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Date : 20210813


Dossier : A-297-20

Référence : 2021 CAF 167

[TRADUCTION FRANÇAISE]

En présence du juge Locke

ENTRE :

ADMINISTRATION PORTUAIRE DE VANCOUVER FRASER

appelante

et

GCT CANADA LIMITED PARTNERSHIP et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimés

Requête jugée sur dossier sans comparution des parties.

Ordonnance rendue à Ottawa (Ontario), le 13 août 2021.

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LE JUGE LOCKE

 


Date : 20210813


Dossier : A-297-20

Référence : 2021 CAF 167

En présence du juge Locke

ENTRE :

ADMINISTRATION PORTUAIRE DE VANCOUVER FRASER

appelante

et

GCT CANADA LIMITED PARTNERSHIP et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimés

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

LE JUGE LOCKE

[1] Le présent appel concerne une décision du juge Michael Phelan de la Cour fédérale, en date du 17 novembre 2020 (2020 CF 1062), dans le contexte d’une demande de contrôle judiciaire (dossier n° T-538-19, la « demande »). Dans sa décision, le juge Phelan a rejeté l’appel d’une décision de la protonotaire Angela Furlanetto en date du 9 mars 2020 (2020 CF 348). La protonotaire avait rejeté la requête en radiation d’un avis de demande pour des motifs de prématurité.

[2] La demande a été introduite par l’intimée, GCT Canada Limited Partnership (GCT), le 28 mars 2019. Le passage de la demande à l’étape de l’audience sur le fond a été retardé par divers litiges interlocutoires, mais un calendrier a été fixé le 25 juin 2021 qui prévoyait une audience de quatre jours à partir du 18 octobre 2021.

[3] L’appelante, l’Administration portuaire Vancouver Fraser (APVF), demande maintenant une ordonnance en suspension de la demande jusqu’à ce qu’une décision définitive soit rendue concernant le présent appel. L’APVF demande également que l’appel soit entendu le plus rapidement possible.

[4] L’intimé, le procureur général du Canada, ne s’oppose pas à cette requête et soutient qu’une suspension serait [traduction] « conforme à l’objectif de l’article 3 des Règles des Cours fédérales, [D.O.R.S./98-106 (les Règles)], pour que le litige soit réglé de façon juste, expéditive et efficace. » GCT s’oppose à la requête en suspension des procédures.

[5] L’alinéa 50(1)b) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7, sur lequel l’APVF se fonde, dispose que « La Cour d’appel fédérale [...] [a] le pouvoir discrétionnaire de suspendre les procédures dans toute affaire : [...] lorsque, pour quelque autre raison, l’intérêt de la justice l’exige. » Les parties conviennent que notre Cour a le pouvoir de suspendre les procédures devant un autre tribunal. Cet argument est étayé dans l’arrêt Clayton c. Canada (Procureur général), 2018 CAF 1, par. 24 (arrêt Clayton). Les arrêts Clayton, par. 24, et Mylan Pharmaceuticals ULC c. Astrazeneca Canada inc., 2011 CAF 312, par. 5 (cités dans les présentes avec approbation) appuient également l’application du critère à trois volets énoncé dans l’arrêt RJR-MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311 (arrêt RJR-MacDonald) à la présente requête concernant les procédures devant un autre tribunal. Ce critère exige que l’APVF établisse chacun des volets suivants :

  1. Elle soulève une question sérieuse quant à l’appel.

  2. Elle subira un préjudice irréparable si la suspension n’est pas accordée.

  3. La prépondérance des inconvénients penche en faveur de l’octroi de la suspension.

[6] Les observations respectives des parties sont liées à ces exigences. L’APVF doit démontrer qu’elle satisfait à toutes ces exigences pour que la suspension soit accordée : Janssen Inc. c. Abbvie Corporation, 2014 CAF 112, par. 14 (arrêt Janssen).

[7] GCT ne conteste pas le fait que l’APVF satisfait à l’exigence relative à la question sérieuse. Je le reconnais.

[8] En ce qui a trait au préjudice irréparable, l’APVF affirme que les efforts qu’elle a déployés pour que l’avis de demande soit rejeté deviendront inopérants si la suspension n’est pas accordée. Elle explique que, bien qu’elle ait agi avec diligence en poursuivant l’appel, et bien que le présent appel soit déjà prêt à être entendu (une demande d’audience a été déposée le 16 mai 2021), la Cour a fait savoir qu’aucune date ne serait fixée avant l’automne. L’APVF renvoie à l’arrêt Charkaoui c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CAF 319, par. 8 à 10 (arrêt Charkaoui), pour étayer l’argument selon lequel notre Cour a le pouvoir de suspendre des procédures devant un autre tribunal, rendant l’appel inutile, futile ou illusoire. De plus, l’APVF affirme que la bonne administration de son régime administratif subirait un préjudice si l’appel était rendu illusoire.

