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Cour fédérale

 

Federal Court

                                                                                                                           

 


Date : 20130726

Dossier : IMM-5205-12

Référence : 2013 CF 823

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 26 juillet 2013

En présence de madame la juge Strickland

 

 

Entre :

 

IQBAL KHOWAJA

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION DU CANADA

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

 MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La Cour est saisie d’une demande présentée conformément au paragraphe 72(1) de la Loi sur l’Immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR), en vue d’obtenir le contrôle judiciaire de la décision par laquelle un agent des visas (l’agent) du haut-commissariat du Canada à Londres, au Royaume-Uni, rejetait la demande de résidence permanente au Canada présentée par le demandeur à titre de membre de la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral).

 

 

[2]               Le demandeur est Pakistanais. Il a présenté une demande de résidence permanente au Canada sous la Classification nationale des professions (la CNP) 0213 : gestionnaire des systèmes informatiques. L’agent a énoncé, dans une lettre de refus datée du 25 avril 2012, que le demandeur n’avait pas établi qu’il exerçait toutes les fonctions essentielles et une partie appréciable des fonctions principales figurant dans la classification de la CNP 0213. Par conséquent, sa demande ne pouvait pas être traitée. Le présent contrôle judiciaire porte sur cette décision.

 

La décision faisant l’objet du présent contrôle

[3]               La décision en l’espèce est constituée de la lettre de refus susmentionnée et des motifs de décision qui se trouvent dans les notes du Système mondial de gestion des cas (le SMGC) prises par l’agent. Il est bien établi que les notes du SMGC font partie des motifs d’un agent des visas (Ghirmatsion c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2011 CF 519, [2011] ACF No 650 (QL) [Ghirmatsion], au paragraphe 8; Taleb c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 384, [2012] ACF No 650 (QL) [Taleb], au paragraphe 25; Rezaeiazar c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 761, [2013] ACF No 804 (QL) [Rezaeiazar], aux paragraphes 58 et 59; Anabtawi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 856, [2012] ACF No 923 (QL) [Anabtawi], au paragraphe 10).

 

[4]               La lettre de refus suit une formule uniformisée. L’extrait pertinent en est le suivant :

[traduction]

Bien que le code de la CNP corresponde à la profession qui figure dans les instructions, les principales tâches que vous avez énumérées n’indiquent pas que vous exerciez toutes les fonctions essentielles et une partie appréciable des fonctions principales énoncées dans les descriptions des professions de la CNP. Je ne suis par conséquent pas convaincu que vous êtes un 0213 Gestionnaires des systèmes informatiques.

 

Comme vous n’avez pas fourni de preuves suffisantes de l’expérience professionnelle que vous avez acquise dans l’une des professions énumérées, vous ne répondez pas aux exigences des Instructions ministérielles et votre demande ne peut pas être traitée.

 

[5]               Les notes du SMGC contiennent notamment ce qui suit :

[traduction]

Les renseignements présentés à l’appui de la demande ne sont pas suffisants pour confirmer que le client satisfait à la description de la profession ou à une partie appréciable des fonctions principales de la CNP 0213. Le client a présenté une lettre de recommandation de son employeur TRG au Pakistan. La lettre décrit le client comme un gestionnaire de projet, direction de la saisie et du traitement de données. Aucune explication fournie au sujet du caractère des projets auxquels le client a participé. Aucune responsabilité en matière de budget ou de recrutement d’analystes, d’ingénieurs, de programmeurs n’est mentionnée, seulement l’embauche de superviseurs et d’employés dans les équipes de saisie et de traitement de données, qui semblent être des employés qui ne font que saisir les données dans les bases de données. La description de poste fournie ressemble plutôt à celle de superviseur à la saisie de données, au sens de la CNP 1211. Compte tenu des préoccupations susmentionnées, je ne suis pas convaincu que le client a acquis un an d’expérience pour la CNP 0213. En fonction des renseignements au dossier, je ne suis pas convaincu que le client a exercé les fonctions décrites à la CNP 0213.

 

 

Les questions en litige

[6]               Bien que le demandeur ait relevé quatre questions dans ses observations, à mon avis, les questions en litige se résument ainsi :

1.             L’agent a-t-il commis une erreur dans l’appréciation qu’il a faite de l’expérience professionnelle du demandeur?

