Décisions de la Cour d'appel fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

Date : 20060614

Dossier : A‑478‑04

Référence : 2006 CAF 220

 

PRÉSENTE : LA JUGE SHARLOW

 

ENTRE :

 

DENIS LANNO

appelant

et

L’AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

intimée

 

 

 

 

 

Requête jugée sur pièces, sans la comparution des parties.

 

Ordonnance rendue à Ottawa (Ontario), le 14 juin 2006.

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :                                                                  LA JUGE SHARLOW

 

 

 


 

 

Date : 20060614

Dossier : A‑478‑04

Référence : 2006 CAF 220

 

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE SHARLOW

 

ENTRE :

DENIS LANNO

appelant

et

L’AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

intimée

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

 

LA JUGE SHARLOW

[1]               Le 2 mai 2005, par la décision Lanno c. Canada (Agence des douanes et du revenu), 2005 CAF 153, la Cour accueillait l’appel formé par M. Lanno contre un jugement de la Cour fédérale (2004 CF 932), qui avait refusé sa demande de redressement à l’encontre d’une décision défavorable du ministre du Revenu national portant sur les intérêts, prise en vertu du paragraphe 152(4.2) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 (5e suppl.), ch. 1.

 

[2]               La Cour a estimé que le rejet de la demande de redressement présentée par M. Lanno n’était pas raisonnable eu égard aux divers motifs exposés par le ministre dans ses lettres datées du 29 mai 2003, du 30 juillet 2003 et du 4 novembre 2003. La Cour avait donné trois motifs pour lesquels l’appel interjeté par M. Lanno devait être accueilli.

 

[3]               D’abord, contrairement à ce qu’affirmait le ministre, les dispositions en matière d’équité peuvent servir à proroger le délai de dépôt d’une opposition. La Circulaire d’information 75‑7R3, intitulée « Nouvelle cotisation relative à une déclaration de revenu », précise que le Ministère établit « ordinairement » une nouvelle cotisation à la demande du contribuable, même si le contribuable n’a pas produit un avis d’opposition dans le délai prescrit. Le paragraphe 4 de la Circulaire d’information prévoit ce qui suit (non souligné dans l’original) :

 

Sur réception d’une demande écrite du contribuable, le Ministère établit ordinairement une nouvelle cotisation pour donner un remboursement, même si un avis d’opposition n’a pas été produit dans le délai prescrit, pourvu :

A reassessment to create a
refund ordinarily will be made
upon receipt of a written
request by the taxpayer, even if
a notice of objection has not
been filed within the prescribed
time
, provided that

a) que le contribuable ait produit la déclaration de revenu dans le délai de quatre ans mentionné au paragraphe 164(1);

(a) the taxpayer has, within the four‑year filling period required by subsection 164(1), filed the return of income;

b) que le Ministère soit convaincu que la cotisation ou nouvelle cotisation précédente était inexacte;

(b) the department is satisfied that the previous assessment or reassessment was wrong;

c) qu’il soit possible d’établir une nouvelle cotisation dans le délai de quatre ans ou de sept ans, selon le cas, dont il est fait mention au numéro 1 précédent ou, s’il n’est pas possible de remplir cette condition, que le contribuable ait produit une renonciation en la forme prescrite;

(c) the reassessment can be made within the four‑year period or the seven year‑year period, as the case may be, referred to in paragraph 1 above or, if that is not possible, the taxpayer has filed a waiver in prescribed form;

d) que la réduction du revenu imposable établi ne résulte pas uniquement d’une majoration des déductions pour amortissement ou d’autres déductions laissant une marge de manœuvre au contribuable, lorsque ce dernier a demandé au départ une déduction inférieure au maximum déductible; et

(d) the requested decrease in taxable income assessed is not based solely on an increased claim for capital cost allowances or other permissive deductions, where the taxpayer originally claimed less than the maximum allowable; and

e) que la demande de remboursement ne se fonde pas uniquement sur un appel devant les tribunaux d’un autre contribuable ayant eu gain de cause.

(e) the application for a refund is not based solely upon a successful appeal to the Courts by a taxpayer.

 

 

 

 

[4]               Deuxièmement, la demande présentée par M. Lanno en vertu des dispositions en matière d’équité reposait sur le fait que c’est à cause de certains malentendus qu’il n’avait pas déposé à temps les avis d’opposition. Contrairement à ce qu’affirmait le ministre, sa demande ne se fondait pas uniquement sur l’appel d’un autre contribuable ayant obtenu gain de cause dans l’arrêt Stewart c. Canada, [2002] 2 R.C.S. 645.

 

[5]               Finalement, le ministre ne s’était pas demandé s’il y avait lieu ou non de traiter M. Lanno différemment des trois autres contribuables qui avaient obtenu le redressement demandé.

 

[6]               La Cour a annulé le jugement de la Cour fédérale et a fait droit à la demande de contrôle judiciaire présentée par M. Lanno. L’affaire a été renvoyée au ministre pour un nouvel examen par un autre décideur.

