Date : 20171012
Dossier : A‑72‑17
Référence : 2017 CAF 206
[TRADUCTION FRANÇAISE]
CORAM : |
LE JUGE WEBB LE JUGE BOIVIN LE JUGE RENNIE
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ENTRE : |
FRASER LEISHMAN et GRAY GREENWAY |
appelants |
et |
SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA, représentée par LA MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT ET DU CHANGEMENT CLIMATIQUE et AGENCE PARCS CANADA |
intimés |
Audience tenue à Edmonton (Alberta), le 3 octobre 2017.
Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 12 octobre 2017.
MOTIFS DU JUGEMENT : |
LE JUGE BOIVIN |
Y ONT SOUSCRIT : |
LE JUGE WEBB LE JUGE RENNIE |
Date : 20171012
Dossier : A‑72‑17
Référence : 2017 CAF 206
CORAM : |
LE JUGE WEBB LE JUGE BOIVIN LE JUGE RENNIE
|
ENTRE : |
FRASER LEISHMAN et GRAY GREENWAY |
appelants |
et |
SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA, représentée par LA MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT ET DU CHANGEMENT CLIMATIQUE et AGENCE PARCS CANADA |
intimés |
MOTIFS DU JUGEMENT
LE JUGE BOIVIN
[1] Nous sommes saisis de l’appel d’un jugement du juge Locke de la Cour fédérale (le juge) rendu le 21 février 2017 (2017 CF 206) par lequel il tranchait deux requêtes jugées sur dossier.
I. Faits et procédures
[2] M. Fraser Leishman et M. Gray Greenway (les appelants) ont chacun un chalet dans le secteur du village de Waterton. Ils sont en désaccord au sujet d’une décision du surintendant du Parc national des Lacs‑Waterton (la décision de réinstallation) par laquelle il a choisi un nouvel emplacement pour le centre d’accueil. Le nouvel emplacement du centre d’accueil est dans le village de Waterton, tout près de l’entrée du terrain de camping Townsite. Les appelants ont pris connaissance de la décision de réinstallation peu après sa communication au public sur le site Internet de Parcs Canada le 7 mars 2016 (demande de contrôle judiciaire des appelants, dossier d’appel, vol. 1, onglet 3, à la page 21).
[3] Les appelants ont déposé une demande de contrôle judiciaire huit (8) mois plus tard, le 21 novembre 2016. Vu qu’ils avaient largement dépassé le délai de 30 jours imposé par la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F‑7, les appelants ont présenté une requête en prorogation de délai (dossier d’appel, vol. 1, onglet 5, à la page 45).
II. Requêtes devant le juge
[5] Le juge était saisi de deux requêtes. Les appelants ont déposé l’une des requêtes en prorogation de délai pour présenter une demande de contrôle judiciaire de la décision de réinstallation en dehors du délai de 30 jours. Ils demandaient également par leur requête la prorogation de délai en vue des futures étapes de leur demande, une ordonnance de production de documents et des dépens. Vu que les appelants avaient demandé d’autres mesures, notamment des ordonnances de prohibition, de déclaration et d’injonction, dans le cadre de leur demande de contrôle judiciaire au fond, Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par la ministre de l’Environnement et du Changement climatique et Agence Parcs Canada (les intimés), a présenté une requête en radiation de ces autres mesures. Vu que ces requêtes étaient étroitement imbriquées, le juge a décidé de les traiter par la même décision.
[6] Le juge a rejeté la requête des appelants en prorogation de délai pour présenter une demande de contrôle judiciaire. La requête en prorogation de délai ayant été rejetée, le juge n’a pas examiné les autres demandes qui faisaient partie de la requête des appelants. Le juge a accueilli la requête des intimés en vue de la radiation d’autres parties de la demande de contrôle judiciaire des appelants.
III. Analyse
[7] Dans le cadre du présent appel, les appelants soutiennent qu’ils ont soulevé la question de la nullité de la décision de réinstallation devant le juge, mais que ce dernier a omis d’y répondre. Ils interjettent également appel de la décision du juge quant aux deux requêtes. Ils soutiennent que le juge a commis une erreur dans son application du critère de Larkman pour une prorogation de délai, tel que défini dans Canada (Procureur général) c. Larkman, 2012 CAF 204, [2012] A.C.F. no 880 (QL) [Larkman] et qu’il a commis une erreur en accordant la requête des intimés en radiation d’autres parties de leur demande de contrôle judiciaire.
[8] En tranchant les deux requêtes, le juge a rendu des décisions relevant de son pouvoir discrétionnaire. L’examen de la décision discrétionnaire d’un juge est conforme à la norme de contrôle énoncée dans Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33, [2002] 2 R.C.S. 235, comme notre Cour l’a récemment décidé dans l’affaire Corporation de soins de la santé Hospira c. Kennedy Institute of Rheumatology, 2016 CAF 215, [2017] 1 R.C.F. 331.
