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Date : 20051122

Dossier : A-244-05

Référence : 2005 CAF 391

 

CORAM :      LE JUGE LINDEN

                        LE JUGE NADON   

                        LE JUGE MALONE

 

ENTRE :

RICHARD CONDO

appelant

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

 

 

 

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 6 septembre 2005

Jugement rendu à Ottawa, le 22 novembre 2005

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                            LE JUGE NADON

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                        LE JUGE LINDEN

                                                                                                                         LE JUGE MALONE

 


 

 

Date : 20051122

Dossier : A-244-05

Référence : 2005 CAF 391

 

CORAM :      LE JUGE LINDEN

                        LE JUGE NADON               

                        LE JUGE MALONE

 

ENTRE :

RICHARD CONDO

appelant

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

LE JUGE NADON

 

[1]               Il s’agit d’un appel de l’ordonnance datée du 30 mai 2005 par laquelle le juge de Montigny de la Cour fédérale a rejeté la demande de contrôle judiciaire présentée par l’appelant à l’égard d’une décision de la Section d’appel de la Commission nationale des libérations conditionnelles (la Section d’appel).

 

[2]               La Section d’appel a, dans une décision datée du 17 janvier 2005, confirmé la décision de la Commission nationale des libérations conditionnelles (la Commission), datée du 30 septembre 2004, dans laquelle celle‑ci concluait que l’appelant, un détenu d’un pénitencier fédéral, devait demeurer en détention jusqu’à l’expiration de sa peine.

Les faits

 

[3]               L’appelant, qui a aujourd’hui 42 ans, purge à l’heure actuelle une peine concurrente de cinq ans dans l’établissement Drummond pour avoir notamment, le 31 mai 1999, enlevé et frappé brutalement son ancienne femme, et lui avoir causé une fracture de l’os malaire et de la mâchoire ainsi que des contusions graves au visage.

 

[4]               Aux termes du paragraphe 127(3) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20 (la Loi), l’appelant avait le droit d’obtenir sa libération d’office après avoir purgé les deux tiers de sa peine. Il avait donc le droit d’être mis en liberté le 24 novembre 2004.

 

[5]               Cependant, au début du mois d’avril 2004, le directeur intérimaire de l’établissement Drummond a décidé, à la suite de l’examen du cas de l’appelant aux termes du paragraphe 129(1) de la Loi, qu’il existait des motifs raisonnables de croire que l’appelant commettrait, avant l’expiration de sa peine, une infraction causant un dommage grave à une autre personne. Le directeur intérimaire, agissant pour le compte du Service correctionnel du Canada (le SCC), a donc déféré le cas à la Commission pour qu’elle tranche cette question, conformément au sous‑alinéa 129(2)a)(i) de la Loi.

 

[6]               Le 30 septembre 2004, la Commission a tenu une audience en vue du maintien en incarcération de l’appelant, aux termes de l’alinéa 140(1)c) de la Loi. Après avoir constaté que le SCC lui avait régulièrement déféré le cas, la Commission a conclu qu’il existait des renseignements suffisants pour prononcer une ordonnance de détention prolongeant celle‑ci au-delà de la date de libération d’office de l’appelant. La Commission a conclu en ce sens en se déclarant convaincue que l’appelant risquait de commettre une infraction causant un dommage grave à une autre personne avant l’expiration de sa peine.

 

[7]               Conformément au paragraphe 147(1) de la Loi, l’appelant a interjeté appel de la décision de la Commission auprès de la Section d’appel. Le 17 janvier 2005, la Section d’appel a rejeté l’appel de l’appelant et confirmé la décision de la Commission. La Section d’appel a estimé qu’il n’était pas possible d’affirmer que la décision de la Commission était déraisonnable.

 

[8]               Enfin, le 30 mai 2005, le juge de Montigny a rejeté la demande de contrôle judiciaire présentée par le demandeur. En rendant cette ordonnance, il a dit qu’il n’était pas convaincu qu’il existait des motifs permettant de modifier la décision de la Section d’appel et qu’il était convaincu que tant la Commission que la Section d’appel avaient correctement tenu compte de tous les facteurs pertinents, y compris de ceux qui sont expressément mentionnés au paragraphe 132(1) de la Loi. Le juge a ensuite conclu qu’il n’était pas possible de qualifier la décision de la Section d’appel de manifestement déraisonnable.

Les dispositions légales pertinentes

 

[9]               Les dispositions pertinentes de la Loi sont reproduites ci-dessous :

 

100. La mise en liberté sous condition vise à contribuer au maintien d’une société juste, paisible et sûre en favorisant, par la prise de décisions appropriées quant au moment et aux conditions de leur mise en liberté, la réadaptation et la réinsertion sociale des délinquants en tant que citoyens respectueux des lois.

 

100. The purpose of conditional release is to contribute to the maintenance of a just, peaceful and safe society by means of decisions on the timing and conditions of release that will best facilitate the rehabilitation of offenders and their reintegration into the community as law-abiding citizens.

 

101. La Commission et les commissions provinciales sont guidées dans l’exécution de leur mandat par les principes qui suivent :

 

101. The principles that shall guide the Board and the provincial parole boards in achieving the purpose of conditional release are

 

a) la protection de la société est le critère déterminant dans tous les cas;

 

(a) that the protection of society be the paramount consideration in the determination of any case;

 

[…]

 

[…]

 

d) le règlement des cas doit, compte tenu de la protection de la société, être le moins restrictif possible;

 

(d) that parole boards make the least restrictive determination consistent with the protection of society;

 

[…]

 

[…]

 

107. (1) Sous réserve de la présente loi, de la Loi sur les prisons et les maisons de correction, de la Loi sur le transfèrement des délinquants, de la Loi sur la défense nationale, de la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre et du Code criminel, la Commission a toute compétence et latitude pour :

 

107. (1) Subject to this Act, the Prisons and Reformatories Act, the Transfer of Offenders Act, the National Defence Act, the Crimes Against Humanity and War Crimes Act and the Criminal Code, the Board has exclusive jurisdiction and absolute discretion

 

[…]

 

[…]

 

b) mettre fin à la libération conditionnelle ou d’office, ou la révoquer que le délinquant soit ou non sous garde en exécution d’un mandat d’arrêt délivré à la suite de la suspension de sa libération conditionnelle ou d’office;

 

(b) to terminate or to revoke the parole or statutory release of an offender, whether or not the offender is in custody under a warrant of apprehension issued as a result of the suspension of the parole or statutory release;

 

[…]

 

[…]

 

127. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, l’individu condamné ou transféré au pénitencier a le droit d’être mis en liberté à la date fixée conformément au présent article et de le demeurer jusqu’à l’expiration légale de sa peine.

 

127. (1) Subject to any provision of this Act, an offender sentenced, committed or transferred to penitentiary is entitled to be released on the date determined in accordance with this section and to remain at large

 

until the expiration of the sentence according to law.

 

[…]

 

[…]

 

   (3) La date de libération d’office d’un individu condamné à une peine d’emprisonnement le 1er novembre 1992 ou par la suite est, sous réserve des autres dispositions du présent article, celle où il a purgé les deux tiers de sa peine.

