Décisions de la Cour d'appel fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20190301


Dossiers : A-235-17

A-236-17

Référence : 2019 CAF 41

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE NADON

LA JUGE GAUTHIER

LA JUGE GLEASON

 

 

Dossier : A-235-17

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

demandeur

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

défenderesse

et

COMMISSION DES RELATIONS DE TRAVAIL ET DE L’EMPLOI DANS LE SECTEUR PUBLIC FÉDÉRAL

intervenante

Dossier : A-236-17

ET ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

demandeur

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

défenderesse

et

COMMISSION DES RELATIONS DE TRAVAIL ET DE L’EMPLOI DANS LE SECTEUR PUBLIC FÉDÉRAL

intervenante

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 22 novembre 2018.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 1er mars 2019.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE GLEASON

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE NADON

LA JUGE GAUTHIER

 


Date : 20190301


Dossiers : A-235-17

A-236-17

Référence : 2019 CAF 41

CORAM :

LE JUGE NADON

LA JUGE GAUTHIER

LA JUGE GLEASON

 

 

Dossier : A-235-17

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

demandeur

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

défenderesse

et

COMMISSION DES RELATIONS DE TRAVAIL ET DE L’EMPLOI DANS LE SECTEUR PUBLIC FÉDÉRAL

intervenante


 

Dossier : A-236-17

ET ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

demandeur

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

défenderesse

et

COMMISSION DES RELATIONS DE TRAVAIL ET DE L’EMPLOI DANS LE SECTEUR PUBLIC FÉDÉRAL

intervenante

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE GLEASON

[1]  Le demandeur sollicite l’annulation de deux décisions de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la Commission), à savoir Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada) 2017 CRTESPF 11 (motifs relatifs au SCC) et Alliance de la Fonction publique du Canada c. Agence du revenu du Canada, 2017 CRTESPF 16 (motifs relatifs à l’ARC). Dans les deux décisions, la Commission a accueilli les plaintes de pratique déloyale de travail déposées par le syndicat intimé, concluant que l’employeur, dans chaque cas, avait contrevenu au gel des conditions d’emploi prévu à l’article 107 de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral, édictée par la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 2 (la LRTSPF). La Commission a décidé que les plaintes avaient été déposées dans les délais prévus au paragraphe 190(2) de la LRTSPF, selon lequel les plaintes doivent être déposées dans les 90 jours qui suivent la date à laquelle le plaignant a eu – ou, selon la Commission, aurait dû avoir – connaissance des mesures ou des circonstances y ayant donné lieu.

[2]  Le demandeur conteste, non pas les décisions de la Commission sur le bien-fondé des plaintes de pratique déloyale de travail, mais uniquement ses conclusions quant au respect des délais prévus au paragraphe 190(2) de la LRTSPF.

[3]  Par des ordonnances de la Cour datées du 10 janvier 2018, la Commission a été autorisée à intervenir dans les présentes demandes. La Commission fait valoir que ses décisions en l’espèce ne sont pas susceptibles de contrôle compte tenu de la disposition d’inattaquabilité que prévoit le paragraphe 34(1) de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral, édictée par la Loi n2 sur le plan d’action économique de 2013, L.C. 2013, ch. 40, art. 365 (la LCRTESPF).

[4]  Ces demandes ont été réunies pour l’audience. L’original des présents motifs sera versé au dossier A-235-17, et une copie sera versée au dossier A-236-17.

[5]  Pour les motifs qui suivent, je conclus que les arguments de la Commission à l’égard du paragraphe 34(1) de la LCRTESPF ne sont pas fondés et que les parties contestées des décisions de la Commission sont susceptibles de contrôle judiciaire. Toutefois, je conclus également que la norme de contrôle de la décision raisonnable s’applique et que les conclusions de la Commission à l’égard du paragraphe 190(2) de la LRTSPF sont raisonnables. Ainsi, je rejetterais les demandes et condamnerais le demandeur aux dépens selon les modalités énoncées ci-dessous. Je ne condamnerais pas la Commission aux dépens ou à l’égard des questions qu’elle soulève.

I.  Contexte et décisions de la Commission relativement au respect du délai

[6]  Il convient de commencer par énoncer les faits pertinents en ce qui concerne la question du délai et de résumer les décisions de la Commission à ce sujet.

[7]  Dans les deux cas, aux moments pertinents, l’employeur et le syndicat intimé participaient à des négociations collectives, et le gel prévu à l’article 107 de la LRTSPF était en vigueur. Cette disposition prévoit en partie qu’après l’avis de négociation collective et tant que la convention collective est toujours en cours de négociation, à moins que les parties en conviennent autrement, les conditions d’emploi en vigueur dans l’unité de négociation le jour où l’avis de négociation a été donné le demeurent et doivent être respectées par l’employeur et l’agent négociateur jusqu’à ce que : a) le droit de grève ou de lock-out soit exerçable, lorsque le mode de règlement des différends prévoit ce droit ou b) jusqu’à ce qu’une sentence arbitrale soit rendue, lorsque le mode de règlement prévoit l’arbitrage. Ainsi, à l’époque des faits, il n’était pas permis aux employeurs de modifier unilatéralement les conditions d’emploi des employés des unités de négociation.