[9] En ce qui concerne la question de la nullité, les appelants soutiennent que le délai de 30 jours ne s’applique pas à la décision de réinstallation parce que celle-ci ayant été prise en l’absence de l’équité procédurale requise, elle était nulle et non avenue. Les intimés ont soutenu que les appelants n’ont soulevé la question que de manière incidente devant le juge. Lors des débats devant notre Cour, l’avocat des appelants a confirmé que cette thèse n’était mentionnée que dans un seul paragraphe des représentations écrites qu’ils avaient présentées au juge. Il semble que les appelants n’ont pas insisté sur le moyen de nullité devant le juge, comme c’est le cas devant notre Cour.
[10] Néanmoins, même si les appelants avaient défendu le moyen de nullité devant le juge, je ne suis pas convaincu qu’ils auraient eu gain de cause. Dans la mesure où ils voulaient attaquer la décision de réinstallation du 7 mars 2016 au motif qu’elle était nulle, ils devaient tout de même convaincre le juge de proroger le délai de 30 jours imposé par la Loi sur les Cours fédérales. Le moyen tiré de la nullité aurait été examiné dans le cadre de l’analyse sommaire du fond menée par le juge selon les critères dans Larkman. De toute manière, le juge a donné raison aux appelants en ce qui concerne le facteur du critère de l’affaire Larkman portant sur le fondement. Pour ce qui est de l’opposition des appelants aux décisions éventuelles du surintendant de délivrer un permis d’aménagement ou un permis de construire conformément au plan communautaire (de Waterton), le moyen tiré de la nullité était tout simplement prématuré.
[11] Je suis également d’avis que le juge a suivi le critère décrit par notre Cour dans Larkman en matière de requêtes en prorogation de délai et qu’il n’a commis aucune erreur manifeste et dominante dans son application du critère. Il a correctement limité son analyse aux quatre facteurs de l’affaire Larkman. Il a également pris soin de ne pas effectuer l’analyse détaillée de la demande des appelants sur le fond. En réalité, l’erreur aurait consisté à effectuer cette analyse dans le cadre d’une requête. Je remarque au passage que, dans le cadre des représentations des appelants devant notre Cour, ils ont souvent discuté de leur demande de contrôle judiciaire sur le fond, mais le présent appel se limite à la décision du juge concernant les deux requêtes.
[12] Finalement, le juge ayant rejeté la requête des appelants en prorogation de délai, il a examiné la requête des intimés en radiation des demandes des appelants en prohibition, en déclaration et en injonction dans le cadre de leur demande de contrôle judiciaire. Il a conclu que les moyens invoqués par les appelants pour attaquer les décisions ultérieures que le surintendant pourrait prendre à l’avenir (les décisions éventuelles mentionnées au paragraphe 4 des présents motifs) étaient axés principalement sur les prétendus défauts de la décision de réinstallation et étaient donc [traduction] « fatalement compromis » dès lors que cette décision n’était plus en cause (motifs du juge, au paragraphe 32). Pour ce motif, le juge a accueilli la requête des intimés. Bien que je souscris à la manière dont le juge a tranché la requête des intimés, je suis d’avis qu’elle aurait plutôt dû être accueillie sur le fondement de la prématurité de la demande des appelants, qui sollicitaient des prohibitions, des déclarations et des injonctions.
[13] Sur ce dernier point, les appelants ont exprimé la préoccupation devant notre Cour selon laquelle la conclusion du juge se trouvant au paragraphe 32 pouvait être interprétée comme faisant obstacle à toute demande éventuelle. Je n’interprète pas ce paragraphe comme imposant un résultat si radical. Au contraire, je suis d’avis que le paragraphe 32 ne fait pas obstacle aux demandes de réparation dans l’éventualité où le surintendant prenne une autre décision administrative.
IV. Conclusion
[14] Pour ces motifs, je rejetterais l’appel avec dépens.
« Richard Boivin »
j.c.a.
« Je suis d’accord
Wyman W. Webb j.c.a. »
« Je suis d’accord
Donald J. Rennie j.c.a. »
COUR D’APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : |
A‑72‑17
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INTITULÉ : |
FRASER LEISHMAN et GRAY GREENWAY c. SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA, représentée par LA MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT ET DU CHANGEMENT CLIMATIQUE et AGENCE PARCS CANADA
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LIEU DE L’AUDIENCE : |
Edmonton (Alberta)
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DATE DE L’AUDIENCE : |
LE 3 OCTOBRE 2017
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MOTIFS DU JUGEMENT : |
LE JUGE BOIVIN
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Y ONT SOUSCRIT : |
LE JUGE WEBB LE JUGE RENNIE
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DATE : |
LE 12 OCTOBRE 2017 |
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COMPARUTIONS :
Kim Wakefield, c.r. Omolara Oladipo
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Pour les appelants
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Christine Ashcroft Cameron G. Regehr |
Pour les intimés
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
DENTONS CANADA S.E.N.C.R.L., s.r.l. Edmonton (Alberta)
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Pour les appelants
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Nathalie G. Drouin Sous‑procureure générale du Canada |
Pour les intimés
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