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Date : 20130429

Dossier : T‑1296‑11

Référence : 2013 CF 438

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 29 avril 2013

En présence de madame la juge Gagné

 

 

ENTRE :

 

MAHMOOD KHALID

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

LE Conseil national de recherches du Canada

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Monsieur Mahmood Khalid [le demandeur] sollicite le contrôle judiciaire, présenté en application de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F‑7, de la décision rendue le 29 avril 2011 par M. John Coleman [le décideur], vice‑président du Conseil national de recherches du Canada [CNRC ou l’employeur], au dernier palier de la procédure de règlement des griefs. Dans cette décision, le décideur a rejeté le grief du demandeur qui contestait la décision de l’employeur de ne pas annuler son entente de congé de transition préalable à la retraite [CTPR], comme il l’avait demandé.

 

[2]               Pour répondre à la demande présentée par le demandeur, l’employeur devait exercer son pouvoir discrétionnaire de décider si des circonstances exceptionnelles ou imprévues justifiaient de faire droit à sa demande d’annulation du CTPR. Pour justifier son refus, l’employeur a notamment tenu compte de la situation du CNRC sur les plans financier et opérationnel à l’époque de même que du fait que la demande était fondée sur un changement dans la situation personnelle du demandeur qui n’avait rien à voir avec le CNRC.

 

[3]               Pour les motifs qui suivent, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

 

Les faits

[4]               Le 16 juillet 2009, alors qu’il était un employé de l’Institut de recherche aérospatiale, le demandeur a demandé un CTPR de deux ans, du 29 avril 2010 au 29 avril 2012. Le demandeur voulait travailler en Europe et se rapprocher de sa mère malade qui, à l’époque, vivait au Royaume‑Uni. Le demandeur déclarait avoir l’intention d’occuper un poste de chargé de cours occasionnel au Karman Institute for Fluid Dynamics [VKI] au Royaume‑Uni.

 

[5]               Un CTPR est un arrangement de travail particulier dans le cadre duquel un employé peut, deux ans avant sa date d’admissibilité à la retraite complète, faire réduire sa semaine de travail. À la fin de la période de congé, l’employé est tenu de démissionner. Pendant que l’employé est en CTPR, sa rémunération est rajustée selon le nombre d’heures de travail réduites, mais les droits à pension et les avantages sociaux ne sont pas touchés.

 

[6]               Selon la Directive sur les congés et les modalités de travail spéciales du Conseil du Trésor, qui s’applique au programme, les employés en CTPR doivent effectuer au minimum 60 p. 100 de leur charge de travail au cours de la période de congé.

 

[7]               Au moment où le CTPR du demandeur avait été déposé et autorisé, le demandeur avait accepté, à l’insu de l’employeur, le poste de chef du service de l’aéronautique et de l’aérospatiale de VKI en Belgique et devait commencer le travail le 1er septembre 2009. Le demandeur avait signé un contrat exécutoire avec VKI le 29 avril 2009, soit environ trois mois avant de demander le CTPR.

 

[8]               Si le demandeur voulait être prêt à commencer le travail à VKI le 1er septembre 2009 et se trouver à moins de deux ans de sa retraite au début de la période de CTPR, il devait prendre huit mois de vacances à compter du 1er septembre 2009, soit les huit mois précédant immédiatement le début de son CTPR en mai 2010.

 

[9]               Le demandeur s’est d’abord adressé au service de la rémunération et des avantages sociaux du CNRC le 13 juillet 2009 et a demandé à Mme Plescia, conseillère à la paye et aux avantages sociaux, de lui envoyer des renseignements au sujet du programme de CTPR. Le 14 juillet 2009, Mme Plescia a répondu au demandeur par courriel et lui a transmis trois hyperliens vers le site Web du CNRC. Les pages auxquelles ces hyperliens donnaient accès contenaient tous les renseignements pertinents au sujet du programme, y compris l’obligation d’effectuer 60 p. 100 de l’horaire de travail au cours de la période de deux ans. Le même jour, le demandeur envoyait à Mme Plescia un autre courriel l’informant qu’il était incapable d’ouvrir le dernier hyperlien vers la page du site Web qui contenait la formule à remplir et à transmettre. Il n’indiquait pas avoir eu des difficultés à ouvrir les hyperliens contenant les renseignements pertinents relatifs au programme.

