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Date : 20050617

Dossier : A-527-03

Référence : 2005 CAF 223

CORAM :        LA JUGE DESJARDINS

LE JUGE ROTHSTEIN

LA JUGE SHARLOW

ENTRE :

                                                           PATRICIA TOSSELL

                                                                                                                                         appelante

                                                                            et

                                                        SA MAJESTÉLA REINE

                                                                                                                                               intimée

                                                                            et

                                                            LARRY PETERSON

                                                                                                                                                 intimé

                                  Audience tenue à Toronto (Ontario), le 10 mai 2005

                                   Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 17 juin 2005

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                          LA JUGE SHARLOW

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                LA JUGE DESJARDINS

                                                                                                                     LE JUGE ROTHSTEIN


Date : 20050617

Dossier : A-527-03

Référence : 2005 CAF 223

CORAM :        LA JUGE DESJARDINS

LE JUGE ROTHSTEIN

LA JUGE SHARLOW

ENTRE :

                                                           PATRICIA TOSSELL

                                                                                                                                         appelante

                                                                            et

                                                        SA MAJESTÉLA REINE

                                                                                                                                               intimée

                                                                            et

                                                            LARRY PETERSON

                                                                                                                                                 intimé

                                                       MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE SHARLOW


[1]                Mme Patricia Tossell interjette appel d'un jugement daté du 8 octobre 2003 par lequel la Cour canadienne de l'impôt (C.C.I.) a rejeté ses appels (dossiers de la C.C.I. 98-2469(I) et 2000-3286 (IT)I) à l'égard de nouvelles cotisations établies pour les années 1995 et 1996 en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.). Conformément aux mêmes motifs de jugement, et à la même date, le juge (le juge de la C.C.I.) a rendu un jugement distinct faisant droit à l'appel de M. Larry Peterson (dossier de la C.C.I. 2000-2170(IT)G), et ce, pour les deux mêmes années. Les motifs de jugement sont publiés sous l'intitulé Peterson c. Canada, 2003 D.T.C. 1347, [2004] 1 C.T.C. 2858, 48 R.F.L. (5th) 333 (C.C.I.).

[2]                La question soumise à la Cour canadienne de l'impôt, de même que dans le présent appel, est le traitement fiscal de certains montants que M. Peterson a payés à Mme Tossell en 1995 et en 1996 à titre de pension alimentaire pour enfants. Mme Tossell soutient qu'elle n'est pas tenue d'inclure les paiements dans son revenu en vertu de l'alinéa 56(1)b) de la Loi de l'impôt sur le revenu. M. Peterson soutient qu'il a le droit de déduire les paiements en question en vertu de l'alinéa 60b) de la Loi de l'impôt sur le revenu. Les alinéas 56(1)b) et 60b) sont le reflet l'un de l'autre, de sorte que si Mme Tossell a raison, M. Peterson a tort, et vice versa.

[3]                Pour les années 1995 et 1996 (après l'entrée en vigueur de modifications apportées par L.C. 1994, ch. 7, annexe VIII, mais avant l'entrée en vigueur de L.C. 1997, ch. 25), les alinéas 56(1)b) et 60b) de la Loi de l'impôt sur le revenu étaient libellés comme suit :

56. (1) Sans préjudice de la portée générale de l'article 3, sont à inclure dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une année d'imposition : [...]

56. (1) Without restricting the generality of section 3, there shall be included in computing the income of a taxpayer for a taxation year, [...]



(b) un montant reçu par le contribuable au cours de l'année, en vertu d'une ordonnance ou d'un jugement rendus par un tribunal compétent ou en vertu d'un accord écrit, à titre de pension alimentaire ou autre allocation payable périodiquement pour subvenir aux besoins du contribuable ou d'enfants de celui-ci ou aux besoins à la fois du contribuable et de ces enfants, si le contribuable, pour cause dchec de son mariage, vivait séparé de son conjoint ou ancien conjoint tenu d'effectuer le paiement, au moment de la réception du paiement et durant le reste de l'année;

(b) any amount received by the taxpayer in the year as alimony or other allowance payable on a periodic basis for the maintenance of the taxpayer, children of the taxpayer or both the taxpayer and the children if the taxpayer, because of the breakdown of the taxpayer's marriage, was living separate and apart from the spouse of former spouse who was required to make the payment at the time the payment was received and throughout the remainder of the year and the amount was received under a decree, order or judgment of a competent tribunal or under a written agreement;

                                       [...]

                                       [...]

60. Peuvent être déduites dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une année d'imposition les sommes suivantes qui sont appropriées : [...]

60. There may be deducted in computing a taxpayer's income for a taxation year such of the following amounts as are applicable: [...]