2.             L’agent a-t-il manqué à son obligation d’équité procédurale envers le demandeur?

 

La norme de contrôle

[7]               Il n’est pas nécessaire d’effectuer dans chaque cas une analyse relative à la norme de contrôle si la jurisprudence établit de manière satisfaisante la norme de contrôle à appliquer (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190 [Dunsmuir]). La jurisprudence a établi que la norme de contrôle qui s’applique à l’appréciation qu’un agent fait de la preuve présentée à l’appui d’une demande de résidence permanente dans la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral) est la décision raisonnable. Cette norme s’applique aussi à l’application du document de la CNP à la preuve (Bazaid c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 17, [2013] ACF No 39 (QL), au paragraphe 36; Gulati c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 451, [2010] ACF No 771 (QL), aux paragraphes 17 et 18; Taleb c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 384, [2012] ACF No 400 (QL), aux paragraphes 19 et 20; Kamchibekov c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1411, [2011] ACF No 1782 (QL) [Kamchibekov], au paragraphe 12).

 

[8]               Dans Anabtawi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 856, [2012] ACF No 923, au paragraphe 29, le juge O’Keefe a conclu que, lorsqu’on examine si un agent a appliqué le critère juridique approprié pour l’appréciation de l’expérience de travail d’un demandeur, la norme de contrôle applicable est la décision raisonnable, citant l’arrêt Smith c Alliance Pipeline Ltd, 2011 CSC 7, [2011] 1 RCS 160, au paragraphe 26, dans lequel la Cour suprême du Canada a conclu que la norme de la décision raisonnable s’applique aux questions qui se rapportent à l’interprétation de la loi habilitante du tribunal administratif ou à une loi étroitement liée à son mandat.

 

[9]               Le caractère adéquat des motifs ne permet plus à lui seul de casser une décision, mais il est intégré à l’analyse de la raisonnabilité de la décision en entier. La cour de révision ne doit pas substituer ses propres motifs à ceux de la décision sous examen, mais peut toutefois, si elle le juge nécessaire, examiner le dossier pour apprécier le caractère raisonnable du résultat. Les motifs répondent aux critères établis dans Dunsmuir s’ils permettent à la cour de révision de comprendre le fondement de la décision du tribunal et de déterminer si la conclusion fait partie des issues possibles acceptables.

 

[10]           Par conséquent, la norme de contrôle applicable à la première question en litige est celle de la décision raisonnable.

 

[11]           La jurisprudence a établi que la question de savoir si un agent des visas devrait faire part de ses préoccupations au demandeur et lui donner l’occasion d’y répondre est une question d’équité procédurale qui est assujettie à la norme de la décision correcte (Kamchibekov, précité; Obeta c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1542, [2012] ACF No 1624 (QL), au paragraphe 14). Lorsque la Cour examine une question d’équité procédurale, son devoir est de déterminer si le processus suivi par le décideur répond au degré d’équité requis dans les circonstances : voir Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339, au paragraphe 43. Par conséquent, la norme de contrôle applicable à la deuxième question en litige est la décision correcte.

 

Analyse

[12]           Les articles 75 à 85 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement) régissent la catégorie des travailleurs qualifiés. Le paragraphe 75(2) prévoit les trois exigences auxquelles le demandeur doit satisfaire pour relever de cette catégorie. Essentiellement, un travailleur qualifié est un étranger qui possède au moins un an d’expérience de travail pour un code de la CNP au cours de la période de 10 ans précédant la demande de résidence permanente (alinéa 75(2)a)). De plus, pendant cette période d’emploi, il doit avoir exercé les tâches décrites dans l’énoncé principal pour la profession établi dans la CNP (alinéa 75(2)d)), et doit avoir exercé une partie appréciable des fonctions principales de la profession établies dans la CNP, y compris toutes les fonctions essentielles (alinéa 75(2)c)). Les dispositions légales applicables en l’espèce se trouvent dans l’annexe à la fin de la décision.