 

[10]           Le demandeur a rempli la formule de demande le 16 juillet 2009 et, sous la rubrique « Période de congé », il a écrit [traduction] « 40 p. 100 de l’horaire de travail, à discuter avec le superviseur ». Il n’a pas rempli la section « Veuillez indiquer les jours à retrancher » et il a envoyé la formule au CNRC. Au cours de la semaine qui a suivi, M. Zan, le superviseur du demandeur, l’a interrogé à deux reprises afin de vérifier s’il avait bien compris les modalités du programme de CTPR étant donné les répercussions importantes qui s’ensuivaient, soit que le demandeur serait tenu de démissionner à la fin de la période de deux ans.

 

[11]           Divers courriels ont été échangés entre le demandeur et Mme Plescia. Le demandeur voulait savoir combien il gagnerait s’il devait maintenir 40 p. 100 de son horaire de travail (et non retrancher 40 p. 100 de son horaire) et Mme Plescia voulait savoir quels jours de la semaine le demandeur souhaitait retrancher. Il semble assez évident à la lecture de cette série de courriels qu’il y a eu un malentendu entre ces deux personnes au sujet des intentions du demandeur.

 

[12]           À la même époque, soit le 23 juillet 2009, le demandeur avait envoyé un courriel à M. Zan pour lui demander de donner suite à sa demande de CTPR. Monsieur Zan l’a fait le même jour en signant la formule de demande et en l’acheminant à Rémunération et avantages sociaux.

 

[13]           Le 4 août 2009, Mme Plescia a envoyé un courriel au demandeur pour l’informer qu’elle avait reçu sa formule de demande, que celle-ci était incomplète et qu’elle la lui renvoyait après en avoir surligné les sections non remplies. Le demandeur a ensuite rempli la section « Veuillez indiquer les jours à retrancher » et y a écrit les mots [traduction] « mardi et jeudi ».

 

[14]           Le demandeur a déménagé en Europe en septembre 2009 et a commencé son travail à titre de chef du service de l’aéronautique et de l’aérospatiale à VKI. Comme je l’ai indiqué précédemment, le demandeur a reconnu qu’il n’avait pas tout dit au CNRC au sujet de son emploi à VKI.

 

[15]           Le 1er octobre 2009, après avoir lu le communiqué relatif à la nomination du demandeur à VKI, M. Zan a envoyé au demandeur un courriel lui rappelant ce qui lui avait été dit en juillet 2009, soit que, selon les lignes directrices de l’employeur sur les conflits d’intérêts, il était tenu de divulguer au Bureau des conflits d’intérêts du CNRC son entente avec VKI.

 

[16]           Environ quatre mois plus tard, dans un courriel daté du 8 février 2010, le demandeur informait M. Zan qu’il démissionnerait de son poste à VKI parce qu’il [traduction] « n’avait jamais réussi à se passer de ses amis et du Canada ». Il a alors demandé à M. Zan s’il pouvait annuler l’entente relative à son CTPR. Monsieur Zan a répondu brièvement à ce courriel en disant qu’il essaierait de voir ce qu’il pourrait faire à ce sujet.

 

[17]           Le 9 février 2010, le demandeur a envoyé un courriel à Denise Le Voguer, généraliste en ressources humaines au CNRC, pour l’informer des changements survenus dans sa situation familiale (le décès de sa mère en octobre 2009, son divorce et le souhait de ses enfants de le voir revenir au Canada) et de son désir de reprendre son poste à temps plein.

 

[18]           Le 18 février 2010, une agente des conflits d’intérêts du CNRC envoyait au demandeur le commentaire suivant au sujet de sa situation : [traduction] « Bien que rien n’empêche qu’il continue à enseigner à VKI tout en assumant ses tâches habituelles au CNRC au cours de la période de préretraite à venir, nos principales réserves portent sur le fait qu’il occupe le poste de chef du service de l’aéronautique et de l’aérospatiale à VKI, lequel comporte des activités de recherche de pointe, ce qui ne serait pas conforme à la manière dont le CNRC gère les conflits d’intérêts. » Le demandeur a répondu que le refus du CNRC d’accepter qu’il occupe un poste de chef de service ne s’opposait pas du tout à ses projets de démissionner de son poste et de revenir au Canada.