 

   (3) Subject to this section, the statutory release date of an offender sentenced on or after November 1, 1992 to imprisonment for one or more offences is the day on which the offender completes two thirds of the sentence.

 

[…]

 

[…]

 

129. (1) Le commissaire fait étudier par le Service, préalablement à la date prévue pour la libération d’office, le cas de tout délinquant dont la peine d’emprisonnement d’au moins deux ans comprend une peine infligée pour une infraction visée à l’annexe I ou II ou mentionnée à l’une ou l’autre de celles-ci et qui est punissable en vertu de l’article 130 de la Loi sur la défense nationale.

 

129. (1) Before the statutory release date of an offender who is serving a sentence of two years or more that includes a sentence imposed for an offence set out in Schedule I or II or an offence set out in Schedule I or II that is punishable under section 130 of the National Defence Act, the Commissioner shall cause the offender's case to be reviewed by the Service.

 

(2) Au plus tard six mois avant la date prévue pour la libération d’office, le Service défère le cas à la Commission — et lui transmet tous les renseignements en sa possession et qui, à son avis, sont pertinents — s’il estime que :

(2) After the review of the case of an offender pursuant to subsection (1), and not later than six months before the statutory release date, the Service shall refer the case to the Board together with all the information that, in its opinion, is relevant to it, where the Service is of the opinion

a) dans le cas où l’infraction commise relève de l’annexe I :

(a) in the case of an offender serving a sentence that includes a sentence for an offence set out in Schedule I, that

(i) soit elle a causé la mort ou un dommage grave à une autre personne et il existe des motifs raisonnables de croire que le délinquant commettra, avant l’expiration légale de sa peine, une telle infraction,

 

(i) the commission of the offence caused the death of or serious harm to another person and there are reasonable grounds to believe that the offender is likely to commit an offence causing death or serious harm to another person before the expiration of the offender's sentence according to law,

 

[…]

 

[…]

 

130. (1) Sous réserve des paragraphes 129(5), (6) et (7), la Commission informe le détenu du renvoi et du prochain examen de son cas — déféré en application des paragraphes 129(2), (3) ou (3.1) — et procède, selon les modalités réglementaires, à cet examen ainsi qu’à toutes les enquêtes qu’elle juge nécessaires à cet égard.

 

130. (1) Where the case of an offender is referred to the Board by the Service pursuant to subsection 129(2) or referred to the Chairperson of the Board by the Commissioner pursuant to subsection 129(3) or (3.1), the Board shall, subject to subsections 129(5), (6) and (7), at the times and in the manner prescribed by the regulations,

 

(a) inform the offender of the referral and review, and

 

(b) review the case,

and the Board shall cause all such inquiries to be conducted in connection with the review as it considers necessary.

 

   (2) Le délinquant dont le cas est examiné aux termes du paragraphe (1) ne peut être libéré d’office tant que la Commission n’a pas rendu sa décision à son égard.

 

   (2) An offender referred to in subsection (1) is not entitled to be released on statutory release before the Board renders its decision under this section in relation to the offender.

 

   (3) Au terme de l’examen, la Commission peut, par ordonnance, interdire la mise en liberté du délinquant avant l’expiration légale de sa peine autrement qu’en conformité avec le paragraphe (5) si elle est convaincue :

   (3) On completion of the review of the case of an offender referred to in subsection (1), the Board may order that the offender not be released from imprisonment before the expiration of the offender's sentence according to law, except as provided by subsection (5), where the Board is satisfied

a) dans le cas où la peine d’emprisonnement comprend une peine infligée pour une infraction visée à l’annexe I, ou qui y est mentionnée et qui est punissable en vertu de l’article 130 de la Loi sur la défense nationale, que le délinquant commettra, s’il est mis en liberté avant l’expiration légale de sa peine, soit une infraction causant la mort ou un dommage grave à une autre personne, soit une infraction d’ordre sexuel à l’égard d’un enfant;

 

(a) in the case of an offender serving a sentence that includes a sentence for an offence set out in Schedule I, or for an offence set out in Schedule I that is punishable under section 130 of the National Defence Act, that the offender is likely, if released, to commit an offence causing the death of or serious harm to another person or a sexual offence involving a child before the expiration of the offender's sentence according to law,

 

[…]

 

[…]

 

132. (1) Le Service et le commissaire, dans le cadre des examens et renvois prévus à l’article 129, ainsi que la Commission, pour décider de l’ordonnance à rendre en vertu de l’article 130 ou 131, prennent en compte tous les facteurs utiles pour évaluer le risque que le délinquant commette, avant l’expiration légale de sa peine, une infraction de nature à causer la mort ou un dommage grave à une autre personne, notamment :

132. (1) For the purposes of the review and determination of the case of an offender pursuant to section 129, 130 or 131, the Service, the Commissioner or the Board, as the case may be, shall take into consideration any factor that is relevant in determining the likelihood of the commission of an offence causing the death of or serious harm to another person before the expiration of the offender's sentence according to law, including

a) un comportement violent persistant, attesté par divers éléments, en particulier :

(a) a pattern of persistent violent behaviour established on the basis of any evidence, in particular,

(i) le nombre d’infractions antérieures ayant causé un dommage corporel ou moral,

(i) the number of offences committed by the offender causing physical or psychological harm,

(ii) la gravité de l’infraction pour laquelle le délinquant purge une peine d’emprisonnement,

(ii) the seriousness of the offence for which the sentence is being served,

(iii) l’existence de renseignements sûrs établissant que le délinquant a eu des difficultés à maîtriser ses impulsions violentes ou sexuelles au point de mettre en danger la sécurité d’autrui,

(iii) reliable information demonstrating that the offender has had difficulties controlling violent or sexual impulses to the point of endangering the safety of any other person,

(iv) l’utilisation d’armes lors de la perpétration des infractions,

(iv) the use of a weapon in the commission of any offence by the offender,

(v) les menaces explicites de recours à la violence,

(v) explicit threats of violence made by the offender,

(vi) le degré de brutalité dans la perpétration des infractions,

(vi) behaviour of a brutal nature associated with the commission of any offence by the offender, and

(vii) un degré élevé d’indifférence quant aux conséquences de ses actes sur autrui;

(vii) a substantial degree of indifference on the part of the offender as to the consequences to other persons of the offender's behaviour;

b) les rapports de médecins, de psychiatres ou de psychologues indiquant que, par suite d’une maladie physique ou mentale ou de troubles mentaux, il présente un tel risque;

(b) medical, psychiatric or psychological evidence of such likelihood owing to a physical or mental illness or disorder of the offender;

c) l’existence de renseignements sûrs obligeant à conclure qu’il projette de commettre, avant l’expiration légale de sa peine, une infraction de nature à causer la mort ou un dommage grave à une autre personne;

(c) reliable information compelling the conclusion that the offender is planning to commit an offence causing the death of or serious harm to another person before the expiration of the offender's sentence according to law; and

d) l’existence de programmes de surveillance de nature à protéger suffisamment le public contre le risque que présenterait le délinquant jusqu’à l’expiration légale de sa peine.

