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Cour d’appel fédérale

 

Federal Court of Appeal

Date : 20111018

Dossier : A‑345‑10

Référence : 2011 CAF 287

 

CORAM :      LE JUGE EVANS

                        LA JUGE LAYDEN‑STEVENSON

                        LE JUGE STRATAS

 

ENTRE :

SAEED KORKI

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

 

Audience tenue à Vancouver (Colombie‑Britannique), le 18 octobre 2011

Jugement rendu à l’audience à Vancouver (Colombie‑Britannique), le 18 octobre 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                    LE JUGE STRATAS

 


Cour d’appel fédérale

 

Federal Court of Appeal

Date : 20111018

Dossier : A‑345‑10

Référence : 2011 CAF 287

 

CORAM :      LE JUGE EVANS

                        LA JUGE LAYDEN‑STEVENSON

                        LE JUGE STRATAS

 

ENTRE :

SAEED KORKI

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Vancouver (Colombie‑Britannique), le 18 octobre 2011)

LE JUGE STRATAS

 

[1]               La Cour est saisie d’un appel du jugement 2010 CCI 384 de la Cour canadienne de l’impôt, prononcé par le juge Little.

 

[2]               L’appelant a déclaré des revenus nets de 19 100 $ et de 22 312 $ respectivement pour les années d’imposition 2002 et 2003. Le ministre, après analyse de valeur nette, a délivré à l’appelant des avis de nouvelle cotisation, que ce dernier a contestés. Le ministre, ayant examiné l’avis d’opposition de l’appelant, lui a délivré un avis révisé de nouvelle cotisation, selon lequel il avait omis de déclarer, pour 2002 et 2003, des revenus d’entreprise et de pensions s’élevant respectivement à 287 340 $ et 177 380 $. Le ministre a aussi prononcé des pénalités pour faute lourde au titre de cette omission.

 

[3]               L’appelant a exercé un recours contre les nouvelles cotisations révisées devant la Cour canadienne de l’impôt, qui l’a débouté.

 

[4]               La décision de la Cour l’impôt ne nous paraît entachée d’aucune erreur donnant lieu à révision. Elle a conclu qu’« une bonne partie du témoignage [de l’appelant] n’était pas fiable » et relevé « diverses contradictions et incohérences dans [ce] témoignage » (paragraphe 47). Cette conclusion de la Cour de l’impôt est étayée par un examen détaillé de la preuve (paragraphes 28 à 46). L’appelant ne nous a pas convaincus que les conclusions de fait de la Cour de l’impôt sont marquées d’une quelconque erreur manifeste et dominante.

 

[5]               Dans son exposé des faits et du droit et dans les observations qu’il nous a présentées de vive voix, l’appelant a principalement invoqué quatre motifs d’opposition à la décision de la Cour de l’impôt.

 

[6]               Premièrement, soutient l’appelant, la Cour de l’impôt n’a pas compris la charge de preuve applicable, telle que l’explique l’arrêt Hickman Motors Ltd. c. Canada, [1997] 2 R.C.S. 336. Or, à notre avis, la lecture impartiale des motifs de la Cour de l’impôt montre qu’elle a bien compris la charge de preuve : elle a tout simplement estimé que l’appelant n’avait pas produit de preuve crédible en l’espèce.

 

[7]               Deuxièmement, fait valoir l’appelant, la Cour de l’impôt a omis de prendre en considération certains certificats sous serment et autres documents établis en Iran qui prouvaient qu’il détenait de l’argent en fiducie pour son père. Or un bon nombre de ces certificats et autres documents avaient été établis sous la direction ou avec la participation de l’appelant. À notre avis, l’opinion d’ensemble de la Cour de l’impôt sur la crédibilité de l’appelant, ainsi que l’absence de dépositions de personnes résidant en Iran qui auraient participé à la création de ces documents (dépositions que l’appelant aurait pu obtenir en formant une requête sous le régime de l’article 119 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt), l’ont amenée à n’attribuer que peu de poids auxdits documents. Nous observons notamment que certains des éléments de preuve que la Cour de l’impôt a jugé contradictoires et sujets à caution se rapportaient à des questions sur lesquelles portaient les certificats et documents susdits. L’appelant n’a établi l’existence d’aucune erreur manifeste et dominante qui commanderait l’annulation de ces conclusions de fait de la Cour de l’impôt.

 

[8]               Troisièmement, toujours selon l’appelant, la Cour de l’impôt n’était pas fondée à conclure à la faute lourde, de manière à le rendre passible de la pénalité prévue au paragraphe 163(2) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 (5e suppl.), ch. 1. Il est vrai que, dans la partie de ses motifs où il déclare qu’une pénalité doit être prononcée, le juge de la Cour de l’impôt ne mentionne que très peu de faits. Cependant, les motifs du jugement de la Cour de l’impôt considérés dans leur ensemble exposent des faits qui suffisent amplement à étayer sa conclusion de faute lourde.

