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Cour d’appel fédérale

 

Federal Court of Appeal

Date : 20111109

Dossier : A-144-11

Référence : 2011 CAF 306

 

CORAM :      LE JUGE NOËL

                        LE JUGE PELLETIER

                        LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

 

ENTRE :

TAXPRO PROFESSIONAL CORPORATION

et HARI NESATHURAI

appelants

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

intimé

 

 

 

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 3 novembre 2011.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 9 novembre 2011.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                                      LE JUGE NOËL

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                       LE JUGE PELLETIER

LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

 


Cour d’appel fédérale

 

Federal Court of Appeal

Date : 20111109

Dossier : A-144-11

Référence : 2011 CAF 306

 

CORAM :      LE JUGE NOËL

                        LE JUGE PELLETIER

                        LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

 

ENTRE :

TAXPRO PROFESSIONAL CORPORATION

et HARI NESATHURAI

appelants

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

intimé

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE NOËL

[1]               Taxpro Professional Corporation et Hari Nesathurai (les appelants) font appel d’une décision de la Cour fédérale dans laquelle M. le juge Mandamin (le juge de première instance) a conclu que certains des documents dont la production avait été demandée conformément à une demande formelle faite en vertu des alinéas 231.2(1)a) et b) de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.) (la Loi), ne bénéficiaient pas du privilège du secret professionnel de l'avocat et devaient donc être produits.

 

[2]               Le juge de première instance devait se prononcer sur 31 documents qui avaient été placés dans une enveloppe scellée afin que soit préservé leur caractère confidentiel en attendant qu’il les examine. Après avoir fait une analyse approfondie de la jurisprudence et s’être attardé aux particularités des documents, il a conclu que 27 d’entre eux bénéficiaient du privilège du secret professionnel de l'avocat et que les quatre restants de l’étaient pas.

 

[3]               Les appelants contestent la conclusion du juge de première instance portant sur trois de ces quatre documents. Par ordonnance de notre Cour, les documents sont restés dans une enveloppe scellée jusqu’à ce qu’il soit disposé de l’appel.

 

[4]               En expliquant pourquoi selon lui les documents en cause n’étaient pas protégés, le juge de première instance a pris soin de ne pas révéler leur contenu. Après avoir souligné la différence entre d’une part des faits qui ont une existence autonome et d’autre part des communications protégées, il a conclu que les trois documents en cause ne relevaient pas du privilège du secret professionnel de l'avocat parce qu’ils concernaient « des questions financières [ne comportant] aucun indice laissant supposer qu’un avis juridique est sollicité ou donné » (motifs, paragraphe 51).

 

[5]               Les appelants affirment que, en décidant ainsi, le juge de première instance n’a pas tenu compte du contexte. D’après eux, bien que les documents, pris isolément, puissent être considérés comme étrangers à l’avis juridique donné, cela cesse d’être le cas quand l’affaire est considérée dans son contexte.

[6]               J’ai soigneusement examiné les documents en question, en tenant compte du contexte. Le contexte montre qu’il existe une relation avocat-client entre Me Nesathurai et sa cliente, mais cela ne met pas en doute la conclusion à laquelle est arrivé le juge de première instance. Dans la mesure où les appelants sont d’avis qu’il existe un lien entre l’avis juridique donné et les questions financières révélées par les documents, il leur incombait de montrer en quoi consistait ce lien. Je relève à cet égard que l’avis juridique donné dans le cadre de la relation avocat-client fait partie du dossier scellé.

 

[7]               Les appelants ont aussi fait valoir que le juge de première instance aurait dû conclure que la demande formelle qui avait été faite en l’espèce constituait un abus de procédure que le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée rend irrecevable. Malgré que ces points aient été soulevés devant le juge de première instance, il ne les a pas abordés dans ses motifs.

 

[8]               Au soutien de ces arguments, l’avocat des appelants a précisé que c’est la troisième fois que des clients de Me Nesathurai sont ciblés par les autorités fiscales. Mettant en relief les deux cas antérieurs, il a renvoyé à deux jugements de la Cour fédérale : Canada (Ministre du Revenu national – M.R.N.) c. Welton Parent Inc., 2006 CF 67, [2006] A.C.F. n° 117, et Nesathurai c. Canada (Ministre du Revenu national – M.R.N.), 2008 CF 177, [2008] A.C.F. n° 220.

 

[9]               Dans la première affaire, il était question d’une demande péremptoire de produire des renseignements se rapportant à des personnes non désignées nommément, conformément au paragraphe 231.2(2) de la Loi. Les renseignements recherchés comprenaient les noms des clients de trois avocats qui avaient donné des avis juridiques dans le contexte d’un régime extraterritorial, l’un de ces avocats étant Me Nesathurai. La Cour a jugé que la communication des noms des clients équivaudrait à divulguer la nature et le contenu de l’avis juridique que les avocats avaient donné à ces clients. Elle a donc conclu que les noms étaient protégés et qu’ils n’avaient pas à être divulgués.

 

[10]           Dans la deuxième affaire, Me Nesathurai s’était vu signifier, cette fois en vertu du paragraphe 289(1) de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. 1985, ch. E-14, une autre demande exigeant la production de renseignements qui, bien que pas tout à fait les mêmes que dans la première affaire, étaient de même nature ou de même type. Se fondant sur le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée, la Cour fédérale a annulé la demande de renseignements, sous réserve du droit du ministre de signifier une nouvelle demande qui ne viserait pas les noms des clients de Me Nesathurai.

 

[11]           En ce qui concerne les arguments présentés par les appelants en l’espèce, le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée ne saurait être applicable à l’égard des deux décisions susmentionnées car la question sur laquelle elles portent ne se pose pas en l’espèce. En effet, la demande à laquelle nous avons affaire ne concerne pas des personnes non désignées nommément, et l’identité de la cliente de Me Nesathurai est bien connue.

 

[12]           Quant à l’argument selon lequel la demande formelle constitue un abus de procédure, il convient de souligner que c’est la troisième fois que des clients de Me Nesathurai sont visés par des demandes formelles. Cependant, ce constat, en soi, ne permet pas de conclure à un abus de procédure. Pour obtenir la réparation qu’ils réclament, il incombait aux appelants de prouver que l’intimé a recours à ses pouvoirs qu’il détient de la loi dans un but illégitime. Aucune preuve de cette nature n’a été produite en l’espèce.

 

[13]           Je rejetterais l’appel, avec dépens.

 

« Marc Noël »

j.c.a.

 

« Je suis d’accord

          J.D. Denis Pelletier, j.c.a. »

 

« Je suis d’accord

          Carolyn Layden-Stevenson, j.c.a. »

 

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                                            A-144-11

 

APPEL DU JUGEMENT DU 24 FÉVRIER 2011 RENDU PAR MONSIEUR LE JUGE MANDAMIN DANS LE DOSSIER N° T-88-09

 

INTITULÉ :                                                                           TAXPRO PROFESSIONAL CORPORATION et HARI NESATHURAI et LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   Le 3 novembre 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                Le juge Noël

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                             Le juge Pelletier

                                                                                                La juge Layden-Stevenson

 

DATE DES MOTIFS :                                                          Le 9 novembre 2011

 

 

COMPARUTIONS:

 

Glen M. Perinot

POUR LES APPELANTS

 

Margaret J. Nott

Cenobar Parker

 

POUR L’INTIMÉ

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

 

Navarrete Perinot, Corporation professionnelle

Toronto (Ontario)

 

POUR LES APPELANTS

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉ

 

 

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