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Date : 20201221


Dossier : A-363-19

Référence : 2020 CAF 222

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE WEBB

LE JUGE NEAR

LE JUGE LASKIN

 

ENTRE :

 

 

RALPH ABDEL DEYAB

 

 

appelant

 

 

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

intimée

 

Audience tenue par vidéoconférence organisée par le greffe, le 8 octobre 2020.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 21 décembre 2020.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE WEBB

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE NEAR

LE JUGE LASKIN

 


Date : 20201221


Dossier : A-363-19

Référence : 2020 CAF 222

CORAM :

LE JUGE WEBB

LE JUGE NEAR

LE JUGE LASKIN

 

ENTRE :

 

 

RALPH ABDEL DEYAB

 

 

appelant

 

 

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

intimée

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE WEBB

[1] M. Deyab a fait l’objet d’une nouvelle cotisation en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.), (la Loi) en 2015 dans laquelle des montants importants ont été ajoutés à son revenu en tant qu’avantages conférés à un actionnaire pour les années d’imposition 2007 à 2011. Des pénalités pour faute lourde ont été incluses dans les nouvelles cotisations. À l’exception de certains montants dont ont convenu les parties, l’appel de M. Deyab concernant l’établissement de ces nouvelles cotisations à son égard a été rejeté par la Cour canadienne de l’impôt (dossier de la Cour canadienne de l’impôt : 2016-410(IT)G).

[2] Pour les raisons qui suivent, j’accueillerais l’appel de M. Deyab concernant l’imposition de pénalités pour faute lourde et je rejetterais son appel concernant les montants inclus dans son revenu.

I. Résumé des faits

[3] M. Deyab est un ingénieur industriel. Pendant plusieurs années, il a travaillé pour Maple Leaf Meats et les sociétés qui l’ont précédée. Il est finalement devenu le directeur de l’ingénierie de cette société. En 2000, il a quitté son emploi chez Maple Leaf Meats et a reçu une indemnité de départ de 1 000 719 $.

[4] Avant de quitter Maple Leaf Meats, M. Deyab et son épouse ont constitué une société à numéro dans le but de mener certaines activités de conseil en ingénierie. Après son départ de Maple Leaf Meats, M. Deyab, par l’intermédiaire de la société à numéro, a fourni des services de conseil en ingénierie à Furlani’s Food Corporation et à Whyte’s Food Corporation Inc. à compter de 2001.

[5] Le 1er décembre 2005, M. Deyab a créé la société M.D. Consulting 2005 Inc. (M.D. Consulting), qui est la société concernée par le présent appel. Cette société a continué à exercer des activités de conseil pour Furlani’s Food Corporation et d’autres clients. M. Deyab a déclaré que sa valeur nette en 2000 était d’environ trois à quatre millions de dollars. Une lettre de BMO Harris Private Banking, datée du 21 novembre 2014, a confirmé que la société à numéro, au 20 septembre 2005, avait un solde sur son compte de 4 222 542 $. M. Deyab a témoigné que, lorsqu’il a commencé à exploiter M.D. Consulting, il a tout transféré de la société à numéro à cette société.

[6] Au cours des années 2007 à 2011, diverses sommes ont été retirées du compte de M.D. Consulting et transférées au compte personnel de M. Deyab ou aux comptes des membres de sa famille immédiate, et M.D. Consulting a payé certaines dépenses personnelles. M. Deyab a fait l’objet d’une nouvelle cotisation afin d’inclure les montants suivants dans son revenu :

Année d’imposition

Montants inclus dans son revenu

2007

103 837 $

2008

232 212 $

2009

212 867 $

2010

2 199 746 $

2011

115 547 $

[7] M. Deyab a fait l’objet d’une nouvelle cotisation au motif que les diverses sommes retirées constituaient des avantages qui lui avaient été conférés en tant qu’actionnaire de M.D. Consulting et ont donc été incluses dans son revenu en vertu du paragraphe 15(1) de la Loi.

[8] Pour les années 2007 à 2010, les avis de nouvelle cotisation ont été établis après l’expiration de la période normale de nouvelle cotisation. De plus, pour chaque année d’imposition, des pénalités pour faute lourde ont été imposées en application du paragraphe 163(2) de la Loi.

[9] Lors de l’audience devant la Cour canadienne de l’impôt, les parties ont convenu que certains rajustements devaient être apportés aux montants inclus dans les nouvelles cotisations. Le tableau suivant présente les montants inclus dans les nouvelles cotisations établies, les rajustements convenus et les montants révisés qui ont été pris en compte dans les nouvelles cotisations révisées pour refléter ces montants convenus :

Année d’imposition

Montant ayant fait l’objet d’une nouvelle cotisation

Rajustement

Montant révisé

2007

103 837 $

(82 501 $)

21 336 $

2008

232 212 $

(113 200 $)

119 012 $

2009

212 867 $

(115 858 $)

97 009 $

2010

2 199 746 $

(167 035 $)

2 032 711 $

2011

115 547 $

(11 308 $)

104 239 $

Total :

[EN BLANC]

[EN BLANC]

2 374 307 $

[10] De plus, M. Deyab a concédé qu’il ne contestait plus l’inclusion de 24 528 $ dans son revenu pour 2011 relativement aux dépenses personnelles qui avaient été payées par M.D. Consulting. Par conséquent, les montants suivants qui ont été inclus dans le revenu de M. Deyab sont demeurés litigieux devant la Cour canadienne de l’impôt et notre Cour :

Année d’imposition

Montant litigieux

2007

21 336 $

2008

119 012 $

2009

97 009 $

2010

2 032 711 $

2011

79 711 $

Total :

2 349 779 $

[11] Tous les montants encore en litige sont des sommes qui ont été transférées du compte de M.D. Consulting aux comptes personnels de M. Deyab et des membres de sa famille proche.

II. Décision de la Cour canadienne de l’impôt

[12] M. Deyab ne conteste pas que lui et sa famille ont reçu les sommes indiquées ci-dessus de M.D. Consulting. Toutefois, il était d’avis qu’il ne faisait que retirer l’argent qu’il avait précédemment transféré à M.D. Consulting.

[13] Aux pages 19 et 20 de la transcription de ses motifs oraux, le juge de la Cour canadienne de l’impôt note ceci :

[traduction]

[...] Il est clair, et admis par M. Deyab, qu’il a reçu de M. D. Consulting 2005 Inc. les sommes encore en litige dans le présent appel, qui s’élèvent à 2 349 779 $. Il est également clair, et admis par l’intimée, que M. Deyab, de même que sa famille, a transféré des sommes importantes à M. D. Consulting 2005 Inc. avant ou pendant les années en cause dans le présent appel. Toutefois, à mon avis, M. Deyab n’a pas établi, selon la prépondérance des probabilités, que les sommes qu’il a reçues étaient un remboursement de prêts par un actionnaire. Il n’y a pas, à mon avis, d’éléments de preuve crédibles suffisants pour étayer cette affirmation.

