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Cour d’appel fédérale

Federal Court of Appeal

 

Date : 20111214

Dossier : A‑80‑11

Référence : 2011 CAF 351

 

CORAM :      LE JUGE EN CHEF BLAIS

                        LE JUGE NADON

                        LE JUGE STRATAS

 

ENTRE :

LORETTA BEST

appelante

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

 

 

 

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 13 décembre 2011.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 14 décembre 2011.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                               LE JUGE STRATAS

Y ONT SOUSCRIT :                                                                              LE JUGE EN CHEF BLAIS

                                                                                                                              LE JUGE NADON

 

 


Cour d’appel fédérale

Federal Court of Appeal

 

 Date : 20111214

Dossier : A‑80‑11

Référence : 2011 CAF 351

 

CORAM :      LE JUGE EN CHEF BLAIS

                        LE JUGE NADON

                        LE JUGE STRATAS

 

ENTRE :

LORETTA BEST

appelante

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

LE JUGE STRATAS

 

[1]               Il s’agit d’un appel d’un jugement de la Cour fédérale (rendu par le juge Martineau) : 2011 CF 71. La Cour fédérale a rejeté la demande de contrôle judiciaire de la décision de la Commission canadienne des droits de la personne datée du 23 décembre 2009. La Commission a décidé de ne pas instruire la plainte de discrimination déposée par l’appelante contre les Forces canadiennes. La Commission a conclu que la preuve dont elle disposait ne permettait pas de conclure à l’existence de discrimination.

 

A.        L’application de la norme de la raisonnabilité

 

[2]               Les parties conviennent qu’il faut adopter et appliquer la norme de contrôle de la raisonnabilité lorsqu’il s’agit d’examiner sur le fond la décision de la Commission de ne pas instruire la plainte de discrimination. La Cour fédérale a adopté et appliqué la norme de la raisonnabilité. Je suis d’accord à cet égard avec les parties et la Cour fédérale.

 

[3]               Devant notre Cour, l’appelante ne conteste aucun principe juridique appliqué par la Commission. Elle met plutôt l’accent sur l’appréciation des faits de la Commission et sur l’application des principes aux faits, faisant valoir que la Commission est arrivée à des conclusions qui n’étaient pas acceptables et qui ne pouvaient pas se justifier au regard de la norme de la raisonnabilité.

 

[4]               La Cour fédérale a conclu que la décision de la Commission était raisonnable, en ce qu’elle appartenait aux issues acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

 

[5]               À mon avis, l’analyse de la Cour fédérale (aux paragraphes 25 à 32) ne comporte pas d’erreur susceptible de contrôle. En fait, je souscris pour l’essentiel aux motifs de la Cour.

 

B.        La norme applicable aux questions d’équité procédurale

 

[6]               En l’espèce, les parties sont d’accord qu’il convient d’appliquer la norme de la décision correcte lorsqu’il s’agit de déterminer si la Commission a agi selon les règles d’équité procédurale. C’est la norme appliquée par la Cour fédérale. Je suis d’accord avec les parties et la Cour fédérale.

 

[7]               La Cour fédérale a également conclu que la Commission n’a manqué à aucune obligation d’équité procédurale. La Cour a énoncé ainsi à juste titre les principes pertinents en invoquant des décisions comme Slattery c. Canada (Commission des droits de la personne), [1994] 2 C.F. 574, conf. par (1996), 205 N.R. 383 (C.A.F.), Syndicat des employés de production du Québec et de l’Acadie c. Canada (Commission des droits de la personne), [1989] 2 R.C.S. 879, et Deschênes c. Canada (Procureur général), 2009 CF 1126. La Cour fédérale a appliqué ces principes aux faits qui lui ont été présentés (voir paragraphes 19 à 21) et a conclu qu’il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale. Plus particulièrement, la Cour a conclu que la Commission a enquêté de manière à s’assurer de traiter de « toutes les questions fondamentales soulevées dans la plainte du demandeur » et que l’appelante a eu « amplement l’occasion d’établir le bien‑fondé des éléments essentiels de sa plainte et de répondre à l’interprétation de sa situation par l’enquêteur » (aux paragraphes 22 à 24).

 

[8]               À mon avis, compte tenu des décisions susmentionnées, la Cour fédérale a eu raison en l’espèce de se demander si la Commission avait traité de toutes les questions fondamentales soulevées dans la plainte de discrimination et si l’appelante avait eu une occasion suffisante d’établir le bien‑fondé des éléments essentiels de sa plainte et de répondre à la preuve présentée à son encontre.