(b) un montant payé par le contribuable au cours de l'année, en vertu d'une ordonnance ou d'un jugement rendus par un tribunal compétent ou en vertu d'un accord écrit, à titre de pension alimentaire ou autre allocation payable périodiquement pour subvenir aux besoins du bénéficiaire, d'enfants de celui-ci ou à la fois du bénéficiaire et de ces enfants, si le contribuable, pour cause dchec de son mariage, vivait séparé de son conjoint au ancien conjoint à qui il était tenu d'effectuer le paiement, au moment où le paiement a été effectué et durant le reste de l'année;

(b) an amount paid by the taxpayer in the year as alimony or other allowance payable on a periodic basis for the maintenance of the recipient, children of the recipient or both the recipient and the children, if the taxpayer, because of the breakdown of the taxpayer's marriage, was living separate and apart from the spouse or former spouse to whom the taxpayer was required to make the payment at the time the payment was made and throughout the remainder of the year and the amount was paid under a decree, order or judgment of a competent tribunal or under a written agreement;

Faits

[4]                Les faits sont exposés en détail dans les motifs du juge de la C.C.I. Pour les besoins du présent appel, un résumé suffit.

[5]                Mme Tossell et M. Peterson se sont mariés en 1970 et se sont séparés en 1991. Ils ont trois enfants. Au moment de la séparation, ces derniers étaient âgés d'environ 16 ans, 14 ans et 10 ans. En septembre 1991, Mme Tossell et M. Peterson ont conclu un accord de séparation écrit qu'ils ont eux-mêmes rédigé. Les deux sont avocats.


[6]                L'accord de séparation de 1991 portait sur un certain nombre de questions, dont les arrangements en matière d'habitation et de pension alimentaire, ainsi que l'aliénation du domicile familial et d'autres biens. Mme Tossell et M. Peterson avaient exercé le droit ensemble. Ils ont convenu que M. Peterson conserverait le cabinet d'avocats, et que Mme Tossell travaillerait à titre d'employée et toucherait un salaire fixe qui, était-il prescrit, ne serait pas inférieur à 50 000 $.

[7]                Les clauses de l'accord de séparation de 1991 obligeaient M. Peterson à payer à Mme Tossell une pension alimentaire pour enfants de 2 000 $ par mois à compter du 1er septembre 1991, et ce, tant que Mme Tossell demeurait au service du cabinet d'avocats. L'accord prévoyait une augmentation annuelle fondée sur l'indice du coût de la vie. La pension alimentaire pour enfants passerait à 36 000 $ par année si Mme Tossell cessait de travailler pour le cabinet d'avocats et gagnait moins de 50 000 $ par année.

[8]                En mars 1993, M. Peterson a unilatéralement réduit la rémunération que Mme Tossell recevait du cabinet d'avocats, parce qu'il avait, semble-t-il, un sérieux problème de liquidités. À cette époque-là, Mme Tossell a cessé de travailler pour le cabinet d'avocats à titre d'employée permanente. Elle a effectué des travaux juridiques à partir de son domicile, et touchait un revenu modeste.


[9]                Mme Tossell s'est adressée à un organisme du gouvernement de l'Ontario - le Régime des obligations alimentaires envers la famille - pour obliger M. Peterson à s'acquitter de ses obligations concernant le paiement de la pension alimentaire pour enfants. Elle a fait valoir au Régime que M. Peterson avait des arriérés de pension alimentaire de 8 182 $ et qu'il se trouvait dans l'obligation d'effectuer des paiements de 3 000 $ par mois. M. Peterson était d'avis qu'au mois de mars 1993 il n'avait pas d'arriérés, et que la pension alimentaire pour enfants qu'il était tenu de payer s'élevait à 2 000 $ par mois. M. Peterson a effectivement versé des paiements au titre de la pension alimentaire pour enfants, à raison de 2 000 $ par mois (24 000 $ par année), dans chacune des années d'imposition 1994, 1995 et 1996.

[10]            Le compte tenu par le Régime des obligations alimentaires envers la famille pour Mme Tossell vise manifestement à illustrer les montants que M. Peterson devait à cette dernière au titre de la pension alimentaire. M. Peterson conteste toutefois l'exactitude du compte. Ce dernier comporte un solde d'ouverture, en date du 25 mai 1983, de 8 182 $, et des augmentations mensuelles de 3 000 $, plus des rajustements de vie chère. Le compte montre aussi les paiements de 2 000 $ que M. Peterson a faits, dans la mesure où ces sommes ont été payées par l'entremise du Régime (il semble qu'un ou plusieurs paiements de pension alimentaire pour enfants ont été faits directement à Mme Tossell). Aucune décision judiciaire n'indique si le compte du Régime est exact ou non.


[11]            Au 31 décembre 1996, le solde impayé du compte tenu par le Régime des obligations alimentaires envers la famille s'élevait à 55 760,28 $. Il s'agit manifestement de la source de l'accord des parties, tel qu'énoncé dans un document que ces dernières ont déposé conjointement auprès de la Cour canadienne de l'impôt, accord selon lequel juste avant que M. Peterson paie la somme de 36 000 $ à Mme Tossell en décembre 1996 (voir ci-après), le montant à payer en vertu des clauses de l'accord de séparation de 1991 était d'environ 56 000 $. La somme de 36 000 $ a été payée en décembre 1996, mais elle n'apparaît dans le compte du Régime qu'en janvier 1997.

[12]            En mars 1994, Mme Tossell a intenté une action devant la Division générale de la Cour de l'Ontario en vue de faire appliquer l'accord de séparation de 1991, y compris la pension alimentaire pour enfants de 3 000 $ par mois. M. Peterson a contesté l'action pour un certain nombre de motifs. Il a soutenu, notamment, qu'aux termes de l'accord de séparation de 1991, la pension alimentaire pour enfants qu'il avait à payer n'était que de 2 000 $ par mois.