[8]  Dans les deux cas, les employeurs ont décidé d’apporter des changements aux heures de travail des employés, en les réduisant dans le cas du Service correctionnel du Canada, et en interdisant certains horaires flexibles, dans le cas de l’Agence du revenu du Canada. Ni l’un ni l’autre n’a obtenu le consentement de la défenderesse, l’agent négociateur des employés. Les deux organisations ont donné aux employés touchés et à la défenderesse un préavis des changements qu’elles entendaient apporter. La défenderesse a déposé des plaintes de pratique déloyale de travail auprès de la Commission pour contravention à l’article 107 de la LRTSPF. Dans les deux cas, les plaintes ont été déposées plus de 90 jours après la date des préavis, mais dans les 90 jours suivant la date à laquelle les changements ont été mis en œuvre.

[9]  Dans les deux cas, la Commission a jugé que les plaintes avaient été déposées dans le délai prévu au paragraphe 190(2) de la LRTSPF. Selon la Commission, la période pertinente de 90 jours a commencé à la date à laquelle les modifications contestées ont été apportées parce que les mesures ou les circonstances ayant donné lieu à la plainte, ou pour reprendre les termes de la Commission, l’« événement déclencheur » à partir duquel il fallait calculer le délai de 90 jours, était le changement des conditions d’emploi et non le préavis de l’intention de l’employeur de mettre en œuvre ces changements (motifs relatifs à l’ARC, par. 10; motifs relatifs au SCC, par. 38). La Commission a fondé cette conclusion sur sa jurisprudence antérieure dans le même sens, notamment Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2013 CRTFP 46 et Syndicat des agents correctionnels du Canada — Union of Canadian Correctional Officers — CSN c. Conseil du Trésor, 2016 CRTEFP 47.

II.  Les décisions de la Commission sont-elles susceptibles de contrôle?

[10]  À la lumière d’un tel contexte, j’examine ensuite l’affirmation de la Commission selon laquelle ses décisions dans les affaires qui nous occupent ne sont pas assujetties au contrôle. Comme il est souligné, la Commission affirme que cette conclusion découle du paragraphe 34(1) de la LCRTESPF, dont voici le libellé :

Les décisions et ordonnances de la Commission sont définitives et ne sont susceptibles de contestation ou de révision par voie judiciaire que pour les motifs visés aux alinéas 18.1(4)a), b) ou e) de la Loi sur les Cours fédérales et dans le cadre de cette loi.

Every order or decision of the Board is final and is not to be questioned or reviewed in any court, except in accordance with the Federal Courts Act on the grounds referred to in paragraph 18.1(4)(a), (b) or (e) of that Act.

[11]  Les alinéas 18.1(4)a), b) et e) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7 prévoient ce qui suit :

(4) Les mesures prévues au paragraphe (3) sont prises si la Cour fédérale est convaincue que l’office fédéral, selon le cas :

(4) The Federal Court may grant relief under subsection (3) if it is satisfied that the federal board, commission or other tribunal

 

a) a agi sans compétence, outrepassé celle-ci ou refusé de l’exercer;

(a) acted without jurisdiction, acted beyond its jurisdiction or refused to exercise its jurisdiction;

 

b) n’a pas observé un principe de justice naturelle ou d’équité procédurale ou toute autre procédure qu’il était légalement tenu de respecter;

 

(b) failed to observe a principle of natural justice, procedural fairness or other procedure that it was required by law to observe;

[…]

[…]

 

e) a agi ou omis d’agir en raison d’une fraude ou de faux témoignages;

(e) acted, or failed to act, by reason of fraud or perjured evidence; or

[12]  La Commission soutient que les parties contestées de ses décisions ‑ qui intéressent le paragraphe 190(2) de la LRTSPF ‑ n’ont pas trait à sa compétence, à un prétendu manquement à l’équité procédurale ou à une prétention de fraude ou de faux témoignages. Au contraire, conformément aux arrêts de la Cour McConnell c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada, 2007 CAF 142 (McConnell), et Boshra c. Association canadienne des employés professionnels, 2011 CAF 98 (Boshra), la Commission affirme que ses décisions sur la question du délai font intervenir des questions de fait ou mixtes de fait et de droit. Selon elle, de telles questions sont susceptibles de contrôle en vertu des alinéas 18.1(4)c) et d) de la Loi sur les Cours fédérales, qui énumèrent, comme motifs de contrôle, les erreurs de droit et les conclusions de fait erronées tirées de façon abusive ou arbitraire ou compte non tenu des éléments dont le tribunal est saisi. Étant donné que ces motifs sont exclus du champ d’application du paragraphe 34(1) de la LCRTESPF, la Commission fait valoir que les parties contestées de ses décisions ne sont pas susceptibles de contrôle.

[13]  Malgré le fait que les décisions de cette nature rendues par la Commission ou par le Conseil canadien des relations industrielles (le CCRI) sont régulièrement contrôlées par la Cour malgré le paragraphe 34(1) de la LCRTESPF (ou du paragraphe 22(1) du Code canadien du travail, L.R.C. 1985, ch. L-2, une disposition semblable), la Commission soutient qu’elle a le droit de faire valoir ses arguments, car la question n’a pas été définitivement tranchée par la Cour.