[9] GCT affirme que l’APVF ne satisfait pas à l’exigence de préjudice irréparable tel que décrite dans l’arrêt Janssen, par. 24 : « [...] le requérant doit établir de manière détaillée et concrète qu’il subira un préjudice réel, certain et inévitable — et non pas hypothétique et conjectural — qui ne pourra être redressé plus tard ». GCT affirme que l’arrêt Charkaoui cité par l’APVF reconnaît que la Cour a compétence pour rendre une ordonnance de suspension, mais n’appuie pas la conclusion de l’existence d’un préjudice irréparable. GCT affirme que l’APVF ne risque pas de subir de préjudice qui ne puisse pas être indemnisé par des dépens. GCT mentionne que l’APVF pourra alléguer que la demande est prématurée (comme elle cherche à le faire dans le présent appel) lors de son audience sur le fond devant la Cour fédérale.

[10] Je suis d’accord avec GCT à cet égard. De plus, une décision de la Cour fédérale invoquant la prématurité pourrait faire l’objet d’un appel en temps utile devant notre Cour. Dans ses observations en réponse, l’APVF affirme que, si la suspension n’est pas accordée, elle subira un préjudice irréparable du fait qu’elle devra débattre du bien-fondé de la question qu’elle affirme précisément être prématurée. Même si cela pourrait représenter un préjudice, je ne suis pas convaincu qu’il soit irréparable.

[11] Ayant conclu que l’APVF n’a pas établi qu’elle subira un préjudice irréparable si la suspension n’est pas accordée, il est inutile que j’aborde le troisième volet énoncé dans l’arrêt RJR-MacDonald : la prépondérance des inconvénients.

[12] Je conclus que le critère établi dans l’arrêt RJR-MacDonald n’est pas satisfait et que la suspension ne devrait pas être accordée.

[13] Je ne suis pas convaincu non plus qu’une suspension serait dans l’intérêt de la justice. Je reconnais que l’APVF a eu raison de croire que le présent appel pourrait être entendu avant la demande, du moins jusqu’à ce que l’échéancier relatif à la demande ait été établi le 25 juin 2021. Je reconnais aussi que l’APVF a fait preuve de diligence raisonnable en poursuivant l’appel. Toutefois, il semble que l’APVF ne se soit pas préoccupée avant le 15 juillet 2021 du fait que l’appel soit entendu avant la demande, même une fois que l’échéancier relatif à la demande a été établi. Le temps écoulé entre le 25 juin et le 15 juillet n’est pas long, mais il est d’une importance accrue en raison du peu de temps qu’il reste jusqu’à l’audition prévue de la demande. Bien que l’APVF indique s’être enquise auprès de la Cour, les 22 et 30 juin 2021, de la date d’audition de l’appel, rien n’indique qu’elle ait demandé une date pour l’instruction accélérée de l’appel à ce moment-là. L’APVF a plutôt demandé par voie de requête la suspension de la demande. Plusieurs semaines se sont écoulées et nous nous rapprochons de la date d’audition de la demande. Entendre et trancher l’appel avant d’entendre la demande s’avère maintenant beaucoup plus difficile.

[14] Quoi qu’il en soit, il semble que rien ne s’oppose à la demande de l’APVF de fixer l’audition de l’appel à la première date disponible. La Cour s’efforcera de répondre à cette demande.

« George R. Locke »

j.c.a.

Traduction certifiée conforme.

Mario Lagacé, jurilinguiste


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-297-20

 

INTITULÉ :

ADMINISTRATION PORTUAIRE DE VANCOUVER FRASER c. GCT CANADA LIMITED PARTNERSHIP ET LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LE JUGE LOCKE

 

DATE DES MOTIFS :

13 août 2021

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Joan M. Young

Komal Jatoi

 

Pour l’appelante

ADMINISTRATION PORTUAIRE DE VANCOUVER FRASER

 

Peter Griffin

Matthew B. Lerner

Christopher Yung

Margaret Robbins

 

POUR L’INTIMÉ

GCT CANADA LIMITED PARTNERSHIP

 

Sarah Bird

Jordan Marks

 

Pour l’intimé

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

McMillan S.E.N.C.R.L., s.r.l.

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Pour l’appelante

ADMINISTRATION PORTUAIRE DE VANCOUVER FRASER

 

Lenczner Slaght Royce Smith Griffin LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR L’INTIMÉ

GCT CANADA LIMITED PARTNERSHIP

 

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Pour l’intimé

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

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