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Date : 20230518


Dossier : A-87-20

Référence : 2023 CAF 109

CORAM :

LA JUGE RIVOALEN

LA JUGE ROUSSEL

LA JUGE GOYETTE

 

 

ENTRE :

KATHERINE MAPACHEE

demanderesse

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 18 mai 2023.

Jugement rendu à l’audience à Ottawa (Ontario), le 18 mai 2023.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE RIVOALEN

 


Date : 20230518


Dossier : A-87-20

Référence : 2023 CAF 109

CORAM :

LA JUGE RIVOALEN

LA JUGE ROUSSEL

LA JUGE GOYETTE

 

 

ENTRE :

KATHERINE MAPACHEE

demanderesse

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Ottawa (Ontario), le 18 mai 2023.)

LA JUGE RIVOALEN

[1] La demanderesse présente une demande de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision rendue par la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale (la division d’appel) (2020 SST 151), qui a jugé qu’elle n’était pas admissible aux prestations prévues par la Loi sur l’assurance-emploi, L.C. 1996, ch. 23 (la Loi). Selon le paragraphe 30(1) de la Loi, la prestataire est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi si elle quitte volontairement son emploi en l’absence de quelque justification prévue à l’alinéa 29c). Devant nous, c’est l’interprétation du sous-alinéa 29c)(ix) de la Loi sur l’assurance-emploi qui est en jeu.

[2] La division générale du Tribunal de la sécurité sociale (la division générale) a examiné la liste non limitative de circonstances permettant de justifier un départ volontaire, tel que le prévoit l’alinéa 29c) de la Loi et a conclu que, malgré le départ volontaire de la demanderesse, cette dernière n’avait pas quitté son emploi sans justification. Selon la division générale, en modifiant une des conditions essentielles du contrat de travail, l’employeur a modifié de façon importante les fonctions de la demanderesse. Selon la preuve au dossier, son départ constituait la seule solution raisonnable.

[3] Le 18 février 2020, la division d’appel a déterminé que la preuve ne supportait pas la conclusion de la division générale à l’effet que l’employeur ait apporté une modification importante aux fonctions de la demanderesse au sens de l’alinéa 29c) de la Loi. La division d’appel a conclu que, n’eût été son retour aux études, la demanderesse aurait manifestement conservé les mêmes fonctions. Ainsi, le départ volontaire n’était pas justifié.

[4] Il convient de rappeler que le paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, L.C. 2005, ch. 34 confère un rôle assez limité à la division d’appel. Celle-ci ne peut intervenir que si la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle a commis une erreur de droit ou qu’elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire, ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[5] La décision de la division d’appel est assujettie à la norme de contrôle de la décision raisonnable : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, 2019 CSC 65, [2019] 4 R.C.S. 653 [Vavilov]. Il incombe à la demanderesse de démontrer que la décision est déraisonnable : Vavilov au para. 100.

[6] Donc, le rôle de notre Cour dans le cadre d’un contrôle d’une décision de la division d’appel consiste à déterminer si la division d’appel a appliqué les facteurs énoncés au paragraphe 58(1) d’une manière déraisonnable. Il s’agit d’une norme rigoureuse à laquelle il n’est pas facile de satisfaire : la cour de révision doit faire preuve de retenue envers un décideur ou un tribunal administratif, sauf s’il peut être démontré que la décision est fondée sur un raisonnement qui n’est pas intrinsèquement cohérent ou qu’elle n’est pas justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles qui ont une incidence sur elle (Uvaliyev c. Canada (Procureur général) (2021 CAF 222)).

[7] La demanderesse soulève de nouveaux arguments devant cette Cour, soit qu’elle ait été victime d’harcèlement psychologique, de racisme et de discrimination. Ces arguments n’ont pas été soulevés ni devant la division générale ni la division d’appel. Elle ne peut donc pas les soulever pour la première fois devant cette Cour.

[8] Après avoir soigneusement examiné le dossier et les représentations écrites et orales de la demanderesse, nous sommes d’avis que la division d’appel n’a commis aucune erreur susceptible de révision.

[9] La question devant la division générale était de savoir si le changement d’horaire de travail de la demanderesse constituait une modification importante de ses fonctions au sens du sous-alinéa 29c)(ix). La version anglaise du sous-alinéa parle de « significant changes in work duties ». Le fait de changer les heures de travail ou l’horaire d’un prestataire ne signifie pas nécessairement une modification importante des fonctions du prestataire. À la lumière du dossier, nous sommes d’avis qu’il était raisonnable pour la division d’appel de conclure que les éléments de preuve étaient insuffisants pour étayer les allégations de la demanderesse selon lesquelles ses fonctions de travail avaient été modifiées de façon importante au sens du sous-alinéa 29c)(ix) de la Loi.

[10] Toutefois, nous ne sommes pas d’accord avec les propos de la division d’appel au paragraphe 15 de ses motifs. Nous sommes d’avis que la division générale n’a pas ignoré la jurisprudence constante de cette Cour, mais a plutôt choisi de traiter de la question devant elle d’une autre façon, celle de regarder les conditions de travail plutôt que le retour aux études. Malgré cela, nous sommes toujours d’avis que la division d’appel a raisonnablement conclu que la division générale avait erré concernant l’interprétation du sous-alinéa 29c)(ix) de la Loi. La décision de la division d’appel commande un haut degré de retenue et, bien que la demanderesse ait tenté de son mieux de nous convaincre du contraire, le rôle de notre Cour est limité.

[11] Par conséquent, nous rejetterions la présente demande de contrôle judiciaire. Compte tenu du fait qu’aucune demande de dépens n’a été présentée, aucun dépens ne sera accordé.

« Marianne Rivoalen »

j.c.a.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


Dossier :

A-87-20

INTITULÉ :

KATHERINE MAPACHEE c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 18 mai 2023

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE RIVOALEN

LA JUGE ROUSSEL

LA JUGE GOYETTE

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE :

LA JUGE RIVOALEN

 

COMPARUTIONS :

Katherine Mapachee

 

Pour la demanderesse

(pour son propre compte)

 

Suzette Bernard

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Shalene Curtis-Micallef

Sous-procureure générale du Canada

Pour le défendeur

 

 

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