 

[19]           Le 11 février 2010, le demandeur informait M. Zan et Mme Le Voguer que vu la décision de Mme Desjardins, il n’avait d’autre choix que de démissionner de VKI et de revenir au CNRC.

 

[20]           Le 17 février 2010, M. Zan a écrit au demandeur pour lui expliquer que l’entente de préretraite semblait exécutoire et irrévocable.

 

[21]           Le 18 février 2010, le demandeur a envoyé un courriel à Jerzy Komorowski, directeur général au CNRC, pour l’informer que par suite des changements survenus dans sa situation familiale, il souhaitait revenir au Canada et faire annuler son programme de préretraite. Il précisait aussi qu’il venait tout juste d’apprendre dans un échange avec Mme Desjardins que l’exigence du Conseil du Trésor relative au travail à effectuer pendant la préretraite s’élevait à au moins 60 p. 100 de la charge de travail plutôt qu’à 40 p. 100, comme il le croyait au moment où il avait obtenu son congé.

 

[22]           Le 19 février 2010, le demandeur a envoyé à Mme Le Voguer un autre courriel rappelant qu’il avait compris que l’employeur, en acceptant sa demande, l’autorisait à effectuer 40 p. 100 de sa charge de travail pendant la période de congé. Il soulignait dans son courriel qu’il n’aurait pas pris le CTPR s’il avait été informé de l’obligation de s’engager à effectuer 60 p. 100 plutôt que 40 p. 100 de la charge de travail.

 

[23]           Dans une lettre datée du 23 mars 2010, M. Komorowski informait le demandeur que le CNRC ne donnerait pas suite à la demande d’annulation de l’entente de CTPR et que le demandeur était tenu d’effectuer trois jours de travail par semaine en vertu des arrangements qui avaient été convenus, c’est‑à‑dire 60 p. 100 de la charge de travail.

 

[24]           À son retour au Canada, le 15 juin 2010, le demandeur a déposé un grief relativement à la décision de l’employeur de ne pas annuler son entente de CTPR. Dans le cadre du processus de règlement des griefs, le demandeur a rappelé qu’il avait appris en février 2010 l’existence de l’obligation d’effectuer 60 p. 100 de la charge de travail et qu’il n’aurait jamais pris de congé de préretraite s’il avait été informé dès le départ de cette exigence. Le CNRC, de son côté, a souligné qu’il n’avait pas à clarifier les choses après la présentation de la demande étant donné que le demandeur aurait dû s’informer au sujet de la politique et de ses diverses exigences.

 

[25]           Le 11 février 2011, M. Komorowski rejetait le grief du demandeur au premier palier du processus. Cette décision a été confirmée par le décideur au dernier palier du processus de règlement des griefs le 29 avril 2011 après une audience tenue le 29 mars 2011; c’est cette dernière décision qui fait l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[26]           Le décideur a conclu que la direction du CNRC avait exercé son jugement et assumé ses responsabilités de gestion de façon équitable et raisonnable dans son traitement de la demande de CTPR présentée par le demandeur et de sa demande ultérieure d’annulation du CTPR. En fait, il est vrai que la Directive du Conseil du Trésor et le programme de préretraite du CNRC prévoyaient tous deux la possibilité d’une annulation dans des « circonstances exceptionnelles ou imprévues », à la discrétion de l’employeur, mais les aspects financiers et opérationnels devaient aussi être pris en compte. Appuyant la décision de la direction, le décideur a aussi souligné qu’aucun revenu supplémentaire et aucun contrat important n’étaient attendus au moment du retour du demandeur et que des dépenses supplémentaires pourraient aggraver la situation financière déjà précaire du CNRC.