 

[7]               Le ministre, par l’entremise d’un autre décideur, a réexaminé la demande de redressement présentée en vertu des dispositions en matière d’équité. Par lettre datée du 24 mars 2006, le ministre rejetait à nouveau la demande de redressement, en application du paragraphe 152(4.2), pour les motifs suivants :

[traduction]

Pour arriver à notre décision, nous avons examiné chacun des trois aspects sur lesquels s’est penchée la Cour.

 

[1] « Il est manifestement inexact de dire que l’on ne peut se prévaloir des dispositions d’équité pour proroger le délai prescrit pour produire un avis d’opposition. »

 

Pour faire cette observation, la Cour considérait le préambule du paragraphe 4 de la Circulaire d’information 75‑7R3, et elle dit que, « si l’exception prévue à l’alinéa 4e) de la Circulaire d’information 75‑7R3 ne s’appliquait pas, [M. Lanno] aurait dû pouvoir se prévaloir des premiers mots du paragraphe 4 ». Cela est vrai, mais il se trouve que l’alinéa 4e) existe et que le préambule du paragraphe 4 ne saurait être lu isolément. Manifestement, l’insertion du mot « et » à la fin de l’alinéa 4d) signifie que la condition énoncée dans l’alinéa 4e) doit être remplie. Elle n’est pas discrétionnaire. […]

 

[2] « Deuxièmement, la référence qui est faite à la lettre de décision du 20 juillet 2003 de même que la déclaration selon laquelle la décision rendue dans cette lettre demeure inchangée donne à penser que M. Scarcello a peut‑être conclu, comme l’avait fait M. Coelho, qu’il s’agissait d’un cas où une dispense était à exclure parce que la demande de remboursement de M. Lanno était “exclusivement fondée sur l’appel fructueux qu’un contribuable avait interjeté devant les tribunaux” (Stewart). »

 

[…] on pourrait avancer un argument solide selon lequel il y avait intention de déposer des avis d’opposition, mais il reste qu’aucun n’a été déposé et que la demande de nouvelle cotisation en application du paragraphe 152(4.2) n’a été présentée qu’après la décision favorable rendue dans l’affaire Stewart.

 

Nous sommes d’avis qu’il n’y avait pas de circonstances extraordinaires qui empêchaient le client et/ou son représentant de se conformer aux conditions.

 

[3] « Troisièmement, M. Scarcello a omis de traiter de la question de savoir s’il y avait un motif de traiter M. Lanno différemment des trois autres personnes qui avaient obtenu une dispense. Il est impossible de déterminer s’il a fait abstraction de cet argument, s’il a pensé qu’il y avait une distinction pertinente ou s’il a jugé qu’il était acceptable de traiter différemment des personnes qui se trouvaient dans une situation similaire. Je dois conclure que M. Scarcello a omis de prendre en considération un élément pertinent. »

 

Pour des raisons de confidentialité, il n’est pas possible d’entrer dans le détail à propos des trois autres contribuables dont parlait la Cour. Qu’il suffise de dire que chaque cas est considéré comme un cas d’espèce et selon les lois applicables. Nous croyons humblement que le cas de M. Lanno a été résolu d’une manière juste et dans le respect de nos politiques.

 

 

[8]               M. Lanno a déposé une demande de contrôle judiciaire devant la Cour fédérale. Il a aussi demandé à la Cour de rendre une ordonnance en application de l’alinéa 431a) des Règles des Cours fédérales (DORS/98‑106) afin de faire exécuter son arrêt du 2 mai 2005.

 

[9]               Selon le ministre, la procédure d’exécution d’une ordonnance est celle que prévoit l’article 423 des Règles :

 

423. Toute question concernant l’exécution forcée d’une ordonnance relève de la Cour fédérale.

423. All matters relating to the enforcement of orders shall be brought before the Federal Court.

 

 

[10]           Selon M. Lanno, la Cour doit le dispenser de l’application de l’article 423 et l’autoriser à se prévaloir de l’article 55 :

 

55. Dans des circonstances spéciales, la Cour peut, dans une instance, modifier une règle ou exempter une partie ou une personne de son application.

 

55. In special circumstances, in a proceeding, the Court may vary a rule or dispense with compliance with a rule.

 

[11]           Je ne suis pas persuadée que des circonstances spéciales justifient une ordonnance selon l’article 55. Si M. Lanno est d’avis que le ministre ne s’est pas conformé à l’arrêt du 2 mai 2005, alors il devrait s’adresser à la Cour fédérale.

 

[12]           Je rejetterais la requête, avec dépens.

 

« K. Sharlow »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Lynne Davidson-Fournier, traductrice-conseil


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A‑478‑04

 

 

INTITULÉ :                                                                           DENIS LANNO c.

                                                                                                L’AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

 

 

REQUÊTE JUGÉE SUR PIÈCES, SANS LA COMPARUTION DES PARTIES

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :                                      LA JUGE SHARLOW

 

 

DATE DES MOTIFS :                                                          LE 14 JUIN 2006

 

 

CONCLUSIONS ÉCRITES :

 

Clifford L. Rand

Susan J. Thomson

POUR L’APPELANT

 

 

Andrea Jackett

Franco Calabrese

POUR L’INTIMÉE

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Stikeman Elliott

Toronto (Ontario)

POUR L’APPELANT

 

 

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉE

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.