[14]  Pour étayer sa position, la Commission s’appuie sur les arrêts de la Cour suprême du Canada Noël c. Société d’énergie de la Baie James, 2001 CSC 39, [2001] 2 R.C.S. 207 et Crevier c. P.G. (Québec), [1981] 2 R.C.S. 220, 1981 CanLII 30. Selon la Commission, la Cour suprême a reconnu qu’il était loisible à une assemblée législative de limiter les motifs de contrôle dans la mesure où le contrôle des questions de compétence est possible. La Commission souligne également les déclarations faites par notre Cour dans l’arrêt Piedmont Airlines Inc. c. United Steel Workers of America, 2003 CAF 154, au par. 6; dans l’arrêt Kowallsky c. Alliance de la fonction publique du Canada, 2008 CAF 183, aux par. 5 et 7; dans l’arrêt Société des Arrimeurs de Québec c. Syndicat canadien de la Fonction publique, section locale 3810, 2008 CAF 237, au par. 18; dans l’arrêt Démocratie en surveillance c. Canada (Procureur général), 2018 CAF 194, au par. 24 et dans l’arrêt Démocratie en surveillance c. Canada (Procureur général), 2018 CAF 195, au par. 5, qui, selon elle, appuient son affirmation selon laquelle les erreurs de droit, de fait ou mixtes de fait et de droit de la Commission ne sont pas susceptibles de contrôle.

[15]  De plus, la Commission fait valoir que son interprétation du paragraphe 34(1) de la LCRTESPF est conforme au texte, au contexte et à l’objet de la disposition, particulièrement compte tenu du besoin de célérité et de finalité dans les relations de travail et de l’expertise évidente de la Commission en ce qui a trait à l’application du paragraphe 190(2) de la LRTSPF.

[16]  Le demandeur, qui représente les employeurs assujettis à la LRTSPF, et la défenderesse, l’agent négociateur représentant la majorité des employés syndiqués assujettis à cette loi, rejettent catégoriquement les arguments de la Commission. Ils affirment que des questions comme celles qui se posent en l’espèce sont à bon droit susceptibles de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, caractérisée par la déférence.

[17]  Ils invoquent les arrêts McConnell et Boshra comme exemples d’affaires où la Cour a contrôlé selon la norme de la décision raisonnable des décisions identiques à celles qui nous occupent. Ils font également remarquer que la jurisprudence de la Cour reconnaît que les erreurs de droit ou de fait qui justifient une intervention peuvent être qualifiées d’erreurs de compétence pour l’application de l’alinéa 18.1(4)a) de la Loi sur les Cours fédérales. À l’appui de ces arguments, ils invoquent les arrêts de la Cour Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes c. Healy, 2003 CAF 380 (Healy), et Alliance de la Fonction publique du Canada c. Assoc. des pilotes fédéraux du Canada, 2009 CAF 223, [2010] 3 R.C.F. 219 (Assoc. des pilotes.).

[18]  Dans l’arrêt Healy, au par. 22, le juge Evans, au nom de la Cour, souligne ce qui suit :

[…] les motifs de révision énoncés au paragraphe 18.1(4) se recoupent dans une certaine mesure. Ainsi, une décision fondée sur une conclusion de fait qui n’est corroborée par aucun élément de preuve est susceptible d’annulation au motif qu’elle a été rendue par un tribunal incompétent (Re Keeprite Workers' Independent Union et al. c. Keeprite Products Ltd. (1980), 114 D.L.R. (3d) 162 (C.A. Ont.); Blanchard c. Control Data Canada Ltd., [1984] 2 R.C.S. 476, aux pages 494 et 495) ou, peut-être, au motif qu’elle violait les règles de justice naturelle (R. c. Deputy Industrial Injuries Commissioner, Ex parte Moore, [1965] 1 Q.B. 456, à la page 488 (C.A. Angl.); Minister for Immigration and Ethnic Affairs c. Pochi (1980), 31 A.L.R. 666, à la page 689 (Cour fédérale d’Australie)).

[19]  De même, dans l’arrêt Assoc. des pilotes. aux par. 32, 33 et 35, le juge Evans, s’exprimant encore une fois au nom de la Cour, explique ce qui suit :

32.  Un tribunal administratif peut, premièrement, avoir « outrepassé sa compétence » [pour l’application de l’alinéa 18.1(4)a) de la Loi sur les Cours fédérales] en rendant une décision erronée sur une question juridique susceptible de révision suivant la norme de la décision correcte. Ces questions ont été qualifiées de « questions de compétence » ou, pour reprendre la terminologie employée par le juge Binnie dans l’extrait précité de « questions touchant la compétence ». Elles peuvent comprendre des questions relatives aux dispositions de la loi habilitant le tribunal administratif.

33.  Deuxièmement, même si la question tranchée par le tribunal administratif n’est pas une question de « compétence » au sens de ce qui précède, mais une « simple » question de droit, la Cour peut quand même accueillir une demande de contrôle judiciaire si la décision rendue est déraisonnable.

[…]

35.  Même si l’interprétation de l’article 58 ne commande pas l’application de la norme de la décision correcte, la Commission aura « outrepassé sa compétence » malgré tout si son interprétation est déraisonnable. Pas plus que les autres tribunaux administratifs, la Commission n’est légalement autorisée à rendre une décision fondée sur une interprétation déraisonnable de sa loi habilitante. Le respect de la primauté du droit exige cette protection minimale contre l’exercice arbitraire d’un pouvoir public par les décideurs administratifs, qu’il y ait ou non clause privative : Khosa, au paragraphe 42.