 

[27]           Bien que des éléments de preuve raisonnables aient étayé l’allégation du demandeur selon laquelle ce n’est que peu de temps avant son retour au Canada qu’il a appris qu’il devait travailler en moyenne trois jours par semaine au lieu de deux, la décision initiale n’en était pas pour autant déraisonnable. Le CNRC et le demandeur étaient tous deux responsables de ce malentendu. En ce sens, il était certes « possible » pour le CNRC avait de faire une mise au point concernant les obligations minimales du demandeur dans le cadre du programme de congé de transition préalable à la retraite, mais la « responsabilité » de s’informer au sujet toutes les modalités de la politique incombait au demandeur et il ne l’a pas fait. Le décideur a ajouté que ce malentendu n’était pas la seule raison qui avait amené le demandeur à décider d’annuler l’arrangement relatif à son congé de préretraite et que sa décision de démissionner de VKI et de reprendre son poste à temps plein au CNRC n’obligeait nullement l’employeur à donner suite à sa demande.

 

Questions en litige

[28]           La présente demande de contrôle judiciaire soulève les questions suivantes :

1)      Quelle est la norme de contrôle applicable à la décision du décideur?

2)      Le décideur a-t-il commis une erreur susceptible de contrôle lorsqu’il a décidé de ne pas annuler l’entente de CTPR de juillet 2009 qui avait été conclue avec le demandeur?

 

[29]           La seconde question comporte deux volets étant donné que le demandeur allègue deux erreurs susceptibles de contrôle de la part du décideur. Selon le demandeur, les motifs invoqués pour refuser sa demande d’annulation de l’entente de CTPR étaient déraisonnables vu la preuve. De plus, il allègue que le CNRC a fait par négligence une déclaration inexacte lorsqu’il a approuvé la demande de CTPR du demandeur telle que présentée, sans apporter de précisions quant au pourcentage de la charge de travail qui était exigé; en tranchant la question de cette façon, le décideur a soit omis d’appliquer, soit appliqué incorrectement, les principes juridiques relatifs aux déclarations inexactes faites par négligence.

 

[30]           Il importe de souligner que dans le cadre de ses observations présentées de vive voix, l’avocat du défendeur a fait valoir que le demandeur n’avait pas allégué l’existence d’une déclaration inexacte faite par négligence devant le décideur. L’avocat du demandeur a répliqué que la question relative à l’existence d’une déclaration inexacte faite par négligence avait été soulevée implicitement et qu’elle constituait en fait l’élément essentiel du grief du demandeur sur lequel le décideur devait se prononcer.

 

Norme de contrôle applicable

[31]           Selon le processus en deux étapes requis pour l’analyse de la norme de contrôle judiciaire décrit dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190 [Dunsmuir], la cour de révision « vérifie si la jurisprudence établit déjà de manière satisfaisante le degré de déférence correspondant à une catégorie de questions en particulier. En second lieu, lorsque cette démarche se révèle infructueuse, elle entreprend l’analyse des éléments qui permettent d’arrêter la bonne norme de contrôle » (Dunsmuir, précité, au paragraphe 62). L’analyse doit s’en tenir à la nature de la question dont était saisi le tribunal en cause (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 4, [2009] 1 RCS 339 [Khosa]). Parmi les autres facteurs à prendre en compte pour établir si le décideur d’un tribunal administratif a droit à une certaine déférence, notons l’existence d’une clause privative, un régime administratif distinct et particulier dans le cadre duquel le décideur possède une expertise spéciale et la nature de la question de droit (Dunsmuir, précité, au paragraphe 55). Selon l’arrêt Dunsmuir, la déférence est habituellement de mise lorsqu’un tribunal administratif interprète sa propre loi constitutive ou une loi étroitement liée à son mandat et dont il a une connaissance approfondie. Elle peut également s’imposer lorsque le tribunal administratif a acquis une expertise particulière dans l’application d’une règle générale de common law ou de droit civil dans son domaine spécialisé (Dunsmuir, précité, au paragraphe 54; Khosa, précité, au paragraphe 25; Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c Canada (Procureur général), 2011 CSC 53, au paragraphe 16, [2011] ACS no 53).

