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Date : 20080403

Dossier : A-209-07

Référence : 2008 CAF 120

 

CORAM :      LE JUGE SEXTON

                        LA JUGE SHARLOW

                        LE JUGE PELLETIER

 

ENTRE :

TRACEY CALLWOOD

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

et

LA SUCCESSION DE JOHN G. CRAWFORD

intimée

 

 

 

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 2 avril 2008.

Jugement rendu à Toronto (Ontario), le 3 avril 2008.

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                     LA JUGE SHARLOW

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                           LE JUGE SEXTON

                                                                                                                         LE JUGE PELLETIER

 


 

Date : 20080403

Dossier : A-209-07

Référence : 2008 CAF 120

 

CORAM :      LE JUGE SEXTON

                        LA JUGE SHARLOW

                        LE JUGE PELLETIER

 

ENTRE :

TRACEY CALLWOOD

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

et

LA SUCCESSION DE JOHN G. CRAWFORD

intimée

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE SHARLOW

[1]               Mme Tracey Callwood interjette appel du jugement du juge Bowie, de la Cour canadienne de l’impôt (2007 CCI 232). Ce jugement a tranché certaines questions visées par l’article 174 de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 ch. 1 (5e suppl.), a rejeté l’appel en matière d’impôt sur le revenu de Mme Callwood pour 2000 et a fait droit à son appel en matière d’impôt sur le revenu pour 2001, mais uniquement dans la mesure où son revenu devait être réduit de 533 $ plutôt que de 20 533 $, soit le montant de la réduction qu’elle demandait.

[2]               Le point dont il est question en l’espèce découle des modifications apportées en 1997 à l’article 56.1 de la Loi de l’impôt sur le revenu, lequel dispose que certains paiements de pension alimentaire pour enfants effectués après le 1er mai 1997 ne sont pas imposables.

 

[3]               Avant les modifications apportées en 1997, un montant payé par l’un des parents d’un enfant à l’autre parent après leur séparation ou leur divorce, à titre d’allocation payable périodiquement, était déductible par le payeur et imposable entre les mains du bénéficiaire si le paiement était fait conformément à une ordonnance judiciaire ou à un accord écrit et si certaines autres conditions prescrites par la loi (et non pertinentes en l’espèce) étaient remplies.

 

[4]               Aux termes des modifications apportées en 1997, lorsqu’un accord écrit ou une ordonnance judiciaire sont modifiés après avril 1997 en vue de changer une « pension alimentaire pour enfants » payable au bénéficiaire, une « date d’exécution » est établie au jour où le premier paiement de la « pension alimentaire pour enfants » modifiée doit être effectué, et une « pension alimentaire pour enfants » payée après la « date d’exécution » n’est ni déductible par le payeur ni imposable entre les mains du bénéficiaire. Les expressions « pension alimentaire pour enfants » et « date d’exécution » sont définies au paragraphe 56.1(4), modifié en 1997.

 

[5]               Point n’est besoin de relater les faits pertinents et l’historique du litige qui sont liés au présent appel. Il suffit de dire que toutes les questions, sauf une, que Mme Callwood a soulevées dans les appels en matière d’impôt sur le revenu pour 2000 et 2001 ont été tranchées à son encontre dans une décision antérieure de la présente Cour (2006 CAF 188). La seule question restante devait être tranchée dans le cadre d’une nouvelle audience devant la Cour canadienne de l’impôt. Cette nouvelle audience a donné lieu au jugement qui est maintenant porté en appel.

 

[6]               La seule question examinée lors du réexamen consistait à savoir si une obligation particulière en matière de pension alimentaire pour enfants de l’ex-époux de Mme Callwood, M. Crawford, était une obligation de payer une « allocation » au sens qui a été donné à ce terme dans les arrêts Gagnon c. Canada, [1986] 1 R.C.S. 264 et Rosenberg c. Canada, 2003 CAF 363. Les appels en matière d’impôt sur le revenu de Mme Callwood pour 2000 et 2001 seraient accueillis si - mais uniquement si - cette obligation était une obligation de payer une allocation.

 

[7]               L’obligation en question, appelée « obligation relative au partage des dépenses », découle de la phrase suivante, qui figure dans un accord de séparation que les parties ont établi en janvier 1997 :

Il est en outre entendu que l’époux [M. Crawford] partagera le fardeau des dépenses vestimentaires, de l’assurance de soins médicaux et des autres dépenses nécessaires auxdits enfants.

 

[8]               L’accord de séparation établi en janvier 1997 exigeait également que M. Crawford paye à Mme Callwood une pension alimentaire de 133 $ pour chacun de leurs trois enfants.

 

[9]               En octobre 2000, Mme Callwood et M. Crawford ont conclu un accord modifiant l’accord de séparation daté de janvier 1997. L’accord modificateur de 2000 ne changeait pas les dispositions de l’accord initial en vertu duquel M. Crawford était tenu de payer la somme de 133 $ par semaine par enfant. Il supprimait toutefois l’obligation relative au partage des dépenses.