[13]            Le 16 décembre 1996, une conférence préalable à l'instruction a eu lieu devant la juge Pardu, de la Cour de l'Ontario (Division générale), en rapport avec l'action que Mme Tossell avait intentée en mars 1994. Cette conférence a duré plus de huit heures. Tôt ce soir-là, l'avocat de M. Peterson et celui de Mme Tossell ont rédigé un « procès-verbal de transaction » , que Mme Tossell et M. Peterson ont tous deux signé le 16 décembre 1996, réglant ainsi l'action de mars 1994.

[14]            La seule disposition du procès-verbal de transaction qui a une incidence en l'espèce est la clause 6, dont le texte est le suivant :

[Traduction] 6. Le défendeur [M. Peterson] paiera rétroactivement, à la demanderesse [Mme Tossell], une pension alimentaire pour enfants supplémentaire périodique s'élevant à 36 000 $ pour les douze mois allant du 1er janvier 1996 au 1er décembre 1996 inclusivement pour chaque enfant susmentionné. Les paiements sont imposables pour la demanderesse et déductibles des revenus du défendeur.


[15]            L'avocat de M. Peterson a témoigné devant la Cour canadienne de l'impôt. Selon son souvenir, le chiffre de 36 000 $ était l'estimation qu'il avait faite des arriérés de pension alimentaire pour enfants concernant les années 1994, 1995 et 1996, en présumant que l'obligation mensuelle était de 3 000 $ comme le soutenait Mme Tossell, plutôt que de 2 000 $ comme le soutenait M. Peterson. La raison pour laquelle son estimation n'incluait pas une partie de l'année 1993 n'est pas claire. Il ne s'est pas souvenu pourquoi le mot « arriérés » n'a pas été employé à la clause 6 du procès-verbal de transaction ni de la raison pour laquelle cette clause ne fait état que de la période de douze mois en 1996.

[16]            Mme Tossell a dit ne pas se rappeler comment le montant de 36 000 $ a été fixé. Il s'agissait, pensait-elle, d'un montant que la juge Pardu avait avancé. Selon elle, ce montant n'était pas conçu pour représenter des arriérés de pension alimentaire pour enfants, à cause du doute que de tels arriérés existent, mais une obligation tout à fait nouvelle. Elle a déclaré aussi que la clause ne faisait état que d'une seule année - 1996 - parce que la juge Pardu avait dit [Traduction] « quelque chose à propos d'éléments jurisprudentiels où il est dit que, dans le cas d'une pension alimentaire rétroactive, on ne remonte pas à plus d'un an » . En présumant que le souvenir de Mme Tossell est exact, il n'est pas clair que ce commentaire de la juge Pardu portait sur un aspect du droit familial, ou s'il se rapportait aux paragraphes 56.1(3) et 60.1(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu (voir le paragraphe 43 ci-après).


[17]            Le procès-verbal de transaction a été reproduit en grande partie dans un mémoire rédigé par la juge Pardu le 16 décembre 1996, ou peu après, en vue de lui donner effet. Cependant, avant qu'une ordonnance judiciaire soit inscrite, il s'est posé un problème au sujet d'une question qui n'est pas pertinente en l'espèce. La forme définitive de l'ordonnance judiciaire, qui a été rendue en mars 1997, reflète la façon dont ce problème a été réglé. L'ordonnance en question comporte la disposition suivante, qui reflète la clause 6 du procès-verbal de transaction :

[traduction] 6. LE TRIBUNAL ORDONNE que le défendeur [M. Peterson] doit payer rétroactivement à la demanderesse [Mme Tossell] une pension alimentaire pour enfants supplémentaire périodique s'élevant à 36 000 $ pour les douze mois allant du 1er janvier 1996 au 1er décembre 1996 inclusivement pour chaque enfant susmentionné né du mariage. Les paiements sont imposables pour la demanderesse et déductibles des revenus du défendeur.

Cotisations et appels

[18]            Quand Mme Tossell a produit ses déclarations de revenus pour les années 1995 et 1996, elle n'a pas inclus dans son revenu les 24 000 $ qu'elle avait reçus de M. Peterson à titre de pension alimentaire pour enfants dans l'une ou l'autre de ces deux années-là. Elle n'a pas inclus non plus le paiement de 36 000 $ qu'elle avait reçu de M. Peterson en décembre 1996, conformément à la clause 6 du procès-verbal de transaction. M. Peterson a déduit la totalité de ces montants en tenant pour acquis qu'il s'agissait de paiements de pension alimentaire pour enfants et qu'ils étaient visés par l'alinéa 60b) de la Loi de l'impôt sur le revenu.


[19]            De nouvelles cotisations ont été établies à l'endroit de Mme Tossell pour les années 1995 et 1996, qui ont ajouté à son revenu la totalité de ces montants (c'est-à-dire 24 000 $ en 1995 et en 1996, ainsi qu'un montant additionnel de 36 000 $ en 1996). M. Peterson a été lui aussi l'objet d'une nouvelle cotisation pour 1995 et 1996 par laquelle les mêmes montants, qu'il avait déduits ont été rejetés. Mme Tossell et M. Peterson ont tous deux interjeté appel devant la Cour canadienne de l'impôt.