 

[32]           Les parties ne s’entendent pas sur la norme de contrôle qui s’applique au dernier palier du processus de règlement des griefs de l’employeur. Selon le demandeur, bien que l’existence de « circonstances exceptionnelles ou imprévues » dont il est question dans la politique soit une question de fait susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, toute prise en compte par le décideur de principes juridiques étrangers à son domaine d’expertise, à savoir ceux qui ont trait à la déclaration inexacte faite par négligence que le demandeur allègue contre l’employeur, doit faire l’objet d’un contrôle selon la norme de la décision correcte (Canada (Procureur général) c Assh, 2006 CAF 358, [2006] ACF no 1656 [Assh]).

 

[33]           Dans l’arrêt Assh, la Cour d’appel fédérale devait se prononcer sur la question de savoir si une décision rendue au dernier palier de la procédure interne de règlement des griefs sur la question de l’existence d’un conflit d’intérêts en contravention du Code régissant les conflits d’intérêts de l’employeur était une question de droit. La Cour a conclu que la question de savoir s’il y a eu conflit d’intérêts fait intervenir l’application de notions de common law, indépendantes de la connaissance institutionnelle du décideur, et a conclu que la norme de la décision correcte était la norme de contrôle applicable à la décision au dernier palier de la procédure de règlement des griefs relative à l’interprétation du Code régissant les conflits d’intérêts (Assh, précité, aux paragraphes 42 et 46, 50 et 53).

 

[34]           Le défendeur a renvoyé la Cour à un certain nombre de décisions qui permettent d’affirmer que c’est la norme de la décision raisonnable qui doit être utilisée pour le contrôle des décisions finales qui sont rendues au dernier palier de la procédure de règlement des griefs dénuée d’arbitrage, et qui interprètent et appliquent des procédures et politiques internes (Hagel c Canada (Procureur général), 2009 CF 329, au paragraphe 27, [2009] ACF no 417 [Hagel]; Peck c Canada (Parcs Canada), 2009 CF 686, au paragraphe 23, [2009] ACF no 1707; Insch c Canada (Revenu national), 2009 CF 869, au paragraphe 14, [2009] ACF no 1525; Spencer c Canada (Procureur général), 2010 CF 33, au paragraphe 32, [2010] ACF no 29).

 

[35]           Comme le soulignait le juge O’Keefe dans la décision Backx c Canada (Agence canadienne d’inspection des aliments), 2010 CF 480, [2010] ACF no 559, au paragraphe 22, étant donné que les précédents relatifs à la norme de contrôle applicable aux différentes décisions définitives rendues en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, LC 2003, c 22 [LRTFP], ne sont pas bien établis, une approche contextuelle est préférable.

 

[36]           Je conviens avec le défendeur que, lors du contrôle judiciaire de décisions d’un employeur du secteur public rendues dans le cadre d’une procédure de règlement des griefs non admissible à l’arbitrage, notre Cour a généralement adopté la norme de la décision raisonnable dans l’examen de questions essentiellement factuelles qui concernent l’application à des circonstances particulières de diverses politiques administratives de l’employeur, mais je ne crois pas que la jurisprudence invoquée par le défendeur soit concluante. Aucune des affaires citées ne vise une situation où, comme en l’espèce, la politique pertinente faisait ou devenait partie intégrante des conditions d’emploi de l’employé et où l’employé alléguait notamment que l’employeur avait manqué à son obligation de diligence.

 

[37]           Dans la décision Appleby‑Ostroff c Procureur général, 2010 CF 479, [2010] ACF no 558 [Appleby‑Ostroff], le juge O’Keefe a conclu que lorsqu’une ligne directrice, une politique ou une directive devenait partie intégrante des conditions d’emploi d’un employé et lorsque l’employé déposait un grief devant l’employeur en vertu de la LRTFP alléguant que l’employeur n’avait pas respecté une de ses politiques, il n’y avait pas lieu de faire preuve de retenue à l’égard d’une décision rendue par l’employeur au dernier palier de la procédure de règlement des griefs. La Cour précisait qu’il en était ainsi non pas parce que la politique applicable constituait du droit ‑ ce qu’elle n’était pas ‑, mais parce qu’elle était devenue partie intégrante des conditions d’emploi de l’employé, de sorte que ce dernier avait droit à une décision correcte prise au dernier palier du processus de grief. Bien que la décision Appleby‑Ostroff concernait l’ajout unilatéral par l’employeur de politiques aux conditions du contrat d’emploi de l’employé et la question de l’applicabilité de l’une de deux politiques distinctes, j’estime que cette décision de la Cour demeure éclairante pour la présente affaire. L’interprétation et l’application d’une politique interne qui fait partie du contrat d’emploi légal et exécutoire du demandeur (l’entente de CTPR) ne peuvent être considérées comme une question de fait ou une question principalement de fait, particulièrement dans un cas où l’on allègue l’existence d’une déclaration inexacte que l’employeur aurait faite par négligence dans le cadre de la relation d’emploi.