 

(d) the availability of supervision programs that would offer adequate protection to the public from the risk the offender might otherwise present until the expiration of the offender's sentence according to law.

 

[…]

 

[…]

 

147. (1) Le délinquant visé par une décision de la Commission peut interjeter appel auprès de la Section d’appel pour l’un ou plusieurs des motifs suivants :

147. (1) An offender may appeal a decision of the Board to the Appeal Division on the ground that the Board, in making its decision,

a) la Commission a violé un principe de justice fondamentale;

(a) failed to observe a principle of fundamental justice;

b) elle a commis une erreur de droit en rendant sa décision;

(b) made an error of law;

c) elle a contrevenu aux directives établies aux termes du paragraphe 151(2) ou ne les a pas appliquées;

(c) breached or failed to apply a policy adopted pursuant to subsection 151(2);

d) elle a fondé sa décision sur des renseignements erronés ou incomplets;

(d) based its decision on erroneous or incomplete information; or

e) elle a agi sans compétence, outrepassé celle-ci ou omis de l’exercer.

 

(e) acted without jurisdiction or beyond its jurisdiction, or failed to exercise its jurisdiction.

 

[…]

 

[…]

 

(4) Au terme de la révision, la Section d’appel peut rendre l’une des décisions suivantes :

(4) The Appeal Division, on the completion of a review of a decision appealed from, may

a) confirmer la décision visée par l’appel;

(a) affirm the decision;

b) confirmer la décision visée par l’appel, mais ordonner un réexamen du cas avant la date normalement prévue pour le prochain examen;

(b) affirm the decision but order a further review of the case by the Board on a date earlier than the date otherwise provided for the next review;

c) ordonner un réexamen du cas et ordonner que la décision reste en vigueur malgré la tenue du nouvel examen;

(c) order a new review of the case by the Board and order the continuation of the decision pending the review; or

d) infirmer ou modifier la décision visée par l’appel.

 

(d) reverse, cancel or vary the decision.

 

(5) Si sa décision entraîne la libération immédiate du délinquant, la Section d’appel doit être convaincue, à la fois, que :

(5) The Appeal Division shall not render a decision under subsection (4) that results in the immediate release of an offender from imprisonment unless it is satisfied that

a) la décision visée par l’appel ne pouvait raisonnablement être fondée en droit, en vertu d’une politique de la Commission ou sur les renseignements dont celle-ci disposait au moment de l’examen du cas;

(a) the decision appealed from cannot reasonably be supported in law, under the applicable policies of the Board, or on the basis of the information available to the Board in its review of the case; and

b) le retard apporté à la libération du délinquant serait inéquitable.

 

(b) a delay in releasing the offender from imprisonment would be unfair.

 

 [Non souligné dans l’original.]

 [Emphasis added]

 

Les questions en litige

 

[10]           Les questions en litige dans le présent appel sont les suivantes :

1.      Le juge qui a entendu la demande a-t-il commis une erreur en décidant que la décision manifestement déraisonnable était la norme applicable au contrôle des décisions prononcées par la Section d’appel?

2.      Le juge a-t-il commis une erreur en rejetant la demande de contrôle judiciaire de l’appelant et, en particulier, (i) a-t-il commis une erreur à l’égard de la conclusion de la Commission selon laquelle elle avait le pouvoir de se prononcer sur le cas du demandeur que lui avait déféré le SCC et (ii) a-t-il commis une erreur en jugeant qu’il n’existait aucun motif permettant de modifier la décision de la Section d’appel selon laquelle la conclusion de la Commission portant que l’appelant risquait de commettre une infraction causant un dommage grave à une autre personne avant l’expiration de sa peine n’était pas déraisonnable?

3.      Si le juge a commis une erreur susceptible de contrôle, l’appelant a-t-il le droit d’obtenir un bref de prohibition interdisant à la Commission de tenir une audience en vue de son maintien en incarcération, plutôt qu’une ordonnance annulant la décision de la Section d’appel et renvoyant l’affaire pour nouvelle décision?

 

Analyse

 

[11]           Pour les motifs qui suivent, il n’est pas utile que j’examine les allégations de l’appelant selon lesquelles le juge a commis une erreur lorsqu’il a appliqué la norme de contrôle de la décision manifestement déraisonnable à la décision de la Section d’appel. Étant donné que les questions en litige portent non pas sur de pures questions de droit, mais plutôt sur des questions mixtes de fait et de droit, la norme applicable est soit la décision manifestement déraisonnable, soit la décision déraisonnable. J’estime que, quelle que soit la norme applicable, il n’existe aucun motif d’intervenir dans la présente affaire.

 

[12]           Avant d’examiner les questions en litige restantes, il serait utile de décrire brièvement le régime législatif pertinent de façon à bien comprendre ces questions.

 

[13]           La Commission est un tribunal administratif indépendant créé par la Loi, et dont les principales attributions concernent la mise en liberté sous condition. Aux termes de l’article 127 de la Loi, le délinquant a généralement le droit d’être libéré d’office lorsqu’il a purgé les deux tiers de sa peine. La période qui va de cette date à celle de la fin de sa peine, appelée date d’expiration du mandat, est souvent désignée par l’expression « période de libération d’office ». Pendant cette période, le délinquant peut purger le reste de sa peine « en liberté » plutôt qu’en détention. La Commission ne prend pas de décision au sujet de la libération d’office des délinquants, mais elle a toute compétence et latitude pour mettre fin à la libération d’office ou la révoquer (voir l’alinéa 107(1)b) de la Loi).

 

[14]           Aux termes du paragraphe 129(1) de la Loi, le commissaire du SCC fait étudier par le SCC, préalablement à la date prévue pour la libération d’office, le cas de tout délinquant dont la peine d’emprisonnement d’au moins deux ans comprend une peine infligée pour une infraction visée à l’annexe I ou II de la Loi. Les infractions visées par ces annexes sont des infractions graves et comprennent celles qui sont à l’origine de la peine que purge actuellement l’appelant.

 

[15]           Lorsque le SCC ou le commissaire a des motifs raisonnables de croire qu’un tel délinquant commettra, avant l’expiration de sa peine, c.‑à‑d. avant la date d’expiration du mandat, une infraction causant la mort ou un dommage grave à une autre personne, le cas est déféré à la Commission au plus tard six mois avant la date prévue pour la libération d’office du délinquant.

 

[16]           Lorsqu’un cas a été déféré à la Commission, celle‑ci l’examine et peut interdire la mise en liberté du délinquant avant l’expiration légale de sa peine, si elle est convaincue que le délinquant commettra, s’il est mis en liberté avant l’expiration légale de sa peine, une infraction causant la mort ou un dommage grave à une autre personne (voir l’alinéa 130(3)a) de la Loi). La Commission prend cette décision en tenant compte de tous les facteurs pertinents, y compris ceux qui sont expressément exposés à l’article 132 de la Loi.

