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Date : 20120308

Dossier : A‑177‑11

Référence : 2012 CAF 80

 

CORAM :      LA JUGE SHARLOW

                        LA JUGE DAWSON

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

LEONA MADISON

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

 

Audience tenue à Edmonton (Alberta), le 14 février 2012

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 8 mars 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                             LA JUGE SHARLOW

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                         LA JUGE DAWSON

                                                                                                                             LA JUGE TRUDEL

 


Date : 20120308

Dossier : A‑177‑11

Référence : 2012 CAF 80

 

CORAM :      LA JUGE SHARLOW

                        LA JUGE DAWSON

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

 

LEONA MADISON

appelante

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE SHARLOW

[1]               L’appelante, Leona Madison, a fait l’objet d’une cotisation établie en vertu du paragraphe 227.1(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.), relativement aux retenues à la source non remises des employés de Canfleur Mining Inc., dont l'ancienne raison sociale était The Nugget Factory Inc. (ci‑après « la société »). Mme Madison a interjeté appel sans succès de sa cotisation à la Cour canadienne de l’impôt (2011 CCI 201). Elle en appelle maintenant devant notre Cour.

 

Cadre législatif

[2]               Le paragraphe 227.1(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu dispose que les administrateurs d’une société peuvent notamment être tenus responsables des retenues à la source non remises des employés de celle-ci. Le paragraphe 227.1(2) exonère les administrateurs d’une société de toute responsabilité jusqu’à ce que le ministre ait rempli certaines conditions qui sont censées garantir que le ministre ne peut établir de cotisation à l’égard des administrateurs sans avoir d’abord épuisé toutes les mesures de recouvrement dont il dispose contre la société (nous discuterons en détail cette disposition plus loin). L'administrateur peut également se soustraire à sa responsabilité par le recours au moyen de défense de diligence raisonnable prévu par le paragraphe 227.1(3) ou en invoquant le paragraphe 227.1(4), qui prévoit que l’administrateur ne peut faire l’objet d’une cotisation en vertu du paragraphe 227.1(1) lorsque deux ans se sont écoulés à compter de la date à laquelle il a cessé d’être administrateur. L’administrateur qui fait l’objet d’une cotisation établie en vertu du paragraphe 227.1(1) peut réclamer de la société et des autres administrateurs le remboursement de toute somme qu’il a payée pour satisfaire à la cotisation (paragraphes 227.1(6) et (7)).

 

Faits et procédures

[3]               La société a été constituée en personne morale le 1er novembre 2000 sous le régime de la Business Corporations Act de l’Alberta, R.S.A. 2000, ch. B‑9. En 2001, 2002 et 2003, la société se livrait à des activités minières. Elle n'a pas remis les retenues à la source de ses employés pour les années en question. Dans les documents délivrés par le bureau du registraire des sociétés de l’Alberta, Mme Madison est désignée comme administratrice de la société à compter de la date de sa constitution en personne morale jusqu’au 2 mai 2007, date à laquelle la société a été dissoute pour défaut de production de ses déclarations annuelles.

 

[4]               Le 26 mars 2009, la Cour fédérale a délivré un certificat précisant le montant de la dette fiscale de la société. À l’époque, cette dette s’élevait à plus de 40 000 $ et représentait les retenues à la source non remises ainsi que les intérêts accumulés. Le 15 avril 2009, après que l’huissier eut constaté que la société n’avait aucun actif, il y a eu défaut d’exécution à l’égard de cette somme. Le 30 avril 2009, Mme Madison a fait l’objet d’une cotisation pour le même montant en vertu du paragraphe 227.1(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu.

 

[5]               Mme Madison a soutenu tant devant la Cour de l’impôt que devant notre Cour que, même si elle était désignée comme administratrice dans les documents délivrés par le registraire, elle n’avait en réalité jamais été autorisée à exercer les pouvoirs d’une administratrice et que, en particulier, elle n’avait aucun contrôle ou pouvoir de signature en ce qui concerne les fonds ou les comptes bancaires de la société. Elle a soutenu que, comme elle n’avait aucun pouvoir, elle pouvait utilement invoquer le moyen de diligence raisonnable prévu par le paragraphe 227.1(3) parce qu’elle avait continuellement déclaré et rappelé aux administrateurs actifs que la société n’avait pas respecté ses obligations en matière de retenues à la source, ajoutant qu’elle ne pouvait faire plus.