 

[38]           En ce qui concerne l’expertise du décideur, il a été établi que « l’absence d’un arbitre indépendant, au dernier palier de la procédure de règlement des griefs, dénote fortement qu’il convient d’accorder moins de retenue à ces décideurs » (Appleby‑Ostroff, précitée, au paragraphe 52; Assh, précité, au paragraphe 44). En statuant sur le grief du demandeur, le décideur a exercé des fonctions de gestion plutôt que d’utiliser une expertise juridique. Je sais bien que le régime législatif a pour objet de « faciliter le règlement de différends de façon rapide, économique et relativement peu formaliste » (Alliance de la Fonction publique du Canada c Assoc. des pilotes fédéraux du Canada, 2009 CAF 223, [2009] ACF no 822, au paragraphe 55) et qu’une déférence s’impose généralement à l’égard des décideurs au dernier palier du processus de règlement des griefs dans le cadre de l’interprétation et de l’application de politiques et de procédures internes (Peck c Canada (Parcs Canada), 2009 CF 686, [2009] ACF no 1707, au paragraphe 21). Cependant, à mon avis, cette déférence ne s’applique pas aux obligations contractuelles résultant d’un contrat individuel de travail régi par les politiques de l’employeur. De plus, je souligne que la clause privative prévue à l’article 214 de la LRTFP a été jugée relativement faible comparativement au libellé de l’article 233 qui protège les décisions rendues par des arbitres indépendants (Appleby‑Ostroff, précitée, au paragraphe 53; Hagel, précitée, aux paragraphes 23 et 24; Assh, précité, au paragraphe 35).

 

[39]           Compte tenu de tous ces facteurs, j’estime que même si la manière dont l’employeur a interprété et appliqué la politique pour préciser les modalités qui figurent dans le contrat de travail du demandeur, et la conclusion que le décideur a tirée pour statuer sur la déclaration inexacte faite par négligence invoquée par le demandeur relativement au pourcentage de la charge de travail exigé, militent en faveur de la norme de la décision correcte, il n’en reste pas moins que l’appréciation des faits par le décideur pour savoir si la situation du demandeur équivalait à des « circonstances exceptionnelles ou imprévues » justifiant l’annulation de l’entente de CTPR commande la retenue. C’est la question qui était soumise au décideur en l’espèce.

 

[40]           J’aborderai donc la première question suivant la norme de la décision correcte et la seconde, suivant la norme de la décision raisonnable.

 

Contrôle de la décision contestée

 

 

Caractère raisonnable de la décision contestée

[41]           Le décideur a conclu que la situation du demandeur avait un caractère personnel et qu’il en avait été tenu pleinement compte au moment où sa demande avait été approuvée. Cependant, le décideur a conclu que le changement de situation allégué doit être examiné en fonction des considérations financières et opérationnelles prévues par la politique de l’employeur, lesquelles ont joué un rôle prépondérant dans l’évaluation de la demande du demandeur et ont été prises en compte tant au moment de l’autorisation du CTPR qu’à celui du refus de sa demande d’annulation.