 

[17]           Dans Cartier c. Canada (Procureur général), [2003] 2 C.F. 317, le juge Décary, parlant au nom de la Cour, a expliqué dans quelles circonstances la Section d’appel pouvait modifier la décision de la Commission. Après avoir examiné en détail l’article 147 de la Loi, il a conclu que la Section d’appel ne pouvait intervenir que si la Commission avait commis une erreur de fait ou de droit qui était déraisonnable. Aux paragraphes 8 à 10 de ses motifs, le juge Décary a écrit :

[8]        L’alinéa 147(5)a) semble indiquer une intention du législateur de privilégier la décision de la Commission, bref de refuser la libération d’office dès que cette décision est raisonnablement fondée en droit et en fait. La Commission a droit à l’erreur, si cette erreur est raisonnable. La Section d’appel n’intervient que si l’erreur, de droit ou de fait, est déraisonnable. Je serais porté à croire qu’une erreur de droit de la Commission relativement à son degré de « conviction » quant à l’évaluation du risque d’une mise en liberté – une erreur qui est alléguée en l’espèce – serait une erreur déraisonnable par définition car elle touche la fonction même de la Commission.

 

[9]        Si la norme de contrôle applicable est celle de la raisonnabilité lorsque la Section d’appel infirme la décision de la Commission, il me paraît improbable que le législateur ait voulu que la norme soit différente lorsque la Section d’appel confirme. Je crois que le législateur, encore que maladroitement, n’a fait que s’assurer à l’alinéa 147(5)a) que la Section d’appel soit en tout temps guidée par la norme de raisonnabilité.

 

[10]      La situation inusitée dans laquelle se trouve la Section d’appel rend nécessaire une certaine prudence dans l’application des règles habituelles du droit administratif. Le juge est théoriquement saisi d’une demande de contrôle judiciaire relative à la décision de la Section d’appel, mais lorsque celle‑ci confirme la décision de la Commission, il est en réalité appelé à s’assurer, ultimement, de la légalité de cette dernière.

 

 

[18]           J’aborde maintenant la question qui découle du fait que la Commission a accepté d’exercer ses pouvoirs lorsque le SCC a décidé de lui déférer le cas.

 

[19]           L’appelant soutient que la Commission n’avait pas le pouvoir de tenir une audience en vue de son maintien en incarcération parce qu’il n’existait aucune base rationnelle justifiant le renvoi de son cas. Plus précisément, il affirme que la Commission a commis un certain nombre d’erreurs lorsqu’elle a pris sa décision. Les voici :

a)      La Commission a omis de tenir compte de l’opinion des agents de correction qui connaissaient le mieux l’appelant, parce qu’ils avaient été davantage en contact avec celui, et elle a uniquement tenu compte de la position officielle du SCC. Par conséquent, d’après l’appelant, la Commission n’a pas tenu compte de tous les éléments pertinents dont elle disposait.

b)      La Commission n’a pas tenu compte du fait qu’avant son arrivée à l’établissement Drummond, il n’avait jamais été soumis à une audience en vue de son maintien en incarcération et son infraction n’avait jamais été qualifiée d’infraction ayant causé un dommage grave à une autre personne.

c)      La Commission n’a pas tenu compte du fait que Nancy Lévêsque, son agente de libération conditionnelle à Donnacona, et Peter Slaughter, son agent de libération conditionnelle à l’établissement Bath, avaient émis l’avis qu’il ne devrait pas être soumis à une audience en vue de son maintien en incarcération.

 

[20]           La Commission comme la Section d’appel ont rejeté ces prétentions. La Commission a estimé que le SCC avait correctement décidé de lui déférer le cas et, par conséquent, qu’elle avait le pouvoir d’entendre l’affaire. Il est exact que des agents du SCC ont donné des opinions différentes à des moments différents sur la question de savoir s’il y avait lieu de maintenir l’appelant en détention au-delà de sa date de libération d’office, mais la Commission a estimé qu’il n’y avait pas eu d’opinion dissidente « officielle » appuyant la position de l’appelant. C’est pourquoi la Commission a conclu que, dans les circonstances, la décision qu’avait prise le SCC de lui déférer le cas était raisonnable.

 

[21]           La Section d’appel a confirmé la conclusion à laquelle en est arrivée la Commission. La Section d’appel a estimé qu’il y avait suffisamment de renseignements pertinents pour justifier la conclusion de la Commission selon laquelle la décision de lui déférer le cas était raisonnable conformément au sous‑alinéa 129(2)a)(i) de la Loi. La Section d’appel en est arrivée à cette conclusion après avoir fait référence à la Recommandation préliminaire en vue d’un éventuel maintien en incarcération datée du 17 mars 2004 et à l’Évaluation en vue d’une décision datée du 6 mars 2004, et elle a formulé les observations suivantes aux pages 3 et 4 de sa décision :

[…] Il était évident, d’après les renseignements versés à votre dossier, que le SCC estimait que les critères de renvoi avaient été remplis. En particulier, le SCC a indiqué que vous purgez actuellement une peine pour une infraction visée à l’annexe 1 (voies de fait graves); que l’infraction a causé à la victime des dommages corporels graves, prévus dans la Loi (une fracture de la pommette gauche, une mâchoire fracturée et des contusions graves à l’œil gauche, lesquelles ont nécessité une chirurgie plastique et une chirurgie de reconstruction squelettique); et qu’il y a des motifs raisonnables de croire que vous êtes susceptible de commettre, avant l’expiration de votre peine, une infraction causant la mort ou un dommage grave à une autre personne.

 

 

[22]           La lecture de l’Évaluation en vue d’une décision (l’Évaluation) démontre de façon incontestable que la décision par le SCC de déférer le cas repose sur une base rationnelle. L’Évaluation, qui comprend 62 pages, examine en détail les antécédents correctionnels de l’appelant depuis 1980 et analyse aussi le comportement qu’il a eu dans les divers établissements fédéraux où il a été détenu depuis le 7 août 2001, à savoir Millhaven (à partir du 7 août 2001), Warkworth (à partir du 21 décembre 2001), Cowansville (à partir du 15 avril 2002), La Macaza (à partir du 27 septembre 2002), Donnacona (à partir du 26 février 2003) et, enfin, Drummond (à partir du 3 décembre 2003).

 

[23]           L’Évaluation expose ensuite de façon très détaillée (aux pages 28 à 61) les motifs mis de l’avant par l’équipe de gestion de cas de l’établissement Drummond, composée de Jacques Gauvreau, Marc Lanoie et Maryse Rioux, sur lesquels repose la décision de déférer le cas de l’appelant à la Commission et de recommander son maintien en incarcération.

 

[24]           Je ne vois donc pas comment il est possible de soutenir que la décision de déférer le cas à la Commission ne repose sur aucune base rationnelle.

 

[25]           Je vais maintenant brièvement examiner les prétentions de l’appelant. Premièrement, Peter Slaughter, l’agent de libération conditionnelle qui n’aurait pas recommandé le maintien en incarcération, est l’agent du SCC qui a présenté à la Commission le renvoi en vue d’un examen de maintien en incarcération. Dans son exposé, M. Slaughter a expliqué que l’Évaluation avait été effectuée par Mme Rioux, une agente de libération conditionnelle de l’établissement Drummond, et une membre de l’équipe de gestion de cas, et que l’Évaluation avait été examinée par le Comité d’unité de l’établissement avant que le cas soit déféré à la Commission par le directeur intérimaire. J’estime qu’il importe peu que M. Slaughter ait été d’accord ou non avec l’équipe de gestion de cas pour recommander le maintien en incarcération de l’appelant, étant donné qu’il est clair que le SCC a recommandé, aux termes du paragraphe 129(2) de la Loi, ce maintien dans le délai prévu par la Loi et en se fondant sur une base rationnelle.