 

[6]               Mme Madison a également fait valoir qu’elle avait cessé d’être administratrice plus de deux ans avant la date de la cotisation de sorte que la cotisation fut établie après l’expiration du délai prévu par le paragraphe 227.1(4) de la Loi de l’impôt sur le revenu. Mme Madison a également soutenu qu’elle ne pouvait être tenue responsable, vu l'inobservation de la condition préalable imposée par l’alinéa 227.1(2)b).

 

[7]               Mme Madison a soutenu devant notre Cour qu’elle était la seule personne qui avait fait l’objet d’une cotisation en tant qu’administratrice de la société. Il ne convenait pas qu’elle formule cet argument dans le cadre de la présente instance, étant donné qu'il ne figure au  dossier aucun élément de preuve à cet égard et que cette question n’est pas pertinente quant à la détermination de sa responsabilité. Néanmoins, l’avocat de Sa Majesté a répondu à l’argument de Mme Madison en informant la Cour que quatre autres administrateurs avaient aussi fait l’objet d’une cotisation, deux pour le même montant, et deux pour un montant moindre.

 

Norme de contrôle

[8]               La Cour est saisie de l’appel d’un jugement rendu par la Cour de l’impôt au terme d’un procès; la norme de contrôle applicable est donc celle de la décision correcte, en ce qui concerne les questions de droit. Les conclusions de fait ou les conclusions mixtes de droit et de fait ne doivent pas être modifiées, sauf en cas d’erreur manifeste et dominante ou d’erreur de droit isolable (Housen c. Nikolaisen, [2002] 2 R.C.S. 235).

 

Exclusion d’éléments de preuve

[9]               Une partie de l’appel de Mme Madison est fondée sur la thèse portant que c’est à tort que le juge a refusé d’admettre en preuve un certain document. Selon Mme Madison  (procès‑verbal de l’audience de la Cour de l’impôt, aux pages 50 et 51), ce document consiste en :

[traduction] 

[…] des notes que j’ai prises de la conversation téléphonique que j’ai eue avec un des administrateurs de la compagnie au cours de laquelle cet administrateur m’a informée qu’à la suite d’un vote du conseil d’administration, j’avais été écartée comme administratrice de cette société, le tout en date du 30 septembre 2006.

 

 

 

(Comme ce document n’a pas été admis en preuve, il n’a pas été versé au dossier d’appel. Toutefois, aux fins du présent appel, je suis disposée à tenir pour acquis que les explications de Mme Madison sont exactes.)

 

[10]           L’avocat de Sa Majesté s’est opposé à l’admission en preuve des notes de Mme Madison. Le procès‑verbal ne révèle pas la raison invoquée au soutien de son objection. Le juge a toutefois formulé les observations suivantes au sujet des notes en question (procès‑verbal de l’audience, aux pages 51 à 53) :

            [traduction] 

Q.

[LE JUGE] : Il s’agit d’une preuve par ouï‑dire. Est‑ce que cette personne, cet administrateur, est ici?

R.

[Mme MADISON] : Non.

Q.

Il ne témoignera pas?

R.

Non.

Q.

Vous ne pourriez pas verser cela en preuve parce qu’il s’agit d’une preuve par ouï‑dire…

R.

Mes notes sont du ouï‑dire?

Q.

Vous dites qu’on vous a dit quelque chose; c’est du ouï‑dire, oui. Étant donné que la personne qui vous aurait déclaré cela n’est pas ici.

R.

D’accord. C’est [...]

Q.

Comment savoir que c’est exact? Je veux dire, ces affirmations auraient pu être ajoutées à vos notes à n’importe quel moment. Ou encore vous auriez pu vous en rappeler et l’ajouter après la conversation. J’ignore tout des circonstances. Mais, de toute façon, vous affirmez quelque chose, mais il s’agit d’une déclaration faite par quelqu’un d’autre qui n’est pas présent devant la Cour comme témoin et ces propos constituent du ouï‑dire, c’est‑à‑dire la pire preuve possible.

R.

Mais alors, Monsieur le Juge, qu’en est‑il des autres documents signés par d’autres personnes qui contrôlent la société?

Q.

