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     Dossier: A-189-81

OTTAWA (ONTARIO), CE 22E JOUR D'AVRIL 1999

CORAM:      LE JUGE STONE
         MADAME LE JUGE DESJARDINS
         LE JUGE MCDONALD

ENTRE:

     TGI FRIDAY'S OF MINNESOTA, INC.,

     appelante,

     - et -

     LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE,

     intimé,

     - et -

     KEN DOLAN INC.,

     intervenante.

     JUGEMENT

     L'appel est accueilli et le jugement de la Division de première instance du 25 mars 1981 ainsi que la décision du Registraire des marques de commerce du 21 mai 1980 sont annulés.         

                             A.J. Stone

                                     J.C.A.

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L.


     Date: 19990422

     Dossier: A-189-81

CORAM:      LE JUGE STONE
         MADAME LE JUGE DESJARDINS
         LE JUGE MCDONALD

AFFAIRE INTÉRESSANT l'article 44 de la Loi sur les marques de commerce, S.R.C. 1970, ch. T-10

ENTRE:

     TGI FRIDAY'S OF MINNESOTA, INC.,

     appelante,

     - et -

     LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE,

     intimé,

     - et -

     KEN DOLAN INC.,

     intervenante.

Affaire entendue à Ottawa (Ontario) le jeudi 22 avril 1999.

Jugement rendu à l'audience le jeudi 22 avril 1999.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR RENDUS PAR      LE JUGE STONE

     Date: 19990422

     Dossier: A-189-81

CORAM:      LE JUGE STONE
         MADAME LE JUGE DESJARDINS
         LE JUGE MCDONALD

AFFAIRE INTÉRESSANT l'article 44 de la Loi sur les marques de commerce, S.R.C. 1970, ch. T-10

ENTRE:

     TGI FRIDAY'S OF MINNESOTA, INC.,

     appelante,

     - et -

     LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE,

     intimé,

     - et -

     KEN DOLAN INC.,

     intervenante.

     MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

     (Délivrés à l'audience à Ottawa (Ontario),

     le jeudi 22 avril 1999)

LE JUGE STONE

[1]      La Cour est saisie de l'appel d'une décision de la Division de première instance rendue le 25 mars 1981.

[2]      Le juge de première instance devait déterminer si le registraire des marques de commerce avait commis une erreur dans sa décision du 21 mai 1980, en radiant la marque de commerce "Friday's" du registre en application de l'article 44 de la Loi sur les marques de commerce tel qu'il était libellé à cette date1. Les dispositions pertinentes de cet article sont les suivantes :


44. (1) The Registrar may at any time and, at the written request made after three years from the date of the registration by any person who pays the prescribed fee shall, unless he sees good reason to the contrary, give notice to the registered owner requiring him to furnish within three months an affidavit or statutory declaration showing with respect to each of the wares or services specified in the registration, whether the trade mark is in use in Canada and, if not, the date when it was last so in use and the reason for the absence of such use since such date.

(2) The Registrar shall not receive any evidence other than such affidavit or statutory declaration, but may hear representations made by or on behalf of the registered owner of the trade mark or by or on behalf of the person at whose request the notice was given.

(3) Where, by reason of the evidence furnished to him or the failure to furnish such evidence, it appears to the Registrar that the trade mark, either with respect to all of the wares or services specified in the registration or with respect to any of such wares or services, is not in use in Canada and that the absence of use has not been due to special circumstances that excuse such absence of use, the registration of such trade mark is liable to be expunged or amended accordingly.

...

44. (1) Le registraire peut, à tout moment, et doit, sur la demande écrite présentée après trois années à compter de la date de l"enregistrement, par une personne qui verse les droits prescrits, à moins qu"il ne voie une raison valable à l"effet contraire, donner au propriétaire inscrit un avis lui enjoignant de fournir, dans les trois mois, un affidavit ou une déclaration statutaire indiquant, à l"égard de chacune des marchandises ou de chacun des services que spécifie l"enregistrement, si la marque de commerce est employée au Canada et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d"emploi depuis cette date.

