Décisions de la Cour d'appel fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20010406

Dossier : A-138-00

Référence neutre : 2001 CAF 112

Coram:             LE JUGE DESJARDINS

LE JUGE DÉCARY

LE JUGE NOËL

Entre :

                                               RONY DANILO FIGUEROA

                               MARITZA JUDITH MORALES de FIGUEROA

                                            HEIDY FIGUEROA-MORALES

                                    ELSA MARITZA FIGUEROA-MORALES

                                                                                                                               Appelants

                                                                      ET

                                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                 ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                     Intimé

                                            Audience tenue à Montréal (Québec)

                                                      le vendredi 6 avril 2001

                                            Jugement rendu à Montréal (Québec)

                                                      le vendredi 6 avril 2001

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR PAR:                      LE JUGE DESJARDINS


Date : 20010406

Dossier : A-138-00

Référence neutre : 2001 CAF 112

Coram :            LE JUGE DESJARDINS

LE JUGE DÉCARY

LE JUGE NOËL

Entre :

                                               RONY DANILO FIGUEROA

                               MARITZA JUDITH MORALES de FIGUEROA

                                            HEIDY FIGUEROA-MORALES

                                    ELSA MARITZA FIGUEROA-MORALES

                                                                                                                               Appelants

                                                                      ET

                                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                 ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                     Intimé

                                     MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

                                  (Prononcés à l'audience à Montréal (Québec)

                                                    le vendredi 6 avril 2001)

LE JUGE DESJARDINS

Nous sommes tous d'avis que cet appel d'une demande de contrôle judiciaire ne peut réussir.


La question certifiée par le premier juge (Figueroa c. Canada (Ministre de la citoyenneté et de l'immigration) [2000] F.C.J. no 250 (T.D.)(Q.L.) se lit comme suit:

En vertu du pouvoir décisionnel qui lui est accordé à l'alinéa 46.04(3) de la Loi, un agent d'immigration peut-il, sans l'intervention d'un arbitre, refuser d'accorder le droit d'établissement à l'intéressé et aux personnes à sa charge visées par la demande, au motif qu'il n'est pas convaincu qu'aucun d'entre eux n'est visé à l'alinéa 19(1)(j) de la Loi.

(Je souligne)

L'alinéa 46.04(3) de la Loi sur l'immigration (la « Loi » ), auquel se réfère la question certifiée, se lit comme suit:


46.04 (3) Malgré les autres dispositions de la présente loi mais sous réserve des paragraphes (3.1) et (8), l'agent d'immigration accorde le droit d'établissement à l'intéressé et aux personnes à sa charge visées par la demande, s'il est convaincu qu'aucun d'entre eux n'est visé à l'un des alinéas 19(1)c.1), c.2), d), e), f), g), j), k) ou l) ou n'a été déclaré coupable d'une infraction prévue par une loi fédérale :

a) soit pour laquelle une peine d'emprisonnement de plus de six mois a été infligée;

b) soit passible d'un emprisonnement maximal égal ou supérieur à cinq ans.

(Je souligne)


46.04 (3) Notwithstanding any other provision of this Act, but subject to subsections (3.1) and (8), an immigration officer to whom an application is made under subsection (1) shall grant landing to the applicant, and to any dependant for whom landing is sought if the immigration officer is satisfied that neither the applicant nor any of those dependants is a person described in paragraph 19(1)(c.1), (c.2), (d), (e), (f), (g), (j), (k) or (l) or a person who has been convicted of an offence under any Act of Parliament for which a term of imprisonment of

(a) more than six months has been imposed; or

(b) five years or more may be imposed.

(emphasis added)



Malgré les termes clairs de l'alinéa 46.04(3), les appelants soumettent qu'un agent d'immigration n'a aucune juridiction pour déclarer inadmissibles les appelants sans qu'un arbitre ait statué qu'un d'entre eux (l'époux en l'espèce) était une personne visée à l'alinéa 19(1)j) de la Loi, lequel se lit comme suit.


19.(1) Les personnes suivantes appartiennent à une catégorie non admissible:

...

j) celles dont on peut penser, pour des motifs raisonnables, qu'elles ont commis, à l'étranger, un fait constituant un crime de guerre ou un crime contre l'humanité au sens du paragraphe 7(3.76) du Code criminel et qui aurait constitué, au Canada, une infraction au droit canadien en son état à l'époque de la perpétration.

