Date : 20140513
Dossier : A-62-13
Référence : 2014 CAF 124
CORAM : LA JUGE TRUDEL
LE JUGE NEAR
LE JUGE SCOTT
ENTRE :
MOHIE EL DIN ALI
appelant
et
PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
et
LA BANQUE TORONTO‑DOMINION
intimés
Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2014
Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 13 mai 2014
MOTIFS DU JUGEMENT : LA COUR
Date : 20140513
Dossier : A-62-13
Référence : 2014 CAF 124
CORAM : LA JUGE TRUDEL
LE JUGE NEAR
LE JUGE SCOTT
ENTRE :
MOHIE EL DIN ALI
appelant
et
PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
et
LA BANQUE TORONTO‑DOMINION
intimés
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR
Le contexte et les procédures
[1] La Cour est saisie d'un appel d'une décision de la Cour fédérale du 15 janvier 2013 par laquelle le juge Rennie (le juge) a rejeté la demande de contrôle judiciaire de M. Mohie El Din Ali (l'appelant) visant une décision de la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission) de ne pas renvoyer la plainte de l'appelant au Tribunal canadien des droits de la personne. L'appelant alléguait que la Banque Toronto‑Dominion (la Banque TD) lui avait refusé des services bancaires et avait agi de manière discriminatoire à son endroit parce qu'il est Arabe et musulman (motifs, au paragraphe 2).
[2] L'appelant avait tenté d'encaisser un chèque de 2 448 $ à une succursale de la Banque TD à Ottawa, mais il avait été avisé que les fonds devraient être retenus pendant cinq jours. Un employé de la banque a expliqué que cette retenue était nécessaire s'il advenait que le chèque soit frauduleux ou ne soit pas accepté, mais que l'appelant pourrait avoir accès aux fonds immédiatement s'il obtenait un chèque certifié ou un mandat. L'appelant allègue que les employés de la Banque TD lui ont posé des questions inopportunes au sujet de la provenance du chèque et de l'emploi de l'appelant et qu'ils ont décidé de retenir les fonds parce que l'appelant est Arabe et musulman et parce que la société qui avait émis le chèque avait une raison sociale musulmane. L'appelant a donc déposé une plainte auprès de la Commission dans laquelle il alléguait que la décision de la Banque TD de retenir les fonds, ainsi que la conduite des employés de la banque à son égard, constituaient de la discrimination fondée sur la race et la religion.
[3] La Commission a rejeté la plainte de l'appelant en vertu du sous‑alinéa 44(3)b)(i) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H‑6. L'enquêteur de la Commission n'a pas réussi à trouver un lien entre la conduite de la Banque TD et un motif de distinction illicite. La Commission a plutôt conclu que la Banque TD avait agi en conformité avec sa politique de retenue de fonds lorsqu'elle avait exercé son pouvoir discrétionnaire de retenir les fonds du chèque de l'appelant. Plus précisément, la Commission a conclu que la décision de la banque de retenir le chèque était fondée sur les antécédents de l'appelant en matière de services bancaires et de crédit et sur la crainte que, si le chèque n'était pas honoré, l'appelant n'ait pas suffisamment de fonds pour en couvrir le montant.
[4] L'appelant a donc déposé une demande de contrôle judiciaire devant la Cour fédérale, alléguant que la décision de la Commission était déraisonnable et que la Commission avait été partiale et avait contrevenu aux règles de l'équité procédurale.
La décision de la Cour fédérale
[5] Appliquant la norme de la décision correcte, le juge a conclu qu'il n'y avait eu aucun manquement à l'équité procédurale et que rien au dossier n'étayait les allégations de l'appelant concernant l'existence d'une crainte de partialité.
[6] L'appelant a soutenu que la Commission avait agi inéquitablement parce qu'elle ne l'avait pas avisé promptement que la Banque TD avait présenté des observations additionnelles en réponse au rapport d'évaluation préliminaire de la Commission. Après que le rapport préliminaire eut été produit, les parties ont eu la possibilité de produire des observations écrites, au plus tard le 29 novembre 2010. La Banque a déposé des observations additionnelles le 25 novembre 2010, donc à l'intérieur du délai imparti. Cependant, la Commission a seulement avisé l'appelant le 3 décembre 2010 de ces observations additionnelles, et l'appelant a soutenu que cela était injuste, puisqu'il n'avait pas eu la possibilité d'y répondre. Le juge a expliqué qu'il n'y avait eu aucune iniquité dans les circonstances. Le commissaire avait avisé l'appelant des observations de la Banque TD peu de temps après qu'elles eurent été déposées, et la Commission avait donné à l'appelant la possibilité de présenter des observations additionnelles, ce qu'il avait d'ailleurs fait le 20 décembre 2010.
