Décisions de la Cour d'appel fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20230224


Dossier : A-295-19

Référence : 2023 CAF 40

Présent : AUDREY BLANCHET, Officière taxatrice

 

ENTRE :

 

 

L’ASSOCIATION DES EMPLOYEURS MARITIMES

L’ADMINISTRATION PORTUAIRE DE MONTRÉAL

LA FÉDÉRATION MARITIME DU CANADA

 

 

demanderesses

 

 

et

 

 

LE SYNDICAT DES DÉBARDEURS, SECTION LOCALE 375 DU SYNDICAT CANADIEN DE LA FONCTION PUBLIQUE

L’ASSOCIATION INTERNATIONALE DES DÉBARDEURS

LA CHAMBRE DE COMMERCE DE L’EST DE MONTRÉAL

LE CONSEIL DU PATRONAT DU QUÉBEC

LA FÉDÉRATION DES CHAMBRES DE

COMMERCE DU QUÉBEC

 

 

défendeurs

 

Taxation des dépens sur dossier sans comparution des parties.

Certificat rendu à Ottawa (Ontario), le 24 février 2023.

MOTIFS DE LA TAXATION PAR :

AUDREY BLANCHET, Officière taxatrice


Date : 20230224


Dossier : A-295-19

Référence : 2023 CAF 40

Présent : AUDREY BLANCHET, Officière taxatrice

ENTRE :

L’ASSOCIATION DES EMPLOYEURS MARITIMES

L’ADMINISTRATION PORTUAIRE DE MONTRÉAL

LA FÉDÉRATION MARITIME DU CANADA

demanderesses

et

LE SYNDICAT DES DÉBARDEURS, SECTION LOCALE 375 DU SYNDICAT CANADIEN DE LA FONCTION PUBLIQUE

L’ASSOCIATION INTERNATIONALE DES DÉBARDEURS

LA CHAMBRE DE COMMERCE DE L’EST DE MONTRÉAL

LE CONSEIL DU PATRONAT DU QUÉBEC

LA FÉDÉRATION DES CHAMBRES DE

COMMERCE DU QUÉBEC

défendeurs

MOTIFS DE LA TAXATION

AUDREY BLANCHET, Officière taxatrice

[1] Le 23 août 2019, les demanderesses ont déposé une demande en contrôle judiciaire d’une décision rendue par le Conseil canadien des relations industrielles [le Conseil ou CCRI]. Dans sa décision, le Conseil avait rejeté la demande de récusation des demanderesses visant un membre du banc dudit Conseil [le membre Ménard] alors saisi d’une demande de maintien de services essentiels. Le 29 janvier 2020, la Cour a rendu un jugement rejetant la demande en contrôle judiciaire des demanderesses, avec dépens [le Jugement]. Il s’agit d’une taxation des dépens effectuée en vertu de ce Jugement, en conformité avec la partie 11 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 [Règles] et du Tarif B. En l’absence d’indication de la Cour, les dépens seront taxés conformément à la colonne III du tableau du tarif B (Règle 407).

[2] Le 13 novembre 2020, le défendeur Syndicat des débardeurs, Section locale 375 du Syndicat canadien de la fonction publique [le défendeur], a déposé un mémoire de frais pour la somme de 82 170,05 $. Le 29 janvier 2021, les parties ont reçu une directive quant aux dates de dépôt des documents pour la taxation des dépens. Les documents suivants ont été déposés par les parties en vue de la présente taxation: le 19 février 2021, le défendeur a déposé des représentations écrites au soutien du mémoire de frais et un affidavit de Michel Murray; le 25 mars 2021, les demanderesses ont déposé des représentations écrites en réponse au mémoire de frais et un affidavit de Jean-Pierre Langlois; le 16 avril 2021, le défendeur a déposé une réplique.

I. Services à taxer

[3] Le défendeur réclame la somme de 9 450,00 $ pour des services à taxer. La taxe de vente harmonisée (TPS et TVQ) est réclamée sur ces services, portant la réclamation à 10 865,14 $.

