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Date : 19991109


Dossier : A-349-98

A-350-98


CORAM :      LE JUGE STRAYER

         LE JUGE ROBERTSON
         LE JUGE ROTHSTEIN

ENTRE :


HAVANA HOUSE CIGAR & TOBACCO MERCHANTS LTD. et EMPRESSA CUBANA DEL TABACO faisant affaires sous les raisons sociales de CUBATABACO et de HABANOS S.A.,

     appelantes,

                                            

     - et -



     SKYWAY CIGAR STORE,

     intimée.



Audience tenue à Toronto (Ontario), les lundi et mardi 8 et 9 novembre 1999.

Jugement prononcé à l"audience à Toronto (Ontario), le mardi 9 novembre 1999.




MOTIFS DU JUGEMENT :      LE JUGE STRAYER







Date : 19991109


Dossier : A-349-98

A-350-98


CORAM :      LE JUGE STRAYER

         LE JUGE ROBERTSON
         LE JUGE ROTHSTEIN

ENTRE :


HAVANA HOUSE CIGAR & TOBACCO MERCHANTS LTD. et EMPRESSA CUBANA DEL TABACO faisant affaire sous les raisons sociales de CUBATABACO et de HABANOS S.A.,

     appelantes,

                                            

     - et -


     SKYWAY CIGAR STORE,

     intimée.


     MOTIFS DU JUGEMENT

     (prononcés à l"audience à Toronto (Ontario),

     le mardi 9 novembre 1999)

LE JUGE STRAYER

[1]      Les deux appels dont il est question en l"espèce ont été entendus ensemble puisqu"ils découlaient d"une seule action devant la Section de première instance. L"appel A-350-98 a été déposé par les appelantes à l"encontre d"un jugement sommaire dans lequel le juge des requêtes a déclaré la nullité et ordonné la radiation de quatre marques de commerce enregistrées au Canada par l"appelante Havana House Cigar & Tobacco Merchants Ltd. (Havana House). L"appel A-349-98 a été déposé par les appelantes à l"encontre du rejet de leur demande de jugement sommaire à l"endroit de l"intimée pour contrefaçon et imitation frauduleuse et pour d"autres réparations demandées en vertu de l"article 7 de la Loi sur les marques de commerce . L"intimée a interjeté des appels incidents, prétendant que l"action en contrefaçon, en imitation frauduleuse, etc., aurait dû être rejetée intégralement.

[2]      Pour ce qui est de l"appel A-350-98 relatif au jugement sommaire déclarant la nullité des marques de commerce canadiennes de l"appelante Havana House et ordonnant leur radiation, nous sommes tous d"avis que le juge de première instance a rendu l"ordonnance qui convenait. Les quatre marques de commerce en question sont apposées sur des produits du cigare à Cuba par les appelantes Cubatabaco ou Habanos S.A., qui sont respectivement le fabricant et le preneur de licence d"exportation de Cubatabaco. Il s"agit des marques officielles de certains produits du cigare à Cuba et celles-ci restent sur le produit au point de la vente au détail. Havana House, le distributeur canadien, ajoute simplement son estampille de distributeur exclusif au Canada sur les boîtes. Les points en litige concernant la validité des quatre marques de commerce, telles qu"elles ont été enregistrées en son propre nom par Havana House au Canada, soulevaient la question de savoir si Havana House avait employé les marques de commerce ou si elle l"avait fait avant l"enregistrement, et si ces marques étaient distinctives de Havana House lorsque les enregistrements ont été contestés en novembre 1996.

[3]      Nous sommes tous d"avis que le juge des requêtes a eu raison de conclure à l"inexistence d"une preuve de l"emploi ou de l"acquisition d"un caractère distinctif par Havana House. Le juge a fait droit à la demande de jugement sommaire de la défenderesse, statuant que les quatre marques de commerce enregistrées au Canada par Havana House étaient invalides et ordonnant leur radiation. Nous sommes d"accord avec sa conclusion et nous rejetons l"appel de cette décision dans le dossier A-350-98.