 

[13]           L’énoncé principal de la CNP 0213 établit que :

Les gestionnaires de systèmes informatiques planifient, organisent, dirigent, contrôlent et évaluent les activités d’organisations qui analysent, conçoivent, mettent au point, mettent en exploitation, font fonctionner et administrent des logiciels informatiques et de télécommunications, des réseaux et des systèmes informatiques. Ils travaillent dans les secteurs public et privé.

 

[14]           Les fonctions principales sont décrites ainsi :

Les gestionnaires de systèmes informatiques exercent une partie ou l’ensemble des fonctions suivantes :

 

         planifier, organiser, diriger, contrôler et évaluer les activités des services et entreprises s’occupant de systèmes informatiques et de traitement électronique de l’information;

         élaborer et mettre en œuvre des politiques et des procédures visant les opérations et le développement des systèmes de traitement électronique des données;

         rencontrer les clients pour discuter des caractéristiques des systèmes, des exigences, des coûts et des échéanciers;

         former et gérer des équipes de spécialistes en informatique pour concevoir, mettre au point, mettre en exploitation, faire fonctionner et administrer des logiciels informatiques et de télécommunications, des réseaux et des systèmes informatiques;

         contrôler le budget et les dépenses d’un service, d’une entreprise ou d’un projet;

         recruter et surveiller des analystes, ingénieurs et techniciens en informatique, des programmeurs et d’autres employés, et assurer leur perfectionnement professionnel et leur formation.

 

[15]           Bien qu’il ne l’ait pas clairement déclaré, le demandeur semble soutenir que l’agent a appliqué le mauvais critère lorsqu’il a appliqué les exigences de la CNP 0213 à la preuve que le demandeur avait fournie. En particulier, le demandeur conteste le fait que la lettre de refus précise que le demandeur n’a pas établi qu’il avait exercé [traduction] « toutes les fonctions essentielles et une partie appréciable des fonctions principales », alors que cela ne pouvait pas être le critère approprié parce que la CNP 0213 ne comprend aucune fonction essentielle. Elle ne comprend qu’un énoncé principal et les fonctions principales de la profession.

 

[16]           La lettre de refus doit être examinée dans le contexte des notes du SMGC qui, comme je l’ai mentionné, font partie des motifs de l’agent. Les notes du SMGC précisent que les renseignements présentés par le demandeur étaient insuffisants pour confirmer qu’il satisfaisait à la description de la profession ou à une partie appréciable des fonctions principales de la CNP 0213. De plus, il est écrit dans les notes que la lettre fournie par The Resource Group (la lettre de TRG), l’employeur du demandeur, ne donne aucune explication [traduction] « au sujet du caractère des projets auxquels le [demandeur] a participé ». Dans ses notes du SMGC, l’agent conclut que, compte tenu des renseignements fournis, il n’était pas convaincu que le demandeur avait exercé les tâches précisées dans la CNP 0213.

 

[17]           Les notes du SMGC établissent que l’agent a appliqué les exigences de la CNP appropriées, c’est-à-dire de déterminer si le demandeur a exercé les tâches décrites dans le code de profession (l’énoncé principal) et une partie appréciable des fonctions principales.

 

[18]           Le demandeur soutient que l’agent a commis une erreur en déclarant qu’il n’avait pas fourni de renseignements au sujet du [traduction] « caractère » des projets auxquels il avait participé et que, par conséquent, l’agent avait importé un nouvel élément inapplicable aux critères des travailleurs qualifiés (fédéral). Comme je l’ai mentionné, je ne suis pas du même avis. L’agent a simplement expliqué qu’en ne décrivant pas la nature des projets, le demandeur n’avait pas fourni suffisamment de renseignements pour permettre à l’agent de déterminer le [traduction] « caractère véritable » de l’emploi occupé par le demandeur et si ce dernier satisfaisait à l’énoncé principal.

 

[19]           Le demandeur soutient que l’utilisation du terme « appréciable » à l’alinéa 75(2)c), c’est‑à-dire qu’il a exercé une partie appréciable des fonctions principales de la CNP, entraîne une incertitude quant à la question de savoir si la CNP exige qu’il ait exercé « une partie ou l’ensemble » des fonctions principales. À son avis, le résultat est que la décision est déraisonnable. Le demandeur se fonde sur la décision A’Bed c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2002] ACF No 1347 (QL) [A’Bed], à l’appui de cet argument.