 

[9]               La Cour fédérale disposait de trois rapports d’enquête, de rapports médicaux présentés par l’appelante et par les Forces canadiennes et de plusieurs observations présentées par l’appelante. Ces documents montrent globalement que l’appelante a eu une occasion suffisante d’établir le bien‑fondé des éléments essentiels de sa plainte et de répondre à la preuve présentée à son encontre.

 

[10]           Devant notre Cour, l’appelante a insisté sur le fait que la Commission ne l’aurait pas interrogée sur les questions relatives à la discrimination fondée sur la déficience et sur le fait qu’elle ne lui avait pas communiqué des documents.

 

[11]           En ce qui concerne l’allégation portant que l’appelante n’aurait pas été interrogée sur des questions liées à la déficience, il faut tout d’abord remarquer que la Commission a effectivement interrogé l’appelante. Celle‑ci le conteste affirmant que la Commission l’a interrogée dans le cadre de l’enquête sur la discrimination fondée sur le sexe et la situation de famille, et non sur la discrimination fondée sur la déficience. Selon la page titre du premier rapport d’enquête, cela pourrait bien être vrai. Toutefois, cela ne diminue en rien le fait que, selon ce rapport d’enquête, l’interrogatoire a eu une portée large, allant au‑delà de la discrimination fondée sur le sexe et la situation familiale. Selon les propos de la Cour fédérale, l’appelante a eu « amplement l’occasion » de soupeser toutes les questions qui la préoccupaient.

 

[12]           Un exemple en ce sens figure au paragraphe 65 du premier rapport d’enquête. L’enquêteur indique que l’appelante a fait valoir en interrogatoire que les Forces canadiennes étaient [traduction] « sur le point de mettre fin à son emploi » et lorsque cela [traduction] « n’a pas été possible par voie administrative », l’appelante a été libérée pour des [traduction] « raisons médicales », c.‑à‑d. sa déficience. L’appelante a également précisé ce point de vue et les faits à l’appui dans sa plainte et dans les observations écrites ultérieures présentées à la Commission.

 

[13]           Vu les renseignements communiqués dans le premier rapport d’enquête sur l’interrogatoire de portée vaste de l’appelante, celle‑ci devait démontrer, dans les circonstances de la présente affaire, qu’elle disposait des renseignements pouvant être utiles à la Commission quant à la question de la déficience et qu’elle a été en quelque sorte empêchée de communiquer ces renseignements au cours de l’interrogatoire. L’appelante n’a produit aucun élément de preuve à cet effet.

 

[14]           L’appelante nous demande de tenir pour acquis qu’elle aurait pu fournir des renseignements utiles dans le cadre d’un interrogatoire sur la question de la déficience. Il n’est pas loisible à la Cour de donner suite à sa demande en prenant connaissance d’office d’un fait controversé.

 

[15]           En ce qui concerne la communication de documents à l’appelante, les rapports d’enquête et les observations écrites présentées par l’appelante à la Commission montrent que cette dernière lui a communiqué des renseignements suffisants pour lui permettre d’établir le bien‑fondé des éléments essentiels de sa plainte et de répondre à la preuve présentée à son encontre.

 

[16]           Après un examen attentif de tous les documents dont la Commission disposait, notamment les rapports d’enquête, les observations de l’appelante et la preuve médicale présentée par l’appelante et les Forces canadiennes, j’estime que les conclusions de la Cour fédérale énoncées au paragraphe 7, susmentionné, sont justifiées. En l’espèce, les droits de l’appelante en matière d’équité procédurale ont été respectés.

 

C.        Décision proposée

 

[17]           Par conséquent, je rejetterais l’appel avec dépens.

 

« David Stratas »

j.c.a.

 

 

 

 

« Je suis d’accord

     Pierre Blais, j.c. »

 

« Je suis d’accord

     M. Nadon, j.c.a. »

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Semra Denise Omer

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    A‑80‑11

 

APPEL D’UNE ORDONNANCE DU JUGE MARTINEAU EN DATE DU 20 JANVIER 2011, NO DE DOSSIER T‑149‑10

 

INTITULÉ :                                                   LORETTA BEST c.
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 13 décembre 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                        LE JUGE STRATAS

 

Y ONT SOUSCRIT :                                     LE JUGE EN CHEF BLAIS

                                                                        LE JUGE NADON

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 14 décembre 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Chantal Beaupré

 

POUR L’APPELANTE

 

J. Sanderson Graham

 

POUR L’INTIMÉ

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Lister Beaupré

Ottawa (Ontario)

 

POUR L’APPELANTE

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR L’INTIMÉ

 

 

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