[20]            Le 14 septembre 2001, le ministre du Revenu national a présenté une demande en vertu de l'article 174 de la Loi de l'impôt sur le revenu afin que l'on se prononce sur une question et, à la suite de cette demande, les appels relatifs à l'impôt sur le revenu de M. Peterson et de Mme Tossell ont été joints. Les questions soumises à la Cour canadienne de l'impôt obligeaient cette dernière à décider si les alinéas 56(1)b) et 60b) de la Loi de l'impôt sur le revenu s'appliquaient aux montants mentionnés au paragraphe 19 ci-dessus. Le juge de la C.C.I. a conclu que les deux dispositions s'appliquaient à la totalité des montants.

[21]            Comme cette conclusion réglait les seules questions qui étaient en suspens dans les appels de M. Peterson et Mme Tossell, le juge de la C.C.I. a fait droit à l'appel de M. Peterson et a rejeté celui de Mme Tossell. Cette dernière interjette maintenant appel devant la présente Cour.

Nouveaux éléments de preuve en appel


[22]            À l'audition du présent appel, Mme Tossell a tenté de se fonder sur un affidavit de M. Peterson signé le 3 septembre 2003 et soumis, semble-t-il, à la Cour de justice de l'Ontario en rapport avec un autre différend entre M. Peterson et Mme Tossell. Cet affidavit n'a pas été produit en preuve devant la Cour canadienne de l'impôt. M. Peterson s'est opposé à ce que le document en question soit introduit dans le présent appel. En général, dans un appel en matière d'impôt sur le revenu, la présente Cour ne doit se fier qu'aux documents déposés et aux autres éléments de preuve produits devant la Cour canadienne de l'impôt. Une preuve ne peut être admise en appel que si elle est crédible, si elle est presque concluante en appel et s'il aurait été impossible, avec l'exercice d'une diligence raisonnable, de la présenter au procès : Frank Brunckhorst Co. c. Gainers Inc., [1993] A.C.F. no 874 (C.A.F.). L'affidavit que Mme Tossell souhaite produire à ce stade-ci existait avant le procès tenu devant la Cour canadienne de l'impôt. Aucune raison n'a été donnée pour expliquer pourquoi cet affidavit ne pouvait être introduit en preuve devant la Cour canadienne de l'impôt. Sa présentation dans le présent appel a été refusée.

Les paiements de 2 000 $ par mois pour 1995 et 1996

[23]            Il est indubitable qu'en 1995 et en 1996 M. Peterson a versé à Mme Tossell la somme de 24 000 $ à titre de pension alimentaire pour enfants, aux termes de l'accord de séparation de 1991. Mme Tossell fait toutefois valoir que ces montants ne satisfont pas aux exigences de l'alinéa 56(1)b) de la Loi de l'impôt sur le revenu parce que l'accord de séparation de 1991 n'était pas exécutoire.


[24]            Devant la Cour canadienne de l'impôt, Mme Tossell a soutenu que M. Peterson avait répudié l'accord de séparation de 1991 en mars 1993, quand il avait changé les conditions de l'emploi qu'elle exerçait auprès du cabinet d'avocats. La juge a rejeté cet argument, principalement parce que M. Peterson, après le mois de mars 1993, a continué de verser des paiements de pension alimentaire pour enfants de 2 000 $ par mois, ce qu'exigeait, selon l'interprétation de M. Peterson, l'accord de séparation de 1991. La conduite de ce dernier ne cadrait pas avec celle d'une partie qui répudie une entente. À mon avis, le juge de la C.C.I. avait raison sur ce point.

[25]            Mme Tossell a soutenu aussi, en se fondant sur son propre témoignage devant la Cour canadienne de l'impôt, qu'au cours d'une conférence préalable tenue le 16 décembre 1996 en rapport avec l'action intentée par elle en 1994 pour faire appliquer l'accord de séparation de 1991, la juge Pardu a indiqué qu'aucun juge ne conclurait que cet accord est exécutoire. D'après Mme Tossell, c'est à cause de ce commentaire que les parties ont conclu un nouvel accord, exposé dans le procès-verbal de transaction, en remplacement de l'accord de séparation de 1991.

[26]            Selon la preuve produite devant la Cour canadienne de l'impôt, M. Peterson a considéré que les dispositions concernant la pension alimentaire pour enfants de l'accord de séparation de 1991 étaient exécutables et, durant les années 1994 et 1995, il s'est acquitté de ce qu'il croyait être ses obligations en matière de pension alimentaire pour enfants aux termes de cet accord en payant la somme de 2 000 $. Rien dans l'accord de séparation de 1991 lui-même ne donne à penser que les obligations en matière de pension alimentaire pour enfants ne liaient pas Mme Tossell et M. Peterson. Cette dernière ne fait pas non plus état d'une source quelconque qui dénoterait que l'accord de séparation de 1991 était à ce point imparfait qu'il était d'emblée forcément nul.


[27]            Je n'exclus pas tout à fait la possibilité que si l'action intentée par Mme Tossell en 1994 avait été instruite, la juge Pardu aurait peut-être conclu que l'accord de séparation de 1991 était inexécutable dans son intégralité, ou en partie. Cependant, même si la juge Pardu était arrivée à la conclusion que les obligations en matière de pension alimentaire pour enfants étaient inexécutables, il me semble que la question de savoir si cette conclusion donnerait nécessairement lieu à une nouvelle qualification des paiements faits par M. Peterson est discutable.