 

[20]           Je conviens que la décision A’bed, précitée, et pertinente parce qu’elle conclut que l’expression « une partie ou l’ensemble » l’emporte sur le langage plus général au sujet d’une « partie appréciable » des fonctions principales et qu’« une partie » signifie plus qu’un. Par conséquent, il a été conclu qu’il est erroné pour un agent des visas d’exiger que le demandeur ait exercé la majorité des fonctions principales lorsque la description de la CNP pertinente ne demande de l’expérience que dans une partie ou l’ensemble des fonctions principales (Dahyalal c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 666, [2007] ACF No 898 (QL) [Dahyalal], au paragraphe quatre). Je ne suis pas d’avis que le libellé de l’alinéa 75(2)c) et celui de la CNP sont suffisants pour conclure que la décision est déraisonnable. La jurisprudence a interprété de façon satisfaisante l’application de ces dispositions.

 

[21]            La question à trancher est celle de savoir si l’agent a raisonnablement appliqué les exigences de la CNP à la preuve du demandeur. Comme le juge Phelan l’a déclaré dans la décision Rodrigues c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 111, [2009] ACF No 114, au paragraphe 10, « le rôle de l’agente des visas consiste en fait à déterminer le caractère véritable du travail exercé par le demandeur ». Il incombe au demandeur de fournir suffisamment de documents justificatifs (Ismaili c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 351, [2012] ACF No 381 (QL), au paragraphe 18; Mihura Torres c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 818, [2011] ACF No 1022 (QL), au paragraphe 37).

 

[22]           À cet égard, le demandeur a déposé un affidavit daté du 18 juillet 2012 à l’appui du présent contrôle judiciaire. Au paragraphe 13 de cet affidavit, il déclare que [traduction] « j’ai besoin d’expliquer en détail ce que la lettre de recommandation de TRG signifiait en ce qui a trait aux tâches qui y sont mentionnées ». Les paragraphes 14 à 24 et le paragraphe 39 de l’affidavit portent sur cette question. Ces explications ne font pas partie du dossier dont l’agent était saisi.

 

[23]           La portée de la preuve admissible en contrôle judiciaire se limite aux documents dont le décideur était saisi. Des preuves supplémentaires ne peuvent être présentées que pour des questions d’équité procédurale et de compétence (Tabanag c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1293, [2011] ACF No 1575 (QL) [Tabanag]), au paragraphe 14. Au paragraphe 15 de Tabanag, le juge Mosley a écrit :

[15]      La preuve contestée n’est pas admissible dans la présente instance pour soutenir l’allégation du demandeur selon laquelle il remplissait les exigences de la CNP lorsqu’il a soumis sa demande dans la catégorie des travailleurs qualifiés. Plus précisément, le demandeur ne peut s’appuyer sur les affirmations contenues dans les affidavits au sujet de ses responsabilités professionnelles ou de la réticence des employeurs de Manille à délivrer des attestations d’emploi. La preuve par affidavit est uniquement admissible pour étayer l’argument selon lequel l’évaluation de sa demande était inéquitable.

 

[24]           En l’espèce, le demandeur a mentionné souvent son affidavit et s’est largement fondé sur celui-ci à l’appui de ses observations écrites. Cependant, je conviens avec le défendeur que les paragraphes 13 à 24 et le paragraphe 39 ne sont pas admissibles parce qu’ils ne traitent pas d’une question d’équité procédurale, mais qu’ils visent plutôt à soutenir la déclaration du demandeur selon laquelle il satisfait aux exigences de la CNP. Je note aussi que les paragraphes 40 à 50 sont principalement composés d’arguments.

 

[25]           Le demandeur soutient aussi que l’agent n’a pas examiné, ou raisonnablement examiné, les tâches qu’il avait exercées par rapport à la CNP.

 

[26]           La lettre de TRG établit que le demandeur a été employé à titre de gestionnaire de projet dans la direction de la saisie et du traitement de données, de septembre 2006 à février 2009. La lettre décrit ses responsabilités comme suit :

         Gestion de projets de saisie et de traitement de données à divers endroits.

         Planifier, diriger et organiser les projets de saisie et de traitement de données.