Compte tenu de tout ce qui précède, je suis d’avis que M. Deyab a reçu les avantages conférés à un actionnaire qui demeurent en litige dans les présents appels, pour un montant total de 2 349 779 $, de M.D. Consulting 2005 Inc. au cours des années faisant l’objet de l’appel, et qu’il n’a pas déclaré ce montant dans son revenu au cours de ces années.

Ayant conclu que M. Deyab a reçu des sommes totalisant 2 349 779 $ au titre des avantages conférés à un actionnaire qu’il a reçus de M.D. Consulting 2005 Inc. et qu’il était tenu d’inclure ce montant dans son revenu au cours des années d’imposition visées par les appels, j’aborderai ensuite en l’espèce la question des pénalités pour faute lourde prévues au paragraphe 163(2) et la nouvelle cotisation établie à l’égard des années frappées de prescription en vertu du paragraphe 152(4).

[14] Les « années frappées de prescription » sont celles qui ont fait l’objet d’une nouvelle cotisation après l’expiration de la période normale de nouvelle cotisation pour ces années.

[15] Les éléments de preuve présentés au juge de la Cour canadienne de l’impôt comprenaient un rapprochement du compte de prêts des actionnaires de M.D. Consulting. Ce rapprochement aurait été préparé après que M. Deyab a fait l’objet d’une nouvelle cotisation. Cependant, comme l’a noté le juge de la Cour canadienne de l’impôt, ce rapprochement ne reflétait pas les retraits importants de plus de deux millions de dollars qui sont en cause dans les présents appels. M. Deyab ne conteste pas que ce rapprochement ne reflète pas ces montants.

[16] Pour déterminer si le ministre du Revenu national (ministre) pouvait établir une nouvelle cotisation pour les années frappées de prescription et également imposer des pénalités pour faute lourde, le juge de la Cour canadienne de l’impôt s’est principalement appuyé sur la décision de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Lacroix c. Canada, 2008 CAF 241 :

[traduction]

À mon avis, le critère établi par la Cour d’appel fédérale au paragraphe 32 de l’arrêt Lacroix s’applique en l’espèce. À cet égard, le ministre a clairement établi, et l’appelant a admis, que M. Deyab a reçu 2 349 779 $ de M. D. Consulting 2005 Inc. qu’il n’a pas déclaré dans son revenu au cours des années d’imposition visées par l’appel. À mon avis, comme il a été dit précédemment, M. Deyab n’a pas fourni d’explication crédible de l’écart entre son revenu déclaré et les sommes importantes qu’il a admis avoir reçues de M. D. Consulting 2005 Inc. Par conséquent, je suis d’avis que le ministre s’est acquitté du fardeau de la preuve aux termes des paragraphes 152(4) et 163(2) de la Loi.

[page 29 de la transcription des motifs oraux du juge de la Cour canadienne de l’impôt]

III. Questions en litige et norme de contrôle

[17] M. Deyab a soulevé trois questions dans son mémoire des faits et du droit. M. Deyab a allégué que le juge de la Cour canadienne de l’impôt avait commis des erreurs, notamment :

  • a) en faisant passer le fardeau de la preuve du ministre vers M. Deyab en ce qui concerne l’établissement de la nouvelle cotisation à l’égard des années frappées de prescription et l’imposition de pénalités pour faute lourde;

  • b) en s’appuyant sur les conclusions défavorables qu’il a tirées à l’encontre de M. Deyab avant que le ministre n’ait établi une preuve à première vue;

  • c) en appliquant mal les éléments de preuve au critère juridique établi dans l’arrêt Lacroix.

[18] Dans la mesure où le présent appel soulève quelque question de droit, la norme de contrôle qui s’applique est celle de la décision correcte. Dans la mesure où le présent appel soulève quelque question de fait ou question de droit et de fait (pour laquelle il n’existe aucune question de droit isolable), la norme de contrôle qui s’applique est celle de l’erreur manifeste et dominante (Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33).

IV. Discussion

[19] Lors de l’audition du présent appel, M. Deyab a fait valoir que le point critique de son appel est le fait que le juge de la Cour canadienne de l’impôt n’a pas tenu compte de tous les éléments de preuve qui lui ont été présentés. Ce point particulier sera examiné relativement aux trois questions soulevées par M. Deyab dans son mémoire des faits et du droit.

[20] Les deux premières questions seront traitées en ce qui concerne les nouvelles cotisations établies à l’égard des années frappées de prescription, et la troisième question sera traitée en ce qui a trait à l’imposition des pénalités pour faute lourde.

A. Fardeau de la preuve

[21] L’argument de M. Deyab, selon lequel le juge de la Cour canadienne de l’impôt a déplacé de façon contre-indiquée le fardeau de la preuve vers M. Deyab en ce qui concerne les nouvelles cotisations établies à l’égard des années frappées de prescription, découle de l’ordre dans lequel le juge de la Cour canadienne de l’impôt a examiné les questions qui lui avaient été soumises. À la page 4 de la transcription de ses motifs oraux, le juge de la Cour canadienne de l’impôt affirme ceci :

[traduction]

Les trois questions qui ont été soulevées dans le présent appel sont les suivantes :

a) L’appelant a-t-il omis de déclarer, dans son revenu, les montants des avantages conférés à un actionnaire mentionnés ci-dessous que le ministre allègue que l’appelant a reçus de M.D. Consulting 2005 Inc. au cours de ses années d’imposition 2007 à 2011?

b) L’appelant est-il tenu de payer des pénalités pour faute lourde à l’égard de ces revenus non déclarés aux termes du paragraphe 163(2) de la Loi?

c) Le ministre pouvait-il établir une nouvelle cotisation à l’égard des années d’imposition 2007, 2008, 2009 et 2010 de l’appelant au-delà de la période normale de nouvelle cotisation en application du paragraphe 152(4) de la Loi?

[22] Dans ses motifs, le juge de la Cour canadienne de l’impôt a examiné la première question avant d’aborder collectivement les deux autres questions. Plus précisément, il a noté ceci à la page 7 de la transcription de ses motifs oraux : [TRADUCTION] « Je vais d’abord aborder la question de savoir si M. Deyab a reçu des avantages conférés à un actionnaire de la part de M.D. Consulting 2005 Inc. qu’il a omis de déclarer au cours des années d’imposition faisant l’objet de l’appel ».

[23] Dans le présent appel, il n’y a pas d’allégation de fraude. Par conséquent, afin d’établir une nouvelle cotisation à l’égard des années prescrites (2007 à 2010), le ministre doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, que M. Deyab :

a) a fait une présentation erronée des faits;

b) qu’une telle présentation erronée est imputable à la négligence, à l’inattention ou à une omission volontaire.

[Succession de Stanley Vine c. Canada, 2015 CAF 125, par. 24]

[24] Dans le présent appel, cependant, ce ne sont pas toutes les années d’imposition dont la Cour canadienne de l’impôt était saisie qui étaient frappées de prescription. Plus précisément, la nouvelle cotisation pour 2011 a été établie durant la période normale de nouvelle cotisation. Par conséquent, le ministre n’aurait pas eu le fardeau de démontrer que le contribuable a fait une présentation erronée des faits qui aurait permis d’établir une nouvelle cotisation à l’égard de l’année d’imposition 2011.