[7] L'appelant a aussi allégué que certains éléments de preuve et certaines observations ne lui avaient pas été communiqués. À cet égard, il a mentionné la politique de retenue de fonds et ses antécédents bancaires. Cependant, le juge a expliqué que le dossier indiquait que ces documents avaient bien été communiqués à l'appelant.
[8] De plus, bien que l'appelant ait soutenu que la Commission n'avait pas mené une enquête rigoureuse, le juge a conclu qu’aucun élément de preuve n’étayait cette affirmation. L'enquêteur avait interrogé les deux parties, et elle avait demandé des renseignements à la Banque TD. En outre, les deux parties avaient eu la possibilité de présenter des éléments de preuve et des observations écrites.
[9] Lorsqu'il a examiné la décision de la Commission, y compris le rapport de l'enquêteur, le juge a appliqué la norme de la décision raisonnable, et il a conclu qu'aucun lien ne pouvait être établi entre les plaintes de l'appelant et un motif de distinction illicite. Le juge a plutôt conclu que tous les éléments de preuve tendaient à démontrer que la Banque TD avait appliqué sa politique de retenue de fonds de manière équitable et raisonnable.
Analyse
[10] Lors de l'instruction du présent appel, l'appelant a essentiellement répété les observations qu'il avait présentées à la Cour fédérale, en invitant notre Cour à intervenir et à annuler la décision rendue en première instance et à accueillir sa demande de contrôle judiciaire.
[11] Après avoir soigneusement examiné les arguments oraux et écrits de l’appelant, les motifs du juge et le dossier dont nous disposons, nous ne sommes pas convaincus que l'intervention de notre Cour serait justifiée. Au paragraphe 11 de ses motifs, le juge a retenu la bonne norme de contrôle, et il l'a bien appliquée à la décision de la Commission (Canada Agence du revenu c. Telfer, 2009 CAF 23, aux paragraphes 18 et 19, demande d'autorisation de pourvoir à la C.S.C. refusée, 33095 (11 juin 2009). Nous souscrivons aux conclusions du juge selon lesquelles ni le dossier ni les arguments de l'appelant ne comportent quoi que ce soit qui puisse étayer l'affirmation voulant que la décision de la Commission soit déraisonnable ou qu'il y ait eu un manquement à l'équité procédurale ou une crainte raisonnable de partialité.
Conclusion
[12] En conséquence, l'appel sera rejeté avec dépens payables à la Banque TD. Le procureur général n'a pas pris part à l'appel. La Banque TD a demandé à la Cour de déterminer le montant des dépens, mais cette demande a été rejetée à l'audience. L'avocat de l'intimée a été invité à présenter ses prétentions au sujet des dépens à l'officier taxateur conformément à l'article 405 des Règles des Cours fédérales (DORS/98‑106).
« Johanne Trudel »
j.c.a.
« David G. Near »
j.c.a.
« A. F. Scott »
j.c.a.
Traduction
COUR D'APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : |
A-62-13
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INTITULÉ : |
MOHIE EL DIN ALI c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA ET LA BANQUE TORONTO-DOMINION
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LIEU DE L'AUDIENCE : |
Ottawa (Ontario)
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DATE DE L'AUDIENCE : |
le 29 avril 2014
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MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : |
LA JUGE TRUDEL LE JUGE NEAR LE JUGE SCOTT
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COMPARUTIONS :
Mohie El Din Ali
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POUR SON PROPRE COMPTE
|
D. Barry Prentice
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POUR L'INTIMÉE LA BANQUE TORONTO‑DOMINION
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
BLANEY McMURTRY LLP Toronto (Ontario)
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POUR L'INTIMÉE LA BANQUE TORONTO‑DOMINION
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