         Préparer des politiques et des procédures pour les projets de saisie et de traitement de données.

         Superviser et évaluer les projets de saisie de données, établir les besoins des clients et assurer que les projets satisfont aux attentes.

         Contrôler la productivité de l’équipe.

         Rencontrer les clients afin de discuter de leurs besoins en matière de projets de saisie de données et contrôler la progression des équipes.

         Travailler en collaboration avec les équipes de technologie de l’information afin de discuter des exigences en matière de matériel pour les projets de saisie de données et de résoudre des problèmes.

         Préparer des factures pour les projets en collaboration avec le service des finances.

         Superviser la formation des équipes pour les projets de saisie de données.

         Recruter des superviseurs et des équipes de saisies et de traitement de données en collaboration avec le service d’embauche.

         Gérer la rotation des quarts de travail.

         Vérifier la qualité des données fournies par les équipes.

 

[27]           Les notes du SMGC établissent que l’agent a mentionné la lettre de TRG. La lettre était la seule preuve présentée à l’appui de l’allégation du demandeur selon laquelle il satisfaisait à la description de la profession, y compris à l’énoncé principal, de la CNP 0213. En l’absence de renseignements supplémentaires, y compris des renseignements qui auraient pu être dérivés de la description des fonctions principales, qui portaient sur la nature véritable du poste qu’occupait le demandeur et, compte tenu du titre du demandeur lorsqu’il travaillait pour TRG, il n’était pas déraisonnable pour l’argent de conclure que cela n’étayait pas l’allégation selon laquelle son poste était un poste de gestionnaire des systèmes informatiques décrit dans l’énoncé principal de la CNP 0213, comme l’exige l’alinéa 75(2)b).

 

[28]           La description des responsabilités du demandeur dans la lettre de TRG place ses responsabilités presque exclusivement dans le contexte de projets de traitement des données. Cela n’aide pas le demandeur à établir que son poste était un poste de gestionnaire des systèmes informatiques et qu’il planifiait, organisait, dirigeait, contrôlait et évaluait les activités d’organismes qui analysent, conçoivent, élaborent, mettent en œuvre, opèrent et administrent des logiciels, des réseaux et des systèmes informatiques et de télécommunications.

 

[29]           Les notes du SMGC montrent aussi que, bien que la lettre de TRG décrive le demandeur comme un gestionnaire de projet dans la direction de la saisie et du traitement des données, aucune explication n’y est fournie quant au caractère des projets auxquels le demandeur a participé. Comme je l’ai mentionné, en ne décrivant pas le caractère de ces projets, le demandeur ne fournit pas suffisamment de renseignements à l’agent pour permettre à ce dernier de déterminer si le poste que le demandeur occupait satisfait à l’énoncé principal.

 

[30]           L’agent a aussi noté que la lettre de TRG ne mentionnait pas de responsabilité quant au budget ou au recrutement d’analystes, d’ingénieurs ou de programmeurs en TI. En fait, la lettre ne mentionnait que l’embauche de superviseurs et d’équipes de saisie et de traitement des données, qui semblent être des employés et qui n’ont pour tâche que la saisie de données dans des bases de données. L’agent a ensuite déclaré que la description du poste fournie ressemble plutôt à la description de superviseur à la saisie de données, sous la CNP 1211. Compte tenu de ce qui précède, l’agent n’était pas convaincu que le demandeur avait exercé les fonctions précisées dans la CNP 0213.

 

[31]           Comme les principales responsabilités du demandeur établies dans la lettre de TRG se limitent à l’exercice de ces responsabilités dans le cadre de projets de traitement de données, et comme il n’avait aucune explication au sujet du caractère de ce projet, l’agent a raisonnablement conclu que le demandeur ne s’était pas acquitté du fardeau d’établir qu’il avait exercé une partie appréciable des fonctions principales de la CNP 0213.