[25] En dressant la liste des questions en litige, le juge de la Cour canadienne de l’impôt aurait dû reconnaître que, pour quatre des cinq années d’imposition qui lui étaient soumises, le ministre avait la charge de prouver que le contribuable avait fait une présentation erronée des faits et que cette présentation erronée était attribuable à la négligence, à une inattention ou à une omission volontaire (vu l’absence d’allégation de fraude en l’espèce). Toutefois, à mon avis, cela n’a pas eu d’incidence sur l’issue de l’affaire en ce qui concerne la question de savoir si les années frappées de prescription auraient pu faire l’objet d’une nouvelle cotisation.

[26] Il ressort clairement des éléments de preuve présentés lors de l’audition qu’il n’est pas contesté que M. Deyab a retiré les sommes en question du compte de M.D. Consulting au cours des années d’imposition en cause. Il n’est pas non plus contesté qu’aucun grand livre comptable des prêts des actionnaires reflétant avec exactitude les sommes retirées n’a été présenté à la vérificatrice de l’Agence du revenu du Canada (Agence) ou à la Cour canadienne de l’impôt.

[27] Le paragraphe 15(1) de la Loi prévoit la règle générale selon laquelle le montant ou la valeur de tout avantage conféré par une société à un actionnaire de cette société doit être inclus dans le revenu de cet actionnaire. Si une société rembourse une somme payable à cet actionnaire et inscrit le paiement à ce titre, alors aucun avantage ne sera conféré et, par conséquent, le fait de ne pas inclure ces fonds dans le revenu de l’actionnaire n’équivaudrait pas à une présentation erronée des faits.

[28] Les états financiers de M.D. Consulting incluaient, dans le passif de cette société, des sommes [traduction] « dues aux actionnaires ». Cependant, bien que la vérificatrice de l’Agence ait demandé les renseignements sur les comptes de prêts des actionnaires de M.D. Consulting lors de son audit, aucun renseignement du genre n’a été fourni à l’Agence. Lors de son contre-interrogatoire, M. Deyab a confirmé que M.D. Consulting ne tenait pas de compte de prêts des actionnaires dans ses livres et registres. Étant donné que M.D. Consulting n’a pas tenu de compte des prêts des actionnaires au cours des années d’imposition en cause, cela soulève la question de savoir comment les sommes dues aux actionnaires ont été déterminées. Il n’y a rien dans le dossier qui traite de la manière dont M.D. Consulting a déterminé les sommes [traduction] « dues aux actionnaires » qui ont été déclarées dans ses états financiers.

[29] M. Deyab a fait préparer un rapprochement du compte de prêts des actionnaires aux fins de son opposition et de son appel. Toutefois, ce rapprochement ne reflète pas les fonds qui ont été retirés du compte de M.D. Consulting et qui sont en cause dans le présent appel.

[30] En l’espèce, il est également difficile de déterminer la source des sommes transférées à M. Deyab et à sa famille au cours des années en cause. Le résumé préparé par la vérificatrice de l’Agence en est la meilleure illustration. Le plus important transfert en litige a eu lieu pendant l’année d’imposition 2010. Environ deux millions de dollars ont été transférés à M. Deyab et à sa famille à partir d’un compte particulier que détenait M.D. Consulting auprès de BMO Harris Private Banking. Dans le résumé qu’elle a préparé, la vérificatrice de l’Agence a également indiqué qu’une contribution de trois millions de dollars avait été versée à ce compte particulier le 30 juin 2010 (soit avant les transferts à M. Deyab et à sa famille qui sont en litige pour 2010).

[31] La documentation relative à la source des trois millions de dollars qui ont été transférés au compte de M.D. Consulting (et qui semble avoir été utilisée pour financer les transferts d’environ deux millions de dollars à M. Deyab et sa famille en 2010) ne conduit pas à M. Deyab. La documentation ne révèle tout simplement pas la source de ces fonds.

[32] Cet argent provient, selon la vérificatrice de l’Agence, d’un compte bancaire particulier. Ce compte bancaire était un compte de la société à numéro mentionnée ci-dessus. Le seul relevé bancaire pour ce compte particulier qui figure dans le dossier est celui relatif à la période se terminant le 30 avril 2007. Le solde de clôture de ce compte au 30 avril 2007 était inférieur à 2 000 $.

[33] De plus, selon le relevé de BMO Harris Private Banking pour le compte de M.D. Consulting à partir duquel les transferts en question dans le présent appel ont été effectués à M. Deyab et à sa famille en 2010, trois millions de dollars ont été transférés à ce compte le 27 avril 2010 (environ deux mois plus tôt que la date notée par la vérificatrice de l’Agence). La source de ces trois millions de dollars a été désignée dans ce relevé bancaire comme étant un compte différent de celui défini par la vérificatrice de l’Agence. Le seul relevé bancaire pour le compte désigné dans le relevé de BMO Harris Private Banking comme étant la source des trois millions de dollars est le relevé relatif à la période se terminant le 30 mars 2007. Ce compte est également désigné comme étant un compte de M.D. Consulting. Selon ce relevé, il y avait moins de 70 000 $ dans ce compte au 30 mars 2007. Ni la documentation cernée par la vérificatrice de l’Agence ni le relevé de BMO Harris Private Banking ne révèle la source des trois millions de dollars transférés au compte de M.D. Consulting.

[34] Les autres documents présentés par M. Deyab à l’appui de ses contributions personnelles à M.D. Consulting ne sont pas non plus d’un grand secours. Les principaux documents sur lesquels M. Deyab s’est appuyé sont des lettres de BMO Harris Private Banking. Ces lettres indiquent qu’il y avait plus de quatre millions de dollars dans le compte de la société à numéro en date du 20 septembre 2005, et qu’il y avait plus de 1,5 million de dollars dans le compte personnel de la famille de M. Deyab en date du 21 novembre 2014. Les instantanés des montants figurant dans ces comptes pour des dates précises ne permettent pas de déterminer à quel moment ces fonds ont été transférés à M.D. Consulting, le cas échéant. À cette fin, M. Deyab a également inclus une lettre de BMO Harris Private Banking, datée du 30 novembre 2010, qui confirme que les fonds suivants ont été transférés du compte de M. Deyab et de sa famille à M.D. Consulting :

  • au cours de l’exercice financier se terminant le 31 mars 2007 : 1 150 662 $

  • au cours de l’exercice financier se terminant le 31 mars 2008 : 580 786 $

  • au cours de l’exercice financier se terminant le 31 mars 2009 : 60 000 $

[35] Il semblerait, d’après le rapprochement du compte de prêt des actionnaires (qui n’incluait pas les fonds retirés par M. Deyab qui sont en cause dans le présent appel), que des montants totalisant environ 4,5 millions de dollars ont été inclus en tant que débits sur le compte de prêts des actionnaires au cours des années en question. Le montant total transféré à M.D. Consulting, tel qu’il est indiqué dans cette lettre, (1 791 448 $ = 1 150 662 $ + 580 786 $ + 60 000 $) est inférieur au montant débité du compte de prêt des actionnaires. Par conséquent, ces fonds transférés ne pourraient pas couvrir les montants débités du compte de prêts des actionnaires, sans même prendre en compte les fonds qui ont été retirés par M. Deyab et qui sont en cause dans le présent appel.