[4]      Il reste à trancher l"appel A-349-98 concernant la demande de jugement sommaire présentée par les appelantes à l"encontre de l"intimée pour contrefaçon de leurs marques de commerce ainsi que pour imitation frauduleuse, dépréciation de l"achalandage attaché à leurs marques de commerce, appel de l"attention du public sur les marchandises de l"intimée de manière à causer de la confusion et emploi de descriptions fausses. Le juge des requêtes a rejeté la demande de jugement sommaire qu"avaient présentée les appelantes pour ces motifs, mais il a aussi rejeté la demande présentée par l"intimée, et entendue en même temps, afin d"obtenir le rejet sommaire de ces revendications. L"avocat des appelantes n"a plus soutenu devant nous qu"il devrait y avoir un jugement sommaire en faveur de ses clientes, mais il a insisté sur le fait que le tribunal devait instruire certaines questions. Dans un appel incident, l"intimée a soutenu que le juge des requêtes aurait dû faire droit à sa demande de rejet sommaire de l"action des appelantes.

[5]      Il convient tout d"abord de souligner que l"ordonnance du juge des requêtes n"est pas très claire quant à son intention sur ce point. L"ordonnance est libellée de la manière suivante :

         Pour les motifs exposés dans les motifs de mon ordonnance, la demande de jugement sommaire de la défenderesse est accueillie et les dépens sont adjugés à la défenderesse. Les quatre marques de commerce HOYO DE MONTERREY DE JOSÉ GENER HABANA, MONTE CRISTO HABANA et dessin, MONTECRISTO et ROMEO Y JULIETA sont invalides et sont radiées du registre des marques de commerce. La demande de jugement sommaire présentée par les demanderesses sur le fondement de la contrefaçon et de l"imitation frauduleuse est rejetée.

[6]      Même si, comme on peut le constater, la première phrase de l"ordonnance semble accueillir intégralement la demande de jugement sommaire de l"intimée, y compris le rejet de toutes les revendications des appelantes, la dernière phrase laisse entendre que l"action est encore pendante. Les appelantes soutiennent qu"il ressort des motifs du juge des requêtes que celui-ci n"a pas rejeté leur action, mais a simplement refusé de leur accorder un jugement sommaire. Cela semble être le cas, même s"il incombait aux appelantes de déposer une requête conformément à la règle 337(5) si elles pensaient que l"ordonnance n"était pas en accord avec les motifs.

[7]      Nous reconnaissons, aux fins du présent appel, que le juge des requêtes n"avait pas l"intention de rejeter cette partie de l"action ne dépendant pas des marques de commerce enregistrées au Canada par Havana House. Nous sommes toutefois d"avis que le juge des requêtes aurait dû la rejeter vu l"absence d"éléments de preuve démontrant l"existence d"une question sérieuse à instruire.

[8]      En terminant son examen de la preuve à cet égard, le juge des requêtes a dit :

         Je conclus que la preuve n"est pas suffisante pour me permettre de conclure qu"il n"y a pas de question sérieuse à instruire.

Toutefois, en vertu de la règle 432.2(1), les appelantes, en tant que parties intimées à la requête présentée en vue d"obtenir un jugement sommaire, étaient tenues d"" énoncer, dans un affidavit ou à l"aide d"un autre élément de preuve, des faits précis démontrant l"existence d"une question sérieuse à instruire ". S"il était convaincu qu"elles ne l"avaient pas fait, le juge était tenu par la règle 432.3(1) de rendre un jugement sommaire en faveur de l"intimée.

[9]      Lorsque nous examinons les conclusions de fait tirées par le juge, nous constatons qu"il a conclu qu"il n"y avait pas suffisamment d"éléments de preuve pour susciter une question sérieuse à instruire. Des exemples suivent.