 

[32]           Le demandeur soutient qu’il a été privé de l’équité procédurale parce que l’agent ne lui a pas fait part de ses préoccupations. Le juge Mosley a traité de cette question dans la décision Hassani c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1283, [2006] ACF No 1597 (QL) [Hassani], au paragraphe 24 :

24 Il ressort clairement de l’examen du contexte factuel des décisions mentionnées ci-dessus que, lorsque les réserves découlent directement des exigences de la loi ou d’un règlement connexe, l’agent des visas n’a pas l’obligation de donner au demandeur la possibilité d’y répondre. Lorsque, par contre, des réserves surgissent dans un autre contexte, une telle obligation peut exister. C’est souvent le cas lorsque l’agent des visas a des doutes sur la crédibilité, l’exactitude ou l’authenticité de renseignements fournis par le demandeur au soutien de sa demande, comme dans Rukmangathan, ainsi que dans John et Cornea, deux décisions citées par la Cour dans Rukmangathan, précitée.

 

[33]           En l’espèce, la crédibilité du demandeur n’avait pas été mise en doute et les préoccupations de l’agent découlaient directement des exigences de la LIPR et de son Règlement. En particulier, les préoccupations de l’agent portaient sur la question de savoir si les renseignements présentés par le demandeur étaient suffisants pour établir qu’il satisfaisait aux exigences légales et réglementaires. Par conséquent, l’agent n’avait aucune obligation de soulever ses préoccupations auprès du demandeur et le demandeur n’a pas été privé de l’équité procédurale (Shah c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2011 CF 697, [2011] ACF N896 (QL), aux paragraphes 30 à 32; Gulati c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 451, [2010] ACF No 771 (QL), au paragraphe 43; Hosseini c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 766, [2013] ACF No 814 (QL), au paragraphe 38; Hassani, précitée).

 

[34]           Le demandeur soutient aussi que les motifs que l’agent a fournis dans sa décision sont inadéquats.

 

[35]           La mention que l’agent a faite dans sa lettre de refus quant au fait de devoir exercer les fonctions essentielles était une erreur parce que la CNP 0213 ne mentionne aucune fonction essentielle. De plus, la lettre ne mentionne pas la conclusion qui se trouve dans les notes du SMGC selon laquelle les renseignements présentés n’étaient pas suffisant pour établir que le demandeur satisfaisait à la description de la profession. La lettre semble aussi laisser entendre que sa demande visait d’autres professions en plus de la CNP 0213, alors que ce n’était pas le cas.

 

[36]           Il convient de rappeler que les agents des visas examinent des milliers de demandes semblables et y répondent. Il est tout simplement impossible de s’attendre à ce que des motifs détaillés soient rendus en réponse à chaque demande qui est refusée. Comme je l’ai déjà mentionné, les agents utilisent des lettres dont la formule est uniformisée et leurs motifs sont souvent complétés par les notes du SMGC (Rezaeiazar, Ghirmatsion, Taleb, Anabtawi, précitées).

 

[37]           De plus, il faut accorder un degré élevé de retenue aux décisions d’un agent des visas qui examine une demande dans la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral) (Chen c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1279, [2011] ACF No 1279 (QL), au paragraphe 7).

 

[38]           Bien que les motifs soient brefs et quelque peu imprécis, il faut aussi tenir compte du fait que la décision faisant l’objet du présent contrôle judiciaire est une décision quant à l’admissibilité qui a été rendue par un agent des visas et qui se situe vers l’extrémité inférieure du registre en ce qui a trait à l’équité procédurale. Comme le juge Pinard l’a écrit dans la décision Kamchibekov, précitée, au paragraphe 23 :

[23]      De plus, la Cour d’appel fédérale, dans l’arrêt Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration c. Patel, 2002 CAF 55, au paragraphe 10, confirme que la teneur du devoir d’équité auquel est astreint un agent des visas se situe vers l’extrémité inférieure du registre (voir aussi Nodijeh, au paragraphe 3; Dash c. Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2010 CF 1255, au paragraphe 7 [Dash]; Fargoodarzi c. Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2008 CF 90, au paragraphe 12 [Fargoodarzi]). Plus précisément, dans le contexte de la décision d’un agent des visas à propos d’une demande de résidence permanente, l’obligation d’équité est relativement peu rigoureuse et facile à satisfaire « en l’absence d’un droit à la résidence permanente reconnu par la loi, du fait qu’il revient [au demandeur] d’établir son admissibilité et du fait des conséquences moins graves sur [celui-ci] que n’a en général la décision, en comparaison de la suppression d’un avantage et de la nécessité pour l’État de maîtriser les coûts de l’administration » (Fargoodarzi, au paragraphe 12). Le demandeur n’a droit à rien de plus qu’une mention de la part de l’agent des visas au sujet des éléments de preuve sur lesquels sa décision a été fondée (Dash, au paragraphe 29).

