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Date : 19990114


Dossier : A-413-97

CORAM :      LE JUGE STONE

         LE JUGE STRAYER

         LE JUGE DÉCARY

    

ENTRE :

     DUMITRU MOLDEVEANU,

    

     appelant,

    

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

    

     intimée.

    

     Audience tenue à Toronto (Ontario), le jeudi 14 janvier 1999

     Jugement prononcé à l'audience

     à Toronto (Ontario), le jeudi 14 janvier 1999

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :      LE JUGE DÉCARY


Date : 19990114


Dossier : A-413-97

CORAM :      LE JUGE STONE

         LE JUGE STRAYER

         LE JUGE DÉCARY

ENTRE :     


DUMITRU MOLDEVEANU,

     appelant,

     - et -


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


intimée.

     MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

     (Prononcés à l'audience à Toronto (Ontario),

     le jeudi 14 janvier 1999.)

LE JUGE DÉCARY

[1]      Il s'agit de déterminer si, à l'occasion d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision d'un agent des visas, des faits qui ne ressortent pas du dossier et dont le demandeur a une connaissance personnelle peuvent être mis en preuve non pas par le demandeur mais au moyen d'un affidavit émanant d'une tierce personne qui n'a aucune connaissance personnelle de ces faits.

[2]      Un bref examen des procédures est justifié.

[3]      Le 13 mars 1997, un agent des visas a rejeté la demande de résidence permanente au Canada présentée par l'appelant.

[4]      Le 11 avril 1997, l'appelant a déposé une demande de contrôle judiciaire de la décision de l'agent des visas. Cette demande n'était étayée que d'un affidavit signé par un technicien en droit de l'étude d'avocats représentant l'appelant.

[5]      Le 9 mai 1997, l'intimée a présenté une requête fondée sur la Règle 324 pour obtenir la radiation de l'affidavit au motif que celui-ci ne satisfaisait pas à la Règle 332(1) des Règles de la Cour fédérale et à la Règle 12 des Règles de la Cour fédérale en matière d'immigration.

[6]      Le 23 mai 1997, le juge des requêtes a accueilli la requête et ordonné la radiation de l'affidavit au motif qu'il ne remplissait pas l'exigence qu'il " repose sur la connaissance et la croyance personnelles ".

[7]      Le 2 juin 1997, l'appelant a déposé un avis d'appel.

[8]      Le 23 juillet 1997, l'intimée a demandé la radiation de l'avis d'appel en s'appuyant sur la Règle 324 et en alléguant que, vu qu'aucune question n'avait été certifiée en vertu de l'article 83 de la Loi sur l'immigration, la Cour n'avait aucune compétence pour connaître de l'appel.

[9]      Le 27 août 1997, la Cour a rejeté la requête en radiation. Elle a rendu cette décision au vu des représentations écrites des parties et elle ne s'est aucunement référée à la jurisprudence dans les motifs de son jugement. L'extrait pertinent de ces motifs se lit comme suit :

                  En l'espèce, si aucun affidavit justificatif valable n'a été déposé comme l'exigeait la règle 1603(1), l'avis de requête introductive d'instance lui-même manquait une condition importante à laquelle il fallait satisfaire pour que la Cour en saisisse légalement. Tout ce dont la Cour était saisie était simplement la demande et l'affidavit, ce dernier ayant été considéré par la Cour comme étant non conforme aux exigences procédurales établies. À notre avis, l'ordonnance du 27 mai 1997 n'était pas du genre visé au paragraphe 83(1). Il y a été simplement conclu que l'affidavit justificatif était défectueux, ce qui a eu pour conséquence que l'avis de requête introductive d'instance était encore dans les limbes, ne pouvait faire l'objet d'une décision de la Cour. En conséquence, les exigences selon lesquelles une question doit être certifiée et énoncée en application du paragraphe comme conditions préalables à la formation de l'appel ne peuvent s'appliquer.             

[10]      Dans son mémoire des faits et du droit, l'intimée réitère son argument selon lequel la Cour n'a pas compétence et invite la Cour à réviser la décision rendue le 27 août 1997.

[11]      Il est trop tard en l'espèce pour que l'intimée manifeste son désaccord au sujet de la décision rendue le 27 août 1997. Nous ne siégeons pas et nous ne pouvons pas siéger en appel de cette décision. Le meilleur recours de l'intimée aurait été de demander en temps utile l'autorisation d'interjeter appel à la Cour suprême du Canada. La Cour peut être appelée à réviser cette décision dans une autre affaire, bien qu'il soit peu probable que des circonstances si particulières se présentent de nouveau.

[12]      Pour ce qui est maintenant du bien-fondé de l'appel, l'appelant soulève deux arguments distincts.