[28]            Le juge de la C.C.I. a conclu que la somme de 24 000 $ payée par M. Peterson à Mme Tossell en 1995 et en 1996, à raison d'environ 2 000 $ par mois, est imposable entre les mains de Mme Tossell en vertu de l'alinéa 56(1)b) de la Loi de l'impôt sur le revenu. À mon avis, cette conclusion est exacte.

Le paiement de 36 000 $ fait en décembre 1996

[29]       Le litige que suscite le traitement fiscal des 36 000 $ payés en décembre 1996 découle de la difficulté qu'il y a à interpréter la première phrase de la clause 6 du procès-verbal de transaction (laquelle clause est essentiellement la même que le paragraphe 6 de l'ordonnance judiciaire). Voici de nouveau, par souci de commodité, la phrase en question :

[traduction] 6. Le défendeur paiera rétroactivement, à la demanderesse, une pension alimentaire pour enfants supplémentaire périodique s'élevant à 36 000 $ pour les douze mois allant du 1er janvier 1996 au 1er décembre 1996 inclusivement, pour chaque enfant susmentionné.


[30]            Le point en litige, tel que je le conçois, consiste à savoir si la description du paiement de 36 000 $ qu'englobent les mots [traduction] « paiera rétroactivement [...] une pension alimentaire pour enfants supplémentaire périodique » établit que ce paiement satisfait aux exigences des alinéas 56(1)b) et 60b) de la Loi de l'impôt sur le revenu. Pour dire les choses le plus simplement possible, le point en litige consiste à savoir si les 36 000 $ sont une somme que M. Peterson a payée à Mme Tossell à titre de pension alimentaire pour enfants payable périodiquement aux termes d'un accord écrit ou d'une ordonnance judiciaire.

[31]            Il ne fait aucun doute que le montant de 36 000 $ était censé être un paiement de pension alimentaire pour enfants, et qu'il a été payé aux termes d'un accord écrit : le procès-verbal de transaction. Toutefois, un montant n'est visé par les alinéas 56(1)b) et 60b) de la Loi de l'impôt sur le revenu que s'il est payable périodiquement. Un montant est payable périodiquement si l'obligation de payer revient à intervalles. Même si la clause 6 du procès-verbal de transaction dit du paiement de 36 000 $ qu'il est « périodique » , il y est question d'un paiement unique de 36 000 $. Elle ne décrit pas une obligation d'effectuer des paiements périodiquement.

[32]            M. Peterson a fait valoir devant la Cour canadienne de l'impôt, ainsi que devant la présente Cour, que les 36 000 $ étaient en fait un paiement d'arriérés de pension alimentaire pour enfants payable périodiquement, aux termes de l'accord de séparation de 1991. Cet argument est fondé sur l'arrêt La Reine c. Sills, [1985] 2 C.F. 200 (C.A.F.), lequel étaye la thèse voulant qu'une obligation de payer un montant périodiquement ne change pas de nature même si plusieurs montants de ce genre sont payés en retard sous la forme d'un paiement forfaitaire unique.


[33]            Le juge de la C.C.I. a conclu qu'en décembre 1996, M. Peterson était en défaut par rapport à ses obligations en matière de pension alimentaire pour enfants. Sa conclusion est résumée au paragraphe 53 de ses motifs :

[53] Avant décembre 1996, la pension alimentaire pour enfants avait été payée au taux de 2 000 $ par mois de façon continue depuis juin 1993 et également de septembre 1991 à mars 1993. Dans le paragraphe 12 ci-dessus, je suis arrivé à une conclusion quant à l'accord de base portant sur la pension alimentaire pour enfants se trouvant dans l'accord de séparation. Plus précisément, les deux modalités les plus importantes sont les suivantes :

a)         Larry devait payer 24 000 $ par année à partir du 1er septembre 1991 tant que Patricia était employée par le cabinet d'avocats de Larry;

b)         si Patricia cessait d'être employée par le cabinet d'avocats de Larry pour quelque raison que ce soit, ce dernier devait lui payer 36 000 $ par année.

Patricia a cessé d'être employée par le cabinet d'avocats de Larry quelque part entre le 22 mars et le 31 mai 1993. À mon avis, Larry était obligé de payer la pension alimentaire pour enfants au taux de 3 000 $ par mois à partir du 1er juin 1993 et, peut-être, pendant un ou deux mois avant cette date. Larry n'a payé que 2 000 $ par mois au titre de la pension alimentaire pour enfants entre le 1er juin 1993 et décembre 1996. Par conséquent, pendant cette période de 43 mois, il a accumulé des arriérés de pension alimentaire pour enfants atteignant la limite de 43 000 $.

