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Date : 20081003

Dossier : A-7-06

Référence : 2008 CAF 291

 

CORAM :      LA JUGE DESJARDINS

                        LE JUGE NADON

                        LE JUGE PELLETIER

 

ENTRE :

LUC DÉRY

demandeur

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

 

 

Décidé sans comparution des parties.

 

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 3 octobre 2008.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                         LA JUGE DESJARDINS

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                  LE JUGE NADON

                                                                                                                          LE JUGE PELLETIER   

 


Date : 20081003

Dossier : A-7-06

Référence : 2008 CAF 291

 

CORAM :      LA JUGE DESJARDINS

                        LE JUGE NADON

                        LE JUGE PELLETIER

 

ENTRE :

LUC DÉRY

demandeur

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

LA JUGE DESJARDINS

[1]                        Le demandeur, par voie de demande de contrôle judiciaire, se pourvoit à l’encontre de deux décisions (celle du 18 juillet 2005 et celle du 21 novembre 2005) du juge-arbitre R.J. Marin, lequel a rejeté l’appel du demandeur et a maintenu la décision du conseil arbitral.

 

[2]                        Le juge-arbitre et le conseil arbitral ont conclu que la somme de 14 903,86 $ reçue par le demandeur d’un syndic de faillite représentait un versement de 8 221,17 $ à titre de vacances et un versement de 6 682,69 $ à titre d’indemnité de départ. Les deux sommes constituaient de la rémunération au sens du paragraphe 35 du Règlement sur l’assurance-emploi, DORS/96-332 (le Règlement), laquelle devait être répartie selon le paragraphe 36(9) du Règlement.

 

[3]                        Le prestataire fut à l’emploi de l’entreprise J. Ford Ltée depuis le milieu de septembre 2000 jusqu’au 29 juin 2001, date à laquelle son emploi prit fin suite à la restructuration de l’entreprise.

 

[4]                        Le 3 juillet 2001, son ancien employeur déposait un avis d’intention de faire une proposition aux termes de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, L.R., 1985, ch. B-3. Quelque temps plus tard, le demandeur déposait auprès du syndic une preuve de réclamation pour une somme de 72 923,10 $. Ce montant représentait des créances liées à la participation du demandeur à la Coopérative des papetiers de Portneuf, quatre semaines de vacances dues, deux semaines de préavis, six mois de compensation salariale, une aide de relocalisation, une prime de 4%, un fonds de retraite ainsi que le salaire de juillet 2001.

 

[5]                        Le syndic écrivit au demandeur le 24 octobre 2001 pour l’informer du rejet partiel de sa réclamation de 72 923,10 $ et de son acceptation pour un montant de 14 903,86 $.

 

[6]                        Le 10 février 2002, la Commission de l’assurance-emploi fit parvenir au demandeur un avis de notification de trop-payé au montant de 3 717,00 $.

 

[7]                        Le demandeur contesta la nature du montant en question en affirmant que ces sommes ne lui avaient pas été remises à titre d’indemnité de fin d’emploi mais plutôt à titre de « dividendes », et que son comptable l’avait informé que pareil paiement n’affecterait pas les prestations de chômage auxquelles il avait droit (dossier du défendeur, p. 40).

 

[8]                        Le demandeur explique en page 5 de son mémoire qu’« il s’agit de déterminer si le juge-arbitre Marin a rendu une décision fondée sur des conclusions erronées tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il disposait ». Le demandeur soumet, entre autres, que, selon le dossier, le comptable de son ancien employeur, M. B. L’Heureux, a fait une déclaration téléphonique au nom de l’employeur selon laquelle « suite à une proposition concordataire, le syndic …a versé [au demandeur] 14 903,86 $ en raison de sa créance pour vacances et indemnité de départ » (dossier du défendeur, p. 39). Or, selon le demandeur, M. L’Heureux ne travaillait pas pour le syndic et n’avait aucunement accès aux informations identifiées sur le formulaire Correction des données du RDE (dossier du défendeur, p. 39). Le demandeur ajoute, « De plus aucune pièce provenant du syndic n’a été présentée au cours des différentes audiences confirmant les informations contenues dans la pièce numéro 6 », soit la pièce où figure la déclaration de M. L’Heureux.

 

[9]                        En ce qui a trait à la notion de « dividendes », on retrouve au dossier un document intitulé « Rapport en vertu de l’article 50(10)(B) de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité », selon lequel le syndic formulait une proposition qui allait permettre aux créanciers de l’entreprise J. Ford Ltée de toucher « un dividende » de près de 3 000 000 $ (dossier du défendeur, p. 38). Selon les pièces 12.1 et 12.2 du dossier, la définition que donne le Bureau du surintendant des faillites du Canada au mot « dividende » est celle-ci (dossier du défendeur, pp 46-47) :

Qu'est-ce qu'un dividende?

Les dividendes sont des montants payables à des particuliers ou à des entreprises qui ont été des créanciers d'une faillite ou d'une proposition en vertu de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. Les dividendes sont remboursés aux créanciers par un syndic du secteur privé ou l'administrateur d'une proposition. Normalement, la répartition se fera à la suite d'une faillite; cependant, dans le cas d'une proposition, les dividendes peuvent être répartis à divers intervalles au cours de l'administration.

[Je souligne.]