A. Article 2 – Préparation et dépôt de toutes les défenses, réponses, demandes reconventionnelles ou dossiers et documents des intimés.

[4] Le défendeur réclame 7 unités au titre de l’article 2 pour la préparation d’une défense. La colonne III du tableau du Tarif B permet d’allouer un nombre d’unités situé entre 4 et 7. Je suis convaincue que la procédure dans ce dossier a nécessité beaucoup de travail puisque le dossier du défendeur comprend de nombreux volumes. Cependant, après avoir examiné le dossier et les actes de procédure, je constate qu’il ne s’agissait pas d’une affaire d’une complexité élevée permettant d’attribuer le haut de la colonne III. Ainsi, 6 unités sont autorisées en vertu de l’article 2.

B. Article 3 – Modification des documents par suite de la présentation par une autre partie d’un acte introductif d’instance, d’un acte de procédure, d’un avis ou d’un affidavit, nouveau ou modifié.

[5] Six unités sont réclamées en vertu de l’article 3 en ce qui concerne le mémoire des faits et du droit du défendeur modifié. L’article 3 porte sur la « [m]odification des documents par suite de la présentation par une autre partie d’un acte introductif d’instance, d’un acte de procédure, d’un avis ou d’un affidavit, nouveau ou modifié ». Or, la modification du mémoire du défendeur n’a pas été effectuée à la suite du dépôt d’un acte de procédure nouveau ou modifié par une partie, mais plutôt à la suite d’une ordonnance de la cour. En effet, la modification du mémoire des faits et du droit du défendeur découlait plutôt de la requête de ce dernier en vertu de la Règle 312 visant à obtenir l’autorisation de déposer un affidavit complémentaire. Il appert que le défendeur avait mentionné dans son mémoire des faits et du droit certains faits contenus dans un affidavit complémentaire dont le dépôt n’avait pas été autorisé par la Cour. Dans son ordonnance du 3 janvier 2020, la Cour a rejeté la requête du défendeur et a ordonné qu’un mémoire des faits et du droit modifié « dans lequel toute mention des faits contenus seulement dans ledit affidavit complémentaire est enlevée » soit déposé. Dans ces circonstances, la réclamation au titre de l’article 3 doit donc être rejetée (Rachalex Holdings Inc. v. 921410 Ontario Ltd., 2010 FC 585 au para. 7; Balisky c. Goodale, 2004 CAF 123 au para. 7).

C. Article 5 – Préparation et dépôt d’une requête contestée, y compris les documents et les réponses s’y rapportant.

[6] Le défendeur réclame 7 unités pour la préparation et le dépôt d’une requête présentée par ce dernier en vertu de l’article 312 des Règles. Ladite requête fut contestée par les demanderesses et rejetée avec dépens. Le défendeur n’ayant pas droit aux dépens de cette requête, la réclamation au titre de l’article 5 est donc rejetée.

D. Article 6 – Comparution lors d’une requête, pour chaque heure.

[7] Aux termes de l’article 6, le défendeur réclame 3 unités par heure pour la comparution lors d’une requête, sans précision quant à la requête à laquelle se rapporte sa réclamation. Après examen du dossier et des Inscriptions enregistrées, je constate que les requêtes entendues dans le cadre de ce dossier ont été tranchées par la Cour sans comparution des parties. D’ailleurs, la Cour a rappelé dans sa directive du 27 août 2019 que les requêtes sont entendues par écrit, « tel que expliqué récemment dans le jugement de Stratas j.c.a. dans l’arrêt Groupe SNC-Lavalin Inc., et al. c. Le Directeur des poursuites pénales, 2019 CAF 108 aux paragraphes 13 et 14 ». Ainsi, aucune unité n’est allouée au titre de l’article 6.