 

[42]           Selon Dunsmuir, précité, au paragraphe 47, le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles et acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

 

[43]           Il serait difficile pour la Cour de remettre en question, selon la norme déférente du caractère raisonnable, la prise en compte des préoccupations relatives à la gestion dont le décideur a fait état dans la décision contestée, étant donné le pouvoir discrétionnaire et l’expertise de l’employeur dans ce domaine. Il serait aussi difficile de remettre en question ses conclusions selon lesquelles i) lorsque le demandeur a demandé un CTPR en juillet 2009, il avait probablement déjà effectué [traduction] « des demandes d’emploi et des contacts personnels et [il y avait] peut‑être même des entrevues en cours avec VKI au sujet de cette occasion de carrière stimulante avant son départ du CNRC » – étant donné que l’interrogatoire du demandeur a par la suite permis de savoir qu’un contrat d’emploi exécutoire avait été signé avec VKI en avril 2009 ‑, et ii) les motifs du demandeur qui justifiaient son désir de revenir au Canada et de reprendre son poste à temps plein au CNRC n’avaient rien à voir avec les modalités de son entente de CTPR ou avec le conflit d’intérêts potentiel dont il venait de découvrir l’existence.

 

[44]           Le décideur a accepté les arguments du demandeur selon lesquels ce dernier n’a appris l’existence de l’obligation d’effectuer 60 p. 100 de la charge de travail qu’en février 2010. Il a décrit la situation comme résultant d’un malentendu et a attribué la responsabilité de ce malentendu à la fois au demandeur et à l’employeur. Cette description de la situation par le décideur est raisonnable vu l’ensemble de la preuve dont la Cour est saisie.

 

[45]           Premièrement, la source de renseignements principale et complète à laquelle avait accès le demandeur avait été fournie par Rémunération et avantages sociaux lorsque, à sa demande, un courriel contenant les trois hyperliens menant au site Web du CNRC lui avait été envoyé. Toutes les modalités du programme y figuraient, comme le droit à la réduction de la semaine de travail jusqu’à concurrence de 40 p. 100. Le demandeur a répondu à ce courriel en déclarant qu’il ne pouvait ouvrir l’hyperlien qui menait à la formule à envoyer. Il n’a pas indiqué être incapable d’ouvrir l’hyperlien qui donnait accès aux modalités du programme. Le demandeur a déclaré dans un affidavit déposé à l’appui de sa demande que, dans les faits, il n’avait pu ouvrir aucun des trois hyperliens envoyés par Mme Plescia. Ce n’est pourtant pas ce qu’il a expliqué au moment où il a reçu le courriel et il ne peut maintenant accuser le CNRC de ne pas s’être assuré qu’il possédait tous les renseignements pertinents avant de faire une demande de CTPR. Cela est d’autant plus vrai si l’on tient compte du fait que M. Zan avait recommandé deux fois au demandeur de s’assurer qu’il comprenait très bien le programme de CTPR avant de présenter sa demande étant donné que les répercussions étaient importantes et le fait que M. Zan avait attendu une semaine avant d’autoriser la demande du demandeur.

 

[46]           Deuxièmement, la formule de demande elle‑même, remplie par le demandeur après qu’il eut vraisemblablement pris connaissance des modalités du programme, ne confirme pas l’assertion du demandeur selon laquelle il s’attendait à effectuer 40 p. 100 de son horaire de travail au cours de la période de CTPR. Dans la section « Période de congé », il a écrit [traduction] « 40 p. 100 de l’horaire de travail, à discuter avec le superviseur » et, dans la section « Veuillez indiquer les jours à retrancher », il a écrit [traduction] « mardi et jeudi ». Cette dernière réponse montrait clairement que le demandeur effectuerait 60 p. 100 de son horaire de travail les lundi, mercredi et vendredi. Il est possible, certes, que le demandeur ait eu une autre intention, mais compte tenu des renseignements qu’il a fournis, il est difficile de faire entièrement assumer à l’employeur le défaut d’une mise au point avec le demandeur.

 

[47]           Troisièmement, le demandeur allègue que s’il avait été au courant de l’obligation d’effectuer 60 p. 100 de son horaire de travail, il n’aurait pas déposé une demande de CTPR et il n’aurait pas accepté le poste à VKI. Cet argument est affaibli par le fait que le demandeur a signé un contrat d’emploi d’une durée indéfinie avec VKI le 29 avril 2009, soit environ trois mois avant de demander un CTPR. Il est aussi fragilisé par le fait que le demandeur a été loin d’être franc avec son employeur au cours de ses négociations avec VKI et au cours des discussions avec l’employeur au sujet de sa demande de CTPR. Il n’a respecté les modalités de la politique du CNRC sur les conflits d’intérêts qu’après que M. Zan eut soumis à son attention le communiqué annonçant la nomination du demandeur comme chef du service de l’aéronautique et de l’aérospatiale à VKI. En fait, il se peut que si le CNRC avait été informé des véritables intentions du demandeur au moment où ce dernier a fait une demande de CTPR, le demandeur ait pu être mis en demeure de choisir entre sa nomination à VKI et le programme de CTPR du CNRC.