[36] Dans une autre lettre datée du 4 septembre 2014, BMO Harris Private Banking a confirmé que la somme totale de 3 154 531 $ [traduction] « a été transférée de comptes d’investissement personnels au nom de Ralph, Mona, Waleed, Tamer et Hany Deyab vers divers comptes personnels aux mêmes noms et vers des comptes d’entreprise au nom de M.D. Consulting 2005 Inc. Ces transferts ont eu lieu entre le 1er janvier 2007 et le 31 mars 2011 ».

[37] Cette lettre ne contient malheureusement pas de détails concernant la date à laquelle ces fonds ont été transférés et à qui ils étaient destinés. Comme la lettre indique que les fonds ont été transférés à d’autres comptes au nom des personnes mentionnées ci-dessus et aux comptes d’entreprise de M.D. Consulting, il n’est pas possible de déterminer quelle portion des quelque trois millions de dollars a été transférée à M.D. Consulting.

[38] Lors de l’audition du présent appel, M. Deyab a souligné qu’il n’était pas contesté qu’il avait transféré des sommes importantes à M.D. Consulting. Il a fait valoir qu’il s’agissait là d’un élément de preuve qui n’a pas été pris en compte par le juge de la Cour canadienne de l’impôt. Toutefois, les détails concernant les sommes exactes transférées et le moment des transferts sont absents. La Loi exige l’existence d’un somme précise pour calculer le revenu d’un contribuable, et non une description générale et vague de montants incertains. Le simple fait d’affirmer qu’il a transféré des sommes importantes non précisées à M.D. Consulting ne suffit pas à étayer la conclusion selon laquelle M. Deyab remboursait des sommes qui lui étaient payables lorsqu’il les a retirées.

[39] Il est également clair que M. Deyab ne tenait pas un compte de prêts des actionnaires pour M.D. Consulting qui incluait précisément les montants en question, et que même le rapprochement qui a été effectué aux fins de son opposition et de son appel n’incluait pas les transferts importants de sommes d’argent de M.D. Consulting à M. Deyab et à sa famille qui font l’objet du présent appel.

[40] Par conséquent, alors que le juge de la Cour canadienne de l’impôt aurait dû d’abord reconnaître qu’il incombait au ministre d’établir les faits qui justifieraient les nouvelles cotisations établies pour les années frappées de prescription, il y avait suffisamment d’éléments de preuve devant le juge de la Cour canadienne de l’impôt pour qu’il puisse conclure que le ministre s’était acquitté de ce fardeau. M. Deyab avait fait une présentation erronée des faits dans ses déclarations de revenus de 2007 à 2010 en ne déclarant pas les fonds qui lui ont été transférés, à lui et à sa famille, par M.D. Consulting, qui, compte tenu des éléments de preuve présentés, n’étaient pas, selon la prépondérance des probabilités, des remboursements de sommes d’argent qui lui étaient dues. Cette présentation erronée des faits était attribuable à la négligence ou à l’inattention de M. Deyab, qui n’a pas tenu correctement un compte de prêts des actionnaires qui aurait peut-être pu justifier le versement des sommes d’argent qui lui étaient dues en guise de remboursement de son prêt d’actionnaire.

[41] La tenue en bonne et due forme d’un compte de prêts d’actionnaire permettrait d’assurer une comptabilité précise de toutes les sommes prêtées par un actionnaire à la société et remboursées par celle-ci. Cela garantirait que les sommes d’argent qui sont correctement remboursées à un actionnaire en tant que sommes payables à cet actionnaire ne sont pas incluses dans le revenu de cet actionnaire en tant qu’avantage imposable. En l’espèce, le fait de ne pas avoir tenu un compte en bonne et due forme a entraîné pour M. Deyab une obligation fiscale considérable qui aurait peut-être pu être évitée.

[42] Par conséquent, M. Deyab ne peut pas obtenir gain de cause sur ce motif d’appel en ce qui concerne les nouvelles cotisations établies pour les années frappées de prescription.

B. Conclusion défavorable

[43] En décrivant les conclusions défavorables tirées par le juge de la Cour canadienne de l’impôt, M. Deyab déclare ce qui suit, au paragraphe 5 de son mémoire :

[traduction]

[...] Le juge a conclu que les sommes d’argent qu’il a reçues de MD étaient imposables. Ce faisant, le juge a tiré des conclusions défavorables à l’encontre de M. Deyab pour n’avoir pas fourni à la Cour un compte de prêts des actionnaires correctement rapproché et pour n’avoir convoqué aucun de ses fiscalistes à l’audience.

[44] En ce qui concerne le rapprochement qui a été préparé, le juge de la Cour canadienne de l’impôt a noté, à la page 15 de la transcription de ses motifs oraux :

[traduction]

Bien qu’il vise à fournir un rapprochement détaillé du compte de prêts des actionnaires de la société, je note qu’il ne reflète pas de manière critique les retraits importants de plus de deux millions de dollars qui sont en cause dans les présents appels. Par conséquent, je suis d’avis que ce document n’est pas fiable, et j’y ai accordé peu de poids. Comme nous le verrons plus loin, je pense qu’en outre ce document compromet gravement la crédibilité du témoignage de M. Deyab et de ses affirmations.

[45] Le juge de la Cour canadienne de l’impôt a ensuite noté que les différents relevés bancaires auraient été mis à la disposition de M. Deyab et de ses comptables, mais que M. Deyab n’a pas appelé son comptable ou son aide-comptable à témoigner. Le juge de la Cour canadienne de l’impôt a également noté que, pendant la période suivant la délivrance des lettres de l’Agence à M. Deyab proposant des rajustements de son revenu jusqu’au moment de l’audition de l’appel devant la Cour canadienne de l’impôt (près de quatre ans et demi plus tard), M. Deyab n’a pas fourni un compte exact du grand livre des actionnaires pour M.D. Consulting. En ce qui concerne la conclusion défavorable, le juge a déclaré, à la page 16 de la transcription de ses motifs oraux, ce qui suit :

[traduction]

J’ai tiré une conclusion défavorable de l’absence d’éléments de preuve disponibles qui auraient pu soutenir le témoignage et les affirmations de M. Deyab. L’absence, plus précisément, d’un rapprochement crédible des comptes d’actionnaires, par rapport à la disponibilité de documents financiers importants, mine, à mon avis, gravement, la crédibilité du témoignage et des affirmations de M. Deyab.