19.1(1) No person shall be granted admission who is a member of any of the following classes:

...

(j) persons who there are reasonable grounds to believe have committed an act or omission outside Canada that constituted a war crime or a crime against humanity within the meaning of subsection 7(3.76) of the Criminal Code and that, if it had been committed in Canada, would have constituted an offence against the laws of Canada in force at the time of the act or omission.


Les décisions sur lesquelles les appelants s'appuient, notamment les affaires Gwala c. Canada [1999] A.C.F. no 792 (C.A.F.)(QL) et Raman c. Canada [1999] A.C.F. no 839 (C.A.F.)(QL), se distinguent pourtant du cas en l'espèce.

Dans l'affaire Gwala, la question certifiée consistait à déterminer si les agents d'immigration supérieurs étaient implicitement investis du pouvoir de se prononcer sur des questions de droit. Notre Cour y répondit par la négative.


L'affaire Raman portait sur la question de savoir si l'agent principal avait compétence, en vertu de la common law, ou encore en vertu de l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés ou du paragraphe 52(1) de la Loi constitutionnelle de 1982, pour rouvrir l'audience au terme de laquelle une mesure d'exclusion avait été prononcée, de façon à permettre à une personne de réclamer la protection du statut de réfugié au sens de la Convention. Notre Cour s'est appuyée sur l'affaire Gwala pour ensuite affirmer ce qui suit ([1999] A.C.T. no 839 (C.A.F.) paragraphe 14) :

... les agents d'immigration principaux n'ont pas compétence pour répondre à des questions juridiques ou constitutionnelles (Gwala c. Canada ...) ... et la Loi dispose expressément qu'ils n'ont pas compétence pour rouvrir une décision de renvoyer une personne du Canada .

(Je souligne)

En l'espèce, la Loi confère explicitement à un agent d'immigration la compétence pour rendre une décision sur l'admissibilité d'un demandeur au droit d'établissement au Canada. L'agent d'immigration avait donc compétence pour accorder ou refuser le droit d'établissement aux appelants.


Les appelants soumettent en second lieu que l'agent d'immigration, s'il a la compétence, ne s'est pas prononcé, comme l'exige l'alinéa 19(1)j) de la Loi, sur la question de savoir si les faits reprochés à l'un d'entre eux « aurait constitué, au Canada, une infraction au droit canadien en son état à l'époque de la perpétration » .

Nous pensons au contraire que devant le dossier tel que constitué, l'agent d'immigration pouvait, « pour des motifs raisonnables » , conclure à l'exclusion de l'un d'entre eux sur la base du second volet de l'alinéa 19(1)j) de la Loi.

La section du statut de réfugiés, dans les deux dossiers qu'elle rendit le 2 avril 1992 et le 12 mars 1997, et particulièrement dans la second où elle incorporait les notes de madame Diane Clement (Dossier d'appel p. 302 et suivantes) fait état du rôle joué par l'époux dans la police secrète du Guatemala de 1982 à 1986 où il s'était engagé volontairement. Il travaillait dans un département connu pour ses abus des droits de l'homme, des interrogatoires et des tortures. Il participait aux missions dans les montagnes et aux interrogatoires à la base militaire de Le Peten où les interrogatoires étaient très durs. Il a lui-même arrêté plusieurs personnes sachant qu'elles seraient interrogées et torturées et assistait aux interrogatoires au cours desquelles ces tortures étaient pratiquées.


Cet appelant n'était donc pas un témoin étranger aux faits qui se déroulaient devant lui.

L'agent d'immigration avait donc amplement de la preuve lui permettant de conclure qu'un des appelants était une personne visée à l'alinéa 19(1)j) de la Loi.

La question certifiée sera répondue par l'affirmative et l'appel sera rejeté avec dépens.

"Alice Desjardins"                            

j.c.a.


                                               

                   COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                               SECTION D'APPEL

Date : 20010406

Dossier : A-138-00

Entre :

RONY DANILO FIGUEROA

MARITZA JUDITH MORALES de FIGUEROA

HEIDY FIGUEROA-MORALES

ELSA MARITZA FIGUEROA-MORALES

                                                                               Appelants

ET

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                     Intimé

                                                                                                                      

                         MOTIFS DU JUGEMENT

                                    DE LA COUR

                                                                                                                      

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.