E. Article 7– Communication de documents, y compris l’établissement de la liste, l’affidavit et leur examen.

[8] Dans son mémoire de frais, le défendeur réclame 5 unités sous l’article 7. Or, cette disposition porte sur la communication de documents au sens de l’article 223 des Règles. En effet, l’article 7 est réservé à la communication de documents énumérés aux articles 222 à 232 et 295 des Règles applicables aux actions et « ne trouve pas son application dans le cadre de recours introduits par demande de contrôle judiciaire » (Montréal (Ville) c. Administration portuaire de Montréal, 2012 CF 221 au para. 9; Turcotte c. Canada (Procureur général), 2011 CF 1090 au para. 5; Omary c. Canada (Procureur général), 2010 CF 813 au para. 7) Par ailleurs, les représentations du défendeur ne me permettre pas de déterminer si des examens ou des interrogatoires ont eu lieu donnant droit à une réclamation au terme de l’article 7. Je ne peux donc pas conclure que les 5 unités réclamées sont justifiées dans le cadre d’une demande en contrôle judiciaire. Ainsi, aucune unité ne sera accordée.

F. Article 10 – Préparation à la conférence préparatoire, y compris le mémoire.

[9] Le défendeur réclame 6 unités aux termes de l’article 10 pour la préparation à la conférence de gestion de l’instance tenue le 17 octobre 2019. La colonne III du tableau du Tarif B permet d’allouer un nombre d’unités situé entre 3 et 6. Dans ses représentations écrites, le défendeur n’a pas étayé sa réclamation de manière à justifier en quoi le maximum d’unités sous cet article devrait lui être octroyé. Étant donné que cette affaire est d’une complexité habituelle et que le niveau par défaut des dépens se situe au milieu de la colonne III du tableau du Tarif B, j’estime raisonnable d’allouer 4 unités (Allergan Inc. c. Sandoz Canada Inc., 2021 CF 186 au para. 25 [Allergan]).

G. Article 11 – Présence à la conférence préparatoire, pour chaque heure.

[10] Le défendeur réclame 3 unités pour la présence de ses procureurs à la conférence de gestion de l’instance tenue par conférence téléphonique le 17 octobre 2019. Le nombre d’heures réclamé et/ou le total d’unités réclamées ne sont toutefois pas précisés. D’après le résumé de l’audience contenu dans le dossier de la Cour, il appert que ladite conférence a duré 15 minutes. J’estime qu’un temps additionnel de 15 minutes pour permettre aux procureurs de s’installer en vue de la conférence téléphonique est raisonnable (Nova-Biorubber Green Technologies, Inc. c. Technologies du développement durable Canada, 2021 CF 102 au para. 21.). Ainsi, 1.5 unité, équivalent à 3 unités par heure pour une durée de 30 minutes, est accordée.

H. Article 13a) – Honoraires d’avocat : préparation de l’instruction ou de l’audience, qu’elles aient lieu ou non, y compris la correspondance, la préparation des témoins, la délivrance de subpoena et autres services non spécifiés dans le présent tarif;

[11] Le défendeur réclame 5 unités au titre de l’article 13a) sans toutefois étayé en quoi le maximum d’unités devrait lui être alloué. Aux termes de l’article 13a) du Tarif B, le nombre d’unités pouvant être alloué en vertu de la colonne III se situe en 2 et 5 unités. En me fondant sur Allergan, précitée, il y a lieu, en l’espèce, d’accorder 3 unités.

I. Article 14 a) – Honoraires d’avocat : pour le premier avocat, pour chaque heure de présence à la Cour;

[12] Douze (12) unités sont réclamées sous l’article 14(a), lesquelles équivalent à 4 heures multipliées par 3 unités pour la présence à la cour du procureur principal du défendeur lors de l’audience du 29 janvier 2020. Puisqu’il appert du résumé de l’audience placé au dossier qu’elle fût d’une durée de 4 heures 30 minutes, la réclamation est raisonnable et est allouée telle que réclamée.