[34]            Cette conclusion n'est pertinente que si le paiement de 36 000 $ exigé par la clause 6 du procès-verbal de transaction était destiné à faire référence aux arriérés de pension alimentaire pour enfants accumulés aux termes de l'accord de séparation de 1991, auquel cas le principe énoncé dans l'arrêt Sills s'appliquerait. Le juge de la C.C.I. a conclu qu'il s'agissait là du but visé par le paiement de 36 000 $. Il explique cette conclusion au paragraphe 55 de ses motifs :


[55] J'ai conclu que le paiement unique de 36 000 $ était un montant négocié dans le procès-verbal de transaction signé le 16 décembre 1996 pour couvrir les arriérés de pension alimentaire pour enfants dus par Larry à cette date. Mes motifs pour atteindre cette conclusion sont les suivants : premièrement, le paiement est décrit comme [Traduction] « une pension alimentaire pour enfants supplémentaire périodique et rétroactive » ; deuxièmement, si le paiement est réparti sur les trois années 1994, 1995 et 1996, il libère Larry des arriérés pour les 36 mois allant de janvier 1994 à décembre 1996; troisièmement, une répartition sur ladite période de 36 mois correspond à la déclaration de Patricia effectuée en mars 1994 et citée au paragraphe 54 ci-dessus; quatrièmement, les 36 000 $ ont été payés par l'intermédiaire du Régime des obligations alimentaires envers la famille et ont produit une réduction considérable du [Traduction] « solde » qui s'était accumulé à raison de 3 000 $ par mois depuis juin 1993 (moins les 2 000 $ par mois qui ont effectivement été payés par l'intermédiaire du Régime); et cinquièmement, la répartition des 36 000 $ sur la période des 36 mois allant de janvier 1994 à décembre 1996 constitue l'interprétation la plus raisonnable et la plus conforme au bon sens du paragraphe 6 d le'ordonnance du tribunal et du paragraphe 6 du procès-verbal de transaction.

[35]            Ceci étant dit avec égards, je ne suis pas d'accord avec le juge de la C.C.I. que les motifs énoncés au paragraphe 55 étayent la conclusion que le paiement de 36 000 $ dont il est question à la clause 6 du procès-verbal de transaction était destiné à couvrir les arriérés de pension alimentaire pour enfants.

[36]            Selon moi, on ne peut dire d'un accord écrit ou d'une ordonnance judiciaire qu'ils obligent une personne à payer des arriérés de pension alimentaire pour enfants sauf si, au moment où cet accord ou cette ordonnance ont été établis, il existe : 1) une reconnaissance expresse ou implicite d'une obligation préexistante de payer une pension alimentaire pour enfants à l'égard d'une période antérieure, 2) une reconnaissance expresse ou implicite d'un manquement total ou partiel à cette obligation, qui donne lieu à des arriérés de pension alimentaire pour enfants, et 3) une obligation, énoncée dans l'accord écrit ou dans l'ordonnance judiciaire, de payer les arriérés en tout ou en partie.


[37]            Dans le procès-verbal de transaction, ou dans l'ordonnance judiciaire ultérieure, on ne trouve pas de reconnaissance expresse d'une obligation préexistante en matière de pension alimentaire pour enfants, ni de l'existence d'arriérés de pension. Le 16 décembre 1996, lorsque le procès-verbal de transaction a été signé, Mme Tossell et M. Peterson ne s'étaient pas entendus sur ce qu'étaient les obligations de M. Peterson en matière de pension alimentaire pour enfants aux termes de l'accord de séparation de 1991, après le mois de mars 1993. Si la juge Pardu avait une opinion sur ce point, il n'y a aucune preuve de ce que cette opinion était, hormis les souvenirs de Mme Tossell et de l'avocat de M. Peterson, qui sont loin d'être concluants.

[38]            Les autres éléments de preuve figurant dans le dossier n'établissent pas une reconnaissance implicite que M. Peterson était obligé de payer des arriérés de pension alimentaire pour enfants; au contraire, les parties ont persisté à ne pas être d'accord sur ce point au moins jusqu'au 16 décembre 1996. Cependant, si je présumais que le juge de la C.C.I. a eu raison de conclure que M. Peterson n'avait pas respecté ses obligations en matière de pension alimentaire, les arriérés se seraient accumulés à raison de 1 000 $ par mois, pendant une période de 43 mois environ. Cela soulève au moins deux questions importantes, qui sont sans réponse. Si la clause 6 du procès-verbal de transaction était censée se rapporter aux arriérés de pension alimentaire pour enfants, pourquoi les arriérés sont-ils quantifiés à 36 000 $, ce qui équivaudrait à 36 mois d'arriérés seulement? Pourquoi la clause 6 indique-t-elle que le paiement de 36 000 $ ne se rapporte qu'à 1996, période pour laquelle les arriérés n'auraient pas pu dépasser 12 000 $?

[39]            À mon avis, rien ne permet de conclure à l'existence d'une reconnaissance implicite quelconque, au 16 décembre 1996, que M. Peterson avait des arriérés de pension alimentaire pour enfants. Cela suffit, selon moi, pour établir que la clause 6 du procès-verbal de transaction ne peut pas vouloir dire qu'un paiement d'arriérés de pension alimentaire pour enfants est exigé.


