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Date : 20131113


Dossier :

IMM-11305-12

 

Référence : 2013 CF 1150

[traduction FRANÇAISE certifiée, non révisée]

Ottawa (Ontario), le 13 novembre 2013

En présence de monsieur le juge O’Reilly

 

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

demandeur

et

EMRE TOKTOK

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Aperçu

[1]               En 2012, un tribunal de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que M. Emre Toktok devait obtenir le statut de réfugié au Canada, parce qu’il craignait d’être persécuté en raison de sa religion et de son appartenance ethnique en Turquie. La Commission a aussi conclu que M. Toktok ne devait pas être exclu du statut de réfugié même si, en 2009, un tribunal turc l’a condamné par contumace pour avoir émis un chèque frauduleux.

 

[2]               Le demandeur, le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, soutient que la conclusion de la Commission concernant la question de l’exclusion était déraisonnable. Le ministre allègue que la Commission aurait dû conclure qu’il y avait « des raisons sérieuses de penser » que M. Toktok avait commis un « crime grave de droit commun » et que, par conséquent, il aurait dû être exclu en application de l’alinéa b) de la section F de l’article premier de la Convention relative au statut des réfugiés. Le ministre me demande d’annuler la décision de la Commission et d’ordonner qu’un autre tribunal de la Commission examine à nouveau la demande de M. Toktok.

 

[3]               Je ne trouve aucun motif d’infirmer la décision de la Commission. La Commission avait de bonnes raisons de douter de l’authenticité du casier judiciaire turc. Par conséquent, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[4]               La seule question litigieuse est de savoir si la décision de la Commission concernant l’exclusion était déraisonnable.

 

II.        Décision de la Commission

[5]               La Commission a conclu que M. Toktok était crédible. Son allégation de persécution n’est pas contestée.

 

[6]               Le ministre a fourni à la Commission le casier judiciaire de 2009 de M. Toktok. Ce dernier avait été déclaré coupable d’avoir émis un chèque frauduleux le 30 décembre 2008, même s’il avait quitté la Turquie neuf jours auparavant. Néanmoins, les parties ont convenu de l’authenticité du casier judiciaire et la Commission a conclu à son authenticité.

 

[7]               Vu le casier judiciaire, la question qui se posait alors était de savoir s’il y avait des raisons sérieuses de penser que M. Toktok était coupable. La Commission a accepté l’allégation de M. Toktok selon laquelle les accusations avaient été fabriquées de toutes pièces par ses persécuteurs en Turquie et elle a noté que le pouvoir judiciaire en Turquie était « très corrompu » (citation de la décision Altun c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1034).

 

III.       La décision de la Commission concernant l’exclusion était-elle déraisonnable?

[8]               Le ministre allègue que l’appréciation faite par la Commission de la crédibilité de M. Toktok n’était pas un motif valide de refus de l’authenticité de son casier judiciaire. En fait, il n’y avait pas de preuve que le document était le fruit d’une collusion ou d’une corruption. Il n’y avait pas non plus de raison de croire qu’il avait été interdit à M. Toktok de se défendre contre l’accusation portée contre lui ou d’interjeter appel de la condamnation.

 

[9]               Selon moi, il était loisible à la Commission d’aller au‑delà du casier judiciaire pour évaluer s’il y avait des preuves établissant que M. Toktok avait réellement commis un crime grave de droit commun. La Commission a relevé que le chèque prétendument frauduleux avait été émis après que M. Toktok fut arrivé au Canada; qu’il n’en avait tiré aucun avantage; qu’aucun mandat d’arrêt ou mandat Interpol n’avait été lancé contre lui; que la condamnation était cohérente avec son allégation selon laquelle il avait été persécuté par la police turque; qu’il avait volontairement révélé l’existence de la condamnation à la Commission; que la preuve documentaire confirmait que le système judiciaire turc était corrompu; et que, parce que les procédures ont eu lieu par contumace, M. Toktok n’avait pas eu l’occasion de se défendre.

 

[10]           Dans de telles circonstances, la Commission avait l’obligation d’évaluer si la condamnation était authentique (Altun, précitée; Hernandez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1323).

 

[11]           Vu la preuve dont elle disposait, je conclus que la décision de la Commission appartenait aux issues possibles acceptables au regard des faits et du droit. Elle n’était pas déraisonnable.

 

IV.       Conclusion

[12]           La Commission a adéquatement apprécié toute la preuve dont elle disposait, notamment le casier judiciaire, lorsqu’elle a déterminé s’il existait des raisons sérieuses de penser que M. Toktok avait commis un crime grave de droit commun. La conclusion de la Commission selon laquelle M. Toktok ne devait pas être exclu de la protection accordée aux réfugiés n’était pas déraisonnable, vu les circonstances. Par conséquent, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Aucune des parties n’a proposé de question de portée générale pour que je la certifie, et aucune n’est énoncée.

 


LA COUR STATUE que :

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Aucune question de portée générale n’est énoncée.

 

 

 

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Laurence Endale

 



COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :

                              IMM-11305-12

 

INTITULÉ :

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

                              c

                              EMRE TOKTOK

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             LE 8 OCTOBRE 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE O’REILLY

DATE DU JUGEMENT

ET DES MOTIFS :                           LE 13 NOVEMBRE 2013

COMPARUTIONS :

 

A. Lina Jaakimainen

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Lina Anani

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Lina Anani

Avocate

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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