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Date: 20010126


Dossier: A-786-99


CORAM:      LE JUGE DESJARDINS

         LE JUGE DÉCARY

         LE JUGE LÉTOURNEAU         


ENTRE:

     TRANSPORT THOM LTÉE,

     Appelante

ET:

     AURÈLE GAGNON,

     Intimé







     Audience tenue à Ottawa (Ontario) le mercredi, 24 janvier 2001


     Jugement rendu à Ottawa (Ontario) le vendredi, 26 janvier 2001





MOTIFS DU JUGEMENT PAR:      LE JUGE LÉTOURNEAU

Y ONT SOUSCRIT:      LE JUGE DESJARDINS

     LE JUGE DÉCARY






Date: 20010126


Dossier: A-786-99


CORAM:      LE JUGE DESJARDINS

         LE JUGE DÉCARY

         LE JUGE LÉTOURNEAU         


ENTRE:

     TRANSPORT THOM LTÉE,

     Appelante

ET:

     AURÈLE GAGNON,

     Intimé




     MOTIFS DU JUGEMENT


LE JUGE LÉTOURNEAU

         _.      Le juge des requêtes s'est-il mépris lorsqu'il a conclu que la décision de l'arbitre quant au montant de l'indemnité payable à l'intimé suite à un congédiement injuste n'était pas déraisonnable? Voilà la question en litige qui lui avait été soumise par voie de contrôle judiciaire. Elle nous parvient au moyen d'un appel de sa décision rejetant la demande de contrôle judiciaire avec dépens.

Les faits

         _.      Puisque le caractère injuste du congédiement n'est pas en cause, les faits pertinents peuvent facilement être résumés en quelques lignes.
         _.      L'intimé, M. Gagnon, travaillait pour une compagnie de transport de personnes comportant deux divisions: une division de transport scolaire et une division de transport par charte-partie (transport nolisé) qui a débuté modestement en 1992 et s'est cristallisée par l'octroi d'un permis de transport nolisé en janvier 1994.
         _.      Le personnel de la division de transport scolaire était syndiqué: celui du transport nolisé ne l'était pas. En 1993, M. Gagnon oeuvrait dans les deux divisions. Pour cette année-là, son revenu total s'élevait à 24 670,23$ ventilé ainsi: 16 008,31$ pour le transport nolisé, 7 374,18$ pour le transport scolaire et une balance de 1 187,21$ représentant des avantages sociaux.
         _.      Entre 1993 et septembre 1994, M. Gagnon fut absent de son travail pour cause de maladie. À son retour, il signifia à son employeur son intention de ne plus faire du transport scolaire et d'oeuvrer uniquement dans le domaine du transport nolisé. Il fut informé qu'en démissionnant de la division de transport scolaire, il perdait son statut de syndiqué et son ancienneté au sein de cette division pour se retrouver sans ancienneté dans une division non syndiquée. C'est donc en pleine connaissance des impacts de son transfert que M. Gagnon choisit de renoncer aux bénéfices de la première division pour souffrir les aléas de la deuxième. Parmi ces aléas, il convient de mentionner que cette division du transport nolisé opérait déjà avec cinq ou six chauffeurs réguliers auxquels M. Gagnon venait s'ajouter comme chauffeur régulier et un certain nombre de chauffeurs à temps partiel.
         _.      Le 1er mai 1995, M. Gagnon fut congédié et reçut une indemnité de départ de 293,02$. Une plainte fut déposée auprès du ministre du Travail en vertu de l'article 240 du Code canadien du travail, R.S.C., 1985, chap. L-2 à l'encontre de ce congédiement.

La décision de l'arbitre

         _.      Par décision d'un arbitre rendue le 28 octobre 1998, M. Gagnon s'est vu octroyer une somme de 20 558,52$ à titre d'indemnité de départ, soit l'équivalent de dix mois de salaire. L'arbitre s'est fondée, pour la détermination de ce montant, sur le salaire de M. Gagnon en 1993 qui était sa dernière année complète de travail. Elle a aussi voulu justifier le caractère raisonnable du montant de l'indemnité par référence au revenu annuel moyen des chauffeurs réguliers de la division nolisée qu'elle établit à 28 114,88$.
         _.      Je reproduis intégralement le passage pertinent de la décision de l'arbitre entériné par le juge des requêtes puisqu'il constitue le noeud du présent litige:
     Compte tenu de la preuve complète qui lui a été présentée, l'arbitre soussignée indiquera le quantum exact de ce que représente ces dix (10) mois de salaire. À cet égard, on ne peut retenir les prétentions de l'employeur à l'effet que l'on doit retenir le salaire des six (6) derniers mois de travail compte tenu qu'avant cette date le plaignant avait été en congé de maladie et avant ce congé, il faisait du transport scolaire. Retenir cet argument n'aurait que pour effet de permettre à l'employeur de réduire le revenu d'un plaignant de façon importante avant son congédiement, et ce afin de minimiser les dommages éventuels qu'il pourrait être condamné à payer si le congédiement s'avérait injuste. Nous prendrons plutôt comme base de calcul l'année 1993, soit la dernière année de travail complète effectuée par le plaignant auprès de l'employeur. Pour cette année 1993, il a eu un revenu de 24 670,23$. Ce chiffre nous semble tout a fait raisonnable compte tenu que les chauffeurs réguliers de la division nolisée de l'employeur ont un revenu annuel moyen de 28 114,88$. Par conséquent, l'employeur est condamné à payer au plaignant la somme de 20 558,52$.