[20]  Le demandeur et la défenderesse soutiennent en outre que les arrêts de la Cour suprême du Canada Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190 (Dunsmuir) et Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 R.C.S. 339 (Khosa) ont pour effet de dépouiller en grande partie le paragraphe 18.1(4) de la Loi sur les Cours fédérales, de sorte que les décisions de tous les tribunaux administratifs fédéraux, y compris la Commission, sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, à moins qu’une des exceptions décrites dans l’arrêt Dunsmuir ne s’applique.

[21]  En réponse, la Commission fait valoir son opposition et affirme que les arrêts Dunsmuir et Khosa traitent de la norme de contrôle à appliquer et non des motifs de contrôle qui peuvent être invoqués. Toutefois, la Commission soutient également que l’arrêt Dunsmuir et la jurisprudence ultérieure de la Cour suprême limitent considérablement la fréquence à laquelle des questions de compétence peuvent être invoquées. Il en résulte, selon la Commission, que bon nombre de ses décisions ne sont pas susceptibles de contrôle en raison de l’effet combiné des paragraphes 34(1) de la LCRTESPF et 18.1(4) de la Loi sur les Cours fédérales.

[22]  Je ne peux accepter les prétentions de la Commission pour plusieurs raisons.

[23]  Premièrement, elles font fi de la multitude d’arrêts rendus par notre Cour et la Cour suprême du Canada dans lesquels des décisions de la Commission, du CCRI ou de leurs prédécesseurs faisant intervenir des présumées erreurs de droit, de fait ou mixtes de fait et de droit ont été contrôlées selon la norme de la décision raisonnable (ou auparavant selon la norme de la décision manifestement déraisonnable) malgré l’existence de dispositions d’inattaquabilité au paragraphe 34(1) de la LCRTESPF et au paragraphe 22(1) du Code canadien du travail. Les 43 arrêts énumérés à l’annexe des présents motifs ont été tranchés sur ce fondement au cours des deux dernières années. Pour chaque année antérieure, plusieurs arrêts supplémentaires seraient ajoutés à la liste. Ainsi, contrairement à ce que prétend la Commission, cette question a bel et bien été définitivement tranchée par la jurisprudence.

[24]  Deuxièmement, la Cour statue au par. 18 de l’arrêt Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Emerson Milling Inc., 2017 CAF 79, [2018] 2 R.C.F. 573, que le terme « compétence », lorsqu’il figure dans une disposition tel l’alinéa 18.1(4)a) de la Loi sur les Cours fédérales, doit être interprété à la lumière du contexte historique dans lequel cette disposition s’inscrit. Cette conclusion est conforme aux principes d’interprétation selon lesquels il est impératif que le tribunal judiciaire tienne compte du contexte approprié dans l’interprétation d’une loi (Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27, 1998 CanLII 837, par. 21 et Bell ExpressVu Limited Partnership c. Rex, 2002 CSC 42, [2002] 2 R.C.S. 559, par. 27).

[25]  En 1990, lorsque le législateur a adopté l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, il était entendu que les erreurs de compétence en droit administratif canadien incluaient des erreurs de droit ‑ dans les cas où la Commission était tenue à une interprétation correcte ‑ et des interprétations législatives manifestement déraisonnables, comme il a été souligné dans l’arrêt Assoc. des pilotes. : voir aussi l’arrêt Caimaw. c. Paccar of Canada Ltd., [1989] 2 R.C.S. 983, aux p. 1003 et 1004, 1989 CanLII 49. Ces erreurs comprenaient également des constatations de fait qui seraient visées par l’alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, comme il est mentionné dans l’arrêt Healy. Ainsi, interprétée adéquatement dans son contexte, l’expression « erreurs de compétence », lorsqu’il s’agit d’établir un motif (par opposition à une norme) de contrôle pour l’application du paragraphe 18.1(4) de la Loi sur les Cours fédérales, vise les situations où la Commission fait une interprétation législative déraisonnable ou une erreur de fait tombant sous le coup de l’alinéa 18.1(4)d) de cette loi.

[26]  Troisièmement, contrairement à ce que prétend la Commission, on ne saurait dire que les arrêts de la Cour suprême du Canada Dunsmuir et Khosa limitent le genre de décisions de la Commission susceptibles de contrôle judiciaire. Cette jurisprudence montre plutôt que les mêmes principes en matière de norme de contrôle s’appliquent à tous les décideurs administratifs fédéraux et que, à moins d’une des exceptions mentionnées dans l’arrêt Dunsmuir, la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable. C’est ce qui ressort des motifs des juges majoritaires dans l’arrêt Khosa, aux paragraphes 43 à 51, et des motifs du juge Rothstein au paragraphe 111 du même arrêt, où il aborde l’importance de l’article 22 du Code canadien du travail. Pour reprendre ses propos :

Le paragraphe 22(1) mentionne expressément le par. 18.1(4) de la [Loi sur les Cours fédérales] pour permettre explicitement le contrôle judiciaire fondé sur des motifs touchant la compétence, l’équité procédurale, la fraude ou les faux témoignages, mais exclut la révision des erreurs de droit ou de fait. Lorsque la clause privative s’applique, c’est-à-dire dans les cas visés aux al. 18.1(4)c), d) ou f) la cour de justice doit composer avec la tension créée entre son rôle constitutionnel en matière de contrôle judiciaire et la suprématie législative. Dans ces cas, l’analyse décrite dans Dunsmuir s’applique. En revanche, dans les cas où le par. 22(1) prévoit expressément la révision par voie judiciaire des questions de compétence, de justice naturelle et de fraude, cette analyse n’a pas sa place et c’est la norme de la décision correcte qui s’applique.