[46] Dans l’ouvrage intitulé Sopinka, Lederman & Bryant : The Law of Evidence in Canada, 5e édition (LexisNexis Canada Inc., 2018), aux paragraphes 6.471 et 6.472, Sidney N. Lederman, Alan W. Bryant et Michelle K. Fuerst, auteurs, exposent les situations dans lesquelles une conclusion défavorable peut être tirée :

[traduction]

§6.471 Dans les instances civiles, une inférence défavorable peut être tirée lorsque la partie au litige omet, sans explication, de témoigner, de produire des témoignages par affidavit à l’appui d’une demande ou de convoquer un témoin qui aurait une connaissance des faits et qui serait disposé à aider cette partie. Dans le même ordre d’idées, une inférence défavorable peut être tirée à l’égard d’une partie qui n’appelle pas de témoin-clé à témoigner dont elle a le contrôle exclusif, sans fournir d’explication pour cette omission. Une telle inférence ne peut toutefois être tirée que dans les cas où les éléments de preuve du témoin qui n’a pas été convoqué auraient été supérieurs à d’autres éléments de preuve semblables. Le défaut de convoquer un témoin-clé équivaut à admettre implicitement que les éléments de preuve du témoin absent mineraient la cause de la partie, ou tout au moins, qu’ils ne l’appuieraient pas.

§6.472 Une inférence défavorable devrait être tirée seulement après l’établissement d’une preuve à première vue par la partie sur laquelle repose le fardeau de la preuve.

[47] La seule objection formulée dans le mémoire de M. Deyab à l’égard de la conclusion défavorable tirée par le juge de la Cour canadienne de l’impôt est le présumé manquement du ministre à établir d’abord la preuve à première vue que M. Deyab avait fait une présentation erronée des faits qui était attribuable à la négligence ou à l’inattention. En l’espèce, des sommes importantes ont été transférées de M.D. Consulting à M. Deyab et à sa famille, qui n’ont pas été incluses dans ses revenus et n’ont pas été reflétées dans le compte de prêts des actionnaires. Le ministre avait donc établi une preuve à première vue que M. Deyab avait fait une présentation erronée des faits en n’incluant pas ces fonds dans ses revenus pour les années en question.

[48] Par conséquent, il n’y a aucune raison de s’opposer à ce qu’une conclusion défavorable soit tirée à l’encontre de M. Deyab pour ne pas avoir appelé son comptable ou son aide-comptable à témoigner, ou pour ne pas avoir présenté un rapprochement en bonne et due forme du compte de prêts des actionnaires.

C. L’application de l’arrêt Lacroix

[49] Je suis d’accord avec M. Deyab pour dire que le juge de la Cour canadienne de l’impôt a commis une erreur en appliquant le jugement rendu par la Cour dans l’arrêt Lacroix aux faits de la présente cause. Il est évident, à la lecture des motifs du juge de la Cour canadienne de l’impôt, qu’il a effectivement abordé les questions de savoir si le ministre pouvait établir une nouvelle cotisation pour les années frappées de prescription et si les pénalités pour faute lourde pouvaient être imposées collectivement. Il a conclu, comme il est indiqué dans l’extrait des motifs oraux cité au paragraphe 16 ci-dessus, que [traduction] « le ministre s’est acquitté du fardeau de la preuve qui lui incombe aux termes des paragraphes 152(4) et 163(2) de la Loi ».

1) Les jugements rendus par notre Cour et la Cour canadienne de l’impôt dans le dossier Lacroix.

[50] L’explication selon laquelle les faits d’une affaire donnée peuvent justifier à la fois l’établissement d’une nouvelle cotisation pour les années frappées de prescription et l’imposition de pénalités pour faute lourde se fonde sur les commentaires de notre Cour au paragraphe 32 de l’arrêt Lacroix :

[32] Qu’en est-il alors du fardeau du ministre? Comment s’en acquitte-t-il? Il se peut que dans certaines circonstances, le ministre soit en mesure de faire une preuve directe de l’état d’esprit du contribuable lorsque ce dernier a produit sa déclaration de revenu. Mais dans la grande majorité des cas, le ministre ne pourra que miner la crédibilité du contribuable, soit par des éléments de preuve qu’il apporte, soit en contre-interrogatoire du contribuable. Dans la mesure où la Cour canadienne de l’impôt est persuadée que le contribuable touche un revenu qu’il n’a pas déclaré et que l’explication offerte par le contribuable pour l’écart constaté entre son revenu déclaré et l’accroissement de son actif est non crédible, le ministre s’est acquitté du fardeau de preuve qui lui incombe aux termes du sous-alinéa 152(4)a)(i) et du paragraphe 162(3) [sic].

[51] Dans l’arrêt Lacroix, la Cour a simplement confirmé que, dans les circonstances de l’affaire, qui portait sur une nouvelle cotisation fondée sur une analyse de la valeur nette, les mêmes faits peuvent soutenir à la fois la conclusion que les années frappées de prescription peuvent faire l’objet d’une nouvelle cotisation et que des pénalités pour faute lourde peuvent être imposées. La Cour n’a pas affirmé que ce serait toujours le cas. Les faits de chaque cas en particulier doivent être examinés afin de déterminer si les exigences législatives distinctes pour l’établissement d’une nouvelle cotisation à l’égard des années frappées de prescription et l’imposition de pénalités pour faute lourde sont satisfaites.

[52] Dans l’arrêt Lacroix, notre Cour a également noté ce qui suit :

[30] Les faits en preuve, dans un tel cas, sont que la déclaration de revenu du contribuable fait une présentation erronée des faits et que la seule explication offerte par le contribuable est jugée non crédible. Évidemment, il doit y avoir une autre explication pour ce revenu. Il faut donc conclure que le contribuable a une source de revenu qu’il n’a pas déclarée, qu’il est au courant de cette source et qu’il refuse de la divulguer puisque les explications qu’il a offertes n’ont pas été jugées crédibles. En de telles circonstances, la conclusion que la fausse déclaration de revenu a été produite sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde me semble inéluctable. Cela justifie non seulement l’imposition d’une pénalité mais aussi l’établissement de la nouvelle cotisation hors de la période statutaire.

[Non souligné dans l’original.]

[53] Le contribuable Lacroix faisait valoir qu’il avait reçu un prêt de 500 000 $ d’une autre personne et que l’analyse de la valeur nette n’était donc pas exacte. En rejetant cet argument, le juge de la Cour canadienne de l’impôt dans la décision Lacroix (2007 CCI 376) a noté ceci :

[20] Mon examen de la preuve m’amène à conclure qu’il est plus probable qu’improbable que ces prêts n’ont jamais existé et que le billet (pièce A‑4), la demande de remboursement (pièce A‑8) et les chèques tirés à l’ordre de monsieur Pronovost ne sont que des trompe-l’œil visant à masquer la vérité. Il est ainsi difficile d’en arriver à une conclusion autre que celle que l’appelant a délibérément omis de déclarer des revenus de l’ordre de 516 000 $. À mon avis, le ministre s’est acquitté dans les présentes de son fardeau de la preuve et ainsi était en droit d’imposer les pénalités prévues au paragraphe 163(2) de la Loi sur les revenus non déclarés par l’appelant. Puisque le fardeau de la preuve imposé au ministre en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi est moindre que celui qui lui est imposé en vertu du paragraphe 152(4), je suis aussi d’avis que le ministre était en droit d’établir de nouvelles cotisations.