Eh bien, il faut les montrer à l’avocat et voir ce qu’il dira. S’il existe des documents qui constituent des déclarations extrajudiciaires faites par une personne qui n’est pas devant la Cour et que l’on produit ce document pour établir la véracité des déclarations qu’il contient, il s’agit alors d’une preuve par ouï‑dire et ce genre d'élément de preuve n’est pas admissible.

Par contre, si l’avocat ne souhaite pas appliquer la règle à l’égard de certains de ces éléments, il a le droit de le faire. Mais vous devez les lui montrer et attendre qu’il prenne position.

R.

Eh bien, l’ARC a déjà rejeté des éléments de preuve que j’ai produits dans mon appel et qui démontraient [...]

Q.

Je ne suis pas intéressé à savoir ce que l’ARC a fait. Je vous donne la possibilité de produire en preuve tout élément pertinent, qui est important et qui ne constitue pas du ouï‑dire. Ce sont les trois critères que j’applique à l’égard de tout élément de preuve que vous présentez, à moins que l’avocat accepte que certains de ces documents soient déposés en preuve même si cela contrevient à l’un de ces principes. Il faut toutefois qu’il soit d’accord pour que ces éléments de preuve soient produits.

R.

D’accord.

Q.

Très bien. Donc si vous avez d’autres éléments de preuve que vous souhaitez produire, je vous suggère de les montrer à l’avocat et d’attendre sa réaction. S’il s’y oppose et que ces éléments de preuve constituent du ouï‑dire, je ne les admettrai pas en preuve.

R.

D’accord. (Inaudible).

 

 

 

[11]           L'exclusion d'éléments de preuve pour l’unique motif qu’ils constituent du ouï‑dire sans vérification préalable de leur nécessité et de leur fiabilité constitue une erreur de droit (R. c. Khan, [1990] 2 R.C.S. 531, et R. c. Smith, [1992] 2 R.C.S. 915). Mais surtout, en l'espèce, il y a erreur de droit lorsqu’il y a exclusion des éléments de preuve constituant du ouï‑dire dans le cadre d’une instance de la Cour de l’impôt régie par les règles de la procédure informelle sans que l'on ait d’abord examiné si ces éléments de preuve sont suffisamment fiables et probants pour justifier leur admission, compte tenu de la nécessité de favoriser une audience juste et expéditive (Selmeci c. Canada, 2002 CAF 293, au paragraphe 8).

 

[12]           Cette conception de l’administration de la preuve dans les instances de la Cour de l’impôt régies par la procédure informelle est dictée par le paragraphe 18.15(3) de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt, L.R.C. 1985, ch. T‑2, dont voici le texte :

18.15 (3) Par dérogation à la loi habilitante, la Cour n’est pas liée par les règles de preuve lors de l’audition de tels appels; ceux‑ci sont entendus d’une manière informelle et le plus rapidement possible, dans la mesure où les circonstances et l’équité le permettent.

 

18.15 (3) Notwithstanding the provisions of the Act under which the appeal arises, the Court is not bound by any legal or technical rules of evidence in conducting a hearing and the appeal shall be dealt with by the Court as informally and expeditiously as the circumstances and considerations of fairness permit.

 

 

 

[13]           Compte tenu des explications fournies par Mme Madison au sujet de ses notes, il me semble qu’elles pourraient être pertinentes quant à la question de savoir si Mme Madison a remis sa démission comme administratrice plus de deux ans avant que sa cotisation ne soit établie, ce qui lui permettrait d’opposer une défense complète à cette cotisation. À cet égard, je constate que Mme Madison a également déclaré lors de son témoignage qu’elle avait démissionné comme administratrice.

 

[14]           Sans les avoir d’abord examinées, le juge a refusé d’admettre les notes en preuve au seul motif qu’elles constituaient du ouï‑dire. Il n’a  pas recherché si elles étaient [traduction] « suffisamment fiables et probantes pour justifier leur admission, compte tenu de la nécessité de favoriser une audience juste et expéditive » comme l’exige la jurisprudence Selmeci. Je conclus que le refus du juge d’admettre ce document en preuve constitue une erreur de droit. Ce motif est suffisant pour justifier l’annulation du jugement de la Cour de l’impôt et pour renvoyer à celle-ci la présente affaire en vue de la tenue d’une nouvelle audition devant un autre juge.