[27]  Bien que les juges majoritaires dans l’arrêt Khosa ne soient pas tous d’avis que l’analyse énoncée dans l’arrêt Dunsmuir s’applique aux alinéas 18.1(4)c) à f) de la Loi sur les Cours fédérales, ils s’entendent pour dire que les questions relevant de ces alinéas sont assujetties à l’analyse énoncée dans l’arrêt Dunsmuir. Par conséquent, le paragraphe 34(1) de la LCRTESPF et le paragraphe 18.1(4) de la Loi sur les Cours fédérales, lorsqu’ils sont interprétés à la lumière de leur véritable contexte, n’empêchent pas le contrôle des affaires qui nous occupent.

[28]  Quatrièmement, les jugements sur lesquels la Commission s’appuie, énumérés au paragraphe 14 des présents motifs, ne lient pas la Cour quant à cette question. Au contraire, dans la mesure où ces jugements contiennent des passages susceptibles d’appuyer l’interprétation de la Commission, les commentaires sont faits par la Cour en passant et ne règlent pas la question. Les arrêts pertinents, qui tranchent la question, sont Assoc. des pilotes et Healy, qui, comme il est mentionné plus haut, contredisent directement les arguments de la Commission. Il est également pertinent de mentionner la multitude de décisions, comme celles qui ont été contestées dans la présente demande, que la Cour a contrôlées selon la norme de la décision raisonnable. Par conséquent, la jurisprudence invoquée par la Commission n’est pas déterminante.

[29]  Cinquièmement, contrairement à ce que prétend la Commission, son interprétation ne permettrait pas une célérité accrue. Selon la Commission, la Cour serait tenue de décider, à titre de question préliminaire, quel alinéa du paragraphe 18.1(4) de la Loi sur les Cours fédérales s’applique à chaque argument présenté dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire et de déterminer la compétence de la Cour en fonction de la qualification de la question en litige. Ce genre d’analyse préliminaire formaliste sous forme de question fait rappeler l’époque où l’ancien article 28 (et non l’article 18) de la Loi sur les Cours fédérales limitait le contrôle aux décisions soumises à un processus judiciaire ou quasi judiciaire (voir l’arrêt Singh c. Ministre de l’Emploi et de l’Immigration, [1985] 1 R.C.S. 177, à la p. 197, 1985 CanLII 65 (la juge Wilson) et Syndicat des employés de production du Québec et de l’Acadie c. Canada (Commission des droits de la personne), [1989] 2 R.C.S. 879, aux p. 895 à 902, 1989 CanLII 44). Cette exigence a donné lieu à des débats alambiqués, coûteux et de longue durée sur la nature d’une décision assujettie au contrôle, qui ne contribuaient guère au fond du litige, et ces exigences ont donc été abolies dans les modifications apportées à la Loi sur les Cours fédérales en 1990 (voir la Loi modifiant la Loi sur la Cour fédérale, la Loi sur la responsabilité de l’État, la Loi sur la Cour suprême et d’autres lois en conséquence, L.C. 1990, ch. 8, art. 8). Ajouter foi à la démarche préconisée par la Commission ramènerait des débats et des atermoiements semblables dans le contrôle judiciaire, ce qui est contraire aux saines relations de travail que la LRTSPF a pour objet de favoriser. Ainsi, l’interprétation de la Commission finirait en fait par miner l’objet de la Loi.

[30]  Enfin, l’interprétation de la Commission, contrairement à ce qu’elle affirme, ne respecte pas les questions de primauté du droit qui sous-tendent sur le plan constitutionnel le contrôle de l’action administrative par le pouvoir judiciaire indépendant (voir l’arrêt Dunsmuir, aux par. 27 à 29, et l’arrêt Highwood Congregation of Jehovah’s Witnesses (Judicial Committee) c. Wall, 2018 CSC 26, au par. 13, [2018] 1 R.C.S. 750). Compte tenu des décisions récentes de la Cour suprême du Canada, la portée des questions de compétence qui se posent dans les affaires de droit administratif est extrêmement limitée, si tant est que ces questions existent. Bien que, dans l’arrêt Dunsmuir, au par. 59, la Cour suprême reconnaît que la catégorie des questions touchant véritablement à la compétence appelle la norme de la décision correcte, elle en souligne à maintes reprises la portée étroite et la rareté (voir, par exemple, l’arrêt Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, [2011] 3 S.C.R. 654, au par. 39; l’arrêt Edmonton (Ville) c. Edmonton East (Capilano) Shopping Centres Ltd., 2016 CSC 47, [2016] 2 S.C.R. 293, au par. 26; l’arrêt Québec (Procureure générale) c. Guérin, 2017 CSC 42, [2017] 2 R.C.S. 3, au par. 32. La Cour suprême, dans l’arrêt Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Canada (Procureur général), 2018 CSC 31, [2018] 2 R.C.S. 230, au par. 41, met en doute l’avenir de cette catégorie :