[54] Le renvoi au fait que le fardeau de la preuve imposé au ministre « en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi est moindre que celui qui lui est imposé en vertu du paragraphe 152(4) » semblerait être une erreur typographique. Le fardeau de la preuve imposé au ministre en ce qui concerne tant l’imposition de pénalités pour faute lourde que l’établissement d’une nouvelle cotisation pour les années frappées de prescription consiste à établir, selon la prépondérance des probabilités, les faits pertinents en fonction des exigences prévues par la loi pour chaque disposition. La logique de la phrase (c’est-à-dire qu’il n’est pas nécessaire d’en dire plus pour justifier l’établissement d’une nouvelle cotisation pour les années frappées de prescription) confirme que le juge de la Cour canadienne de l’impôt a compris qu’une fois qu’il a conclu que les documents étaient un trompe-l’œil et que le contribuable, dans ce cas, « a délibérément omis de déclarer des revenus de l’ordre de 516 000 $ », cette conclusion justifierait également l’établissement d’une nouvelle cotisation pour l’année frappée de prescription au motif qu’il y avait eu une présentation erronée de son revenu qui était attribuable à une omission volontaire.

[55] Dans la décision Lacroix, la Cour canadienne de l’impôt a conclu que les documents censés justifier un prêt étaient un trompe-l’œil et que M. Lacroix « a[vait] délibérément omis de déclarer des revenus de l’ordre de 516 000 $ ». Dans le cas de M. Deyab, il y avait des éléments de preuve établissant que des sommes importantes avaient été transférées à M.D. Consulting et rien n’indique que des documents étaient un trompe-l’œil.

2) Pénalités pour faute lourde et établissement d’une nouvelle cotisation pour une année frappée de prescription

[56] Le paragraphe 163(3) de la Loi dispose que, pour toute pénalité imposée en application du paragraphe 163(2), « le ministre a la charge d’établir les faits qui justifient l’imposition de la pénalité ». En ce qui concerne la manière dont le ministre peut s’acquitter de son fardeau de preuve, il peut introduire des éléments de preuve en contre-interrogeant le contribuable ou en appelant le contribuable à témoigner (article 146 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale), DORS/90-688a). Le ministre pourrait également appeler d’autres témoins, même si, en règle générale, la personne qui connaît le mieux les affaires du contribuable est le contribuable lui-même. En l’espèce, M. Deyab a témoigné, et le ministre a eu l’occasion de le contre-interroger.

[57] Il est important de reconnaître que les exigences prévues par la loi pour établir une nouvelle cotisation pour une année frappée de prescription ne sont pas les mêmes que les exigences prévues par la loi pour établir des pénalités pour faute lourde. Bien qu’il puisse y avoir des cas où les mêmes faits pourraient justifier à la fois l’établissement d’une nouvelle cotisation pour une année frappée de prescription et l’imposition de pénalités pour faute lourde, ce ne sera pas nécessairement toujours le cas.

[58] Le droit d’établir une nouvelle cotisation pour une année frappée de prescription est défini à l’alinéa 152(4)a) de la Loi. À moins qu’une renonciation n’ait été présentée par le contribuable dans le délai prescrit, le ministre ne peut établir une nouvelle cotisation à l’égard d’un contribuable pour une année frappée de prescription que si « le contribuable ou la personne produisant la déclaration : (i) [...] a fait une présentation erronée des faits, par négligence, inattention ou omission volontaire, ou a commis quelque fraude en produisant la déclaration ou en fournissant quelque renseignement sous le régime de la présente loi [...] ».

[59] Les conditions requises pour établir une nouvelle cotisation pour une année frappée de prescription sont remplies si la présentation erronée des faits est imputable à la négligence ou à l’inattention, sans qu’il soit nécessaire d’examiner la question de savoir si la présentation erronée des faits est imputable à une omission volontaire ou si le contribuable a commis une fraude (ce qui, en soi, pourrait également justifier l’établissement d’une nouvelle cotisation pour une année frappée de prescription).

[60] En revanche, des pénalités ne peuvent être imposées en application du paragraphe 163(2) que si le comportement du contribuable constitue une faute lourde : « Toute personne qui, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration, un formulaire, un certificat, un état ou une réponse (appelé « déclaration » au présent article) rempli, produit ou présenté, selon le cas, pour une année d’imposition pour l’application de la présente loi, ou y participe, y consent ou y acquiesce [...] » est passible de la pénalité prévue dans ce paragraphe.

[61] La négligence ou l’inattention ne doit pas être confondue avec la faute lourde.

[62] Dans l’arrêt Guindon c. Canada, 2015 CSC 41, la Cour suprême du Canada s’est penchée sur la question de savoir si une conduite donnée constituait une conduite coupable aux fins de la pénalité imposée aux préparateurs de déclarations en application de l’article 163.2 de la Loi. En abordant cette question, la Cour suprême a approuvé les descriptions suivantes de la faute lourde aux fins du paragraphe 163(2) de la Loi :

[59] Les expressions « montre une indifférence quant à l’observation de la présente loi » et « équivaut à une conduite intentionnelle » tirent leur origine de la jurisprudence sur la pénalité pour faute lourde qui s’applique directement au contribuable suivant le par. 163(2) de la LIR, lequel dispose :

(2) Toute personne qui, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration, un formulaire, un certificat, un état ou une réponse (appelé « déclaration » au présent article) rempli, produit ou présenté, selon le cas, pour une année d’imposition pour l’application de la présente loi, ou y participe, y consent ou y acquiesce est passible d’une pénalité [...] [Calcul du montant de la pénalité omis.]

[60] Dans son mémoire, la ministre soutient que la « conduite coupable » visée à l’article 163.2 de la LIR [traduction] « n’est pas censée différer de la faute lourde et de la norme qui s’y rattache au par. 163(2) » (par. 79). Dans Venne c. Canada (ministre du Revenu national — M.R.N.), [1984] A.C.F. No 314 (QL) (1re inst.), une affaire relative à la pénalité prévue au par. 163(2), la Cour fédérale explique qu’« une indifférence au respect de la Loi » ne s’entend pas que d’une simple inattention ou négligence; elle suppose « un degré important de négligence qui corresponde à une action délibérée » (p. 11). Cela s’apparente en somme à faire l’autruche : (Sirois (L.C.) c. Canada, 1995 CarswellNat 555 (WL Can.) (C.C.I.), par. 13; Keller c. Canada, 1995 CarswellNat 569 (WL Can.) (C.C.I.). Dans Sidhu c. La Reine, 2004 CCI 174, la Cour canadienne de l’impôt, pour expliquer sa décision dans Venne, développe les expressions « équivaut à une conduite intentionnelle » et « montre une indifférence quant à l’observation de la présente loi » :

Les actions « qui correspondent » à des actions réalisées intentionnellement sont celles pour lesquelles on peut présumer une intention, comme les actions qui démontrent « une indifférence au respect de la Loi » [...] Le fardeau de la preuve ne consiste pas à prouver au‑delà du doute raisonnable l’intention coupable de se soustraire au paiement de l’impôt, mais à prouver selon la prépondérance des probabilités une telle indifférence à l’égard de la diligence appropriée et raisonnable dans le contexte d’un système d’autocotisation qui contredit et insulte le sens commun. [par. 23 (CanLII)]

[63] Une conduite qui justifierait l’imposition d’une pénalité pour faute lourde est un comportement qui équivaut à une action délibérée. Une conduite qui équivaudrait à une action délibérée visant à éviter le paiement d’impôts sur des fonds retirés du compte d’une société est différente d’une conduite inattentive ou négligente qui fait qu’une personne est imposée pour avoir reçu un avantage de cette société pour les années frappées de prescription.