[40]            Cependant, ma conclusion serait identique même s'il avait été reconnu de manière implicite que M. Peterson avait des arriérés de pension alimentaire pour enfants, car, selon moi, la clause 6 du procès-verbal de transaction ne peut être raisonnablement interprétée comme une obligation de payer 36 000 $ d'arriérés. Je fonde cette conclusion sur le fait que la clause 6, en disant [traduction] « paiera rétroactivement... » qualifie le paiement de « rétroactif » . Le mot « rétroactif » ne signifie pas simplement « fondé sur le passé » , comme le dit le juge de la C.C.I. au paragraphe 52 de ses motifs. Au contraire, il est abusif de qualifier le paiement d'une obligation en souffrance de « paiement rétroactif » .

[41]            Le procès-verbal de transaction a été rédigé par un avocat d'expérience spécialisé en droit de la famille, à la suite d'une longue conférence préalable avec un juge ayant compétence dans le domaine du droit de la famille. Il est raisonnable de conclure que le mot [traduction] « rétroactivement » a été employé dans le sens où l'entendent les avocats spécialisés en droit de la famille. L'alinéa 34(1)f) de la Loi sur le droit de la famille, L.R.O. 1990, ch. F.3, traite des ordonnances concernant les paiements de pension alimentaire ( « le versement d'aliments » ) rétroactifs. Le texte de cette disposition est le suivant :

34. (1) Le tribunal saisi d'une requête présentée en vertu de l'article 33 peut rendre une ordonnance provisoire ou définitive portant sur les mesures suivantes :

[...]

f)           le versement d'aliments relativement à une période antérieure à la date de l'ordonnance;


[42]            Il ressort clairement de cette description légale des paiements de pension alimentaire rétroactifs qu'une obligation juridique de payer rétroactivement une pension alimentaire pour enfants est une nouvelle obligation. Il pourrait s'agir, par exemple, d'une nouvelle obligation de payer une pension alimentaire pour enfants à l'égard d'une période antérieure précisée pour laquelle il n'existait aucune obligation préexistante. Ou bien il pourrait s'agir d'une nouvelle obligation de payer une pension alimentaire pour enfants à l'égard d'une période antérieure précisée, en sus d'une pension alimentaire pour enfants payable aux termes d'un accord antérieur jugé inadéquat. D'une façon ou d'une autre, une obligation juridique de payer une pension alimentaire pour enfants rétroactive est le contraire d'une obligation juridique de payer des arriérés de pension alimentaire pour enfants.

[43]            J'ouvre une parenthèse à ce stade-ci pour mentionner les paragraphes 56.1(3) et 60.1(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu, deux dispositions qui traitent d'une situation dans laquelle une ordonnance judiciaire ou un accord écrit prescrivent qu'un certain paiement effectué avant la date de l'ordonnance ou de l'accord en question doit être considéré comme ayant été fait au titre de cette ordonnance ou de cet accord. Dans les cas où cela est prescrit, le paiement en question est réputé, aux fins de l'impôt sur le revenu, avoir été fait au titre de l'ordonnance judiciaire ou de l'accord écrit, tant que cela a eu lieu dans la même année que celle où l'ordonnance ou l'accord ont été établis, ou l'année précédente. Le genre de clause que décrivent ces dispositions peut avoir un effet rétroactif, en ce sens qu'elle qualifie rétroactivement un paiement antérieur comme ayant été fait « au titre » d'une ordonnance judiciaire ou d'un accord écrit qui n'existaient pas à l'époque où le paiement a été fait. Aucune des parties au présent appel n'a cité ces dispositions, et il n'y a pas lieu de conclure que ces dernières sont d'une application quelconque en l'espèce.


[44]            Dans sa conclusion, le juge de la C.C.I. semble avoir été influencé par le fait que l'avocat spécialisé en droit de la famille de M. Peterson, en se préparant pour la conférence préalable du 16 décembre 1996, s'était formé l'opinion que la somme de 36 000 $ était le montant qu'il pouvait négocier à l'égard des arriérés de pension alimentaire pour enfants de M. Peterson au mois de décembre 1996. À mon avis, cette preuve établit uniquement que l'avocat de M. Peterson avait une position de négociation. Elle ne permet pas de prouver la nature du paiement de 36 000 $ auquel il est fait référence à la clause 6 du procès-verbal de transaction.

[45]            Le juge de la C.C.I. a accordé aussi un certain poids au fait que M. Peterson a payé la somme de 36 000 $ à Mme Tossell par l'entremise du Régime des obligations alimentaires envers la famille, et que cette somme a été portée au crédit du compte de Mme Tossell, réduisant ainsi de manière appréciable le solde impayé. Rien ne prouve qu'un représentant quelconque de ce Régime a décidé que le paiement de 36 000 $ représentait des arriérés de pension alimentaire pour enfants. Rien ne prouve que le Régime aurait pu faire quoi que ce soit avec le montant reçu de 36 000 $, sinon le porter au crédit du compte de Mme Tossell. Rien ne prouve non plus que M. Peterson était tenu d'effectuer le paiement par l'entremise du Régime, plutôt que directement à Mme Tossell. Le fait qu'il ait procédé ainsi, et que le montant ait été porté au crédit du compte de Mme Tossell, ne permet pas d'établir que le paiement était destiné à représenter des arriérés de pension alimentaire pour enfants.


