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Date : 20021113

Dossier : A-473-01

Référence neutre : 2002 CAF 447

CORAM :       LE JUGE LINDEN

LE JUGE NOËL

LE JUGE SEXTON

ENTRE :

                          L'ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                                   et

                                    SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA,

                                     REPRÉSENTÉE PAR LE CONSEIL DU TRÉSOR

                                                                                                                                               défenderesse

                                    Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 13 novembre 2002.

                         Jugement rendu à l'audience à Ottawa (Ontario), le 13 novembre 2002.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                              LE JUGE SEXTON


Date : 20021113

Dossier : A-473-01

Référence neutre : 2002 CAF 447

CORAM :       LE JUGE LINDEN

LE JUGE NOËL

LE JUGE SEXTON

ENTRE :

                          L'ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                                   et

                                    SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA,

                                     REPRÉSENTÉE PAR LE CONSEIL DU TRÉSOR

                                                                                                                                               défenderesse

                                                           MOTIFS DU JUGEMENT

                         (prononcés à l'audience à Ottawa (Ontario), le 13 novembre 2002)

LE JUGE SEXTON


[1]                 La demanderesse sollicite le contrôle judiciaire d'une décision de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) prononcée par son président, M. Yvon Tarte, qui avait refusé le renvoi d'une affaire par l'Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC) selon l'article 99, au motif que l'AFPC n'avait pas établi l'existence d'une obligation dans la convention collective aux fins de l'article 99 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP).

[2]                 Il n'est pas nécessaire de passer en revue tout l'historique de la présente instance. Qu'il suffise de dire que des plaintes en matière d'équité salariale ont été déposées par l'AFPC à la Commission canadienne des droits de la personne au nom de groupes dont la classification est à prédominance féminine. Un Tribunal des droits de la personne fut éventuellement nommé pour examiner lesdites plaintes, et le Tribunal a rendu le 29 juillet 1998 ce qu'il est convenu d'appeler une décision de la phase II. Dans cette décision, il était ordonné que l'écart salarial pour les salaires directs devait être calculé de manière à rendre compte de la conclusion du Tribunal selon laquelle il y avait eu discrimination ainsi que l'affirmait l'AFPC.

[3]                 Non seulement l'AFPC avait plaidé devant le Tribunal la question se rapportant aux salaires directs, mais encore elle avait fait valoir qu'il fallait recalculer les autres avantages qui étaient fondés sur les salaires. Il s'agissait par exemple des avantages de nature salariale tels que l'indemnité de formation, l'indemnité de départ, les directives du service extérieur, la protection salariale en cas de mutation à des postes moins rémunérateurs, et les vacances. L'AFPC avait soutenu devant le Tribunal qu'il n'était pas nécessaire au Tribunal de recalculer tous ces éléments pour chaque événement, ajoutant qu'il suffisait pour le Tribunal de fixer les salaires appropriés et que les calculs pouvaient être effectués par les parties. Devant nous, l'avocat de l'AFPC a admis qu'il aurait été du ressort du Tribunal de faire de tels calculs.


[4]                 Cependant, lorsqu'il a rendu sa décision, le Tribunal n'a évidemment pas accepté l'affirmation selon laquelle tous les avantages de nature salariale étaient décidés à ce moment-là. Le paragraphe 13 de l'ordonnance du Tribunal est ainsi formulé :

13. Que la question de savoir si les rajustements rétroactifs aux salaires directs doivent être réputés des salaires à toutes les fins, ou des salaires aux fins du calcul de la pension de retraite mais non à d'autres fins, soit réglée dans le cadre de la phase III de cette procédure.

[5]                 À la lecture de ce paragraphe, il est évident que le Tribunal reportait à la phase III la question de savoir si les rajustements au titre des salaires directs devaient être réputés « des salaires à toutes les fins, ou des salaires aux fins du calcul de la pension de retraite, mais non à d'autres fins » .

[6]                 La phase III de l'instruction n'a jamais eu lieu. Ce qui arriva, c'est que les parties ont suspendu l'instance et entrepris de négocier un compromis. Par un protocole d'accord en date du 29 octobre 1999, les parties se sont entendues pour que « les termes du présent accord règlent tous les aspects de la phase II et de la phase III se rapportant aux plaintes » de l'AFPC.


[7]                 L'accord réglait certains avantages de nature salariale, notamment les prestations de maternité, l'invalidité à long terme, les indemnités de départ, ainsi que les heures supplémentaires, les primes d'affectation intérimaire et primes d'avancement, avantages qui, nous a-t-on dit, constituent le gros des questions salariales litigieuses qui avaient été soulevées auparavant, mais non tranchées par le Tribunal.

[8]                 Les parties se sont alors présentées devant le Tribunal pour lui demander que l'accord soit incorporé, par consentement, dans une ordonnance du Tribunal.

[9]                 L'avocat de l'AFPC, s'adressant au Tribunal à propos de l'accord, a déclaré : « les parties vous demandent d'approuver et de signer l'ordonnance selon la forme dans laquelle elle vous est présentée » , et il a demandé au Tribunal d'accepter « le protocole d'accord comme représentant le règlement de tous les points restants de la phase II et de la phase III se rapportant aux plaintes déposées » .