 

[10]                    Par contre, en ce qui concerne la présente demande, la question que devait se poser le juge-arbitre et le conseil arbitral était celle de savoir si les deux montants reçus du syndic avaient valeur de rémunération au sens du paragraphe 35(1) et de l’alinéa 35(2)a) du Règlement, dont voici les extraits pertinents:

35. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

 «revenu» Tout revenu en espèces ou non que le prestataire reçoit ou recevra d’un employeur ou d’une autre personne, notamment un syndic de faillite. ( income )

 

 

(2) Sous réserve des autres dispositions du présent article, la rémunération qu’il faut prendre en compte pour déterminer s’il y a eu un arrêt de rémunération et fixer le montant à déduire des prestations à payer en vertu de l’article 19 ou des paragraphes 21(3) ou 22(5) de la Loi, ainsi que pour l’application des articles 45 et 46 de la Loi, est le revenu intégral du prestataire provenant de tout emploi, notamment :

 

 

a) les montants payables au prestataire, à titre de salaire, d’avantages ou autre rétribution, sur les montants réalisés provenant des biens de son employeur failli;

[Je souligne.]

 

35. (1) The definitions in this subsection apply in this section.

« income » means any pecuniary or non-pecuniary income that is or will be received by a claimant from an employer or any other person, including a trustee in bankruptcy. ( revenu ) 

 

  (2) Subject to the other provisions of this section, the earnings to be taken into account for the purpose of determining whether an interruption of earnings has occurred and the amount to be deducted from benefits payable under section 19 or subsection 21(3) or 22(5) of the Act, and to be taken into account for the purposes of sections 45 and 46 of the Act, are the entire income of a claimant arising out of any employment, including

 

(a)    amounts payable to a claimant in respect of wages, benefits or other remuneration from the proceeds realized from the property of a bankrupt employer;

...

[E,mphasis added.]

 

 

[11]                    Tant le juge-arbitre que le conseil arbitral ont jugé crédible la déclaration de M. B. L’Heureux qui établissait la nature des sommes en cause. Le demandeur ne peut, par de simples allégations dans son mémoire des faits et du droit, mettre en doute la véracité des propos du comptable. Cette Cour ne peut réviser les conclusions de faits qu’à la lumière du dossier tel que constitué.

 

[12]                    Le demandeur a d’ailleurs fait valoir les mêmes arguments devant le conseil arbitral, lequel les a rejetés en ces termes (décision du conseil arbitral, dossier du défendeur, pp 107-108) :

Preuve à l’audience

Le prestataire n’était pas présent et il.était représenté par monsieur Michel Martel.  Il dépose un document (pièce 25) qu’il avait remis au Juge arbitre en juin 2004.  Il nous informe que le prestataire avait fait une déclaration au syndic (pièce 15) suite à la faillite de l’employeur.  Au règlement final le prestataire a reçu du syndic la somme de $14,903.86.  Le représentant tente à démontrer que ce montant ne représente aucunement le paiement de vacances, étant donné que le paiement de vacance (sic) n’est pas une créance priorisé (sic) en matière de faillite.  Ce montant représente les items mentionnés dans le document déposé soit cotisation à la COOP, REER., l’aide de relocalisation, et une prime de séparation.  Le représentant ne peut fournir aucune preuve même après avoir fait des démarches auprès de (sic) syndic qui se sont avérés (sic) négatives.  

[Je souligne.]

Le demandeur n’a donc pas acquitté son fardeau de preuve.

 

[13]                    Le juge-arbitre, pour sa part, a donné foi à la déclaration de M. L’Heureux (voir par. 3 de la décision de l’arbitre en date du 18 juillet 2005, dossier du demandeur, p. 17). Il a ensuite ajouté « Inutile d’explorer plus à fond la qualité de rémunération de ces montants. ».

[14]                    Notre Cour ne peut intervenir dans les conclusions de faits auxquelles en sont arrivés le juge-arbitre et le conseil arbitral à moins que celles-ci ne revêtent un caractère déraisonnable selon les critères jurisprudentiels (Budhai c. Canada (Procureur Général) (C.A.), [2002] CAF 298; Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9). Les conclusions en l’espèce sont conformes à la preuve.

 

[15]                    Les conclusions de droit et les conclusions mixtes de faits et de droit auxquelles en sont arrivés le juge-arbitre et le conseil arbitral quant à la notion de rémunération et de répartition et leur application en l’espèce sont également inattaquables en ce qu’elles sont conformes à la jurisprudence de notre Cour (Canada (Procureure générale) c. Roch, 2003 CAF 256, par. 34 et suivants; Fédération des caisses populaires Desjardins de Montréal et de l'Ouest du Québec c. Canada, 2001 CAF 27, par. 92, Noël j.c.a., dissident, mais non sur ce point).

 

 

[16]                    Je rejetterais la demande de contrôle judiciaire.

 

[17]                    Le défendeur ne réclame pas de frais.

 

 

« Alice Desjardins »

j.c.a.

 

« Je suis d’accord.

     M. Nadon j.c.a. »

 

« Je suis d’accord.

     J.D. Denis Pelletier j.c.a.  »


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A-7-06

 

INTITULÉ :                                                                           LUC DÉRY ET PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA      

 

 

DÉCIDÉ SANS COMPARUTION DES PARTIES

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                LA JUGE DESJARDINS

Y ONT SOUSCRIT :                                                             LE JUGE NADON

                                                                                                LE JUGE PELLETIER

                                                                                               

 

DATE DES MOTIFS :                                                          LE 3 OCTOBRE 2008

 

 

MÉMOIRES ÉCRITS :

 

Luc Déry

DEMANDEUR

POUR SON PROPRE  COMPTE

 

Pascale-Catherine Guay

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Luc Déry

Sainte-Foy (Québec)

 

DEMANDEUR

POUR SON PROPRE COMPTE

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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