 

[9]               Quatrièmement, l’appelant se plaint de certaines remarques formulées par le juge de la Cour de l’impôt dans le cadre de son recours. Ce juge a fait observer qu’il serait mieux en mesure d’apprécier la crédibilité de l’appelant en tant que témoin s’il déposait en anglais plutôt qu’avec l’aide d’un interprète. L’appelant fait valoir devant notre Cour que cette observation et d’autres donnent à penser que le juge de la Cour de l’impôt avait d’une certaine manière préjugé de sa crédibilité et n’était donc pas impartial. Nous notons que l’appelant, à aucun moment, n’a contesté devant la Cour de l’impôt ces remarques du juge. Celui‑ci lui a accordé une suspension d’audience pour décider avec son avocat dans quelle langue il témoignerait, après quoi il a exprimé son choix de déposer en anglais. L’appelant n’a excipé de la partialité ou de l’appréciation prématurée de sa crédibilité ni à ce moment ni à aucun autre de l’instance. Or il était tenu, le cas échéant, de faire valoir sa crainte de partialité à la première occasion; voir Bassila c. Canada, 2003 CAF 276, paragraphe 10. L’omission d’alléguer une exception de partialité vaut abandon de recours contre toutes implications ou conséquences des remarques du juge. Quoi qu’il en soit, nous ne sommes pas convaincus que l’appelant a rempli la norme de preuve rigoureuse applicable à la question de la partialité judiciaire.

 

[10]           Avant l’audience du présent appel, l’appelant a formé une requête en production d’éléments de preuve non produits devant la Cour de l’impôt. Cette requête a été rejetée, mais sans préjudice de la possibilité de la plaider de nouveau devant la formation d’appel, ce que l’appelant a fait.

 

[11]           La preuve que l’appelant veut faire admettre consiste en l’enregistrement vidéo d’un interrogatoire principal de son père effectué en Iran. Or l’avocat de l’appelant reconnaît que le père de celui‑ci, dans cette vidéo, ne fait que répéter les déclarations qu’il a formulées dans une lettre signée de sa main, dont disposait déjà la Cour de l’impôt.

 

[12]           Le juge Evans a formulé au paragraphe 8 de l’arrêt Canada c. Conseil canadien pour les réfugiés, 2008 CAF 17, le critère applicable à l’admission de nouveaux éléments de preuve sous le régime de l’article 351 des Règles des Cours fédérales. La Cour doit se demander si les nouveaux éléments de preuve « auraient pu être découverts moyennant une diligence raisonnable avant la fin de l’instruction », s’ils sont crédibles et s’ils sont « pour ainsi dire déterminants dans l’appel ». Les éléments de preuve qui ne remplissent pas ces trois conditions peuvent néanmoins être admis « dans l’intérêt de la justice ».

 

[13]           L’avocat de l’appelant a reconnu devant notre Cour que les éléments de preuve que son client voulait y produire « auraient pu être découverts moyennant une diligence raisonnable » avant la fin du procès à la Cour de l’impôt. En outre, comme ces éléments ne font que corroborer la preuve dont la Cour de l’impôt disposait déjà, ils ne sont pas « pour ainsi dire déterminants » dans le présent appel. Enfin, nous ne voyons aucun autre motif qui nous inciterait à les admettre dans l’intérêt de la justice. Par conséquent, nous refusons d’admettre les éléments de preuve en question.

 

[14]           À en juger d’après la description de son contenu qu’a donnée l’avocat de l’appelant, même si nous avions admis cette vidéo en preuve, nous n’en aurions pas moins rejeté l’appel, par les motifs qui précèdent.

 

[15]           En conséquence, nous rejetterons l’appel avec dépens.

 

 

« David Stratas »

j.c.a.

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                                A‑345‑10

 

APPEL DU JUGEMENT EN DATE DU 15 JUILLET 2010 DE LA COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT, PRONONCÉ PAR LE JUGE LITTLE DANS LE DOSSIER NO 2008‑74 (IT)G (2010 CCI 384)

 

INTITULÉ :                                                               SAEED KORKI c.

                                                                                    SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                         Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                       Le 18 octobre 2011

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :           LES JUGES EVANS, LAYDEN‑STEVENSON

                                                                                    ET STRATAS

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :                   LE JUGE STRATAS

 

 

COMPARUTIONS :

 

D. Laurence Armstrong

POUR L’APPELANT

 

Bruce Senkpiel

Max Matas

POUR L’INTIMÉE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Armstrong Wellman

Avocats

Victoria (Colombie‑Britannique)

 

POUR L’APPELANT

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉE

 

 

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