises transformées sont exportées. Toutefois, le paragraphe 122(1) prévoit que si les résidus ou déchets sont vendables et seraient passibles de droits à l’importation, l’exonération ne peut pas être accordée, à moins qu’ils ne soient exportés. Le taux est celui qui est applicable aux résidus du même type s’ils avaient été importés. Autrement dit, la personne qui importe au Canada des matières passibles de droits de douane faisant l’objet d’une transformation qui occasionne des résidus et des déchets, ne se voit pas accorder une exonération de 100 % des droits de douane payés sur la matière importée, à moins que 100 % de la matière importée soit exportée ultérieurement. Toute matière importée ainsi que tout résidu et tout déchet occasionnés par la transformation de cette matière au Canada et qui restent au Canada sont assujettis à des droits de douane à condition qu’ils soient vendables.

[38]     Le même raisonnement s’applique aux marchandises à l’égard desquelles une demande a été présentée au titre des articles 110 ou 113 [mod. par L.C. 2002, ch. 22, art. 354; 2005, ch. 38, art. 89(F), 142, 145]. Que le drawback ou le remboursement soit demandé sur des marchandises excédentaires ou surannées (article 110), ou pour des droits payés sur des marchandises pour lesquelles aurait été accordée une exonération en application de l’article 89 [mod. par L.C. 2002, ch. 22, art. 349; 2005, ch. 38, art. 142, 145] (article 113), il est clair que le montant du drawback ou du remboursement devra être réduit d’un montant équivalent aux droits applicables à la valeur marchande des résidus découlant de la transformation. C’est ce qui ressort d’une lecture attentive du paragraphe 122(3) de la Loi, tel qu’il est expliqué aux paragraphes 30 et 31 du Mémorandum D7-4-2 publié le 31 janvier 1996 par l’Agence des services frontaliers du Canada [Programme de drawback].

[39]     Ce programme se distingue nettement de celui établi pour les marchandises surannées et excédentaires. Dans le contexte de l’article 110 de la Loi, l’expression « marchandises surannées ou excédentaires » fait clairement référence à quelque chose dont on n’a plus besoin ou qui est en sus de la quantité nécessaire à la production. Les définitions des termes « suranné » et « excédentaire » présentées par les dictionnaires confirment cette interprétation [Black’s Law Dictionary, 7e éd. St. Paul, Minn. : West Group, 1999] :

[traduction] suranné, adj. Qui a cessé d’être en usage; révolu.

[. . .]

excédentaire.1. Qui est en excédent; ce qui est en plus du nombre, de la quantité fixés.

[40]     Une marchandise ne peut être considérée comme surannée ou excédentaire sans un emploi ou une date d’origine. Les dispositions de la Loi traitent les « résidus » et les « déchets » différemment des « marchandises surannées ou excédentaires ». Le mot « excédentaire » signifie quelque chose qui a été fabriqué et qui pourrait être utilisé au besoin, alors que les mots « résidus » et « déchets » signifient des matières supplémentaires qui, par définition, ne sont pas utilisées dans la fabrication du produit fini et ne peuvent être considérées comme des marchandises ni comme des sous-produits découlant de la fabrication.

[41]     L’alinéa 110a) de la Loi vise une situation dans laquelle un importateur ou un fabricant, décide, pour une raison ou une autre, après avoir payé les droits de douane sur un coupon de tissu, de ne plus utiliser une partie ou l’ensemble du tissu importé. Pour autant que le tissu non utilisé réponde aux exigences de l’article 109 de la Loi, l’importateur ou le fabricant peut demander un drawback des droits payés en raison du fait que le tissu devient une marchandise surannée ou excédentaire. Il en va de même si le fabricant décide de ne plus commercialiser, en tout ou en partie, les robes fabriquées à partir du coupon de tissu. L’alinéa 110b) de la Loi lui donnerait droit au drawback étant donné que les robes seraient des marchandises surannées ou excédentaires (en présumant évidemment que les autres exigences de l’article 109 sont remplies). La version française « marchandises surannées ou excédentaires » exprime ces notions de désuet, révolu et de surplus de la présente demande de manière plus explicite que son équivalent anglais. Cette expression n’a rien à voir avec la notion de résidus et de déchets.

[42]     L’avocat de la demanderesse a fait valoir que la phrase « pour lesquels . . . [un drawback] ne peut pas être accordé », du paragraphe 122(3), serait illogique si les résidus ou les déchets vendables ne constituaient pas des « marchandises » avant tout. Étant donné que la première démarche qu’un potentiel demandeur de drawback doit suivre est d’établir que les marchandises excédentaires pour lesquelles la demande est présentée font partie de la catégorie des « marchandises », la phrase susmentionnée serait redondante selon cet argument, vu que les résidus ou les déchets vendables ne pourraient jamais être admissibles au drawback.

[43]     Aussi ingénieux soit-il, ce raisonnement ne peut pas tenir. La situation décrite au paragraphe susmentionné se distingue totalement de celle de la demanderesse en l’espèce. Les résidus vendables visés au paragraphe 122(3) seraient les retailles de tissu découlant de la transformation du coupon de tissu ou des robes pour lesquelles un remboursement a déjà été demandé en application de l’article 110. Le paragraphe 122(3) vise à faire en sorte que le drawback demandé sur des marchandises surannées ou excédentaires soit réduit d’un montant équivalent au montant des droits de douane qui devraient être payés sur les résidus vendables découlant de la transformation de ces marchandises. C’est tout à fait différent que d’affirmer que les résidus et les déchets visés peuvent être considérés comme des marchandises surannées ou excédentaires.

[44]     Les conditions énoncées à l’article 109 de la Loi rendent encore plus difficile d’intégrer la notion de résidus et déchets dans le concept de « marchandises excédentaires ». Pour satisfaire aux exigences énoncées à l’article 109 et devenir admissibles au remboursement, les marchandises importées ne peuvent pas être endommagées avant leur destruction. Personne ne peut raisonnablement soutenir que les retailles de tissu en l’espèce constituent des marchandises qui pourraient être « endommagées »; elles constituent déjà « des résidus et des déchets ».

[45]     Enfin, j’estime qu’il est logique de croire que le législateur n’avait pas l’intention d’accorder un remboursement des droits de douane sur tous les résidus et déchets découlant du processus de fabrication. Il suffit d’imaginer la difficulté d’apprécier la valeur de la sciure de bois résultant de la fabrication de meubles à partir de bois importé pour saisir l’incongruité d’interpréter l’expression « marchandises excédentaires » comme englobant les résidus et déchets découlant de la transformation de marchandises importées.

[46]     Pour tous les motifs qui précèdent, je suis donc d’avis que le représentant du défendeur n’a pas commis d’erreur en rejetant la demande de drawback présentée par la demanderesse. Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée avec dépens en faveur du défendeur.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.