Cour d’appel fédérale |
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Federal Court of Appeal |
ENTRE :
IPR PHARMACEUTICALS, INC.,
ASTRAZENECA UK LIMITED et
SHIONOGI SEIYAKU KABUSHIKI KAISHA
et
Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 20 avril 2010.
Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 22 avril 2010.
MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE NOËL
Y ONT SOUSCRIT : LE JUGE PELLETIER
LA JUGE DAWSON
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Federal Court of Appeal |
Date : 20100422
Dossier : A-510-09
Référence : 2010 CAF 112
CORAM : LE JUGE NOËL
LE JUGE PELLETIER
LA JUGE DAWSON
ENTRE :
ASTRAZENECA CANADA INC.,
IPR PHARMACEUTICALS, INC.,
ASTRAZENECA UK LIMITED et
SHIONOGI SEIYAKU KABUSHIKI KAISHA
appelantes
et
NOVOPHARM LIMITED
intimée
MOTIFS DU JUGEMENT
[1] Il s’agit d’un appel interjeté à l’encontre de l’ordonnance du juge Hughes (le juge de la Cour fédérale) radiant la déclaration déposée par AstraZeneca Canada Inc., IPR Pharmaceuticals Inc., AstraZeneca UK Limited et Shionogi Seiyaku Kabushiki Kaisha (les appelantes). Selon la déclaration, Novopharm Ltd. (l’intimée) contrefait actuellement le brevet des appelantes en fabriquant ou en faisant fabriquer des quantités commerciales du produit contrefait (contrefaçon actuelle), et elle contrefera le brevet des appelantes si elle s’oppose avec succès à leur demande pendante d’interdiction, et si elle obtient la délivrance d’un avis de conformité à l’égard de ses comprimés de novo-rosuvastatine (quia timet ou contrefaçon future).
[2] Le juge de la Cour fédérale a conclu que les allégations de contrefaçon actuelle constituaient un abus de procédure puisqu’elles étaient fondées sur de simples affirmations sans aucun élément de preuve les étayant. En ce qui concerne la contrefaçon future, le juge de la Cour fédérale a conclu que les allégations était de nature spéculative et ne présentaient pas le niveau de certitude requis pour justifier une action quia timet.
[3] Les appelantes contestent les deux aspects de la décision du juge de la Cour fédérale. Elles soutiennent qu’elles ont invoqué suffisamment de faits pertinents pour étayer les allégations de contrefaçon actuelle et qu’elles avaient répondu aux critères exigés pour une action quia timet. Les appelantes ajoutent que pour le reste, l’avis d’allégation (AA) signifié par l’intimée constitue, en soi, un acte de contrefaçon et que ce fait est suffisant à lui seul pour appuyer une action en contrefaçon. Dans ce contexte, on ne peut pas dire que l’action n’a aucune chance d’être accueillie.
[4] En ce qui concerne l’allégation de contrefaçon actuelle, le juge de la Cour fédérale a souligné qu’on avait demandé aux appelantes de fournir des précisions à l’égard de leur action et qu’elles avaient refusé de le faire. Voici de quelle façon il a examiné l’argument des appelantes, maintenant repris devant notre Cour (motifs, par. 15, 17 et 18) :
[15] […] [les appelantes] soutiennent que toute question portant sur ce que la défenderesse a fait ou a l'intention de faire peut être examinée lors d'un interrogatoire préalable au cours duquel une cause satisfaisante pourra ensuite être établie. […]
[…]
[17] Un grand nombre de décisions de notre Cour ont établi qu'une action ne peut être intentée sur la base de conjectures dans l'espoir que des faits pertinents soient découverts lors de l'interrogatoire préalable, permettant ainsi d'appuyer les allégations figurant dans les actes de procédure. Cette tactique est souvent appelée « interrogatoire à l'aveuglette ». […]
[18] Les allégations faites dans la déclaration déposée dans la présente action selon laquelle l’[intimée] a acquis le médicament [TRADUCTION] « pour usage commercial » et qu'elle a l'intention de le vendre ne s'appuient pas sur des faits déterminants. De simples allégations de cette nature doivent être appuyées par des faits déterminants. Il ne suffit pas de dire que compte tenu des réponses obtenues lors de l'interrogatoire préalable, ces faits peuvent être établis. Il s'agit d'un abus.