[13]      Premièrement, il prétend que le juge des requêtes a commis une erreur en ne considérant pas la requête comme étant prématurée. De l'avis de son avocat, nombre de décisions de la Cour appuient la thèse selon laquelle il est généralement incorrect de présenter des requêtes en radiation à l'occasion d'une procédure de contrôle judiciaire. Bien que la requête présentée en l'espèce n'était pas techniquement parlant une requête en radiation de la demande de contrôle judiciaire, le principe susmentionné s'applique sans aucun doute. Cependant, dans l'arrêt David Bull Laboratories (Canada) Inc. c. Pharmacia Inc.1 où se trouve énoncé ce principe, la Cour se laisse de la marge pour le cas où un acte de procédure " est manifestement irrégulier au point de n'avoir aucune chance d'être accueilli " (à la page 600). De toute évidence, le juge des requêtes était d'avis que l'affidavit comme tel ne permettrait pas d'étayer la procédure en cause et, comme nous le verrons plus loin, nous partageons cette opinion. Si nous comprenons bien, aucune demande d'autorisation en vue de présenter un nouvel affidavit n'a été présentée au juge des requêtes à l'époque où l'on débattait de l'affaire. Nous ne nous prononçons pas quant à l'effet de la nouvelle Règle 221 (qui a remplacé l'ancienne Règle 419) sur le principe mentionné précédemment.

[14]      L'avocat de l'appelant prétend ensuite que le juge des requêtes a commis une erreur dans son interprétation des Règles de la Cour fédérale et des Règles de la Cour fédérale en matière d'immigration en vigueur à l'époque en question. L'avocat de l'appelant se fonde sur les Règles 3(2), 4(2) et 12(1) des Règles de la Cour fédérale en matière d'immigration et sur les Règles 332(1) et 1603 des Règles de la Cour fédérale (cette dernière règle se trouve dans la Partie V.1 des Règles de la Cour fédérale).

[15]      Cet argument est mal fondé. Pour ce qui est de la Règle 12(1), qu'il suffise de dire qu'elle ne s'applique pas dans les affaires relatives aux décisions des agents des visas et que, en toute hypothèse, la preuve par ouï-dire que l'auteur de l'affidavit donnerait s'il était appelé à témoigner ne satisferait pas au critère de " nécessité " et de " fiabilité " établi par la Cour suprême du Canada. En ce qui a trait à l'allégation d'incompatibilité entre la Règle 332(1) et la Règle 1603 des anciennes Règles de la Cour fédérale , il nous semble qu'un affidavit à l'appui d'une demande de contrôle judiciaire peut à la fois confirmer les faits sur lesquels le demandeur se fonde (Règle 1603) et être fondé sur une connaissance personnelle (Règle 332(1)). La pratique proposée par la Cour dans l'arrêt Wang v. Canada (Minister of Employment and Immigration)2 et suivie par les juges de la Section de première instance, qui consiste à exiger que l'aspirant immigrant présente lui-même la preuve dans les affaires relatives aux décisions d'agents des visas " à moins que l'erreur qui entacherait la décision de nullité ressorte du dossier ", est, selon nous, empreinte de beaucoup de sagesse.

[16]      L'appel est rejeté.

                             " Robert Décary "

                                 J.C.A.

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.

              COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     Avocats inscrits au dossier

NO DU GREFFE :                      A-413-97
INTITULÉ DE LA CAUSE :              DUMITRU MOLDEVEANU,
                                         appelant,
                                 - et -
                             LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,
                                         intimée.
DATE DE L'AUDIENCE :              LE JEUDI 14 JANVIER 1999
LIEU DE L'AUDIENCE :              TORONTO (ONTARIO)
MOTIFS DU JUGEMENT :              LE JUGE DÉCARY

Prononcés à Toronto (Ontario)

le jeudi 14 janvier 1999

ONT COMPARU :                      M. Rocco Galati

                    

                                 pour l'appelant
                             Mme Chery Mitchell
                             M. Jeremiah Eastman

                        

                                 pour l'intimée

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :          Galati, Rodrigues, & Associates
                             Avocats
                             637, rue College, bureau 203
                             Toronto (Ontario)
                             M6G 1B5

                            

                                 pour l'appelant
                             Morris Rosenberg
                             Sous-procureur général
                             du Canada     

                                 pour l'intimée


                                         COUR D'APPEL FÉDÉRALE     
                                         Date : 19990114     
                                         Dossier : A-413-97     
                                         ENTRE :     
                                         DUMITRU MOLDEVEANU,     
                                                          appelant,     
                                         - et -     
                                         LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,     
                                                          intimée.     
                                             
                                              MOTIFS DU JUGEMENT     
                                                  DE LA COUR     
                                             
__________________

     1      [1995] 1 C.F. 588 (C.A.).

     2      (1991) 12 Imm.L.R. (2d) 178 (C.A.F., à la page 183).

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