(2) Le registraire ne doit recevoir aucune preuve autre que cet affidavit ou cette déclaration statutaire, mais il peut entendre des représentations faites par ou pour le propriétaire inscrit de la marque de commerce, ou par ou pour la personne à la demande de qui l"avis a été donné.

(3) Lorsqu"il apparaît au registraire, en raison de la preuve à lui fournie ou de l"omission de fournir une telle preuve, que la marque de commerce, soit à l"égard de la totalité des marchandises ou services spécifiés dans l"enregistrement, soit à l"égard de l"une quelconque de ces marchandises ou de l"un quelconque de ces services, n"est pas employée au Canada, et que le défaut d"emploi n"a pas été attribuable à des circonstances spéciales qui le justifient, l"enregistrement de cette marque de commerce est susceptible de radiation ou modification en conséquence.

...

[3]      La marque avait été enregistrée le 4 mai 1973 au nom de la société Friday's Ltd. dont un dénommé Herman Lindy était le président et le principal actionnaire. En 1977, la société a cédé la marque à M. Lindy, de sorte que ce dernier est devenu son "propriétaire inscrit". Malgré la cession, la société a continué à utiliser la marque de commerce à l'exclusion de M. Lindy, même si elle n'en était pas l'"usager inscrit" sous le régime de l'article 49 de la Loi.

[4]      Le registraire a prononcé la radiation de la marque de commerce parce qu'il n'avait pas été établi que le propriétaire inscrit de la marque, M. Lindy, l'avait utilisée en liaison avec chacun des services offerts dans la pratique normale du commerce au Canada, le 30 mars 1978, soit la date de l'avis prévu à l'article 44.

[5]      Le juge de première instance a maintenu la décision du registraire. Il a estimé qu'en raison de la présence des mots "est employée au Canada", à l'article 44, il faut que ce soit le propriétaire inscrit qui emploie la marque, à moins que l'usager réel ne soit un "usager inscrit" sous le régime de l'article 49 de la Loi et, de ce fait, soit "habilité" à utiliser la marque. M. Lindy a interjeté le présent appel le 8 avril 19812.

[6]      L'appelante conteste cette dernière conclusion, mais uniquement à titre subsidiaire. En effet, le motif principal qu'elle invoque pour demander que le jugement de première instance soit infirmé est que la Loi en cause a été modifiée alors que l'appel était pendant, de telle sorte qu'elle reconnaît maintenant que le type d'usage fait par la société satisfait à l'exigence de l'emploi de la marque au Canada énoncée à l'article 44, et que cette modification a un effet rétroactif. La modification, énoncée aux actuels paragraphes 50(1) et (2) de la Loi3, est la suivante :

50. (1) For the purposes of this Act, if an entity is licensed by or with the authority of the owner of a trade-mark to use the trade-mark in a country and the owner has, under the licence, direct or indirect control of the character or quality of the wares or services, then the use, advertisement or display of the trade-mark in that country or as in a trade-mark, trade-name or otherwise by that entity has, and is deemed always to have had, the same effect as such a use, advertisement or display of the trade-mark in that country by the owner.

(2) For the purposes of this Act, to the extent that public notice is given of the fact that the use of a trade-mark is a licensed use and of the identity of the owner, it shall be presumed, unless the contrary is proven, that the use is licensed by the owner of the trade-mark and the character or quality of the wares or services is under the control of the owner.

50. (1) Pour l"application de la présente loi, si une licence d"emploi d"une marque de commerce est octroyée, pour un pays, à une entité par le propriétaire de la marque, ou avec son autorisation, et que celui-ci, aux termes de la licence, contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques et la qualité des marchandises et services, l"emploi, la publicité ou l"exposition de la marque, dans ce pays, par cette entité comme marque de commerce, nom commercial "ou partie de ceux-ci " ou autrement ont le même effet et sont réputés avoir toujours eu le même effet que s"il s"agissait de ceux du propriétaire.