 

[26]           Deuxièmement, même si Mme Nancy Lévêsque, l’agente de libération conditionnelle de l’appelant à Donnacona, estimait que son cas ne devait pas être déféré à la Commission en vue d’un éventuel maintien en incarcération, elle a néanmoins expliqué à l’appelant, au cours de la réunion qu’elle a eue avec lui le 18 septembre 2003, que ce n’était pas à elle d’évaluer son cas en vue d’un éventuel renvoi à la Commission pour une audience aux fins d’un maintien en incarcération et que cette responsabilité appartenait à l’équipe de gestion de cas qui serait chargée d’effectuer l’Évaluation avant sa libération d’office.

 

[27]           Troisièmement, j’estime que les prétentions de l’appelant selon lesquelles, avant son arrivée à l’établissement Drummond, il n’avait jamais été mentionné qu’il serait susceptible de faire l’objet d’un renvoi en vue d’une audience de maintien en incarcération, sont dépourvues de tout fondement.

 

[28]           Pour des motifs qu’il n’y a pas lieu d’examiner, il semble que, jusqu’à ce que l’appelant arrive à l’établissement Donnacona (en février 2003), ses dossiers correctionnels étaient fondés sur le fait qu’il ne purgeait pas alors une peine pour une infraction ayant causé un dommage grave à la personne, c.‑à‑d. un des critères exigés pour le renvoi en vue d’un examen de maintien en incarcération. Ce point de vue était manifestement contraire aux conclusions du juge MacPhee de la Cour de justice de l’Ontario qui a qualifié, dans ses décisions du 14 avril 2000 et du 26 juillet 2001, le crime commis par l’appelant contre son ancienne femme de sévices graves à la personne. Il est difficile d’imaginer comment le juge MacPhee aurait pu en arriver à une autre conclusion.

 

[29]           Quoi qu’il en soit, dans une modification au Rapport sur le profil criminel de l’appelant, daté du 6 janvier 2004, Mme Nancy Lévêsque mentionne que l’appelant purgeait une peine pour une infraction qui avait causé un dommage grave à la victime. Voici la conclusion de Mme Lévêsque :

[traduction] Lorsque des poursuites sont instituées ou des peines imposées à l’égard d’infractions ayant causé un dommage grave au sens de la Loi, le SCC sait que les infractions commises ont causé un dommage grave à la victime; cette modification a été écrite dans le but d’illustrer l’effet de l’application des critères du dommage grave.

 

Un examen des divers documents figurant au dossier et la nature même de la déclaration d’un délinquant visé par une surveillance de longue durée nous amènent à conclure que la victime, Mme McGuire, a subi un dommage grave.

 

 

[30]           À mon avis, les prétentions de l’appelant sur ce point sont indéfendables. Je ne vois pas ce que l’on peut reprocher à la conclusion de la Section d’appel selon laquelle la décision qu’a prise la Commission était tout à fait raisonnable. Premièrement, et cela n’est pas contesté, le SCC a déféré le cas dans le délai prévu par la Loi, c.‑à‑d. pas plus tard que six mois avant la date prévue pour la libération d’office de l’appelant. Deuxièmement, les preuves indiquent clairement que la décision par le SCC de déférer le cas reposait sur une base rationnelle.

 

[31]           J’aborde maintenant la question du caractère suffisant des preuves concernant la probabilité que l’appelant commette une infraction grave causant un préjudice à une autre personne avant l’expiration de sa peine.

 

[32]           L’appelant soutient que la Commission et la Section d’appel ont toutes deux commis un certain nombre d’erreurs de droit dont le juge n’a pas tenu compte lorsqu’il a rendu sa décision. Premièrement, l’appelant soutient que la Commission n’a pas limité son examen à la période pertinente, c.‑à‑d. du 24 novembre 2004 (la date de la libération d’office) au 25 juillet 2006 (la date d’expiration du mandat).

 

[33]           Deuxièmement, selon l’appelant, la Commission a en fait tenu une audience de libération conditionnelle et non une audience en vue d’un maintien en incarcération, dans la mesure où elle a principalement examiné le risque de récidive d’une façon générale et non pas le risque que l’appelant commette une infraction grave causant un dommage à une autre personne avant l’expiration de sa peine.

 

[34]           Troisièmement, l’appelant soutient que la décision de la Commission était déraisonnable parce qu’elle ne s’appuyait pas sur des renseignements pertinents, fiables et convaincants. En particulier, il signale que la Commission n’a pas accordé une force probante suffisante à la seule preuve d’expert dont elle disposait au sujet de son risque de récidive violente, à savoir l’opinion du Dr Semrau qui se trouve dans les rapports du 20 avril 2001 et du 4 septembre 2004 et, dans une mesure moindre, l’avis de la psychologue, Mme Cindy Cyr, tel qu’il figurait dans son rapport du 16 janvier 2004.

 

[35]           Enfin, l’appelant soutient que la Commission a omis d’envisager, comme l’y invite l’alinéa 101d) de la Loi, de prononcer une ordonnance moins restrictive qu’une ordonnance de maintien en incarcération.

 

[36]           Toutes ces prétentions ont été exposées par l’appelant à la Section d’appel et n’ont pas été retenues. Pour ce qui est de la période pertinente, la Section d’appel a conclu que la Commission savait fort bien que sa décision portait sur la probabilité que l’appelant cause un dommage grave à une autre personne avant l’expiration de sa peine. J’ai lu avec attention la décision de la Commission et je suis entièrement convaincu non seulement du fait que la Commission savait que sa décision devait porter uniquement sur la période allant de la date de la libération d’office à la date d’expiration du mandat, mais également qu’elle a pris sa décision en fonction de cette période. Après avoir analysé le cas de l’appelant, la Commission a conclu sa décision dans les termes suivants (à la page 14 de ses motifs) :

[traduction] Après avoir pris en considération tous les critères de maintien en incarcération, tels qu’exposés à l’article 132 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, la Commission est convaincue que vous risquez de commettre une infraction causant un dommage grave avant la date d’expiration de votre mandat. C’est pourquoi la Commission ordonne par la présente votre maintien en incarcération.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[37]           Je ne suis donc pas convaincu que la conclusion que la Section d’appel a tirée sur ce point est déraisonnable.

 

[38]           Pour ce qui est de la prétention de l’appelant selon laquelle la Commission a en réalité tenu une audience de libération conditionnelle et non pas une audience en vue d’un maintien en incarcération, la Section d’appel a été convaincue que ce n’était pas le cas. Elle a estimé qu’il était incontestable que la Commission avait tenu une audience en vue d’un maintien en incarcération et qu’en particulier, elle avait examiné tous les facteurs pertinents, y compris ceux qui sont expressément énoncés à l’article 132 de la Loi.