J. Article 24 – Déplacement de l’avocat pour assister à l’instruction, une audience, une requête, un interrogatoire ou une procédure analogue, à la discrétion de la Cour.

[13] Dans son mémoire de frais, le défendeur réclame douze (12) unités pour les frais de déplacement engagés par ses procureurs afin d'assister à l’audience du 29 janvier 2020. La disposition de l’article 24 édicte que les frais sont accordés « à la discrétion de la Cour ». En application du paragraphe 5(1) de la Loi sur les Cours fédérales, LRC (1985), c F-7, « [l]a Cour d’appel fédérale se compose du juge en chef, appelé juge en chef de la Cour d’appel fédérale, qui en est le président, et de quatorze autres juges ». Ainsi, je ne détiens pas la juridiction nécessaire, en tant qu’officière taxatrice, afin d’accorder les frais prévus aux termes de cet article (Double Diamond Distribution Ltd v. Crocs Canada, Inc, 2021 FCA 47 au para. 16; Delizia Limited v. Sunridge Gold Corp, 2018 FCA 158 au para. 7 (non publiée, dossier A-119-16); Ade Olumide v. Conservative Party of Canada, 2016 FCA 168 au para. 14 (non publiée, dossier A-301-15)). Puisque le Jugement de la Cour rendu suite à l’audience du 29 janvier 2020 n’a pas expressément accordé ces frais, la réclamation est rejetée.

K. Article 25 – Services rendus après le jugement et non mentionnés ailleurs.

[14] Dans son mémoire de frais, le défendeur réclame 1 unité pour les services rendus après le jugement. Malgré l’absence de preuve, l’article 25 est régulièrement alloué puisqu’il est usuel qu’un procureur ait examiné le jugement et expliqué ses répercussions à son client (Halford c. Seed Hawk inc., 2006 CF 422 au para. 131). Par conséquent, je conclus que le défendeur a droit à 1 unité telle que réclamée.

L. Article 26 – Taxation des frais.

[15] Au titre de l’article 26, soit pour les services effectués pour préparation de la présente taxation des frais, le défendeur réclame 3 unités. Cette réclamation n’est pas contestée par les demanderesses et ne requiert pas non plus mon intervention. J’estime raisonnable d’allouer les 3 unités réclamées.

II. Débours

A. Transcriptions Ubiqus

[16] Dans son mémoire de frais, le défendeur réclame la somme de 44 856,66 $ pour la « transcription de fichiers audio et la transcription de plaidoiries effectuées » par la compagnie Ubiqus. Au soutien de cette réclamation, le défendeur a produit 8 factures démontrant que des services de transcription juridique ont été rendus.

[17] Dans ses représentations écrites, le défendeur précise que « […] les factures de la compagnie Ubiqus représentent les transcriptions des trente-deux (32) jours d’audiences ayant eu lieu au CCRI dans la décision faisant l’objet de la demande de révision des demanderesses […] ».

[18] Dans ses représentations écrites en réponse, les demanderesses s’opposent avec véhémence à cette réclamation. Dans un argumentaire très détaillé, les demanderesses exposent essentiellement des arguments pouvant être résumés comme suit :

  • i) Il ne s’agit pas de débours raisonnables et nécessaires au litige. Aucune preuve n’a été présentée;

  • ii) Aucune loi ni ordonnance ne permet au défendeur de réclamer les frais liés aux transcriptions;

  • iii) Il ne s’agit pas transcription de notes sténographiques offrant une garantie de fiabilité. Les transcriptions n’ont pas été déposées au dossier de la Cour. Il s’agit tout au plus de notes personnelles à l’usage du défendeur;

  • iv) Les transcriptions se rapportent à des journées d’audience qui n’ont aucune pertinence au litige. Les demanderesses avaient déjà produit les transcriptions sténographiques pertinentes au litige;

  • v) Le défendeur avait obtenu l’intégralité des enregistrements des audiences devant le Conseil;

  • vi) Des notes sténographiques se rapportant au même enregistrement d’audience ont été déposées par le défendeur;

  • vii) La transcription de certaines audiences est postérieure à la date de mise en état du dossier et/ou à l’audience tenue devant cette Cour et a donc pu être utile lors de l’audition devant le Conseil, mais non dans le présent litige.

