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Cour d'appel fédérale

Federal Court of Appeal

 

 

Date: 20111020

Dossier: A-14-11

Référence: 2011 CAF 285

 

CORAM :      LE JUGE PELLETIER

                        LA JUGE TRUDEL

                        LE JUGE MAINVILLE

 

ENTRE :

GASTON MARCOUX

demandeur

et

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

 

défendeur

 

Audience tenue à Québec (Québec), le 4 octobre 2011.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 20 octobre 2011.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                          LE JUGE PELLETIER  

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                     LA JUGE TRUDEL

LE JUGE MAINVILLE

 


Cour d'appel fédérale

Federal Court of Appeal

Date: 20111020

Dossier: A-14-11

Référence: 2011 CAF 285

 

CORAM :      LE JUGE PELLETIER

                        LA JUGE TRUDEL

                        LE JUGE MAINVILLE

 

ENTRE :

GASTON MARCOUX

demandeur

 

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

                                                                                                                                         défendeur 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

LE JUGE PELLETIER

[1]               Monsieur Marcoux demande la révision judiciaire de la décision CUB 72725A en date du 10 novembre 2010, décision signée par le juge de Montigny de la Cour fédérale, siégeant en  sa qualité de juge-arbitre. La question en litige est celle de déterminer la nature des prestations payées pendant les semaines où le prestataire se dit non disponible pour le travail sans que pour autant, la Commission de l’assurance-emploi (la Commission) exige qu’il lui fournisse une preuve de maladie.

[2]               Monsieur Marcoux, qui recevait des prestations régulières d’assurance-emploi au cours d’une période de prestations qui a commencé le 12 novembre 2006, s’est dit non-disponible pour le travail entre le 25 et le 31 mars 2007 et entre le 15 et le 21 avril 2007 parce qu’il était malade. Il a donc reçu pendant ces deux semaines des prestations de maladie. Au mois d’avril 2008, monsieur Marcoux a demandé à la Commission de reconvertir les prestations payées à titre de prestations maladie en prestations régulières au motif qu’il n’était pas malade au cours de ces deux semaines. La Commission a refusé sa demande, estimant que sa déclaration originale était plus digne de foi que celle faite au soutien de sa demande.

 

[3]               Monsieur Marcoux porta cette décision en appel devant le conseil arbitral. Au cours de l’audition de son appel, monsieur Marcoux avoua qu’il était, de fait, malade pendant les deux semaines en cause, mais que, de toute façon, les prestations de maladie payées pendant une période de maladie de courte durée sont, en effet, des prestations régulières puisque la Commission n’exige pas que lui soit soumis un certificat de médecin par rapport à ces semaines. Le conseil arbitral rejeta l’appel de monsieur Marcoux en notant sa maladie avouée pendant les semaines en cause.

 

[4]               Monsieur Marcoux en appela de la décision du conseil arbitral au juge-arbitre. Devant celui-ci, il tenta d’attaquer la validité constitutionnelle de la politique de la Commission selon laquelle celle-ci n’exige pas la production de certificat de médecin dans le cas de maladies de courte durée. Ceci lui a valu une remise pour lui permettre de constituer son dossier et de signifier l’avis de question constitutionnelle prévu par l’article 57 de la Loi sur les cours fédérales L.R.C. 1985 c. F-7. Ces exigences satisfaites, Monsieur Marcoux plaida sa cause devant le juge-arbitre, qui la rejeta.

 

[5]               En bref, le juge-arbitre était d’avis que monsieur Marcoux n’avait pas mis de l’avant des éléments de preuve susceptibles d’étayer ses arguments constitutionnels. Ce faisant, le juge-arbitre donnait effet à une jurisprudence constante voulant que les questions constitutionnelles ne se décident pas dans un vide factuel. Pour ce qui était de la demande de monsieur Marcoux de faire reconvertir les prestations de maladies en prestations régulières, le juge-arbitre a statué que la décision du conseil arbitral était raisonnable, compte tenu de l’aveu de monsieur Marcoux quant à son état de santé.

 

[6]               Devant cette Cour, monsieur Marcoux a fait état de l’abus qu’engendrait la politique de la Commission selon laquelle elle n’exige pas de certificat de médecin lorsqu’un prestataire se déclare non disponible au travail pour raison de maladie pour une période allant jusqu’à cinq semaines. Selon lui, les habitués du système d’assurance-emploi profitent de la politique de la Commission pour obtenir des prestations auxquelles ils n’ont pas droit en mentant quant à leur état de santé tandis que ceux qui ne sont pas aussi expérimentés ne se prévalent pas de cette occasion de profiter du mensonge.

 

[7]               Sans nier qu’il puisse exister de l’abus de la part de certains prestataires, le Procureur général du Canada se fonde sur le paragraphe 50(10) de la Loi sur l’assurance-emploi, L.C. 1996 c. 23 (la Loi), pour justifier la politique de la Commission en cause, même si le paragraphe 40(1) du Règlement sur l’assurance-emploi, DORS/96-332 semble exiger la production d’un certificat de médecin. Les dispositions législatives pertinentes suivent :

 Le prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour tout jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel il ne peut prouver qu’il était, ce jour-là :

a) soit capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d’obtenir un emploi convenable;

b) soit incapable de travailler par suite d’une maladie, d’une blessure ou d’une mise en quarantaine prévue par règlement et aurait été sans cela disponible pour travailler;

Règlement sur l’assurance-emploi

 

 (1) Les renseignements et la preuve que le prestataire doit fournir à la Commission pour établir son incapacité de travailler par suite d’une maladie, d’une blessure ou d’une mise en quarantaine en application de l’alinéa 18b) ou du paragraphe 152.03(1) de la Loi consistent en un certificat établi par un médecin ou autre professionnel de la santé qui atteste cette incapacité et qui indique la durée probable de la maladie, de la blessure ou de la quarantaine.