 

[39]           D’après les preuves, il n’est pas possible d’affirmer, à mon avis, que la conclusion de la Section d’appel est déraisonnable.

 

[40]           La Section d’appel a ensuite examiné la prétention de l’appelant selon laquelle la Commission n’avait pas accordé une force probante suffisante à l’avis du Dr Semrau. La Section d’appel s’est prononcée sur cet argument dans les termes suivants à la page 11 de ses motifs :

Nous ne sommes pas d’accord avec vos arguments selon lesquels la Commission aurait dû se fonder uniquement sur les rapports du Dr Semrau, puisque celui‑ci était le seul spécialiste qui avait mis l’accent sur votre risque de récidive avec violence pouvant causer un dommage grave ou la mort. La Commission avait les pouvoirs discrétionnaires (tout comme le juge MacPhee lors de votre audience visant à déterminer si vous devez être déclaré délinquant dangereux) pour évaluer et soupeser tous les renseignements pertinents, y compris les divers avis d’experts au moment de rendre sa décision. Les avis d’experts constituent un seul facteur, parmi de nombreux autres, dont la Commission tient compte. Même si cette dernière prend en considération les avis d’experts, elle doit tirer ses propres conclusions indépendantes sur le risque que vous présentez, ce qu’elle a fait dans votre cas. Nous estimons que la Commission a exercé à juste titre son pouvoir discrétionnaire en évaluant les divers avis d’experts ayant trait à votre risque de récidive avec violence, et nous n’avons donc aucune raison d’intervenir.

 

 

[41]           Je tiens à préciser qu’à partir de la page 10 de ses motifs, la Commission examine les divers avis d’expert, notamment ceux du Dr Semrau et de Mme Cindy Cyr. Aux pages 11 et 12 de ses motifs, la Commission a déclaré :

[traduction] Depuis 2003, vous refusez de participer à des évaluations effectuées par les psychologues du Service correctionnel du Canada. Le rapport de Cindy Cyr qui a été achevé en janvier 2004 constitue une exception. Elle a indiqué que vous semblez peu disposé à participer à des programmes portant sur les facteurs qui influencent votre comportement. Elle a constaté que vous refusez d’assumer la responsabilité de vos gestes et que vous avez tendance à faire retomber la faute sur votre victime. Elle s’est déclarée favorable à une libération à la date de libération d’office assortie d’une assignation à résidence. Il est regrettable qu’aucune mesure actuarielle ait été utilisée pour effectuer l’évaluation en raison du fait que la personne chargée de vous évaluer croyait que ces mesures actuarielles n’étaient pas valides étant donné que vous étiez d’origine autochtone. La recherche est clairement favorable à l’utilisation de ces outils pour l’évaluation des risques. C’est pourquoi la Commission accorde une force probante moindre à cette évaluation.

 

D’après l’Évaluation du risque de violence conjugale, achevée en mars 2003, vous représentez un risque élevé de violence familiale.

 

Les renseignements les plus récents dont dispose la Commission sont un rapport daté de septembre 2004, qui encore une fois a été effectué à votre demande, par le DSemrau. Il déclare avoir préparé cette mise à jour de l’évaluation en disposant de renseignements nouveaux qu’il n’avait pas lorsqu’il a effectué le rapport de 2001. Premièrement, pour la première évaluation, il ne savait pas que vous aviez commis auparavant des actes de violence à l’égard de votre partenaire actuelle, Mme Magas. Il a exprimé des inquiétudes à ce sujet, « compte tenu du fait que [votre] plan de libération d’office comprendrait presque certainement la continuation de cette relation ». Il a émis l’avis que le plus grand risque touchait le domaine de la violence conjugale. Il a également émis l’avis que, par rapport à l’entrevue précédente que vous aviez eue avec lui, l’impression générale qu’il avait maintenant eue de vous était plus négative sur certains points. Il a mentionné que votre compréhension de la situation s’était obscurcie. Il a conclu que si vous deviez résider dans un établissement résidentiel communautaire ou un centre correctionnel communautaire « […] le risque que [vous ayez] un comportement violent à l’égard d’une personne serait faible […] » Pour ce qui est des interventions visant à résoudre vos difficultés personnelles et émotives non résolues ainsi qu’à aborder le domaine des facteurs criminogènes, il laisse entendre qu’il est peu probable que vous répondiez favorablement à ce genre de traitement. La Commission souscrit à cette opinion, tout en notant que vous avez déclaré estimer pouvoir profiter de services de counseling, mais seulement avec un thérapeute de votre choix.

 

La Commission affirme ensuite :

[traduction] En fin de compte, la Commission dispose d’évaluations cliniques du risque qui vont de « relativement faible » à « très » ou « extrêmement élevé ». De plus, les scores que vous avez obtenus sur l’Échelle de psychopathie révisée sont considérablement différents. Les rapports préparés à votre demande évaluent votre risque au niveau le plus faible.

 

Face aux contradictions constatées dans les renseignements fournis par les experts et les professionnels, la Commission est tenue d’apprécier chaque élément de preuve et de tirer sa propre conclusion au sujet du risque de violence future et plus précisément, de la probabilité que vous causiez un dommage grave à l’avenir.

 

 

[42]           À mon avis, la Section d’appel n’a pas commis d’erreur au sujet de la force probante à accorder aux opinions du Dr Semrau et de Mme Cyr. J’ai soigneusement examiné les preuves, en particulier les deux rapports du Dr Semrau et le rapport de Mme Cyr du 16 janvier 2004, et je suis convaincu qu’il était raisonnablement loisible à la Section d’appel de conclure comme elle l’a fait. De toute façon, je suis tout à fait d’accord avec la Section d’appel lorsqu’elle affirme que les avis d’expert, même s’ils sont pertinents et importants, ne peuvent, dans la plupart des cas, jouer un rôle déterminant. Ils constituent un facteur qui doit être pris en considération, parmi tous les autres facteurs pertinents. En fin de compte, la Commission doit apprécier l’ensemble des preuves et en arriver à une conclusion.

 

[43]           Pour conclure, il convient de rappeler que le Dr Semrau estimait que l’appelant était un psychopathe, qu’il définit comme étant la catégorie [traduction] « des personnes dont la personnalité et le comportement reflètent une forte tendance à l’égocentrisme, qui profitent des autres et qui manifestent très peu de considération envers autrui ». Il a mentionné que faisait partie de la catégorie des psychopathes un tiers seulement des individus les plus perturbés ayant des personnalités antisociales. À son avis, l’appelant occupe une position élevée sur l’échelle de la psychopathie. Il a expliqué son point de vue de la façon suivante :

[traduction] Cela veut dire que si l’on choisissait au hasard cent détenus de sexe masculin dans un pénitencier et qu’on les classait selon leur degré de psychopathie, il [l’appelant] se situerait à la 77e position, 76 détenus étant moins psychopathes que lui et 23 détenus l’étant davantage.