[10]            Le Tribunal a accepté les conclusions des parties et a rendu une ordonnance par consentement le 16 novembre 1999, qui comprenait notamment les passages suivants :

[Traduction] Et attendu que les parties ont informé le Tribunal que les matières se rapportant à la phase II et à la phase III de la présente instance ont été résolues à la faveur d'un accord conclu le 29 octobre 1999.

Le Tribunal ordonne ce qui suit, par consentement du plaignant et du défendeur :

1. L'accord du 29 octobre 1999 ci-annexé est ici accepté par le Tribunal et règle tous les points restants de la phase II et de la phase III se rapportant aux plaintes déposées au nom des employés conformément à l'article 11 de la Loi.


[11]            À la suite de la délivrance de l'ordonnance par consentement, l'AFPC a revendiqué divers autres avantages de nature salariale, que le Conseil du Trésor a refusés. L'AFPC a donc présenté un renvoi à la CRTFP en conformité avec l'article 99 de la LRTFP.

[12]            Le président Tarte a conclu qu'il ne pouvait accéder au renvoi demandé par l'AFPC, renvoi dans lequel l'AFPC affirmait que tous les avantages, gratifications et indemnités contenus dans les diverses conventions collectives des groupes visés par les plaintes, et rattachés aux taux de rémunération qui avaient été jugés discriminatoires par le Tribunal, devaient être rajustés en fonction de chaque événement pour toute la période rétroactive, étant entendu que, par l'effet de la loi, la conclusion du Tribunal selon laquelle les salaires étaient discriminatoires avait eu pour effet de modifier la convention collective. Le président Tarte s'est exprimé ainsi :

Il n'est certainement pas clair que le Tribunal convenait que la loi lui prescrivait d'ordonner le rajustement de tous les avantages indirects, au cas par cas, pour toute la période rétroactive, ou qu'il l'aurait nécessairement fait si la phase III de la procédure avait eu lieu... L'imprécision de la formulation utilisée dans l'ordonnance sur consentement peut donner lieu à des vues et interprétations différentes. Je ne crois pas que la Commission devrait tenter de corriger l'ambiguïté contenue dans l'ordonnance du Tribunal. À moins que les parties ne s'entendent sur cette question, l'affaire doit être renvoyée à la Cour fédérale et, à terme, au Tribunal.


[13]            Pour avoir gain de cause, il incombait à la demanderesse, avant que naisse une obligation selon la convention collective, de convaincre le président Tarte que l'ordonnance par consentement donnait effet à un accord selon lequel les avantages et indemnités précisés devaient être payés. À notre avis, le président Tarte était parfaitement fondé à dire que l'ordonnance par consentement était imprécise sur ce point et que par conséquent l'existence de la présumée obligation n'avait pas été établie.

[14]            Nous reconnaissons qu'il est loin d'être évident que le protocole d'accord et l'ordonnance par consentement donnent lieu à une telle obligation, et cela suffisait pour autoriser le président Tarte à tirer les conclusions qu'il a tirées.

[15]            Le Tribunal, dans sa décision de la phase II, ne prétendait pas régler la question des avantages de nature salariale, mais voulait plutôt aborder cet aspect durant la phase III des audiences. Il nous est impossible de dire si le Tribunal aurait ordonné tous les redressements recherchés par la demanderesse, pour le cas où les audiences de la phase III auraient eu lieu. Le paragraphe 53(2) de la Loi canadienne sur les droits de la personne confère au Tribunal un pouvoir discrétionnaire sur les redressements qui peuvent être ordonnés, et le Tribunal l'a reconnu dans ses motifs.

[16]            Nous sommes enclins à dire que l'effet de l'ordonnance par consentement est restreint par les termes exprès du protocole d'accord, le résultat étant que ce qui n'est pas énoncé dans le protocole d'accord est exclu de l'ordonnance par consentement.

[17]            Nous ne croyons pas qu'il soit nécessaire de statuer sur le point soulevé par l'affaire Boutilier.


[18]            Nous sommes par conséquent d'avis que cette demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée, avec dépens.

  

                                                                          « J. EDGAR SEXTON »          

                                                                                                             Juge                         

   

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                               COUR D'APPEL FÉDÉRALE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

  

DOSSIER :              A-473-01

  

INTITULÉ :            ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

c. SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA, REPRÉSENTÉE PAR LE CONSEIL DU TRÉSOR

  

LIEU DE L'AUDIENCE :                                OTTAWA (ONTARIO)

  

DATE DE L'AUDIENCE :                              LE 13 NOVEMBRE 2002

  

MOTIFS DU JUGEMENT

DE LA COUR :      LE JUGE SEXTON

  

PRONONCÉS À L'AUDIENCE À OTTAWA (ONTARIO), LE MERCREDI 13 NOVEMBRE 2002

  

DATE DES MOTIFS :                                     LE 13 NOVEMBRE 2002

  

COMPARUTIONS :

M. Andrew Raven                                                POUR LA DEMANDERESSE

M. Richard Fader                                                POUR LA DÉFENDERESSE

Mme Beverly Whitlaw

  

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Raven, Allen, Cameron & Ballantyne                  POUR L'APPELANTE

Ottawa (Ontario)

Morris Rosenberg                                                 POUR L'INTIMÉE

Sous-procureur général

Ottawa (Ontario)

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