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Date : 20130425

Dossier : IMM-4569-12

Référence : 2013 CF 434

Ottawa (Ontario), le 25 avril 2013

En présence de Madame la juge Simpson

 

 

ENTRE :

 

XIAODONG CHEN

 

 

 

demandeur

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

 ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

           MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Xiaodong Chen [le demandeur] sollicite, en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, c 27 [la Loi], le contrôle judiciaire de la décision en date du 2 mai 2012 qu’une agente des visas de Citoyenneté et Immigration Canada [l’agente des visas] a rendue au Consulat général du Canada à Detroit [le Consulat], à l’effet de refuser la demande de résidence permanente présentée par le demandeur dans la catégorie de l’expérience canadienne [la décision].

 

[2]               Pour les motifs suivants, la demande sera rejetée.

Contexte

[3]               Le demandeur est un citoyen chinois âgé de 27 ans. Il est arrivé au Canada le 22 août 2005 en possession d’un visa d’étudiant, et il a étudié à l’Université de Windsor où il a obtenu un diplôme en administration des affaires et en informatique. Un permis de travail lui a été délivré, valide de mars 2010 à mars 2013.

 

[4]               Au mois de mars 2010, il a été engagé par une entreprise de parquets, Senlong (Canada) Wood Products Ltd. [Senlong]. Pendant un an, soit jusqu’au mois de mars 2011, le demandeur y a travaillé quatre jours par semaine, puis, de mars 2011 à juin 2011, il y a travaillé à temps plein.

 

[5]               Le 8 juin 2011, il a présenté une demande de résidence permanente fondée sur son expérience professionnelle chez Senlong, dans laquelle il a indiqué deux codes de la Classifications nationale des professions (CNP), à savoir le code 6233 – Acheteurs/acheteuses des commerces de gros et de détail et le code 6211 – Superviseurs/superviseures des ventes - commerce de détail. Il devait démontrer qu’il avait occupé ces postes pendant un an.

 

[6]               La directrice générale de Senlong, Mme Jessie Zhang [l’employeure], a signé une lettre datée du 3 juin 2011 [la lettre de l’employeure] à l’appui de la demande de visa, dans laquelle figurait une longue liste de fonctions accomplies par le demandeur. Il appert toutefois des notes de l’agente des visas que le 12 avril 2012, avant de rencontrer le demandeur, elle a joint l’employeure au téléphone et que cette dernière aurait simplement indiqué, au sujet du travail qu’exécutait le demandeur pour Senlong :

         qu’il était représentant commercial;

         qu’il s’occupait des plaintes des clients;

         qu’il aidait parfois au chargement et au déchargement des produits dans l’entrepôt.

Il va sans dire que cette description n’indiquait nullement qu’il était acheteur ou qu’il exerçait des fonctions de supervision. Autrement dit, l’employeure avait omis de mentionner à l’agente des visas la plupart des renseignements figurant dans sa lettre.

 

[7]               L’employeure a aussi mentionné ce qui suit à l’agente des visas :

            elle avait fourni de deux à trois mois de formation au demandeur;

           le demandeur touchait un salaire mensuel, habituellement par chèque, mais parfois en espèces;

 

            elle supervisait les employés de Senlong;

            Senlong comptait six employés, qu’elle a décrits ainsi :

o   deux vendeurs,

o   un comptable,

o   un directeur d’entrepôt,

o   un gestionnaire.

En présumant qu’en tant que directrice générale elle était la sixième employés, on constate qu’elle n’a mentionné ni acheteur ni superviseur du service à la clientèle.

 

[8]               L’entrevue du demandeur au Consulat canadien de Detroit a eu lieu le 12 avril 2012. L’agente des visas l’a alors informé qu’elle croyait qu’il avait uniquement exercé des fonctions de vendeur chez Senlong et elle lui a accordé 30 jours pour produire des documents supplémentaires à l’appui de sa demande.

[9]               Le demandeur a fourni de tels documents [les renseignements supplémentaires] dans le délai imparti, et il en sera question ci‑dessous. Malgré ces renseignements, toutefois, l’agente des visas a rejeté sa demande de résidence permanente le 2 mai 2012.

 

[10]           Au cours de l’entrevue, l’agente des visas avait pris des notes à la main et elles les avait transcrites dans le Système mondial de gestion des cas une vingtaine de minutes plus tard [les notes]. Le demandeur soutient que ces notes ne sont pas fiables, et qu’il faut leur préférer la preuve figurant dans un affidavit souscrit environ trois mois après l’entrevue.

 

[11]           Je ne puis accepter cet argument, et je suis d’avis que les notes sont la meilleure preuve des déclarations que le demandeur a faites au cours de l’entrevue. Trois raisons me font tirer cette conclusion : i) les notes manuscrites sont contemporaines de l’entrevue et ont été rapidement transcrites, ii) il n’a pas été allégué que l’agente des visas avait des raisons de mal rendre compte des déclarations du demandeur et iii) la fiabilité de la preuve soumise par le demandeur fait défaut à d’autres égards. Par exemple, l’employeure avait dit à l’agente des visas qu’elle avait donné de la formation au demandeur au Canada pendant deux ou trois mois, mais ce dernier a nié avoir reçu une telle formation. Il a plutôt indiqué qu’il avait reçu de la formation dans une usine de Senlong en Chine, mais l’employeure n’a fait aucune mention de cela lorsque lorsqu’elle a été questionnée au sujet de l’expérience du demandeur. Elle a indiqué en outre que le demandeur était payé par chèque et, parfois, en espèces, mais le demandeur a nié avoir jamais reçu de l’argent comptant.