3) Les erreurs du juge de la Cour canadienne de l’impôt

[64] En confirmant l’établissement de la nouvelle cotisation pour les années frappées de prescription et l’imposition des pénalités en application du paragraphe 163(2) de la Loi en l’espèce, le juge de la Cour canadienne de l’impôt a noté ce qui suit, dans le paragraphe suivant immédiatement l’extrait cité dans les présents motifs au paragraphe 16 ci-dessus :

[traduction]

Selon l’arrêt Lacroix, une fois que le ministre a établi avec des éléments de preuve fiables un écart important avec le revenu déclaré, qui n’a pas été expliqué de manière crédible, le contribuable doit alors déterminer la source du revenu et démontrer que ce revenu n’est pas imposable. À mon avis, l’appelant ne l’a pas fait en l’espèce pour les raisons évoquées précédemment.

[Non souligné dans l’original.]

[65] Cependant, si M. Deyab avait [traduction] « [déterminé] la source du revenu et [démontré] que ce revenu n’était pas imposable », les montants n’auraient pas du tout été inclus dans son revenu. Non seulement il n’y aurait pas eu de pénalités, mais il n’y aurait pas eu d’impôt à payer. Le simple fait de constater qu’un montant non déclaré est imposable ne conduit pas inévitablement à la conclusion qu’une pénalité pour faute lourde est justifiée. Le juge de la Cour canadienne de l’impôt a effectivement assimilé le critère permettant de déterminer si une pénalité pour faute lourde doit être imposée au critère permettant de déterminer si les sommes sont imposables. À mon avis, le juge de la Cour canadienne de l’impôt a commis une erreur en procédant ainsi.

[66] Le droit d’établir une nouvelle cotisation pour une année frappée de prescription et le droit d’imposer une pénalité pour faute lourde sont tous deux fondés sur le fait qu’un contribuable touche des revenus non déclarés pour une année d’imposition donnée. Une fois qu’il a été établi qu’un contribuable a touché des revenus non déclarés, les circonstances liées à l’omission de déclarer les revenus doivent être examinées pour déterminer si cette omission était attribuable à la négligence, à l’inattention, à l’omission volontaire ou à la fraude (pour établir une nouvelle cotisation pour une année frappée de prescription) ou à une faute lourde (pour justifier l’imposition d’une pénalité pour faute lourde).

[67] Il semble que le juge de la Cour canadienne de l’impôt ait fondé sa lecture de l’arrêt Lacroix sur la déclaration suivante de la Cour au paragraphe 32 de l’arrêt :

[…] Dans la mesure où la Cour canadienne de l’impôt est persuadée que le contribuable touche un revenu qu’il n’a pas déclaré et que l’explication offerte par le contribuable pour l’écart constaté entre son revenu déclaré et l’accroissement de son actif est non crédible, le ministre s’est acquitté du fardeau de preuve qui lui incombe aux termes du sous-alinéa 152(4)a)(i) et du paragraphe 162(3) [sic].

[68] Cependant, ces commentaires doivent être lus à la lumière du litige dont était saisie la Cour dans l’arrêt Lacroix. Au paragraphe 30, la Cour a souligné ce qui suit :

[30] Les faits en preuve, dans un tel cas, sont que la déclaration de revenu du contribuable fait une présentation erronée des faits et que la seule explication offerte par le contribuable est jugée non crédible. Évidemment, il doit y avoir une autre explication pour ce revenu. Il faut donc conclure que le contribuable a une source de revenu qu’il n’a pas déclarée, qu’il est au courant de cette source et qu’il refuse de la divulguer puisque les explications qu’il a offertes n’ont pas été jugées crédibles. En de telles circonstances, la conclusion que la fausse déclaration de revenu a été produite sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde me semble inéluctable. Cela justifie non seulement l’imposition d’une pénalité mais aussi l’établissement de la nouvelle cotisation hors de la période statutaire.

[69] Dans les circonstances de l’arrêt Lacroix, l’absence d’explication crédible était suffisante pour justifier l’imposition de la pénalité pour faute lourde et l’établissement d’une nouvelle cotisation pour les années frappées de prescription. Les commentaires de la Cour dans l’arrêt Lacroix n’appuient pas la conclusion selon laquelle, pour annuler une pénalité pour faute lourde, [traduction] « le contribuable doit [...] déterminer la source du revenu et démontrer que ce revenu n’est pas imposable ».

[70] Le juge de la Cour canadienne de l’impôt, à la page 30 de ses motifs, affirme également ce qui suit :

[traduction]

[...] Le fait que M. Deyab n’ait pas déclaré les avantages accordés aux actionnaires en cause dans le présent appel est imputable à la fois à la négligence et à l’inattention. Compte tenu des montants des avantages consentis aux actionnaires que M. Deyab savait, de son propre aveu, qu’il avait reçus, et qu’il n’a pas déclarés en toute connaissance de cause, je suis également d’avis qu’il n’a pas déclaré les avantages consentis aux actionnaires en cause dans le présent appel, à la fois en toute connaissance de cause et dans des circonstances équivalant à une faute lourde.

[Non souligné dans l’original.]

[71] Étant donné que la thèse de M. Deyab, qu’il a maintenue tout au long de l’audience devant la Cour canadienne de l’impôt et dans le contexte du présent appel, était qu’il se contentait de recevoir en remboursement les fonds qu’il avait précédemment avancés à M.D. Consulting, il n’y a pas lieu de conclure que M. Deyab [TRADUCTION] « savait, de son propre aveu, qu’il [avait reçu] » des avantages conférés à un actionnaire. M. Deyab savait qu’il retirait des fonds de M.D. Consulting, mais comme, à son avis, il s’agissait simplement de sommes d’argent qui lui étaient payables, il ne faut pas en conclure qu’il savait, de son propre aveu, qu’il recevait des avantages conférés à un actionnaire. Rien ne permet de conclure que M. Deyab savait, de son propre aveu, qu’il recevait des avantages conférés à un actionnaire. Cette conclusion est à la base de la conclusion du juge de la Cour canadienne de l’impôt selon laquelle les pénalités pour faute lourde doivent être confirmées. Par conséquent, le juge de la Cour canadienne de l’impôt a commis une erreur manifeste et dominante en tirant une telle conclusion.

[72] Ainsi, la question de savoir si les pénalités pour faute lourde pouvaient être imposées sera examinée en fonction du dossier.

4) L’imposition des pénalités pour faute lourde doit-elle être confirmée?