  • viii) Les factures ne sont pas assez détaillées et ne permettent pas d’identifier la proportion des frais pour la transcription de chaque journée d’audience;

  • ix) Le défendeur n’a pas mitigé ses frais en s’enquérant, par exemple, auprès des demanderesses pour obtenir un partage des coûts;

[19] En réplique aux représentations des demanderesses, le défendeur a fourni des factures détaillées des services rendus par Ubiqus. À cette même occasion, il précise que les transcriptions étaient nécessaires à sa défense puisque le recours des demanderesses s’appuyait notamment sur des paroles prononcées par le membre Ménard à différents moments pendant les audiences et dont la portée avait donné lieu à une crainte raisonnable de partialité. Afin de réfuter ces allégations, le défendeur soutient qu’il a dû obtenir les transcriptions de toutes les audiences afin de démontrer que c’était plutôt le procureur de l’Association des employeurs maritimes qui aurait eu un comportement irrévérencieux à l’égard des membres du Conseil et aurait manqué de déférence.

[20] En réplique à l’argument des demanderesses qui concerne la réception des transcriptions postérieurement à la mise en état du dossier et à l’audience de la demande en contrôle judiciaire du 29 janvier 2020, le défendeur précise qu’il a dû se référer aux plaidoiries ayant eu lieu devant le Conseil du 7 au 29 octobre 2019 dans son mémoire supplémentaire déposé suite à la directive émise par la Cour le 7 février 2020 en lien avec la demande de suspension dont l’audience s’est tenue le 21 février 2020.

[21] Finalement, le défendeur argumente qu’en retenant les services de transcription de Ubiqus, il a mitigé ses débours puisque l’obtention de transcriptions sténographiques pour l’ensemble des audiences tenues devant le Conseil aurait été beaucoup plus onéreuse que l’option retenue.

[22] Avant d’analyser la position respective des parties, un examen de la législation applicable est de mise. Premièrement, les dispositions des Règles exigent expressément qu’une partie doive inclure les extraits de toute transcription sur lesquelles elle entend s’appuyer. La Règle 310(2) s’énonce comme suit :

Contenu du dossier du défendeur

(2) Le dossier du défendeur contient, sur des pages numérotées consécutivement, les documents suivants dans l’ordre indiqué ci-après :

(…)

d) les extraits de toute transcription des témoignages oraux recueillis par l’office fédéral qu’il entend utiliser à l’audition de la demande;

(…)

Respondent’s record

(2) The record of a respondent shall contain, on consecutively numbered pages and in the following order,

(…)

(d) the portions of any transcript of oral evidence before a tribunal that are to be used by the respondent at the hearing;

(…)

[23] Quant au fardeau de preuve applicable aux débours, l’article 1(4) du Tarif B des Règles établit ce qui suit :

Preuve

(4) À l’exception des droits payés au greffe, aucun débours n’est taxé ou accepté aux termes du présent tarif à moins qu’il ne soit raisonnable et que la preuve qu’il a été engagé par la partie ou est payable par elle n’est fournie par affidavit ou par l’avocat qui comparaît à la taxation.

Evidence of disbursements

(4) No disbursement, other than fees paid to the Registry, shall be assessed or allowed under this Tariff unless it is reasonable and it is established by affidavit or by the solicitor appearing on the assessment that the disbursement was made or is payable by the party.

[24] En sus de l’article 1(4) du Tarif B des Règles, la jurisprudence a également établi qu’en matière de taxation des débours, la partie qui a gain de cause peut réclamer les débours qui sont raisonnables et nécessaires au litige (Merck & Co. c. Apotex inc., 2006 CF 631 au para. 3).