 

[12]           La fiabilité des notes revêt une importance particulière parce que l’agente des visas y fait état de l’incapacité du demandeur de nommer ne serait‑ce qu’une entreprise auprès de laquelle il a fait des achats, lorsqu’elle l’a interrogé au sujet de ses fonctions d’acheteur chez Senlong, et que cela a beaucoup joué dans sa décision. Le demandeur affirme cependant que cela est faux et qu’il a pu nommer trois entreprises. Il conteste la fiabilité des notes parce qu’elles sont rédigées au passé dans la transcription alors qu’elles ont été prises pendant l’entrevue. J’estime toutefois que le changement du temps des verbes n’amoindrit pas l’exactitude des notes. Il est tout à fait raisonnable qu’un agent des visas écrive « il dit … » dans les notes prises à la main lors d’une entrevue et qu’il utilise « il a dit » dans la transcription, parce qu’alors les déclarations sont devenues choses du passé.

 

[13]           Le demandeur soutient aussi que l’agente des visas n’a pas attribué le poids qu’il fallait aux renseignements supplémentaires. Parmi ces renseignements, il y avait un affidavit en date du 25 avril 2012 souscrit par l’employeure [l’affidavit], qui s’y décrivait comme présidente de Senlong, mais qui avait signé la lettre de l’employeure en tant que directrice générale. L’affidavit comportait les déclarations suivantes :

         le titre du poste du demandeur était Acheteur adjoint/ Superviseur du service à la clientèle de gros;

         comme acheteur adjoint, il :

                                                                                i.            commandait les produits en transmettant des bons de commande aux fournisseurs, et les produits étaient livrés au magasin ou directement aux clients;

                                                                              ii.            contrôlait les stocks;

                                                                            iii.            lorsque les fournisseurs livraient des produits, il approuvait le montant à payer en apposant ses initiales sur le connaissement; des copies de connaissements ainsi paraphées étaient annexées [les connaissements];

                                                                            iv.            il secondait les vendeurs lorsque des clients de détail demandaient des rabais, parce que son approbation était requise;

         comme superviseur du service à la clientèle, il :

                                                                                i.            veillait au maintien de bonnes relations avec les fournisseurs et les clients;

                                                                              ii.            examinait les plaintes de clients après une installation;

                                                                            iii.            demandait à des professionnels indépendants de préparer des rapports au sujet de plaintes – un rapport d’inspection de parquet était annexé comme exemple [le rapport].

 

[14]           Ce qui est problématique au sujet de l’affidavit, c’est que les pièces jointes ne répondent pas aux préoccupations exposées par l’agente des visas. Le nom du demandeur figure aux connaissements à côté des mots « authorized signature », mais c’est le nom de Jenny Du qui figure à côté du mot « contact », et rien dans l’affidavit n’explique le rôle de celle‑ci en tant que contact ni les responsabilités du demandeur en tant que signataire.

 

[15]           Il appert du rapport que trois personnes étaient présentes à l’inspection :

         le propriétaire de la maison;

         Jenny Du, « Senlong »;

         le demandeur, « Service à la clientèle »

Encore une fois, cette pièce n’indique pas que le demandeur exerçait une fonction de supervision et elle ne départage pas les rôles respectifs du demandeur et de Mme Du.

 

[16]           Les renseignements supplémentaires comprenaient aussi des lettres non datées émanant de deux entreprises approvisionnant Senlong. La lettre de Fortune Gate Timber Products est rédigée en termes vagues, et indique que l’entreprise a souvent [traduction] « traité » et « interagi » avec le demandeur en tant qu’acheteur adjoint de Senlong, mais elle n’affirme nulle part clairement que ce dernier a effectué des achats de produits au nom de Senlong. Un bon de commande de Senlong en date du 12/10/2010 adressé à Fortune Gate Timber Products désigne toutefois Jenny Du comme « contact » de Senlong et le demandeur comme signataire autorisé. Cependant, ce document ne renseigne pas non plus sur les véritables responsabilités du demandeur, de sorte qu’il ne peut corroborer l’affidavit le décrivant comme « acheteur ».

 

[17]           On peut lire, dans la lettre de Biyuls Canada, que le demandeur [traduction] « passait des commandes ». Le problème est qu’aucun des bons de commande n’est annexé à l’affidavit.

 

[18]           Dans ces circonstances, j’estime qu’il était raisonnable pour l’agente des visas de conclure que les renseignements supplémentaires n’étaient pas suffisants pour apaiser ses doutes.

 

[19]           Aucune question n’a été proposée pour certification en vertu de l’alinéa 74d) de la Loi.


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que :

la demande soit rejetée.

 

 

« Sandra J. Simpson »

Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-4569-12

 

INTITULÉ :                                      XIAODONG CHEN c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 11 mars 2013

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE:                       Mme la juge SIMPSON

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 25 avril 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

 

Raoul Boulakia

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Laoura Christodoulides

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Raoul Boulakia

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

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