 

Loi sur l’assurance-emploi

 

50(10) La Commission peut suspendre ou modifier les conditions ou exigences du présent article ou des règlements chaque fois que, à son avis, les circonstances le justifient pour le bien du prestataire ou un groupe ou une catégorie de prestataires.

 A claimant is not entitled to be paid benefits for a working day in a benefit period for which the claimant fails to prove that on that day the claimant was

(a) capable of and available for work and unable to obtain suitable employment;

(b) unable to work because of a prescribed illness, injury or quarantine, and that the claimant would otherwise be available for work; or

 

 

Employment Insurance Regulation

 (1) The information and evidence to be provided to the Commission by a claimant in order to prove inability to work because of illness, injury or quarantine under paragraph 18(b) or subsection 152.03(1) of the Act, is a medical certificate completed by a medical doctor or other medical professional attesting to the claimant’s inability to work and stating the probable duration of the illness, injury or quarantine.

 

Employment Insurance Act

 

(10) The Commission may waive or vary any of the conditions and requirements of this section or the regulations whenever in its opinion the circumstances warrant the waiver or variation for the benefit of a claimant or a class or group of claimants

 

[8]               Monsieur Marcoux affirme que la politique de la Commission n’est encadrée d’aucune façon, de sorte qu’elle est d’une imprécision incompatible avec la règle de droit. Il nous demande de déclarer invalide cette politique et d’ajouter les semaines auxquelles elle s’applique (quatre, selon monsieur Marcoux) aux 15 semaines de prestations de maladie prévues par la Loi. Ceci ferait en sorte que toute personne se disant non disponible pour le travail en raison de maladie devrait produire un certificat de médecin à l’appui de sa demande de prestation de maladie, mais en revanche, le prestataire aurait droit à des prestations de maladies pour une période de 19 semaines.

 

[9]               Le Procureur général du Canada nous fait remarquer que monsieur Marcoux demande à cette cour de modifier la Loi, ce qui n’est pas de notre compétence. Il s’agit de la compétence exclusive du législateur.

 

[10]           Monsieur Marcoux n’a pas à critiquer l’exercice que fait la Commission de sa discrétion puisqu’il en a profité lors de sa déclaration de non-disponibilité en raison de son état de santé. Compte tenu de son aveu qu’il était vraiment malade au cours des semaines en question, la décision de la Commission de ne pas reconvertir ses prestations maladie pour les deux semaines en cause en prestations régulières est inattaquable.

 

[11]           Pour ce qui est de la question de la légitimité de la politique de la Commission selon laquelle elle n’exige pas des prestataires un certificat de médecin en cas de maladie de courte durée, monsieur Marcoux ne m’a pas convaincu que le paragraphe 50(10) n’est pas apte à conférer cette discrétion à la Commission.

 

[12]           En ce qui concerne la question constitutionnelle soulevée par monsieur Marcoux, je suis d’avis qu’elle n’en est pas une. Monsieur Marcoux n’est pas en mesure de préciser la loi ou la disposition de loi qui brime le droit à l’égalité des prestataires. Si la politique ne trouve pas ses assises dans la Loi, elle est illégale et la question de sa constitutionnalité ne se pose pas. La Commission se fonde sur le paragraphe 50(10) de la Loi pour justifier sa politique. Monsieur Marcoux n’a pas su nous convaincre qu’elle avait tort. La distinction faite par monsieur Marcoux entre les prestataires rusés qui abusent du système et les prestataires naïfs qui ne savent pas qu’ils peuvent en abuser ne peut pas justifier un argument de traitement inégal à l’encontre de l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés et ce, pour des raisons évidentes.

 

[13]           Je rejetterais donc la demande de contrôle judiciaire. Le procureur général demande que lui soient accordés ses dépens. Le procureur général a eu raison et, règle générale, il aurait droit à ses dépens. Monsieur Marcoux ne m’a pas convaincu que la règle générale ne s’applique pas. J’accorderais donc au procureur général ses dépens que je fixerais à 500 $, débours inclus.

 

«J.D. Denis Pelletier»

j.c.a.

 

«Je suis d’accord

      Johanne Trudel j.c.a. »

 

«Je suis d’accord

      Robert M. Mainville j.c.a. »


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A-14-11

 

INTITULÉ :                                                                           GASTON MARCOUX c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     Québec (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   Le 4 octobre 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                Le juge Pelletier

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                             La juge Trudel

                                                                                                Le juge Mainville

                                                                                               

 

DATE DES MOTIFS :                                                          Le 20 octobre 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Gaston Marcoux

POUR LE DEMANDEUR

(Pour son propre compte)

 

Pauline Leroux

POUR L’INTIMÉ

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

S/O

POUR LE DEMANDEUR

 

Ministère de la Justice du Canada,

Montréal (Québec)

POUR L’INTIMÉ

 

 

 

 

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