[10]      Tout d"abord, évidemment, il a conclu que les marques de commerce enregistrées au Canada étaient invalides1 et qu"aucune des causes d"action des appelantes ne pouvaient reposer sur celles-ci. Il a estimé que toutes les marques de commerce employées sur les cigares indiquaient qu"elles proviennent des fabricants, non de Havana House2. Dans son avis, le témoin des appelantes a reconnu que les cigares vendus par l"intimée provenaient de sources cubaines représentées par Cubatabaco et Habanos S.A.3, ce que les marques de commerce indiqueraient évidemment aux clients de l"intimée. Le juge des requêtes a estimé qu"il n"y avait aucune preuve que quatre boîtes de cigares vendues par l"intimée, au sujet desquelles les appelantes ont porté plainte, portaient la marque non enregistrée H. UPMANN HABANA appartenant à Cubatabaco4. Le juge n"a pas cru que la preuve démontrait que le contrôle de la qualité de l"intimée était insatisfaisant5. " Rien ne permet[tait] de penser que [l"intimée] a employé des normes de contrôle de la qualité qui soient insatisfaisantes "6. De plus, " rien ne permet[tait] de conclure que les actes de [l"intimée] ont causé une "dépréciation de l"achalandage" au sens de l"article 22 de la Loi sur les marques de commerce "7. Qui plus est, la preuve était insuffisante pour démontrer que les cigares qu"elles vendaient n"avaient pas été achetés par l"intimée à des points de vente légitimes8. Ces conclusions démentent une revendication prouvable quant à la vente de " cigares contrefaits ", à la fausse indication par l"intimée que Havana House était la source de ses cigares ou aux activités qui entraîneraient une dépréciation de l"achalandage des appelantes.

[11]      Même si les appelantes ont tenté de trouver dans le dossier des éléments de preuve qui auraient pu étayer leur cause et que le juge des requêtes n"avait pas expressément mentionnés, nous ne pouvons constater aucune erreur susceptible de contrôle dans ses conclusions de fait. Ces conclusions démontrent qu"aucun jugement sommaire n"aurait dû être rendu en faveur des appelantes; mais elles démontrent aussi que les appelantes n"ont pas été en mesure d"énoncer " des faits précis démontrant l"existence d"une question sérieuse à instruire " comme l"exige la règle 432.2(1).

[12]      Si les règles applicables aux jugements sommaires doivent avoir une certaine utilité, elles devraient être utilisées dans des circonstances comme l"espèce pour éviter des retards et la tenue d"un procès reposant sur des éléments de preuve dénués de fondement.

[13]      Nous accueillons donc l"appel incident de l"intimée dans le dossier A-349-98 et nous rejetons l"action des appelantes.

[14]      L"intimée a droit aux dépens en première instance et à un seul mémoire de frais devant notre Cour.

     " B.L. Strayer "

     J.A.


Traduction certifiée conforme


Suzanne Bolduc, LL.B.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     Avocats et procureurs inscrits au dossier

DOSSIERS :                      A-349-98 et A-350-98
INTITULÉ DE LA CAUSE :          HAVANA HOUSE CIGAR & TOBACCO MERCHANTS LTD. et EMPRESSA CUBANA DEL TABACO faisant affaire sous les raisons sociales de CUBATABACO et de HABANOS S.A.
                         - et -
                         SKYWAY CIGAR STORE

DATE DE L"AUDIENCE :              LES LUNDI ET MARDI 8 ET 9 NOVEMBRE 1999
LIEU DE L"AUDIENCE :              TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DU JUGEMENT du juge Strayer prononcés à l"audience à Toronto (Ontario), le mardi 9 novembre 1999

ONT COMPARU :                  Roger T. Hughes, c.r.
                         Kenneth D. McKay
                             pour les appelantes
                         Alnaz I. Jiwa
                             pour l"intimée en personne

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER:

                         Sim, Hughes, Ashton & McKay
                         Avocats
                         6e étage, 330, University Ave.
                         Toronto (Ontario)
                         M5G 1R7
                             pour les appelantes
                         Alnaz I. Jiwa
                         103 Parkway Forest Drive
                         Pièce 54
                         Willowdale (Ontario)
                         M2J 1L8
                             pour l"intimée en personne
__________________

1 Motifs de l"ordonnance, 1 dossier d"appel, par. [68].

2 Ibid ., au par. [60].

3 Ibid ., au par. [72].

4 Ibid ., au par. [76].

5 Ibid ., aux par. [77] et [78].

6 Ibid ., au par. [83].

7 Ibid ., au par. [80].

8 Ibid ., au par. [79].

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