41.  En réalité, la catégorie des questions touchant véritablement à la compétence est maintenue en vie artificiellement depuis l’arrêt Alberta Teachers. Jamais les juges majoritaires de la Cour n’ont reconnu un seul exemple de question de ce type, et son existence même est mise en doute depuis longtemps. Comme les parties n’ont pas présenté d’observations complètes sur cette question et son effet potentiel, s’il en est, sur le cadre d’analyse actuel applicable à la norme de contrôle, je me contenterai de réitérer le commentaire déjà formulé par la Cour, c’est-à-dire que ce sera aux éventuelles parties à un litige d’établir si cette catégorie est toujours nécessaire ou si le moment est venu, pour reprendre les termes du juge Binnie, « d’en finir avec cette catégorie de questions » une fois pour toutes (Alberta Teachers, par. 88).

[31]  Comme l’admet la Commission, reconnaître qu’il existe peu de questions touchant à la compétence, voire aucune, aurait pour effet de mettre ses décisions largement à l’abri du contrôle. Un tel résultat ne peut être soutenu.

[32]  Dans l’arrêt Dunsmuir, la Cour suprême du Canada souligne que le contrôle judiciaire doit pouvoir être exercé, car il s’agit d’un impératif constitutionnel, et ne peut être écarté par une disposition d’inattaquabilité ou clause privative. Au paragraphe 31, les juges Bastarache et LeBel, s’exprimant au nom de la majorité, affirment ce qui suit :

31.  L’organe législatif du gouvernement ne peut supprimer le pouvoir judiciaire de s’assurer que les actes et les décisions d’un organisme administratif sont conformes aux pouvoirs constitutionnels du gouvernement. Même si elle est révélatrice de l’intention du législateur, la clause privative ne saurait être décisive à cet égard (Succession Woodward c. Ministre des Finances, [1973] R.C.S. 120, p. 127).

[33]  Ainsi, pour les raisons qui précèdent, contrairement à ce que prétend la Commission, ses décisions dans les affaires qui nous occupent peuvent être contrôlées par la Cour.

[34]  Toutefois, cette conclusion ne signifie pas que le paragraphe 34(1) de la LCRTESPF n’a aucun effet. Au contraire, il a des répercussions cruciales; il en ressort que la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable et que les décisions de la Commission de cette nature commandent une déférence considérable (voir l’arrêt Dunsmuir au par. 52). La Cour et la Cour suprême du Canada ont souvent fait remarquer que le paragraphe 34(1) des lois ayant précédé la LCRTESPF emportait précisément ces répercussions. Par exemple, dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Alliance de la fonction publique du Canada, [1993] 1 R.C.S. 941, à la p. 962, 1993 CanLII, la Cour suprême souligne que la disposition d’inattaquabilité représente l’une des raisons « pour lesquelles les cours de justice devraient faire preuve de retenue à l’égard des décisions rendues par la Commission dans les limites de sa compétence ». De nos jours, on dirait que les décisions de la Commission doivent être contrôlées selon la norme de la décision raisonnable, en partie parce qu’elles sont protégées par cette disposition stricte (Exeter c. Canada (Procureur général), 2014 CAF 251; Boshra, par. 44; McConnell, par. 14).

III.  Les décisions de la Commission sont-elles raisonnables?

[35]  La question est donc de savoir si les décisions de la Commission dans ces deux affaires portant sur la question du respect du délai sont raisonnables.

[36]  Le demandeur fait valoir que les décisions de la Commission ne sont pas raisonnables, parce qu’elle a offert une interprétation déraisonnable du paragraphe 190(2) de la LRTSPF. Plus précisément, le demandeur affirme que la Commission n’a pas tenu compte du libellé de la disposition, que son interprétation était incompatible avec les objets de la LRTSPF et l’objectif du délai de prescription de 90 jours prévu à cette disposition et que son interprétation contredit en grande partie la jurisprudence antérieure de la Commission suivant laquelle, aux dires du demandeur, le délai de 90 jours commence à courir lorsque l’employeur annonce son intention de prendre une mesure et non à partir du moment où la mesure est prise. À l’appui de ce dernier point, le demandeur avance plusieurs jugements traitant du début de la période de 90 jours dans d’autres circonstances que des plaintes liées au gel des conditions d’emploi (par exemple, Castonguay c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2007 CRTFP 78; Bunyan et al. c. Conseil du Trésor (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2007 CRTFP 85; Cuming c. Butcher et al., 2008 CRTFP 76; Éthier c. Service correctionnel du Canada, 2010 CRTFP 7; Forward-Arias c. Syndicat des employé-e-s du Solliciteur général, 2010 CRTFP 81; Baun c. Élément national de l’Alliance de la Fonction publique du Canada, 2010 CRTFP 127; Crête c. Ouellet, 2013 CRTFP 96; Coulter c. Alliance de la fonction publique du Canada, 2014 CRTFP 53; Esam c. Alliance de la Fonction publique du Canada (Syndicat des employées et employés nationaux), 2014 CRTFP 90; Gibbins c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada, 2015 CRTEFP 36).