(2) Pour l"application de la présente loi, dans la mesure où un avis public a été donné quant à l"identité du propriétaire et au fait que l"emploi d"une marque de commerce fait l"objet d"une licence, cet emploi est réputé, sauf preuve contraire, avoir fait l"objet d"une licence du propriétaire, et le contrôle des caractéristiques et de la qualité des marchandises et services est réputé, sauf preuve contraire, être celui du propriétaire.

[7]      Nous avons souligné les mots sur lesquels l'appelante s'appuie pour soutenir que la modification a un effet rétroactif. Il nous paraît que les mots "sont réputés avoir toujours eu le même effet" font de la loi un texte déclaratif du droit, non seulement pour l'avenir mais également pour le passé, qui doit être appliqué dans cet esprit à moins qu'un obstacle ne s'y oppose.

[8]      En l'espèce, deux obstacles pourraient nous empêcher de donner effet à l'article 50. Premièrement, il est entré en vigueur quelque douze ans après la date du jugement contesté et la Cour ne pourrait donc l'appliquer maintenant. Selon la Cour suprême, dans l'arrêt Western Minerals Ltd. c. Gaumont4, il ne s'agirait pas là toutefois d'un obstacle insurmontable. Le passage suivant des motifs du juge Cartwright (tel était alors son titre) s'applique tant à la question de la rétroactivité qu'à celle de l'obligation qui incombe à une cour d'appel, dans des circonstances comme celles de la présente espèce, de donner au texte de loi la portée rétroactive voulue par le législateur5 :

     [TRADUCTION]         
     Bien sûr, la règle générale établit incontestablement qu'il faut présumer qu'un texte de loi est prospectif et non rétroactif à moins qu'il ne ressorte clairement et sans équivoque du libellé de la loi que le législateur en a voulu autrement, ainsi que l'exprime la maxime bien connue "Omnis nova constitutio futuris formam imponere debet no praeteritis". Toutefois, les tribunaux ont souvent statué que la présomption voulant qu'un texte de loi ne s'interprète pas rétroactivement ne s'applique pas aux lois déclaratoires (voir Craies on Statute Law , op. cit., p. 341, et la jurisprudence qui y est citée).         
     Puisque j'ai conclu que la Loi déclare quel est et quel était le droit de l'Alberta en cette matière, je n'estime pas nécessaire de trancher la question de savoir si aux termes des lois et des règles applicables en Alberta, un appel à l'Appellate Division est "un appel au sens strict et non un appel par voie de nouvelle audition", pour reprendre les mots du juge Duff (tel était alors son titre) dans l'arrêt Boulevard Heights c. Veilleux, [[1915] 52 R.C.S. 185, à la p. 192]. En effet, même en supposant qu'il le soit, je crois que l'Appellate Division serait tenue de donner effet à une loi, adoptée postérieurement à la date du jugement porté en appel mais avant l'audition ou le règlement de l'appel, qui déclarerait ce qu'est et a toujours été le droit et, par voie de conséquence, ce qu'il était au moment du procès. Cette affirmation me paraît d'une évidence telle qu'elle me dispense de l'étayer jurisprudentiellement, mais s'il faut invoquer la jurisprudence, je crois que le passage suivant de l'arrêt Boulevard Heights c. Veilleux, précité, est pertinent :         
     Le juge Duff (tel était alors son titre), aux p. 191 et 192 :         
         Il ne fait aucun doute, selon moi, que si ces modifications avaient été adoptées avant l'audition de l'appel par l'Appellate Division de l'Alberta, elles se seraient appliquées à la détermination de l'appel par la Cour. C'est une autre question qu'il nous faut trancher toutefois. La législature de l'Alberta n'a pas compétence pour établir des règles régissant le règlement par notre Cour des appels émanant de l'Alberta, et les dispositions invoquées par M. Clarke, qui ne visent pas à dire l'état du droit au moment où l'action a été intentée ou au moment où l'Appellate Division a statué sur l'appel, ne peuvent avoir d'effet sur les droits des parties que dans la mesure où les lois et les règles régissant notre Cour leur permettent de s'appliquer.                 

