Décisions de la Cour d'appel fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20110124

Dossier : A‑82‑10

Référence : 2011 CAF 25

 

CORAM :      LE JUGE EN CHEF BLAIS

                        LE JUGE EVANS

                        LE JUGE STRATAS

 

ENTRE :

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

demandeur

et

 

ROSEMONT LIVESTOCK

défenderesse

 

 

Audience tenue par vidéoconférence entre Toronto (Ontario)

et Regina (Saskatchewan), le 24 janvier 2011

 

Jugement prononcé à l’audience à Toronto (Ontario), le 24 janvier 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                       LE JUGE STRATAS

 


Date : 20110124

Dossier : A‑82‑10

Référence : 2011 CAF 25

 

CORAM :      LE JUGE EN CHEF BLAIS

                        LE JUGE EVANS

                        LE JUGE STRATAS

 

ENTRE :

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

(AGENCE CANADIENNE D’INSPECTION DES ALIMENTS)

demandeur

et

 

ROSEMONT LIVESTOCK

défenderesse

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Toronto (Ontario), le 24 janvier 2011)

 

LE JUGE STRATAS

 

[1]               Le procureur général du Canada sollicite le contrôle judiciaire d’une décision, en date du 25 janvier 2010, de la Commission de révision agricole du Canada.

 

[2]               La Commission a conclu que l’Agence canadienne d’inspection des aliments n’avait pas établi selon la prépondérance des probabilités que la défenderesse, Rosemont Livestock, avait contrevenu au paragraphe 177(1) du Règlement sur la santé des animaux, DORS/91‑525. Le paragraphe 177(1) du Règlement interdit de « transporter ou faire transporter un animal ou une carcasse d’animal qui ne porte pas une étiquette approuvée ».

 

[3]               La Commission a exposé un certain nombre de motifs au soutien de sa conclusion. Dans la présente demande, le procureur général du Canada les conteste tous. À notre avis, il suffit que nous tranchions l’un des motifs. 

 

[4]               En l’espèce, pour démontrer l’existence d’une violation du paragraphe 177(1), l’Agence devait prouver, selon la prépondérance des probabilités, que les agneaux trouvés sans étiquette appartenaient à Rosemont et que Rosemont avait omis d’étiqueter les agneaux.  

 

[5]               L’Agence n’a pas convaincu la Commission de ces deux éléments essentiels.

 

[6]               Un bref examen des faits suffit. L’inspectrice d’hygiène de l’Agence, Mme Ashley Lalonde, a trouvé des agneaux sans étiquette dans les box des Ontario Stockyards, à Cookstown, en Ontario. Après avoir fait enquête, elle a conclu que les agneaux non étiquetés appartenaient à Rosemont. C’est ce que Mme Lalonde a affirmé dans son témoignage devant la Commission. En réponse, Rosemont a fait comparaître deux témoins, qui ont déclaré que Rosemont étiquetait tous les agneaux destinés à l’Ontario.

 

[7]               La Commission a fait observer (au paragraphe 57 de sa décision) que l’Agence n’avait présenté aucune preuve directe démontrant que les agneaux non étiquetés appartenaient bien à Rosemont. La Commission a relevé l’existence d’éléments de preuve indirecte et circonstancielle en ce sens, mais a jugé insuffisante la preuve relative à cette question de fait.

 

[8]               La Commission n’a pas non plus acquis la conviction que Rosemont avait omis d’étiqueter les agneaux. Elle est parvenue à cette conclusion après avoir analysé la preuve contradictoire. La Commission a expliqué (au paragraphe 58 de sa décision) que « les conditions d’étiquetage n’étaient pas idéales, mais il relèverait de l’hypothèse, et non d’une déduction au sens juridique, d’affirmer que [des] agneaux ont pu échapper au processus d’étiquetage » alors qu’ils se trouvaient à la ferme de Rosemont.

 

[9]               Globalement, la Commission a conclu (au paragraphe 62 de sa décision) que « [p]our que la Commission confirme qu’il y a eu violation dans cette affaire, il lui faudrait se fonder sur trop de spéculations, d’impressions et de ouï‑dire » et que la cause de l’Agence «  n’est pas corroborée par suffisamment de preuves de propriété et de garde des agneaux ». Comme la Commission n’avait pas établi tous les éléments constitutifs de l’infraction, la Commission a décidé que Rosemont n’était pas responsable de la violation.

 

[10]           Compte tenu de la preuve dont était saisie la Commission, il était loisible à celle‑ci de tirer ces conclusions de fait. Eu égard à la norme de contrôle de la raisonnabilité qui s’applique en l’espèce et qui commande la retenue judiciaire, aucun fondement ne justifie que nous annulions ces conclusions de fait. Par conséquent, la conclusion de la Commission portant qu’il n’y a pas eu violation doit être confirmée.

 

[11]           Le procureur général a soutenu devant la Cour que la Commission a imposé à l’Agence un fardeau de preuve plus exigeant que la prépondérance des probabilités. Il a insisté sur l’observation de la Commission selon laquelle l’Agence n’avait pas présenté de preuve directe de la propriété des agneaux.   

 

[12]           L’examen de l’ensemble des motifs de la Commission nous amène à conclure que cette dernière a bien appliqué la norme de preuve voulue, soit la preuve selon la prépondérance des probabilités. Au début de son analyse (au paragraphe 46), la Commission a relevé cette norme de preuve. Elle a fait remarquer avec justesse qu’elle était tenue d’appliquer la norme prévue par l’article 19 de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, L.C. 1995, ch. 40, et a cité l’arrêt rendu par notre Cour à cet effet dans l’affaire Doyon c. Procureur général du Canada, 2009 CAF 152. Enfin, en résumant ses conclusions quant aux faits, elle a mentionné la norme de la prépondérance des probabilités trois fois (aux paragraphes 60, 61 et 63 de sa décision). La Commission n’a pas imposé à l’Agence un fardeau de preuve plus exigeant du fait qu’elle a fait référence à l’absence de preuve directe de la part de l’Agence. Nous sommes convaincus au contraire que la Commission a évalué la preuve dont elle était saisie et, l’appréciant dans son ensemble, a conclu que cette preuve n’établissait pas l’existence d’une violation selon la prépondérance des probabilités.

 

[13]           En conséquence, nous rejetons la demande. Comme Rosemont n’a déposé ni avis de comparution ni mémoire, aucuns dépens afférents à la demande ne lui seront adjugés.

 

 

« David Stratas »

j.c.a.

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    A‑82‑10

 

(DEMANDE DE CONTRÔLE JUDICIAIRE D’UNE DÉCISION, EN DATE DU 25 JANVIER 2010, RENDUE PAR LA COMMISSION DE RÉVISION AGRICOLE DU CANADA DANS LE DOSSIER No RT‑1509)

 

INTITULÉ :                                                   PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA c. ROSEMONT LIVESTOCK

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Par vidéoconférence entre Toronto (Ontario) et Regina (Saskatchewan)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 24 janvier 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

DE LA COUR                                                (LE JUGE EN CHEF BLAIS ET LES JUGES EVANS ET STRATAS)

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :       LE JUGE STRATAS

 

 

COMPARUTIONS :

 

Philippe Alma

POUR LE DEMANDEUR

 

Greg McKelevey

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Greg McKelevey

Caron (Saskatchewan)

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.