 

[15]           Avant de conclure sur la question de la preuve documentaire, je tiens à formuler quelques observations au sujet de l’argument de Mme Madison suivant lequel on ne lui a pas permis de produire d’autres documents lesquels, selon elle, auraient démontré qu’elle avait remis sa démission. Plus précisément, Mme Madison affirme qu’elle a en mains une lettre de démission, laquelle aurait pris effet le 31 décembre 2002, ainsi qu’un document accessible au public qui avait été rédigé par la société et qui contenait une liste des administrateurs en 2005 ou 2006 et sur laquelle son nom ne figure pas. Mme Madison admet qu’elle n’a pas produit ces documents en preuve lors de l’audition de l'affaire par la Cour de l’impôt, mais elle justifie cette omission par le fait que le juge lui avait dit qu’elle ne pouvait pas le faire. Il ressort de l’examen du procès‑verbal que le juge n’a pas dit à Mme Madison qu’elle ne pouvait pas produire les documents en question en preuve. Toutefois, il est raisonnable d’inférer que Mme Madison a pu en arriver à cette conclusion en raison d’une mauvaise interprétation de certains des propos du juge, et ce, malgré le fait que le juge n’était probablement pas conscient du malentendu. Je mentionne cet élément uniquement pour souligner que, lors de la nouvelle audition de l'affaire par la Cour de l’impôt, Mme Madison pourra produire toute preuve documentaire qui ne figure pas à l'heure actuelle au dossier, y compris sa lettre de démission ainsi que la liste des administrateurs de la société en 2005 ou 2006. La pertinence et l’admissibilité de ces documents, à supposer qu’ils seront produits, sont des questions sur lesquelles se prononcera le juge qui présidera la nouvelle audition.

 

Moyen de droit fondé sur le paragraphe 227.1(2)

[16]           Vu la plupart des moyens d’appel invoqués par Mme Madison, le juge qui présidera la nouvelle audition de l'affaire sera appelé à rechercher si et à quel moment Mme Madison a cessé d’être administratrice, et si elle a démontré que lui est ouvert le moyen de défense de diligence raisonnable. Le moyen que Mme Madison tire du paragraphe 227.1(2) soulève toutefois une question d’interprétation; chose certaine, les faits sont constants. Il convient donc d’étudier dès maintenant cette question pour éviter qu’elle soit examinée lors de la nouvelle audition de l'affaire.

 

[17]           Le paragraphe 227.1(2) exonère l’administrateur de la responsabilité prévue au paragraphe 227.1(1), sauf dans les cas prévus par les alinéas 227.1(2)a), b) ou c) . Voici les textes :

227.1 (2) Un administrateur n’encourt la responsabilité prévue au paragraphe (1) que dans l’un ou l’autre des cas suivants :

227.1 (2) A director is not liable under subsection 227.1(1), unless

a) un certificat précisant la somme pour laquelle la société est responsable selon ce paragraphe a été enregistré à la Cour fédérale en application de l’article 223 et il y a

eu défaut d’exécution totale ou partielle à l’égard de cette somme;

(a) a certificate for the amount of the corporation’s liability referred to in that subsection has been registered in the Federal Court under section 223 and execution for

that amount has been returned unsatisfied in whole or in part;

b) la société a engagé des procédures de liquidation ou de dissolution ou elle a fait l’objet d’une dissolution et l’existence de la créance à l’égard de laquelle elle encourt la responsabilité en vertu de ce paragraphe a été établie dans les six mois suivant le premier en date du jour où les procédures ont été engagées et du jour de la dissolution;

(b) the corporation has commenced liquidation or dissolution proceedings or has been dissolved and a claim for the amount of the corporation’s liability referred to in that subsection has been proved within six months after the earlier of the date of commencement of the proceedings and the date of dissolution; or

c) la société a fait une cession ou une ordonnance de faillite a été rendue contre elle en vertu de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité et l’existence de la créance à l’égard de laquelle elle encourt la responsabilité en vertu de ce paragraphe a été établie dans les six mois suivant la date de la cession ou de l’ordonnance de faillite.

(c) the corporation has made an assignment or a bankruptcy order has been made against it under the Bankruptcy and Insolvency Act and a claim for the amount of the corporation’s liability referred to in that subsection has been proved within six months after the date of the assignment or bankruptcy order.