[37]  Le demandeur invoque également les décisions de la Commission dans les affaires Association des chefs d’équipe des chantiers maritimes du gouvernement fédéral c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale), 2016 CRTEFP 26 (Association des chefs d’équipe) et Fraternité internationale des ouvriers en électricité, section locale 2228 c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale), 2017 CRTEFP 37 (FIOE), où la Commission a entendu les plaintes liées au gel des conditions d’emploi déposées après l’avis de la modification imminente, mais avant que la modification ne soit apportée. Le demandeur affirme que les décisions antérieures de la Commission sont incompatibles avec sa conclusion relative au respect des délais dans les présents dossiers.

[38]  Je diverge d’avis avec le demandeur en tout point.

[39]  D’abord, je ne vois rien d’incohérent dans la décision de la Commission dans les deux décisions visées par le contrôle, car elles sont en fait conformes à la jurisprudence antérieure et à la jurisprudence du CCRI, et de ses prédécesseurs, sur la question de savoir quand le délai pour une plainte pour gel des conditions d’emploi commence à courir (voir, par exemple, Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2013 CRTFP 46; Syndicat des agents correctionnels – Union of Canadian Correctional Officers – CSN c. Conseil du Trésor, 2016 CRTEFP 47; Conseil du Trésor c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2017 CRTEFP 11; voir aussi Air Canada (Re), 24 di 203 (CCRI) (QL); Vaillancourt c. Conseil du Trésor (Transports Canada), [1988] C.R.T.F.P.C. no 366 (QL); Syndicat canadien de la fonction publique c. Air Alliance Inc., 15 C.L.R.B.R. (2d) 288 (QL)). Ces affaires démontrent que la période pertinente débute lorsque le changement contesté aux conditions d’emploi des employés est mis en œuvre et non lorsque le préavis du changement imminent est donné.

[40]  Il est raisonnable de distinguer les affaires faisant intervenir le délai prévu au paragraphe 190(2) de la LRTSPF en ce qui a trait au gel des conditions d’emploi des affaires faisant intervenir le délai de présentation d’un grief. Comme la Cour l’affirme dans l’arrêt Boshra, le paragraphe 190(2) de la LRTSPF exige que la Commission détermine les mesures ou les circonstances donnant lieu à la plainte et décide si le demandeur savait ou aurait dû savoir (paragraphe 40). Il n’est en rien déraisonnable de conclure que la mesure ou circonstance à l’origine d’une plainte pour non-respect du gel est la modification contestée des conditions d’emploi étant donné que l’article 107 de la LRTSPF l’interdit et que l’alinéa 190(1)c) prévoit qu’une plainte peut être déposée si l’employeur « a contrevenu à l’article 107 ». Ce n’est pas la même chose pour les griefs, par lesquels les politiques de l’employeur peuvent être contestées avant qu’elles ne soient appliquées; comme le fait remarquer la défenderesse, les articles 208 et 209 de la LRTSPF permettent le dépôt de griefs contestant les interprétations par l’employeur de la convention collective. Par conséquent, il est tout à fait raisonnable d’arriver à des issues différentes dans les deux types de cas quant aux questions faisant intervenir les délais.

[41]  Les autres affaires que le demandeur invoque au sujet des délais applicables aux plaintes relatives au devoir de juste représentation ou à d’autres types de plaintes pour pratiques déloyales de travail sont axées sur les faits. Contrairement à ce que prétend le demandeur, ces affaires ne démontrent pas que, dans tous les cas, le délai commence à courir dès que l’intimé informe le plaignant d’une mesure qu’il entend prendre. Les décisions Association des chefs d’équipe et FIOE ne sont pas non plus utiles au demandeur, puisque la Commission n’y a pas abordé la question des délais.

[42]  Ainsi, les décisions de la Commission dans les présentes affaires ne contredisent pas sa jurisprudence et celle du CCRI, ce qui milite fortement en faveur de leur caractère raisonnable.

[43]  En outre, rien dans le libellé du paragraphe 190(2) de la LRTSPF ou dans la politique qui le sous-tend n’appelle une conclusion différente. Il n’est en rien déraisonnable de conclure que les mesures et les circonstances qui ont donné lieu à une violation du gel légal sont la mise en œuvre des modifications contestées aux conditions d’emploi des employés. De plus, comme la défenderesse le souligne à juste titre, de bonnes raisons de principe en matière de relations de travail justifient la démarche de la Commission dans ces cas, car donner aux parties plus de temps pour discuter pendant les négociations concorde avec de saines relations de travail.

[44]  Quoi qu’il en soit, il appartient à la Commission, et non à la Cour, de déterminer comment on favorise l’adoption de politiques judicieuses en matière de relations de travail par l’interprétation des dispositions de la LRTSPF. Compte tenu du libellé des dispositions pertinentes, de la jurisprudence pertinente et de l’importante déférence qu’appellent les décisions de la Commission dans des affaires de cette nature, je conclus que les décisions de cette dernière sont raisonnables.

IV.  Dispositif proposé

[45]  Par conséquent, je rejetterais les demandes et je condamnerais le demandeur aux dépens en faveur de la défenderesse, à l’exception des frais associés à la réponse à l’intervention de la Commission. Je n’adjugerais aucuns dépens à la Commission, ni ne la condamne à ceux-ci, ou relativement aux questions soulevées dans son intervention.

« Mary J.L. Gleason »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

M. Nadon j.c.a. »

« Je suis d’accord.