 

[39]           De plus, en ce qui a trait au caractère suffisant des motifs, dans la décision Dash c (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1255, [2010] ACF No 1565 (QL), on s’est fié aux notes du STIDI (l’ancienne version des notes du SMGC actuel) pour compléter les motifs d’une lettre de refus :

[27]      Je ne peux être d’accord avec la demanderesse quand elle affirme que ces motifs sont insuffisants. Il est bien établi en droit que le niveau d’équité procédurale auquel les demandeurs de visa ont droit se situe à l’extrémité inférieure du registre (Pan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 838, au paragraphe 26, Chiau c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] 2 C.F. 297, [2000] A.C.F. no 2043 (QL) (C.A.), au paragraphe 41). Il a été statué que les notes du STIDI constituent des motifs adéquats si elles fournissent suffisamment de détails pour permettre au demandeur de savoir pourquoi la demande a été refusée (Bhandal c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 427, 147 A.C.W.S. (3d) 474, au paragraphe 18).

 

[40]           Le demandeur n’a pas fourni une preuve suffisante quant au détail des projets de traitement des données sur lesquels il a travaillé (c’est-à-dire le [traduction] « caractère » des projets) et, compte tenu des détails qu’il a fournis, il n’était pas clair si sa description de poste concordait réellement à l’énoncé principal ou aux fonctions principales de la CNP 0213. Par conséquent, bien que les fonctions détaillées dans la lettre de TRG semblent coïncider avec une partie des fonctions principales de la CNP, en l’absence de clarté sur le caractère des projets de traitement de données et sur le poste du demandeur à titre de gestionnaire du traitement des données, l’agent a raisonnablement conclu qu’il n’y avait pas suffisamment de renseignements pour confirmer que le demandeur était un gestionnaire des systèmes informatiques.

 

[41]           Les motifs établis dans la lettre de refus sont loin d’être parfaits et l’agent aurait certainement pu mieux utiliser la lettre type, ce qu’il aurait dû faire. Cependant, en fin de compte, la lettre établit bien que, comme le demandeur n’a pas fourni des preuves satisfaisantes qu’il possédait l’expérience de travail requise, sa demande ne pouvait pas être traitée. Le demandeur savait donc pourquoi sa demande a été rejetée (Kamchibekov, précitée, aux paragraphes 19 à 24) et rien de plus n’était requis de la part de l’agent. Il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale et la décision de l’agent était raisonnable.


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question de portée générale à certifier n’a été proposée et aucune n’est soulevée.

 

 

« Cecily Y. Strickland »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme,

Evelyne Swenne, traductrice-conseil

 


ANNEXE

 

Les dispositions de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27, qui s’appliquent en l’espèce sont les suivantes :

 (1) Le présent article s’applique aux demandes de visa et autres documents visées au paragraphe 11(1) — sauf à celle faite par la personne visée au paragraphe 99(2) —, aux demandes de parrainage faites par une personne visée au paragraphe 13(1), aux demandes de statut de résident permanent visées au paragraphe 21(1) ou de résident temporaire visées au paragraphe 22(1) faites par un étranger se trouvant au Canada, aux demandes de permis de travail ou d’études ainsi qu’aux demandes prévues au paragraphe 25(1) faites par un étranger se trouvant hors du Canada.

 

Atteinte des objectifs d’immigration

 

(2) Le traitement des demandes se fait de la manière qui, selon le ministre, est la plus susceptible d’aider l’atteinte des objectifs fixés pour l’immigration par le gouvernement fédéral.

 

 

 

 

Instructions

 

(3) Pour l’application du paragraphe (2), le ministre peut donner des instructions sur le traitement des demandes, notamment des instructions :

 

a) prévoyant les groupes de demandes à l’égard desquels s’appliquent les instructions;

a.1) prévoyant des conditions, notamment par groupe, à remplir en vue du traitement des demandes ou lors de celui-ci;

 

b) prévoyant l’ordre de traitement des demandes, notamment par groupe;

 

 

c) précisant le nombre de demandes à traiter par an, notamment par groupe;

 

 

d) régissant la disposition des demandes dont celles faites de nouveau.