[5] Je suis d’accord avec les appelantes pour dire qu’il ne faut pas confondre les faits importants, lesquels doivent être allégués comme ils l’ont été dans la présente affaire, et les moyens de preuve susceptibles d’établir ces faits. Toutefois, il n’en demeure pas moins qu’une allégation qui ne repose sur aucun élément de preuve pour l’étayer est un abus de procédure. À cet égard, au vu du dossier dont il disposait, il était loisible au juge de la Cour fédérale de conclure que l’allégation de contrefaçon actuelle était un abus de procédure. Je fais notamment référence au refus des appelantes de fournir des détails et à leur argument selon lequel leur dossier serait étoffé après l’interrogatoire préalable.
[6] En ce qui concerne la contrefaçon future, le juge de la Cour fédérale a examiné des décisions de la Cour fédérale dans lesquelles des allégations d’actes de contrefaçon n’ayant pas encore été posés ont été radiées au motif que ces actes étaient purement hypothétiques (Connaught Laboratories Ltd. c. SmithKline Beecham Pharma Inc., (1998) 86 C.P.R. (3d) 36; Pfizer Research and Development Co. N.V./S.A. c. Lilly Icos LLC, (2003) 27 C.P.R. (4th) 86; GlaxoSmithKline Biologicals S.A. c. Novartis Vaccines and Diagnostics, Inc., 2007 CF 833). Se fondant sur ces décisions, il a ensuite conclu que (motifs, par. 23) :
Il n'y a pas de différence importante entre les allégations dans les trois affaires susmentionnées et les allégations contenues dans la présente déclaration. Le texte de la présente déclaration a été un peu « poli », mais si on regarde les choses sous une perspective réaliste, tout ce qui est dit est que si Novopharm obtient gain de cause dans la procédure concernant l'avis de conformité après le procès ou l'appel, elle obtiendra fort probablement un avis de conformité et elle commencera fort probablement à vendre le médicament breveté au Canada. Cet acte de procédure n'est pas foncièrement différent de ceux qui ont été radiés par la Cour.
[Non souligné dans l’original.]
[7] Cette conclusion s’appuie sur une interprétation légitime de la déclaration des appelantes et elle est conforme au principe bien établi selon lequel une action quia timet doit être fondée sur autre chose que de simples possibilités.
[8] Le juge de la Cour fédérale ne s’est pas penché sur le dernier argument des appelantes,
c.-à-d. celui selon lequel l’AA constituant en soi un acte de contrefaçon et cette question n’ayant pas encore été examinée par les tribunaux, on ne peut pas dire de l’action qu’elle n’a aucune chance d’être accueillie. L’intimée soutient que cette situation résulte du fait que l’argument n’a pas été porté à l’attention du juge de la Cour fédérale et, en se fondant sur ce motif, elle demande avec insistance à notre Cour de ne pas traiter de cette question.
[9] Le fait que le juge de la Cour fédérale n’ait pas examiné l’argument laisse croire que les appelantes ne l’ont pas présenté ou qu’elles n’ont pas insisté sur ce point. Quoi qu’il en soit, ce que les appelantes tentent de soulever est un acte de contrefaçon nouvellement posé qui devrait être expressément plaidé avant de pouvoir être examiné. La déclaration ne contient aucune allégation de cette nature.
[10] Je rejetterais l'appel avec dépens.
« Je suis d’accord
J.D. Denis Pelletier, j.c.a. »
« Je suis d’accord
Eleanor R. Dawson, j.c.a. »
Traduction certifiée conforme
Jean-Jacques Goulet, LL.L.
COUR D’APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-510-09
(APPEL INTERJETÉ À L’ENCONTRE D’UNE ORDONNANCE RENDUE EN DATE DU 24 NOVEMBRE 2009 PAR LE JUGE HUGHES DE LA COUR FÉDÉRALE, NO T-1563-09.)
INTITULÉ : AstraZeneca Canada Inc., IPR Pharmaceuticals, Inc., AstraZeneca UK Limited et Shionogi Seiyaku Kabushiki Kaisha - et - Novopharm Limited
LIEU DE L’AUDIENCE : Ottawa (Ontario)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 20 avril 2010
MOTIFS DU JUGEMENT : Le juge Noël
Y ONT SOUSCRIT : Le juge Pelletier
COMPARUTIONS :
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POUR LES APPELANTES
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Andrew McIntyre |
POUR L’INTIMÉE
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Toronto (Ontario)
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POUR LES APPELANTES
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Toronto (Ontario) |
POUR L’INTIMÉE
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