     (le souligné est de moi)


Analyse de la décision du juge des requêtes et de l'arbitre

         _.      Avec force et conviction, le procureur de l'appelante soumet que l'arbitre s'est trompée dans le choix de sa base de calcul de l'indemnité de départ. L'argument ne manque pas d'attrait et s'élabore ainsi.
         _.      L'arbitre aurait dû fonder l'indemnité sur le revenu annuel de M. Gagnon en 1995 comme chauffeur au sein de la division du transport nolisé. Le revenu annuel moyen qu'elle a utilisé comme barème, soit la somme de 28 114,88$, ne constituait pas une moyenne de revenu annuel, mais plutôt, comme le démontre un relevé comptable à la page 116 du dossier d'appel, une moyenne de revenu pour 25 mois. Transposé sur une base annuelle, ce revenu moyen s'établit à seulement 13 505,20$.
         _.      Le procureur de l'appelante prétend également, comme alternative, que, si l'arbitre voulait prendre le revenu de M. Gagnon en 1993 comme base de calcul, elle devait soustraire du total le montant du revenu provenant du transport scolaire puisqu'il s'agit d'évaluer ses gains au sein de la division du transport nolisé. Elle aurait donc dû prendre comme base de calcul la somme de 16 008,31$.
         _.      Je crois qu'il importe de revenir à la décision de l'arbitre et d'en faire une analyse minutieuse pour identifier ce qu'elle a vraiment retenu comme base de calcul. Il ressort clairement de la décision qu'elle a d'abord retenu l'année 1993 avant de se pencher sur la question du revenu parce que l'année 1993 était plus représentative de ce que M. Gagnon aurait gagné s'il était demeuré à l'emploi de l'appelante. À ses yeux, cette année était plus représentative, d'une part, parce qu'il s'agissait d'une année complète de travail et, d'autre part, parce que l'employeur avait au cours des six derniers mois de travail de M. Gagnon considérablement réduit ses heures de travail, pouvant ainsi diminuer le montant de l'indemnité de départ à payer. Je suis d'accord avec le juge des requêtes que le choix de l'année 1993, même si M. Gagnon fut congédié en mai 1995, n'était pas déraisonnable dans les circonstances.
         _.      Par la suite, l'arbitre a examiné le revenu gagné pour l'année 1993. Il est vrai, comme le souligne le procureur de l'appelante, qu'elle s'est méprise en considérant comme revenu annuel moyen la somme de 28 114,88$ alors qu'il s'agissait d'un revenu moyen étalé sur une période de 25 mois. J'ajouterais qu'elle s'est aussi méprise en prenant ce revenu moyen comme celui des chauffeurs réguliers alors qu'il s'agit en fait du revenu moyen de tous les chauffeurs, y compris ceux à temps partiel, ce qui a évidemment pour effet de diminuer sensiblement la moyenne gagnée par les chauffeurs réguliers.
         _.      Ceci dit, je crois que ces deux erreurs n'ont pas porté à conséquence puisqu'il y avait devant elle une preuve, à laquelle elle fait d'ailleurs référence à la page 2 de sa décision, que M. Lance, un chauffeur régulier comme M. Gagnon, avait accumulé en 1993, à sa première année de service en grande partie écoulée au sein de la division du transport nolisé, des gains de 25 000$ et que, par la suite, ses gains annuels à l'intérieur de cette division s'étaient situés entre 25 000$ et 30 000$. M. Lance a témoigné qu'à ce montant, il y avait lieu d'ajouter une somme de 3 000$ à titre de pourboires.
         _.      À mon avis, compte tenu de cette preuve, le juge des requêtes avait raison de conclure que le montant de 24 670,23$ retenu par l'arbitre pour effectuer le calcul d'une indemnité de dix mois de salaire était raisonnable. Pour ces motifs, je rejetterais l'appel avec dépens.

     "Gilles Létourneau"

     j.c.a.

"Je souscris à ces motifs.

     Alice Desjardins j.c.a."

"Je suis d'accord

     Robert Décary j.c.a."

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