 

 

 

[…]

 

 (1) This section applies to applications for visas or other documents made under subsection 11(1), other than those made by persons referred to in subsection 99(2), to sponsorship applications made by persons referred to in subsection 13(1), to applications for permanent resident status under subsection 21(1) or temporary resident status under subsection 22(1) made by foreign nationals in Canada, to applications for work or study permits and to requests under subsection 25(1) made by foreign nationals outside Canada.

 

 

Attainment of immigration goals

 

(2) The processing of applications and requests is to be conducted in a manner that, in the opinion of the Minister, will best support the attainment of the immigration goals established by the Government of Canada.

 

 

 

Instructions

 

(3) For the purposes of subsection (2), the Minister may give instructions with respect to the processing of applications and requests, including instructions

 

(a) establishing categories of applications or requests to which the instructions apply;

(a.1) establishing conditions, by category or otherwise, that must be met before or during the processing of an application or request;

 

(b) establishing an order, by category or otherwise, for the processing of applications or requests;

 

(c) setting the number of applications or requests, by category or otherwise, to be processed in any year; and

 

(d) providing for the disposition of applications and requests, including those made subsequent to the first application or request.

 

[…]

 

Les dispositions suivantes du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, s’appliquent à la présente instance :

Catégorie

 

75. (1) Pour l’application du paragraphe 12(2) de la Loi, la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral) est une catégorie réglementaire de personnes qui peuvent devenir résidents permanents du fait de leur capacité à réussir leur établissement économique au Canada, qui sont des travailleurs qualifiés et qui cherchent à s’établir dans une province autre que le Québec.

 

Qualité

 

(2) Est un travailleur qualifié l’étranger qui satisfait aux exigences suivantes :

 

a) il a accumulé au moins une année continue d’expérience de travail à temps plein au sens du paragraphe 80(7), ou l’équivalent s’il travaille à temps partiel de façon continue, au cours des dix années qui ont précédé la date de présentation de la demande de visa de résident permanent, dans au moins une des professions appartenant aux genre de compétence 0 Gestion ou niveaux de compétences A ou B de la matrice de la Classification nationale des professions — exception faite des professions d’accès limité;

 

b) pendant cette période d’emploi, il a accompli l’ensemble des tâches figurant dans l’énoncé principal établi pour la profession dans les descriptions des professions de cette classification;

 

 

c) pendant cette période d’emploi, il a exercé une partie appréciable des fonctions principales de la profession figurant dans les descriptions des professions de cette classification, notamment toutes les fonctions essentielles.

 

 

[…]

 

Class

 

75. (1) For the purposes of subsection 12(2) of the Act, the federal skilled worker class is hereby prescribed as a class of persons who are skilled workers and who may become permanent residents on the basis of their ability to become economically established in Canada and who intend to reside in a province other than the Province of Quebec.

 

 

Skilled workers

 

(2) A foreign national is a skilled worker if

 

 

(a) within the 10 years preceding the date of their application for a permanent resident visa, they have at least one year of continuous full-time employment experience, as described in subsection 80(7), or the equivalent in continuous part-time employment in one or more occupations, other than a restricted occupation, that are listed in Skill Type 0 Management Occupations or Skill Level A or B of the National Occupational Classification matrix;

 

 

 

(b) during that period of employment they performed the actions described in the lead statement for the occupation as set out in the occupational descriptions of the National Occupational Classification; and

 

(c) during that period of employment they performed a substantial number of the main duties of the occupation as set out in the occupational descriptions of the National Occupational Classification, including all of the essential duties.

 

[…]

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-5205-12

 

INTITULÉ :                                      IQBAL KHOWAJA c MCI

 

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 21 mars 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LA JUGE STRICKLAND

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 26 juillet 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Cecil L. Rotenberg, c.r.

 

POUR LE DEMANDEUR

Leila Jawando

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Cecil L. Rotenberg, c.r.

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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