[46]            Le juge de la C.C.I. a considéré que le fait de répartir la somme de 36 000 $ sur la période de 36 mois écoulée entre les mois de janvier 1994 et de décembre 1996 est l'interprétation « la plus raisonnable et la plus conforme au bon sens » de la clause 6 du procès-verbal de transaction. Ceci étant dit avec respect, je ne suis pas d'accord. Le 16 décembre 1996, chacune des parties faisait face à la perspective de contester l'accord de séparation de 1991, ce qui, pour chacune, présentait des difficultés considérables. Le litige aurait mis en jeu de nombreuses questions, dont certaines étaient susceptibles d'avoir des effets à long terme qui auraient été plus importants que des arriérés de pension alimentaire pour enfants. Les deux auraient pu régler les questions liées à la pension alimentaire pour enfants impayée d'une manière qui aurait constaté officiellement les arriérés, et prévoir le paiement intégral ou partiel de ces derniers. Ils auraient pu aussi mettre de côté la question des arriérés et créer une obligation tout à fait nouvelle. Il est impossible de déterminer, à partir du dossier, si l'une de ces deux solutions aurait été plus raisonnable que l'autre.

[47]            D'après l'analyse faite au paragraphe 58 des motifs du juge de la C.C.I., je déduis que l'opinion qu'avait ce dernier de la situation a peut-être été influencée par la seconde phrase de la clause 6 du procès-verbal de transaction :

[traduction] 6. [...] Les paiements sont imposables pour la demanderesse et déductibles des revenus du défendeur.


[48]            La raison pour laquelle cet énoncé figure dans le procès-verbal n'est pas claire. Mme Tossell a peut-être cru, le 16 décembre 1996, que les 36 000 $ seraient imposables en droit. Elle était peut-être disposée à ce moment-là à convenir que, dans les circonstances, ce traitement serait juste et équitable. Elle a peut-être été influencée par le fait que, si M. Peterson se situait dans une fourchette d'imposition plus élevée que la sienne, leur actif combiné serait meilleur si le paiement était déduit par M. Peterson, même s'il était imposable entre les mains de Mme Tossell. Ce que cette dernière a pu avoir pensé ou espéré importe peu. Le traitement fiscal du paiement de 36 000 $ dépend du fait que ce dernier est visé ou non par les alinéas 56(1)b) et 60b) de la Loi de l'impôt sur le revenu, ce qui dépend à son tour des droits et des obligations juridiques décrits à la première phrase de la clause 6 du procès-verbal de transaction. Selon moi, le juge de la C.C.I. aurait dû faire abstraction de la seconde phrase.

Conclusion

[49]            Pour ces motifs, je rejetterais l'appel de Mme Tossell pour 1995 (dossier de la C.C.I. 98-2469(IT)I), j'accueillerais en partie son appel pour 1996 (dossier de la C.C.I. 2000-3286(IT)I) et je renverrais l'affaire au ministre pour nouvelle cotisation, étant entendu que le paiement de 36 000 $ que Mme Tossell a reçu en 1996 n'est pas imposable entre ses mains. Son appel n'ayant été fructueux qu'en partie, je ne rendrais aucune ordonnance quant aux dépens.

[50]            Le ministère public n'a pas porté en appel le jugement de la Cour canadienne de l'impôt concernant M. Peterson (dossier de la C.C.I. 2000-2170(IT)G). Cependant, dans une ordonnance de la présente Cour datée du 23 janvier 2004 (2004 CAF 30), M. Peterson a été ajouté à titre d'intimé. La question de savoir si, par suite de l'issue du présent appel, il convient de rendre une ordonnance à son endroit n'est pas claire.


[51]            Il est demandé aux avocats du ministère public de soumettre des observations écrites sur ce point (maximum de 5 pages, à double interligne) avant le 27 juin 2005. L'avocat de M. Peterson peut fournir une réponse (maximum de 5 pages, à double interligne) avant le 4 juillet 2005. Le jugement officiel dans le présent appel sera différé en attendant que l'on reçoive ces observations.


                         « K. Sharlow »

                                 Juge

« Je souscris aux présents motifs.

     Alice Desjardins, juge »

« Je souscris aux présents motifs.

     Marshall E. Rothstein, juge »

Traduction certifiée conforme

Michèle Ali



                                                    COUR D'APPEL FÉDÉRALE

                                                                             

                                             AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                       A-527-03

INTITULÉ :                                       PATRICIA TOSSELL et SA MAJESTÉ LA REINE et LARRY PETERSON

LIEU DE L'AUDIENCE :               Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :             LE 10 MAI 2005

MOTIFS DU JUGEMENT :           LA JUGE SHARLOW

Y ONT SOUSCRIT :                       LA JUGE DESJARDINS

LE JUGE ROTHSTEIN

DATE DES MOTIFS :                     Le 17 juin 2005

COMPARUTIONS :

Patricia Tossell                                 Pour son propre compte

Peter M. Kremer, c.r.

Justine Malone                                  Pour l'intimée, Sa Majesté la Reine

Larry Peterson

Wallace DuCharme                          Pour l'intimé, Larry Peterson

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Patricia Tossell

Sault Ste. Marie (Ontario)                Pour son propre compte

John H. Sims, c.r.                            Pour l'intimée, Sa Majesté la Reine

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

Wallace Klein Partners in Law        Pour l'intimé, Larry Peterson

Avocats

North Bay (Ontario)


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