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Date : 20191030


Dossier : A-295-19

Référence : 2019 CAF 271

En présence de madame la juge Gleason

ENTRE :

L’ASSOCIATION DES EMPLOYEURS MARITIMES

L’ADMINISTRATION PORTUAIRE DE MONTRÉAL

LA FÉDÉRATION MARITIME DU CANADA

demanderesses

et

LE SYNDICAT DES DÉBARDEURS, SECTION LOCALE 375 DU SYNDICAT CANADIEN DE LA FONCTION PUBLIQUE

L’ASSOCIATION INTERNATIONALE DES DÉBARDEURS

LA CHAMBRE DE COMMERCE DE L’EST DE MONTRÉAL

LE CONSEIL DU PATRONAT DU QUÉBEC

LA FÉDÉRATION DES CHAMBRES DE COMMERCE DU QUÉBEC

défendeurs

Requête jugée sur dossier sans comparution des parties.

Ordonnance rendue à Ottawa (Ontario), le 30 octobre 2019.

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LA JUGE GLEASON

 


Date : 20191030


Dossier : A-295-19

Référence : 2019 CAF 271

En présence de madame la juge Gleason

ENTRE :

L’ASSOCIATION DES EMPLOYEURS MARITIMES

L’ADMINISTRATION PORTUAIRE DE MONTRÉAL

LA FÉDÉRATION MARITIME DU CANADA

demanderesses

et

LE SYNDICAT DES DÉBARDEURS, SECTION LOCALE 375 DU SYNDICAT CANADIEN DE LA FONCTION PUBLIQUE

L’ASSOCIATION INTERNATIONALE DES DÉBARDEURS

LA CHAMBRE DE COMMERCE DE L’EST DE MONTRÉAL

LE CONSEIL DU PATRONAT DU QUÉBEC

LA FÉDÉRATION DES CHAMBRES DE COMMERCE DU QUÉBEC

défendeurs

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

LA JUGE GLEASON

[1]  Les demanderesses sollicitent une ordonnance suspendant l’instance en cours devant le Conseil canadien des relations industrielles (le CCRI ou le Conseil) concernant la demande de maintien d’activités présentée par les demanderesses au titre de l’article 87.4 du Code canadien du travail, L.R.C. 1985, ch. L-2 (le Code). Par cette demande, les demanderesses visent à faire déclarer nécessaire pour prévenir des risques imminents et graves pour la sécurité ou la santé du public le travail effectué au Port de Montréal par les membres d’un des défendeurs, le Syndicat des débardeurs, section locale 375 du Syndicat canadien de la fonction publique (la section locale 375). Une telle déclaration aurait pour effet d’empêcher les membres de la section locale 375 de déclencher une grève légale en vertu de la partie I du Code. Si cette déclaration était faite, le Conseil ordonnerait normalement que d’autres moyens soient pris pour régler la convention collective entre la section locale 375 et l’une des demanderesses, l’Association des employeurs maritimes, comme l’arbitrage de différends afin de fixer les modalités de la convention collective.

[2]  Dans leur requête, les demanderesses demandent la suspension de la procédure devant le Conseil concernant leur demande présentée au titre de l’article 87.4 jusqu’à ce que notre Cour tranche leur demande de contrôle judiciaire visant la décision rendue le 21 août 2019 par le CCRI. Dans cette décision, le Conseil a rejeté la demande des demanderesses qui voulaient que l’un des membres de la formation du Conseil entendant la demande de maintien des activités se récuse en raison d’une crainte raisonnable de partialité découlant de certains commentaires, actions et gestes faits, en particulier, au cours de deux des journées d’audience devant le Conseil.

[3]  Le Conseil a tenu plus de vingt jours d’audience concernant la demande présentée au titre de l’article 87.4 et il en est à présent rendu à entendre les exposés finaux.

[4]  Dans le contexte de la présente requête en suspension, les parties ont déposé des documents conformément au calendrier établi dans ma directive du 27 août 2019, qui établissait des délais pour le dépôt par les défendeurs de documents en réponse et par les demanderesses de documents en réplique. Conformément à la directive donnée le 23 septembre 2019 par mon collègue le juge de Montigny, les demanderesses ont été autorisées à inclure un affidavit supplémentaire dans leurs documents déposés en réplique.