[25] Quant aux services de transcription effectués par Ubiqus, il est sans équivoque que les frais réclamés ont bel et bien été engagé par le défendeur. La preuve documentaire est exhaustive sur ce point. La question est maintenant de déterminer si ces frais étaient nécessaires et raisonnables en regard à la conduite du litige.

[26] Les demanderesses opposent, avec raison, que le défendeur n’était pas justifié d’obtenir la transcription des 32 journées d’audiences du Conseil en vue de préparer une défense adéquate puisque force est de constater qu’aucune de ces transcriptions n’a été déposée au dossier de la Cour. D’ailleurs, le défendeur avait obtenu la totalité des enregistrements des audiences devant le Conseil. Une simple écoute de ces enregistrements aurait suffi, sans nécessiter d’en faire la transcription. Je me rallie à l’argument qu’il s’agit tout au plus de notes à l’usage personnel du défendeur en vue de préparer son dossier et qu’il ne s’agit pas de débours taxables rencontrant le critère de nécessité. Bien que la taxation des dépens ne doit pas être examinée depuis une position rétrospective, j’estime que la preuve permettant de justifier la nécessité d’engager de tels frais pour la conduite du litige ne m’a pas été présentée. Dans l'affaire Dableh c. Ontario Hydro [1994] A.C.J. No. 1810, au paragraphe 15 [Dableh], la Cour précise ce qui suit :

[…] Le critère préliminaire, lorsqu’il s’agit d’indemniser quelqu’un de débours comme ceux-ci, n’est pas fonction de ce qui arrive après coup, mais de la question de savoir si, compte tenu des circonstances existant au moment où il a décidé d’engager les frais le procureur représentait son client d'une façon prudente et raisonnable […].

[27] Bien que Dableh traite de la question des témoins experts, je considère, tout comme l’officier taxateur dans l’affaire Janssen Inc. c. Teva Canada Limited, 2012 CF 48, au paragraphe 68, que le même « raisonnement [est] juste et applicable à de nombreux débours (…) », dont les frais de transcription.

[28] Malgré que je n’adhère pas à l’argument des demanderesses à l’effet que le défendeur avait déjà en sa possession les extraits auxquels le dossier faisait référence et considère qu’il soit tout à fait justifié pour le défendeur de faire sa propre preuve, je concilie mal le fait que ce dernier ait pu engager de tels frais tout en sachant que des transcriptions sténographiques devraient ultérieurement être préparées. D’ailleurs, dans l’affaire Apotex Inc. c. H. Lundbeck A/S, 2013 CF 1188, la Cour a précisé que :

[36] Comme le sait n’importe quel avocat plaidant, il est crucial qu’une transcription exacte soit préparée par un sténographe impartial. Les interrogatoires préalables sont transcrits de façon à ce qu’il puisse être donné suite correctement et justement aux engagements et aux objections. Des passages de la transcription peuvent être utilisés dans des arguments lors de l’instruction, ou pour confronter un témoin dont le témoignage est incohérent. [Non souligné dans l’original.]

[29] Je considère que cette réclamation n’est pas non plus raisonnable puisqu’en sus de ces transcriptions, des notes sténographiques se rapportant aux audiences du 11 et 14 juin, 19 juillet et 28 août 2019 ont dû être préparées pour dépôt au dossier de la Cour. Comme le soutiennent les demanderesses avec raison, le défendeur n’a pas non plus mitigé ses frais. Il aurait pu s’enquérir auprès des demanderesses pour obtenir un partage des coûts, tout comme il aurait pu s’en tenir à l’écoute des enregistrements plutôt que d’engager des frais substantiels de l’ordre de
44 856,66 $. D’ailleurs, dans Leithiser v. Pengo Hydra Pull of Canada Ltd., [1973] F.C.J. No. 1106, affaire dans laquelle le défendeur avait obtenu la transcription intégrale du procès sans avoir consulté son opposant, la Cour a déterminé que la transcription constituait « […] un luxe que la partie opposée ne devrait pas être obligée de défrayer » et a rejeté cette réclamation. Je suis d’avis que le même raisonnement s’applique à la présente affaire, d’autant plus qu’il ne s’agit pas de transcription sténographique ici.