 

 

 

[18]           Selon l'objet du paragraphe 227.1(2), l’administrateur ne doit pas être tenu responsable des dettes fiscales de la société à moins que Sa Majesté n’ait entrepris des démarches précises en temps utile pour recouvrer la dette sur les actifs de la société. À cet égard, il existe trois cas de figure, qui sont prévus respectivement par les alinéas 227.1(2)a), b) et c). Dans une affaire donnée, un seul de ces textes peut jouer. La question de savoir lequel de ces trois alinéas joue dépend des faits particuliers de l’espèce (Kennedy c. Canada, [1992] 2 C.T.C. 59, no 1, 92 D.T.C. 6380 (C.A.F.), confirmant le jugement Kennedy c. ministre du Revenu national, [1991] 2 C.T.C. 2333, 91 D.T.C. 1037 (C.C.I.)). En l'espèce, il y a controverse entre les parties sur la question de savoir si la disposition pertinente est l’alinéa 227.1(2)a) ou l’alinéa 227.1(2)b).

 

[19]           Mme Madison soutient que l’alinéa 227.1(2)b) joue en raison de la dissolution de la société. Comme aucune preuve de l’existence de la créance n’a été produite dans le délai de six mois prescrit en ce qui concerne les retenues à la source impayées de la société, les exigences de l’alinéa 227.1(2)b) n’ont pas été respectées. Sa Majesté soutient que l’alinéa 227.1(2)a) joue parce que la Cour fédérale a délivré un certificat précisant la somme pour laquelle la société était responsable au titre des retenues à la source impayées et qu’il y a eu défaut d’exécution à l’égard de cette somme lorsque l’huissier a constaté que la société n’avait aucun bien.

 

[20]           Notre jurisprudence Kennedy, précitée, a mis fin à cette controverse. Notre Cour a alors confirmé la décision du juge en chef adjoint Christie suivant laquelle l’alinéa 227.1(2)b) ne joue pas lorsque la société est dissoute en vertu d’une procédure qui n’exige pas la nomination d’un liquidateur ou la présentation d’un titre de créance. À mon avis, la jurisprudence Kennedy est saine. Il s’ensuit que le moyen de droit que Mme Madison tire de l’alinéa 227.1(2)b) ne saurait être retenu.

 

[21]           Mme Madison invoque avec force la jurisprudence Savoy c. Canada, 2011 CCI 35. A cette occasion, le juge s’est dit d’avis que, malgré notre jurisprudence Kennedy, il importait peu qu’aucun liquidateur n’ait été nommé relativement à la dissolution ordonnée par le registraire, étant donné que Sa Majesté peut établir sa réclamation, comme elle l’a fait en l’espèce, en faisant enregistrer un certificat à la Cour fédérale. À mon humble avis, la jurisprudence Savoy est à écarter sur ce point et ne doit pas être suivie. Compte tenu des textes législatifs pertinents, l’expression « preuve de réclamation » au sens où l’emploie l’alinéa 227.1(2)b) s’entend d’un titre de créance produit dans le cadre d’une procédure de liquidation ou de dissolution.

Dispositif

[22]           Par les motifs qui précèdent, je suis d’avis d’accueillir l’appel avec dépens, d’annuler le jugement de la Cour de l’impôt et de renvoyer la présente affaire à la Cour de l’impôt en vue de la tenue d’une nouvelle audition par un autre juge. La nouvelle audition devra se dérouler conformément à la procédure informelle sur le fondement du dossier actuel, complété par tout élément de preuve documentaire ou témoignage que les parties souhaiteront produire et que le nouveau juge pourra légalement admettre.

 

 

« K. Sharlow »

j.c.a.

 

 

« Je suis d’accord 

            Eleanor R. Dawson, j.c.a. »

 

« Je suis d’accord 

            Johanne Trudel, j.c.a. »

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

François Brunet, réviseur.

 

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    A‑177‑11

 

 

(APPEL D’UNE ORDONNANCE RENDUE LE 6 AVRIL 2011 (2011 CCI 201) PAR LE JUGE MARGESON DE LA COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT)

 

 

INTITULÉ :                                                   LEONA MADISON c.
SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Edmonton (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 14 février 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                        LA JUGE SHARLOW

 

Y ONT SOUSCRIT :                                     LA JUGE DAWSON

                                                                        LA JUGE TRUDEL

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 8 mars 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Leona Madison

 

L’APPELANTE,
POUR SON PROPRE COMPTE

 

Adam Gotfried

Michael J. Lema

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

S/O

 

L’APPELANTE,
POUR SON PROPRE COMPTE

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

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