[5]  Dans une directive datée du 22 octobre 2019, j’ai jugé que la requête en suspension des demandeurs serait tranchée sur le fondement des documents écrits des parties puisqu’il était impossible de fixer une date d’audience en temps voulu étant donné les engagements préalables de certains des avocats.

[6]  Dans une lettre datée du 23 octobre 2019, la section locale 375 a fait savoir qu’elle comptait s’appuyer sur certains affidavits et pièces contenus dans trois volumes de documents joints à la lettre. Ces trois volumes ont été déposés par la section locale 375 dans le contexte de la demande de contrôle judiciaire sous-jacente visant la décision rendue le 21 août 2019 par le CCRI. L’avocat des demanderesses a écrit à la Cour le même jour pour contester la recevabilité de ces documents supplémentaires en l’espèce, au motif que le dépôt de ces documents ne respecte ni le calendrier établi dans ma directive du 27 août 2019 ni les délais pour le dépôt de documents établis dans les Règles des Cours fédérales, DORS/98-106.

[7]  Je conviens avec les demanderesses que ces documents supplémentaires ne sont pas recevables puisqu’ils n’ont pas été déposés dans les délais établis dans la directive que j’ai donnée le 27 août 2019. Par conséquent, je ne tiendrai pas compte de ces volumes supplémentaires.

[8]  Quant au fond de la requête en suspension, les demanderesses doivent, pour avoir droit à une suspension, satisfaire au critère à trois volets énoncé dans l’arrêt RJR-Macdonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311, c’est-à-dire qu’elles doivent établir que leur demande de contrôle judiciaire sous-jacente soulève une question sérieuse, qu’elles subiraient un préjudice irréparable si la suspension n’était pas accordée et que la prépondérance des inconvénients favorise l’octroi de la suspension.

[9]  Les demanderesses pourraient bien avoir satisfait au premier volet de ce critère, étant donné que le seuil pour établir l’existence d’une question sérieuse est relativement peu élevé et compte tenu de certains des commentaires formulés par un des membres du Conseil lors de l’audience devant le CCRI le 28 juin 2019.

[10]  Elles n’ont toutefois pas établi qu’elles subiront un préjudice irréparable si la suspension demandée n’est pas accordée à ce stade. Comme l’a fait observer notre Cour dans l’arrêt Sgt 2000 Inc. c. Union des Chauffeurs de Camions, Hommes d’Entrepôts et Autres Ouvriers, 2000 CanLII 15095 (C.A.F.) [SGT], il est extrêmement inhabituel qu’un tribunal suspende la procédure d’une commission du travail afin d’empêcher celle-ci de rendre une décision.

[11]  Le préjudice irréparable allégué par les demanderesses est lié au préjudice que, selon leurs dires, des tiers et elles subiraient en cas de décision défavorable d’une formation du Conseil, laquelle formation pourrait raisonnablement être perçue comme étant partiale. À ce stade, on ignore si ce préjudice se réalisera puisqu’il est concevable que les demanderesses obtiennent gain de cause dans leur demande présentée au Conseil. La présente requête en suspension est donc prématurée. Il est déjà arrivé que notre Cour rejette des requêtes en suspension semblables dans des cas comparables, notamment dans les arrêts SGT et Canada (Commission des droits de la personne) c. Malo, 2003 CAF 466.

[12]  En réponse à cette réserve, les demanderesses font valoir qu’il n’y aura pas assez de temps pour obtenir une suspension de la décision à venir du Conseil sur sa demande présentée au titre de l’article 87.4 entre le prononcé de cette décision et le début d’une grève légale, puisque la section locale 375 serait en droit de déclencher la grève si le Conseil rejetait la demande de maintien des activités. À ce moment-là, la section locale 375 pourrait donner un préavis de 72 heures en vertu de l’article 87.2 du Code et il serait alors possible (et probable, aux dires des demanderesses) qu’une grève légale soit déclenchée au Port de Montréal à l’échéance de ce préavis.