[30] Les cours fédérales ont rappelé à maintes reprises que l’objectif des règles en matière de taxation des dépens n’est pas de rembourser tous les frais engagés par une partie dans la poursuite d’un litige, mais de fournir une indemnisation partielle. (Compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique c. Canada, 2022 CF 392 au para. 23; Sherman c. Canada (Ministre du revenu national), 2004 CAF 29 au para. 8) À plus forte raison, les dépens partie-partie ne devraient pas être punitifs ni extravagants, mais devraient représenter un compromis entre l’indemnisation d’une partie qui a obtenu gain de cause et le fait de ne pas imposer un fardeau indu à une partie qui succombe. (Apotex Inc. v. Wellcome Foundation Ltd., [1998] F.C.J. No. 1736 au para. 7; M. K. Plastics Corporation c. Plasticair inc., 2007 FC 1029 au para. 20)

[31] Pour les motifs précédemment exposés, cette réclamation est rejetée en totalité.

B. Frais de sténographe

[32] Au soutien de son mémoire de frais, le défendeur a fourni 2 factures de Madame Florence Béliveau, sténotypiste officielle. La première facture comprend la transcription de l’enregistrement des séances du Conseil du 14 juin, 19 juillet et 28 août 2019 et s’élève à
2 560,28 $. La seconde facture, au montant de 2 327,37 $, correspond à la transcription de l’enregistrement d’extraits des séances du Conseil du 11 et 14 juin 2019. Ces débours ne sont pas contestés par les demanderesses.

[33] Après examen du dossier, j’estime que la transcription était nécessaire et pertinente pour la poursuite de l’action. Ainsi, le coût de la transcription des notes sténographiques au montant total de 4 887,65 $ peut être inclus comme débours dans les frais accordés au défendeur.

C. Frais de confection et d’impression

[34] Le défendeur réclame des débours relatifs à la confection et l’impression de procédures par une firme spécialisée. Le mandat incluait : étude du dossier, traitement des documents, numérotation, en-têtes, mise en page, correction d’épreuves, préparation des pages couvertures et tables des matières, impression et reliure, prise en charge de la signification et production. À ce titre, le défendeur a soumis 7 factures détaillées totalisant 21 141,08 $. Ces frais ne sont pas contestés par les demanderesses.

[35] Après examen du dossier de cour, je constate qu’à l’exception du dossier de requête du défendeur du 13 décembre 2019 pour lequel il n’a pas droit aux dépens, les documents copiés sont réclamés à juste titre. Le nombre de copies préparées est conforme et les dates des factures et leurs descriptifs coïncident d’ailleurs avec leurs dates respectives de dépôt au dossier de la Cour. Il m’est toutefois impossible de déterminer avec précision si tous les frais réclamés tels les endos, les onglets, les reliures et autres frais divers sont exacts. Dans Apotex inc. c. Merck & Co. Inc., 2008 CAF 371, la Cour précise ce qui suit quant à l’appréciation de la preuve :

[14] Compte tenu de la documentation limitée dont disposent les officiers taxateurs, la question de savoir quelles dépenses sont raisonnables est souvent tranchée sommairement, ce qui laisse forcément aux officiers taxateurs une large marge d'appréciation discrétionnaire […].

[36] Malgré ce qui précède, je suis tout de même en mesure de constater que les frais de signification réclamés ne correspondent pas avec justesse aux honoraires de l’huissier afférents aux différentes procédures signifiées dans le cadre de ce litige. Après examen des factures de l’huissier, je note que les frais de signification s’élèvent à la somme de 1 479,63 $, représentant un écart de 255 $ par rapport aux frais facturés au défendeur et réclamés à son mémoire de frais. Cette somme, ainsi que les débours liés au dossier de requête du défendeur, sont déduits du montant réclamé. Ainsi, les débours acceptés à titre de frais de confection et de préparation de procédures s’élèvent donc à 18 007,50 $.