 

 

[44]           Le Dr Semrau a conclu son premier rapport en évaluant à 25 p. 100 au cours des dix prochaines années, dans le cas où l’appelant serait remis en liberté immédiatement, le risque qu’il commette une infraction grave contre une autre personne. C’est le passage de l’avis du Dr Semrau sur lequel l’appelant base ses prétentions. Comme je viens de le mentionner, la Commission et la Section d’appel ont examiné ces prétentions sans commettre d’erreur. J’ajouterais simplement, pour appuyer le point de vue de la Commission, que l’avis du DSemrau, comme celui d’autres experts dans ce domaine, est, dans une certaine mesure, une estimation éclairée. Sur ce point, à la page 11 de son premier rapport, le DSemrau a formulé les remarques suivantes :

[traduction] Sur le plan de la pratique clinique et de la recherche, il est très difficile de mettre sur pied des méthodes fiables permettant d’apprécier le risque de récidive que posent les délinquants violents. Il existe de nombreuses raisons qui expliquent cet état de choses, notamment notre compréhension imparfaite des causes à l’origine des crimes violents, les difficultés à faire entrer les caractéristiques très variées de chaque contrevenant dans un cadre standardisé permettant d’évaluer leurs problèmes, les effets incertains des traitements et des mesures de surveillance, la difficulté de connaître à l’avance la situation dans laquelle un délinquant pourrait vivre, être surveillé et traité au cas où il serait remis en liberté dans la collectivité.

 

Ces problèmes sont encore aggravés par les difficultés cliniques qui découlent du fait qu’il est difficile de savoir exactement ce qu’un délinquant pense et ressent véritablement au cours d’une entrevue d’évaluation, la possibilité que le délinquant se trompe lui‑même ou tente intentionnellement ou non de tromper les autres demeurant un problème répandu. Même le fait d’avoir vraiment de bonnes intentions et une attitude positive peut être trompeur en raison des nombreuses distractions, sources de stress et tentations que rencontre un délinquant dans la collectivité.

 

Compte tenu de toutes ces difficultés, il faut reconnaître que nos méthodes d’évaluation sont nécessairement approximatives et peuvent tout au plus fournir une estimation des risques de récidive.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[45]           C’est pourquoi j’estime que la prétention de l’appelant selon laquelle la Commission et la Section d’appel auraient dû suivre la recommandation du DSemrau est tout simplement dénuée de fondement.

 

[46]           J’en arrive maintenant à la question de savoir s’il existait suffisamment de renseignements pertinents, fiables et convaincants pour étayer la conclusion de la Commission selon laquelle l’appelant devait être maintenu en incarcération jusqu’à l’expiration de sa peine. La Section d’appel a conclu dans les termes suivants sur cette question, à la page 15 de ses motifs :

[…] Les motifs écrits sont détaillés dans l’examen des facteurs pertinents de votre cas et clairement exposés comme étant le fondement de la décision de la Commission. La conclusion tirée par la Commission selon laquelle elle était convaincue que vous étiez susceptible de commettre une infraction causant un dommage grave avant l’expiration de votre peine, selon les dispositions de la Loi, est raisonnable et appuyée par des renseignements pertinents, fiables et convaincants. […]

 

 

[47]           La Section d’appel en est arrivée à cette conclusion en écartant la prétention de l’appelant selon laquelle la Commission avait limité son évaluation du risque qu’il cause des dommages graves à des dommages psychologiques graves. La Section d’appel a fait remarquer que la Commission s’inquiétait manifestement de la propension de l’appelant à causer des dommages corporels à d’autres personnes. Sur ce point, la Section d’appel a souligné que la Commission avait résumé, dans ses motifs écrits, les antécédents violents et les dommages corporels graves qu’il avait causés à ses victimes.

 

[48]           La Section d’appel a également mentionné qu’il était raisonnable que la Commission s’inquiète de la sécurité de l’épouse actuelle de l’appelant, son avocate, Mme Magas. La Commission a fait remarquer sur ce point que, dans son rapport du 4 septembre 2004, le DSemrau avait également manifesté des inquiétudes à l’égard de la sécurité de Mme Magas, dans le cas où leur relation prendrait fin.

 

[49]           Au paragraphe 48 de son mémoire des faits et du droit, le procureur général énumère 14 facteurs dont la Commission a, d’après lui, tenu compte pour rendre sa décision. J’ai soigneusement examiné la décision de la Commission et conclu que le procureur général avait formulé objectivement les facteurs dont la Commission avait régulièrement tenu compte, à savoir :

[traduction]

48. […]

 

i)          une tendance importante et persistante à commettre des infractions violentes, certaines à l’aide d’armes, causant des dommages corporels ou psychologiques graves ou risquant de causer un dommage aux victimes antérieures […];

 

ii)         une série d’accusations ou d’allégations très graves n’ayant pas entraîné de déclarations de culpabilité qui ont été signalées au cours de l’audience relative au statut de délinquant dangereux de l’appelant […];

 

iii)        des éléments graves rapportés par l’appelant, notamment son comportement abusif et agressif antérieur envers sa conjointe actuelle […];

 

iv)       l’omission de s’attaquer aux principaux problèmes à l’origine de ses actes de violence, notamment des problèmes d’enfance non résolus, des sentiments réprimés, des problèmes de pouvoir et de contrôle ainsi que de gestion de la colère […];

 

v)        même si les rapports psychiatriques et psychologiques ne concordent pas tous au sujet du risque de récidive qu’il représente, la plupart des spécialistes qui ont examiné l’appelant ont estimé que celui‑ci se situait très près ou au‑delà du seuil […] de la psychopathie;

 

vi)       plusieurs rapports psychiatriques ou psychologiques indiquent que l’appelant représente un risque élevé à extrêmement élevé de récidive […];

 

vii)      des tendances criminelles basées sur le contrôle et l’exploitation d’autrui en vue d’obtenir un avantage financier, tendances qui semblent perdurer dans son comportement à l’égard de sa femme actuelle […];

 

viii)     un degré élevé d’indifférence à l’égard des infractions commises antérieurement et de leurs conséquences, conjuguée à un manque de compréhension de ces conséquences et un remords superficiel; une minimisation et une rationalisation des infractions commises et le rejet sur les autres de sa responsabilité pour ces infractions […];

 

ix)        une incapacité à contrôler ses pulsions violentes et fait que les infractions les plus graves qu’il ait commises étaient la conséquence de réactions impulsives à la situation;

 

x)         un manque de crédibilité constant et des histoires invraisemblables […];

 

xi)        le refus de collaborer avec son équipe de gestion de cas, une incapacité de gérer son plan correctionnel, combinés à un comportement hostile, intimidant et manipulateur à l’égard du personnel du SCC et des détenus;

 

xii)       les omissions antérieures de la part de Mme Magas de rapporter au SCC avant l’audience relative au statut de délinquant dangereux de l’appelant que celui‑ci l’avait agressée et menacée; un élément qui complique la situation est que Mme Magas étant à la fois son épouse et son avocate, il est peu probable que celle‑ci déclare à l’avenir les actes violents qu’il pourrait commettre;

 

xiii)      des tendances à agir de plus en plus violemment et à causer à autrui des dommages plus graves dans la commission d’infractions criminelles, notamment l’information relative à l’intimidation exercée dans le milieu carcéral, la poursuite des tendances criminelles à l’égard de sa femme actuelle;

 

xiv)      une absence de programmes de surveillance susceptibles de réduire le risque de récidive de la part de l’appelant et de perpétration d’infractions causant un dommage grave, dans le cas où celui‑ci serait remis en liberté avant l’expiration de sa peine.