[13]  Je ne suis pas convaincue qu’il serait impossible pour notre Cour d’examiner une nouvelle requête en suspension durant cette période de 72 heures. Pour que cette nouvelle requête en suspension, le cas échéant, soit examinée rapidement, j’ajournerais la présente requête plutôt que de la rejeter. Dans les cinq jours suivant la date de mon ordonnance, les demanderesses pourront signifier et déposer tout document supplémentaire qu’elles souhaitent produire à l’appui de leur requête en suspension. Les défendeurs disposeront de cinq jours à compter de la réception de tout document supplémentaire signifié par les demanderesses pour déposer tout document supplémentaire qu’ils souhaitent produire en réponse.

[14]  Si le Conseil déboute les demanderesses et que celles-ci souhaitent maintenir leur requête en suspension, elles peuvent demander la suspension de la décision du Conseil au moyen d’une lettre, à laquelle elles auront joint une copie de la décision du Conseil, qu’elles devront signifier et déposer dans les 24 heures suivant la réception de la décision du Conseil. À l’inverse, si les demanderesses ont gain de cause devant le Conseil, elles n’auront qu’à produire une copie de la décision du Conseil dans les 24 heures suivant la réception. Les demanderesses devront également aviser l’administratrice judiciaire par téléphone dès que possible après le prononcé de la décision du Conseil. Si ces délais tombent la fin de semaine, les demanderesses devront communiquer avec le fonctionnaire du greffe de la Cour en service pour prendre des mesures pour la transmission des documents nécessaires par courriel.

[15]  Une fois que ces documents auront été déposés, la requête me sera renvoyée sans délai pour que je rende décision. Si je ne suis pas disponible, elle sera confiée à un autre juge de notre Cour, qu’aura désigné le juge en chef.

[16]  Dans les circonstances, il convient que l’audition de la demande de contrôle judiciaire sous-jacente des demanderesses visant la décision rendue par le Conseil le 21 août 2019 soit accélérée. Dans les cinq jours suivant la date de mon ordonnance, les parties devront soumettre un calendrier établi d’un commun accord ou, en cas de désaccord, leurs observations respectives quant à la réalisation des étapes à compléter dans la présente demande, afin qu’elle soit inscrite au rôle pour audition en janvier 2020, à Ottawa ou à Montréal.

[17]  La question des dépens relatifs à la présente requête sera réglée lorsqu’un jugement définitif sera rendu à l’égard de la requête.

« Mary J.L. Gleason »

j.c.a.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-295-19

 

INTITULÉ :

L’ASSOCIATION DES EMPLOYEURS MARITIMES et autres c. LE SYNDICAT DES DÉBARDEURS, SECTION LOCALE 375 DU SYNDICAT CANADIEN DE LA FONCTION PUBLIQUE et autres

 

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LA JUGE GLEASON

 

DATE :

Le 30 octobre 2019

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Nicola Di lorio

Mélanie Sauriol

 

Pour les demanderesses

(L’Association des employeurs maritimes)

 

Michel Brisebois

 

POUR LES DEMANDERESSES

(L’Administration portuaire de Montréal)

 

Jean-Denis Boucher

POUR LES DEMANDERESSES

(La Fédération maritime du Canada)

 

Jacques Lamoureux

Marie-Christine Morin

POUR LES DÉFENDEURS

(Le Syndicat des débardeurs, section locale 375 du Syndicat canadien de la fonction publique)

 

Ronald A Pink

POUR LES DÉFENDEURS

(L’Association internationale des débardeurs)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

BCF

Montréal (Québec)

 

Pour les demanderesses

(L’Association des employeurs maritimes et L’Administration portuaire de Montréal)

 

Robinson Sheppard Shapiro

Montréal (Québec)

 

POUR LES demanderesses

(La Fédération maritime du Canada)

 

Lamoureux Morin Avocats Inc.

Longueuil (Québec)

POUR LES DÉFENDEURS

(Le Syndicat des débardeurs, section locale 375 du Syndicat canadien de la fonction publique)

 

Pink Larkin

Halifax (Nouvelle-Écosse)

POUR LES DÉFENDEURS

(L’Association internationale des débardeurs)

 

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