     [Non souligné dans l'original]

[9]      L'existence d'une "licence" en faveur de la société et le contrôle de la marque par le propriétaire peuvent constituer le deuxième obstacle. L'appelante soutient que même si M. Lindy n'a pas octroyé de licence écrite à la société pour la période allant de 1977 à la date de l'avis prévu à l'article 44, la preuve permet raisonnablement d'inférer l'existence d'une licence verbale et du contrôle de M. Lindy. Ce dernier est demeuré le président et le principal actionnaire de la société jusqu'à la date de l'avis prévu à l'article 44 et, pendant cette période, la société a exploité un bar et un restaurant en se servant de la marque de commerce. À notre avis, ces faits permettent d'inférer que la société a utilisé la marque en vertu d'une licence verbale octroyée par M. Lindy ou en vertu d'une entente équivalant à une licence verbale et que la marque est demeurée sous le contrôle direct ou indirect de M. Lindy. Cela a donc permis à la société d'utiliser la marque de commerce comme elle l'a fait dans le cadre de son entreprise.

[10]      L'appel est accueilli. Le jugement de la Division d'appel et la décision du registraire des marques de commerce sont infirmés.

                         A.J.Stone

                                 J.C.A.

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L.

COUR D'APPEL FÉDÉRALE

     Date: 19990422

     Dossier: A-189-81


AFFAIRE INTÉRESSANT l'article 44 de la Loi sur les marques de commerce, S.R.C. 1970, ch. T-10

ENTRE:

     TGI FRIDAY'S OF MINNESOTA, INC.,

     appelante,

     - et -

     LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE,

     intimé,

     - et -

     KEN DOLAN INC.,

     intervenante.

     MOTIFS DU JUGEMENT

     DE LA COUR

     COUR D'APPEL FÉDÉRALE

     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :              A-189-81

APPEL DU JUGEMENT DE LA DIVISION DE PREMIÈRE INSTANCE DE LA COUR FÉDÉRALE DU CANADA RENDU LE 25 MARS 1981 DANS L'AFFAIRE PORTANT LE NO T-3440-80

INTITULÉ :                  TGI FRIDAY'S OF MINNESOTA, INC. c.
                     LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE et
                     KEN DOLAN INC.
LIEU DE L'AUDIENCE :          Ottawa (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE :      le 22 avril 1999

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR (les juges Stone, Desjardins et McDonald)

RENDUS À L'AUDIENCE PAR LE JUGE STONE

COMPARUTIONS :

M. Allen D. Israel                      pour l'appelante

Aucune comparution                      pour l'intimé

Aucune comparution                      pour l'intervenante

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Allen D. Israel

Ottawa (Ontario)                      pour l'appelante

Aucune comparution                      pour l'intimé

Aucune comparution                      pour l'intervenante

__________________

1      S.R.C. 1970, ch. T-10.

2      La marque de commerce a plus tard été cédée à l'appelante actuelle, laquelle a été substituée par ordonnance de la Cour à M. Lindy.

3      L.C. 1993, ch. 15, art. 69; la loi modificatrice, Loi modifiant la Loi sur le droit d'auteur, la Loi sur les dessins industriels, la Loi sur les topographies de circuits intégrés, la Loi sur les brevets, la Loi sur les marques de commerce et d'autres lois en conséquence a été sanctionnée le 6 mai 1993. La modification a eu pour effet d'abroger les dispositions de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13, relatives à l'"usager inscrit" et de les remplacer par un nouvel article.

4      [1953] 1 R.C.S. 345.

5      Id., à la p. 369.

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