[73] Dans l’arrêt Lacroix, au paragraphe 28, la Cour a cité un passage de la décision du juge Bowman intitulée Farm Business Consultants Inc. c. Sa Majesté la Reine, [1994] 2 C.T.C. 2450, 95 D.T.C. 200 :

27 Une cour doit faire preuve d’une prudence extrême lorsqu’elle sanctionne l’imposition de pénalités prévues au paragraphe 163(2). Une conduite qui légitime l’établissement d’une nouvelle cotisation à l’égard d’une année frappée de prescription ne justifie pas d’office l’imposition d’une pénalité, et l’imposition systématique de pénalités, par le ministre, est une pratique qui est à déconseiller... Par ailleurs, quand une pénalité est imposée en vertu du paragraphe 163(2) même si une norme de preuve civile est exigée, lorsque la conduite d’un contribuable cadre avec deux hypothèses viables et raisonnables, l’une qui justifie la pénalité et l’autre pas, il convient d’accorder le bénéfice du doute au contribuable, et de supprimer la pénalité...

[74] Dans le litige qui nous occupe, le juge de la Cour canadienne de l’impôt a reconnu que des sommes importantes avaient été transférées par M. Deyab à M.D. Consulting. La question qui se posait dans le litige portait sur la tenue des registres et, plus précisément, sur le fait que M.D. Consulting n’avait pas correctement enregistré toutes les opérations entre cette société et M. Deyab (et sa famille). Il est possible que les fonds qui ont été transférés à M.D. Consulting aient dépassé les dépenses personnelles payées par M.D. Consulting et les fonds retirés, et que les retraits, s’ils ont été correctement enregistrés, aient constitué un remboursement des sommes payables à M. Deyab. La Cour est appelée à décider si, dans les circonstances de l’espèce, l’imposition de pénalités pour faute lourde doit être confirmée.

[75] Un élément de preuve essentiel qui, à mon avis, n’a pas été pris en compte par le juge de la Cour canadienne de l’impôt pour confirmer l’imposition de pénalités pour faute lourde est la preuve que M.D. Consulting a perdu de l’argent au cours de chaque année d’imposition. Dans le contexte de l’examen de la présente affaire, l’Agence a préparé un résumé des pertes de M.D. Consulting pour ses années d’imposition se terminant les 31 mars des années 2007 à 2011. Pour sa première année d’imposition se terminant le 31 mars 2006, le résumé révèle qu’aucun revenu ou dépense n’a été enregistré pour cette année-là. Les pertes indiquées dans ce résumé sont les suivantes :

Année d’imposition se terminant le :

(Perte)

31 mars 2007

(74 952 $)

31 mars 2008

(126 923 $)

31 mars 2009

(517 986 $)

31 mars 2010

(249 859 $)

31 mars 2011

(158 158 $)

Total :

(1 127 878 $)

[76] Avec des pertes de plus d’un million de dollars, la question évidente est celle-ci : comment M.D. Consulting a-t-elle pu obtenir les fonds transférés à M. Deyab et à sa famille? Il est clair que les fonds qui leur ont été transférés ne provenaient pas des bénéfices réalisés par M.D. Consulting. Le fait que M.D. Consulting a subi des pertes tout au long de ses années d’exploitation soutient l’hypothèse viable et raisonnable selon laquelle M.D. Consulting aurait pu simplement rembourser à M. Deyab les fonds qu’il avait précédemment avancés à M.D. Consulting. Aucune autre source n’a été déterminée pour ces fonds.

[77] Le fait que M. Deyab n’a pas tenu de registres appropriés qui auraient pu établir que M.D. Consulting remboursait les sommes d’argent qui étaient dues à M. Deyab (si ces montants avaient été correctement enregistrés) n’établit pas que son omission d’inclure dans ses revenus les sommes retirées démontrait « un degré important de négligence qui correspond[…] à une action délibérée » ou qu’il était indifférent au fait de se conformer ou non à la loi. Le fait que M. Deyab n’a pas inclus dans ses revenus les montants qui ont fait l’objet d’une nouvelle cotisation, dans les circonstances de l’espèce, ne constitue pas une faute lourde.

[78] J’accueillerais l’appel concernant l’imposition des pénalités pour faute lourde.

V. Conclusion

[79] Après l’audience, les parties ont avisé notre Cour que, si M. Deyab obtenait partiellement gain de cause, les parties convenaient qu’aucuns dépens ne devaient être accordés ni par notre Cour ni par la Cour canadienne de l’impôt.

[80] Par conséquent, j’accueillerais l’appel, sans dépens, en ce qui concerne l’imposition de pénalités pour faute lourde, mais je rejetterais par ailleurs l’appel de M. Deyab. J’annulerais donc le jugement rendu par la Cour canadienne de l’impôt et je rendrais la décision suivante (qui reflète les montants dont ont convenu les parties lors de l’audience devant la Cour canadienne de l’impôt et la suppression des pénalités pour faute lourde) :

Les appels interjetés à l’égard des nouvelles cotisations établies aux termes de la Loi pour les années d’imposition 2007, 2008, 2009, 2010 et 2011 de M. Deyab sont accueillis, sans dépens, et les nouvelles cotisations sont renvoyées au ministre pour nouvel examen et établissement de nouvelles cotisations pour les motifs suivants :

  • a) le revenu imposable de M. Deyab pour l’année 2007 doit être réduit de 82 501 $;

  • b) le revenu imposable de M. Deyab pour l’année 2008 doit être réduit de 113 200 $;

  • c) le revenu imposable de M. Deyab pour l’année 2009 doit être réduit de 115 858 $;

  • d) le revenu imposable de M. Deyab pour l’année 2010 doit être réduit de 167 035 $;

  • e) le revenu imposable de M. Deyab pour l’année 2011 doit être réduit de 11 308 $;

  • f) le montant de l’intérêt applicable devrait être réduit en conséquence des alinéas a) à e) qui précèdent;

  • g) toutes les pénalités imposées en application du paragraphe 163(2) de la Loi doivent être supprimées;

  • h) l’appel interjeté par M. Deyab est rejeté à tous les autres égards.

« Wyman W. Webb »

j.c.a.

« Je souscris à ces motifs.

D.G. Near, j.c.a. »

« Je souscris à ces motifs.

J.B. Laskin, j.c.a. »

Traduction certifiée conforme.

Mario Lagacé, jurilinguiste


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


APPEL D’UN JUGEMENT DE LA COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT

DATÉ DU 27 JUIN 2019, DOSSIER NO 2016-410(IT)G

DOSSIER :

A-363-19

 

INTITULÉ :

RALPH ABDEL DEYAB c.

SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Audience par vidéoconférence ORGANISÉE par le greffe

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 8 octobre 2020

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE WEBB

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE NEAR

LE JUGE LASKIN

DATE DES MOTIFS :

Le 21 décembre 2020

COMPARUTIONS :

Joseph G. LoPresti

Pour l’appelant

Dominique Gallant

Pour l’intimée

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

LoPresti Law

Toronto (Ontario)

Pour l’appelant

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Pour l’intimée

 

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