 

[10]           Comme il a été indiqué plus tôt, le juge Bowie avait à déterminer si l’obligation relative au partage des dépenses était une « allocation ». S’il ne s’agissait pas d’une allocation, cette obligation ne correspondait donc pas à la définition d’une « pension alimentaire pour enfants » incluse dans la loi. Il s’ensuivrait que l’accord modificateur de 2000, qui mettait fin à l’obligation relative au partage des dépenses, ne modifiait pas une obligation de payer une « pension alimentaire pour enfants » et n’établissait donc pas une « date d’exécution ». De ce fait, les paiements hebdomadaires que Mme Callwood avait reçus en 2000 et en 2001 au titre de la pension alimentaire pour enfants n’étaient pas assujettis aux dispositions de l’article 56.1 modifié en 1997 et étaient donc imposables à juste titre entre les mains de Mme Callwood (sauf, pour des raisons qui ne sont pas pertinentes en l’espèce, la somme de 533 $ reçue après le 14 décembre 2001).

 

[11]           Le juge Bowie a conclu que l’obligation relative au partage des dépenses n’était pas une allocation. Il est allégué, pour le compte de Mme Callwood que cette conclusion est erronée en droit et dans les faits.

 

[12]           Selon les arrêts Gagnon et Rosenberg (précités), un montant n’est une allocation que si les conditions suivantes sont remplies :

a)                  le montant est limité et fixé au préalable par un accord précisant le montant en question, ou un accord indiquant de quelle façon ce montant doit être déterminé;

b)                  le montant est payé pour permettre au bénéficiaire de s’acquitter d’un certain type de dépense (dans le cas présent, des frais de garde d’enfants);

c)                  le bénéficiaire est capable de disposer entièrement du montant.

 

[13]           Le juge Bowie a déclaré que la première condition n’était pas remplie parce que le montant de l’obligation relative au partage des dépenses n’était pas limité et fixé au préalable. Il a conclu de ce fait que l’obligation n’était pas une allocation.

 

[14]           Il n’est pas contesté que l’accord de séparation daté de 1997 ne prescrit pas le montant de l’obligation relative au partage des dépenses. Cependant, le juge Bowie a admis que, en principe, un montant est déterminé au préalable si les parties ont convenu de la façon de le déterminer.

 

[15]           Devant la Cour canadienne de l’impôt, Mme Callwood a produit une preuve que M. Crawford avait payé certaines dépenses des enfants dans les années antérieures à 2000. Il a été allégué pour le compte de Mme Callwood que cette preuve établissait que les parties avaient convenu de la façon de déterminer le montant de l’obligation relative au partage des dépenses. Le juge Bowie n’a pas souscrit à cet argument. Il n’a trouvé aucune preuve que Mme Callwood et M. Crawford avaient réfléchi à la question de savoir de quelle façon déterminer l’obligation relative au partage des dépenses. Cette conclusion ne peut être remise en cause à moins d’une erreur de droit ou d’une erreur de fait manifeste et dominante. À mon sens, le dossier soumis à la Cour ne révèle aucune erreur de ce genre.

 

[16]           Dans les observations faites pour le compte de Mme Callwood dans le cadre du présent appel, il a été expliqué que l’obligation relative au partage des dépenses avait été volontairement rédigée en termes généraux de façon à ce que M. Crawford soit obligé de contribuer aux dépenses relatives aux enfants même s’il était impossible de déterminer à l’avance quelles seraient ces dépenses. À mon humble avis, cette observation étaye la conclusion du juge Bowie selon laquelle les parties n’ont pas convenu à l’avance de la façon de déterminer le montant de l’obligation relative au partage des dépenses.

 

[17]           Il a aussi été allégué pour le compte de Mme Callwood que le faux témoignage du témoin de M. Crawford a induit le juge Bowie en erreur. Ce même argument a été invoqué dans l’appel déposé antérieurement devant la présente Cour, et il a été rejeté comme étant injustifié. Il est lui aussi injustifié en l’espèce. Quoi qu’il en soit, cet argument n’aurait pas aidé la cause de Mme Callwood si le juge Bowie avait rejeté le témoignage de ce témoin, car le dossier ne serait toujours pas en mesure d’établir l’existence d’une entente quant à la façon de déterminer le montant de l’obligation relative au partage des dépenses.

 

[18]           Le juge Bowie, a-t-on laissé entendre, n’a pas abordé cette affaire avec un esprit ouvert. Il s’agit là d’une allégation de partialité injustifiée qu’il y a lieu de rejeter.

 

[19]           Je suis d’avis de rejeter le présent appel avec dépens.

 

 

« K. Sharlow »

j.c.a.

 

« Je suis d’accord

            J. Edgar Sexton j.c.a. »

 

« Je suis d’accord

            Denis Pelletier j.c.a. »

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra De Azevedo, LL.B.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                          A-209-07

 

 

INTITULÉ :                                                         TRACEY CALLWOOD c.

                                                                              SA MAJESTÉ LA REINE et LA SUCCESSION DE JOHN G. CRAWFORD       

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                   TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                 LE 2 AVRIL 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                              LA JUGE SHARLOW

 

Y ONT SOUSCRIT :                                           LES JUGES SEXTON

                                                                              ET PELLETIER

                                                                             

 

DATE DU JUGEMENT :                                   LE 3 AVRIL 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Tracey Callwood

POUR SON PROPRE COMPTE

 

Aleksandrs Zemdegs

Margaret J. Nott

POUR L’INTIMÉE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Tracey Callwood

Courtice (Ontario)

 

POUR SON PROPRE COMPTE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR L’INTIMÉE

 

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