 

 

[50]           L’appelant nous invite, comme il a invité la Section d’appel, à examiner son cas de façon très détaillée. Cette approche n’est manifestement pas justifiée, étant donné que la Commission et la Section d’appel doivent, pour protéger la société, adopter une vue d’ensemble de tous les renseignements présentés. Compte tenu de l’examen approfondi que la Commission a effectué du dossier de l’appelant et des facteurs que la Commission a pris en considération pour rendre sa décision, je suis convaincu que la décision qu’a prononcée la Section d’appel ne doit pas être modifiée.

 

[51]           Il reste une question à régler, c.‑à‑d. celle de savoir si la Commission aurait dû prononcer une ordonnance moins restrictive.

 

[52]           La Commission a conclu qu’il n’existait pas dans la collectivité des programmes de surveillance permettant de protéger suffisamment le public contre le risque que posait l’appelant. La Commission a poursuivi en disant qu’elle ne pensait pas qu’un centre correctionnel communautaire ou un établissement résidentiel communautaire serait en mesure de fournir le genre de surveillance qui permettrait de surveiller la façon dont l’appelant interagit avec les autres. C’est pourquoi la Commission a estimé qu’il était justifié dans les circonstances de prononcer une ordonnance de maintien en incarcération.

 

[53]           La Section d’appel a rejeté l’appel de l’appelant parce qu’elle a estimé que l’ordonnance de maintien en incarcération prononcée par la Commission était la décision la moins restrictive compatible avec la protection de la société. Je suis convaincu que la Section d’appel n’a commis aucune erreur en arrivant à cette conclusion.

 

[54]           Le paragraphe 132(1) énonce que la Commission prend en compte tous les facteurs utiles pour évaluer le risque que le délinquant commette, notamment, avant l’expiration de sa peine, une infraction de nature à causer un dommage grave à une autre personne, y compris les facteurs énumérés expressément dans cette disposition. L’alinéa 132(1)d) est l’un des facteurs expressément énumérés dans cet article et énonce que la Commission doit prendre en compte « l’existence de programmes de surveillance de nature à protéger suffisamment le public contre le risque que présenterait le délinquant jusqu’à l’expiration légale de sa peine ».

 

[55]           La Commission était en possession du plan de libération de l’appelant, selon lequel il devait résider avec son épouse, Mme Magas. Ce plan de libération est quelque peu surprenant, si l’on pense au fait que le DSemrau y était opposé et que le juge MacPhee avait conclu, dans sa décision du 25 juillet 2001, qu’il n’était pas dans l’intérêt public que M. Condo et Mme Magas poursuivent leur relation. Le juge a écrit ce qui suit aux pages 74 et 75 de sa décision :

[traduction] Monsieur Condo, il s’agit là d’un élément particulièrement délicat du prononcé de la peine parce que je ne comprends pas très bien la dynamique de votre relation avec le Dre McGuire et Mme Magas. Il n’est pas dans l’intérêt public que cette relation se poursuive. Je mentionne ce fait parce que j’estime que cette relation représente pour M. Condo un risque très élevé de récidive, et s’il est peut‑être dans l’intérêt des parties d’entretenir une telle relation, ce n’est pas dans l’intérêt public.

 

Il y a des membres du public qui doivent être protégés, même contre leur propre désir, leurs propres souhaits et leurs propres intérêts. En particulier, la Cour trouve particulièrement inquiétante la poursuite de la relation entre Mme Magas et M. Condo. Cette relation est contraire à l’intérêt public qui voudrait que cet homme puisse s’intégrer à la collectivité lorsqu’il sera remis en liberté. Les preuves indiquent d’après moi que celle‑ci a depuis longtemps renforcé les pires tendances de M.  Condo qui le poussent à résister aux traitements et à toute surveillance. Il me serait difficile d’être plus clair que je le suis.

 

 

[56]           La Commission a non seulement refusé d’accepter le plan de libération de l’appelant, mais elle est allée plus loin et a conclu qu’il n’existait à l’heure actuelle aucun programme de surveillance susceptible de protéger de façon satisfaisante le public contre le risque que présente l’appelant.

 

[57]           Après avoir examiné l’ensemble des preuves, la Commission a conclu que l’intégration partielle de l’appelant à la collectivité, compte tenu du fait que la protection de la société est le facteur primordial, n’était pas une solution réaliste. J’estime que la Commission pouvait parfaitement en arriver à cette conclusion et je n’ai par conséquent pu trouver aucune erreur dans la décision de la Commission. La Section d’appel n’a donc pas commis d’erreur en refusant d’intervenir.

Conclusion

 

[58]           L’examen de l’ensemble de la preuve amène inévitablement à la conclusion que ni la décision de la Commission ni celle de la Section d’appel ne peut être qualifiée de déraisonnable. Il importe peu que le juge de première instance ou la Cour aurait pu en arriver à une autre conclusion. Il demeure que les décisions qu’ont prononcées les deux sections de la Commission nationale des libérations conditionnelles, en s’appuyant sur les preuves présentées, sont tout à fait raisonnables.

 

[59]           Une dernière remarque. Compte tenu des observations qu’a formulées le juge MacPhee au sujet de la relation de l’appelant avec Mme Magas et du fait que celle‑ci se trouve au centre de certains éléments qui constituent la fondation factuelle du présent appel, j’ai de sérieuses réserves au sujet de la question de savoir si Mme Magas aurait dû comparaître devant la Cour fédérale ou devant nous pour le compte de l’appelant. J’ai exprimé ces réserves à Mme Magas à la fin de l’audience et je suis convaincu qu’elle réfléchira sérieusement à mes remarques, dans le cas où elle souhaiterait encore une fois comparaître pour le compte de l’appelant pour des dossiers connexes.

 

[60]           Pour ces motifs, je rejetterais l’appel avec dépens.

 

« M. Nadon »

Juge

 

« Je souscris aux présents motifs

            A.M. Linden, juge »

 

« Je souscris aux présents motifs

            B. Malone, juge »

 

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                       A-244-05

 

APPEL D’UNE ORDONNANCE DU JUGE DE MONTIGNY DATÉE DU 30 MAI 2005 DANS LE DOSSIER T-129-05

 

INTITULÉ :                                      RICHARD CONDO

                                                           c.

                                                           LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :               OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :              LE 6 SEPTEMBRE 2005

 

MOTIFS DU JUGEMENT :           LE JUGE NADON

 

Y ONT SOUSCRIT :                       LE JUGE LINDEN

                                                           LE JUGE MALONE

 

DATE DES MOTIFS :                    LE 22 NOVEMBRE 2005

 

 

COMPARUTIONS :

 

Diane Magas                                        POUR L’APPELANT

 

Jeff Anderson                                       POUR L’INTIMÉ

Éric Lafrenière

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Magas Law Office                                POUR L’APPELANT

Ottawa (Ontario)

 

John Sims, c.r.                                      POUR L’INTIMÉ

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

                                                          

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