D. Frais d’hébergement

[37] Des frais d’hébergement encourus pour l’audience tenue à Ottawa le 29 janvier 2020 sont réclamés par le défendeur. D’après la facture fournie au soutien de son mémoire de frais, trois (3) chambres d’hôtel, totalisant 419,52 $, ont été réservées. Selon le dossier de cour et le résumé de l’audience sur la demande de contrôle judiciaire, le défendeur était représenté par deux (2) procureurs. Compte tenu de ce qui précède, la réclamation pour frais d’hébergement est partialement acceptée, soit pour la somme de 279,68 $, laquelle représente des frais d’hébergement pour deux (2) chambres d’hôtel.

III. Conclusion

[38] Le mémoire de frais du défendeur est taxé et alloué au montant de 28 434,94 $. Un certificat de taxation sera émis pour cette somme.

« Audrey Blanchet »

Officier taxateur



COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-295-19

INTITULÉ :

L'ASSOCIATION DES EMPLOYEURS MARITIMES, L'ADMINISTRATION PORTUAIRE DE MONTRÉAL, LA FÉDÉRATION MARITIME DU CANADA c. LE SYNDICAT DES DÉBARDEURS, SECTION LOCALE 375 DU SYNDICAT CANADIEN DE LA FONCTION PUBLIQUE, L'ASSOCIATION INTERNATIONALE DES DÉBARDEURS, LA CHAMBRE DE COMMERCE DE L'EST DE MONTRÉAL, LE CONSEIL DU PATRONAT DU QUÉBEC, LA FÉDÉRATION DES CHAMBRES DE COMMERCE DU QUÉBEC

TAXATION DES DÉPENS SUR DOSSIER EXAMINÉ À OTTAWA (ONTARIO) SANS COMPARUTION DES PARTIES.

 

MOTIFS DE LA TAXATION PAR :

Audrey BLANCHET, Officière taxatrice

 

DATE DES MOTIFS :

24 FÉVRIER 2023

 

REPRÉSENTATIONS ÉCRITES PAR :

Nicola Di Iorio

Mélanie Sauriol

Geneviève Beaudin

Pour la demanderesse L'ASSOCIATION DES EMPLOYEURS MARITIMES

Michel Brisebois

Georges Samoisette Fournier

Pour la demanderesse

L'ADMINISTRATION PORTUAIRE DE MONTRÉAL

Jean-Denis Boucher

Pour la demanderesse

LA FÉDÉRATION MARITIME DU CANADA

Marie-Christine Morin

Jacques Lamoureux

Pour le défendeur

LE SYNDICAT DES DÉBARDEURS, SECTION LOCALE 375 DU SYNDICAT CANADIEN DE LA FONCTION PUBLIQUE

Dominic Caron

Pour la défenderesse

L'ASSOCIATION INTERNATIONALE DES DÉBARDEURS

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

BCF, S.E.N.C.R.L.

Montréal (Québec)

 

Pour les demanderesses

L'ASSOCIATION DES EMPLOYEURS MARITIMES et

L'ADMINISTRATION PORTUAIRE DE MONTRÉAL

Robinson Sheppard Shapiro s.e.n.c.r.l.

Montréal (Québec)

Pour la demanderesse

LA FÉDÉRATION MARITIME DU CANADA

Lamoureux Morin avocats inc.

Longueuil (Québec)

Pour le défendeur

LE SYNDICAT DES DÉBARDEURS, SECTION LOCALE 375, DU SYNDICAT CANADIEN DE LA FONCTION PUBLIQUE

Pink Larkin

Montréal (Québec)

Pour la défenderesse

L'ASSOCIATION INTERNATIONALE DES DÉBARDEURS

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.