Johanne Gauthier j.c.a. »
ANNEXE

Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et ses prédécesseurs

  1. Mme Unetelle c. Canada (Procureur général), 2018 CAF 183.

  1. Klos c. Canada (Procureur général), 2018 CAF 160.
  2. Canada (Procureur général) c. Fehr, 2018 CAF 159.
  3. Dias c. Canada (Procureur général), 2018 CAF 126.
  4. Kalonji c. Canada (Procureur général), 2018 CAF 8.
  5. Canada (Procureur général) c. Canada (Alliance de la Fonction publique), 2017 CAF 208.
  6. Chopra c. Canada (Procureur général), 2017 CAF 76.
  7. Canada (Procureur général) c. Heyser, 2017 CAF 113, [2018] 1 R.C.F. 245.
  8. Canada (Conseil du Trésor) c. Canada (Alliance de la fonction publique), 2017 CAF 111.
  9. Canada (Procureur général) c. Association des pilotes fédéraux du Canada, 2017 CAF 100.
  10. Jean Pierre c. Canada (Immigration et Statut de réfugié), 2018 CAF 97.
  11. Allen c. Canada (Conseil national de recherches), 2017 CAF 81.
  12. Canada (Procureur général) c. Féthière, 2017 CAF 66.
  13. Bernard c. Canada (Agence du revenu), 2017 CAF 40.
  14. Bergey c. Canada (Procureur général), 2017 CAF 30.
  15. Gandhi c. Canada (Procureur général), 2017 CAF 26.
  16. Canada (Procureur général) c. Grant, 2017 CAF 10.
  17. Jean Pierre c. Clément, 2016 CAF 308.
  18. Canada (Procureur général) c. Rahmani, 2016 CAF 249.
  19. Alliance de la Fonction Publique du Canada c. Canada (Procureur général), 2016 CAF 184.
  20. Sather c. Canada (Service correctionnel), 2016 CAF 149.
  21. Forner c. Canada (Procureur général), 2016 CAF 136.
  22. Alexander c. Canada (Procureur général), 2016 CAF 132.
  23. Bahniuk c. Canada (Procureur général), 2016 CAF 127.
  24. Canada (Procureur général) c. Dyson, 2016 CAF 125.
  25. Pierre c. Canada (Agence des services frontaliers), 2016 CAF 124.
  26. Lloyd c. Canada (Procureur général), 2016 CAF 115.
  27. Canada (Procureur général) c. Institut professionnel de la Fonction publique du Canada, 2016 CAF 104.
  28. Canada (Procureur général) c. Association des juristes de Justice, 2016 CAF 92, [2016] 4 R.C.F. 349, infirmé en partie et confirmé en partie par 2017 CSC 55, [2017] 2 R.C.S. 456.
  29. Edith Baragar c. Canada (Procureur général), 2016 CAF 75.
  30. Pouliot c. Administrateur général (Comité des griefs des Forces canadiennes), 2016 CAF 54.
  31. Cavanagh c. Canada (Agence du Revenu), 2016 CAF 27.
  32. Alliance de la Fonction Publique du Canada c. Canada (Agence du revenu), 2016 CAF 8.
  33. Canada (Procureur général) c. Gatien, 2016 CAF 3.

Conseil canadien des relations industrielles

  1. Conseil des Innus de Pessamit c. Michaud, 2018 CAF 177.
  2. Garda Security Screening Inc. c. General Teamsters, Local Union 979, 2018 CAF 71.
  3. Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes c. Lang, 2017 CAF 233.
  4. Wsáneć School Board c. Colombie-Britannique, 2017 CAF 210.
  5. Fairhurst c. Unifor, section locale 114, 2017 CAF 152.
  6. Rogers Communications Canada Inc. c. Metro Cable T.V. Maintenance, 2017 CAF 127.
  7. Fedex Freight Canada, Corp. c. Section Locale 31 des Teamsters, 2017 CAF 78.
  8. Chin Quee c. Teamsters Local #938, 2017 CAF 62.
  9. Madrigga c. Conférence ferroviaire de Teamsters Canada, 2016 CAF 151.

COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-235-17

 

 

INTITULÉ :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA c. ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA et COMMISSION DES RELATIONS DE TRAVAIL ET DE L’EMPLOI DANS LE SECTEUR PUBLIC FÉDÉRAL

 

 

ET DOSSIER :

A-236-17

 

 

INTITULÉ :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA c. ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA et COMMISSION DES RELATIONS DE TRAVAIL ET DE L’EMPLOI DANS LE SECTEUR PUBLIC FÉDÉRAL

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 22 NOVEMBRE 2018

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE GLEASON

 

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE NADON

LA JUGE GAUTHIER

 

DATE DES MOTIFS :

LE 1er MARS 2019

 

COMPARUTIONS :

Richard Fader

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Amanda Montague-Reihnoldt

 

POUR la défenderesse

 

Asha Kurian

Nicholas Czyzewski

 

POUR L’INTERVERNANTe

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

 

pour le demandeur

 

Raven, Cameron, Ballantyne & Yazbeck LLP/s.r.l.

Barristers & Solicitors

Ottawa (Ontario)

 

pour la défenderesse

 

Service canadien d’appui aux tribunaux administratifs

Secrétariat de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

Ottawa (Ontario)

pour l’intervenante

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.