 

[48]           Quatrièmement, les courriels envoyés par le demandeur au CNRC entre le 8 février et le 18 février 2010 révèlent sans l’ombre d’un doute que les motifs de la décision du demandeur de revenir au Canada sont uniquement liés à un changement dans sa situation personnelle. L’impression erronée du demandeur selon laquelle il ne devait effectuer que 40 p. 100 de son horaire de travail au cours du congé de CTPR et le fait qu’il aurait pu être empêché de travailler à VKI à cause d’un conflit d’intérêts semblent correspondre à une prise de conscience bien tardive chez le demandeur.

 

Allégation de déclaration inexacte faite par négligence formulée par le demandeur

[49]           Si l’allégation de déclaration inexacte faite par négligence formulée par le demandeur n’a pas été débattue devant le décideur, il est fort possible que la question n’ait pas été en litige; par conséquent, la Cour ne devrait pas l’examiner dans le cadre du contrôle judiciaire. La jurisprudence indique clairement que dans le cadre d’un contrôle judiciaire, une décision ne peut être contestée en invoquant une question qui n’a pas été soulevée devant le tribunal administratif, sauf si la nouvelle question a trait à la compétence, ce qui n’est pas le cas en l’espèce (voir Toussaint c Canada (Conseil canadien des relations du travail), [1993] ACF no 616 (CAF), au paragraphe 5; Bande indienne de Shubenacadie c Canada (Commission des droits de la personne) (Re Macnutt), [1997] ACF no 1481, aux paragraphes 37 à 43; et Nametco Holdings Ltd c Canada (Ministre du revenu national), 2002 CAF 149, au paragraphe 2).

 

[50]           Or, aucune des parties n’a mentionné ce fait dans ses observations écrites et, à l’issue de l’audience tenue devant la Cour, il était difficile de savoir si cet argument avait été présenté au décideur et la façon dont on l’avait présenté. J’examinerai donc l’allégation du demandeur.

 

[51]           Deux questions doivent être abordées en ce qui concerne la déclaration inexacte que le CNRC aurait faite par négligence alléguée par le demandeur : i) L’existence des éléments constitutifs de la responsabilité pour négligence est‑elle bien établie? Dans l’affirmative, ii) l’employeur peut-il présenter une défense partielle de négligence contributive en raison des manquements du demandeur?

 

i)                    L’existence des éléments constitutifs de la responsabilité pour négligence est‑elle bien établie?

 

[52]           Selon la décision Spinks c Canada (CA), [1996] 2 CF 563, [1996] ACF no 352 [Spinks], au paragraphe 20, laquelle cite l’arrêt Queen c Cognos Inc., [1993] 1 RCS 87 [Cognos], le critère juridique qui permet d’établir la responsabilité pour négligence comprend cinq éléments constitutifs : i) il doit exister une obligation de diligence fondée sur un « lien spécial » entre la personne qui fait la déclaration et la personne visée; ii) la déclaration doit être fausse, inexacte ou trompeuse; iii) la personne qui fait la déclaration doit avoir agi de façon négligente en faisant la déclaration; iv) la personne visée doit s’être fiée raisonnablement à la déclaration faite de façon négligente; et v) la personne visée par la déclaration et qui s’y est fiée doit avoir subi un préjudice.

 

[53]           La Cour a jugé que « [l]a confiance prévisible suffit pour créer un lien spécial dans la plupart des cas » (Spinks, précitée, au paragraphe 22). Il est évident qu’en l’espèce le demandeur s’est au moins fié en partie à l’employeur lorsqu’il a demandé à Mme Plescia de lui envoyer, comme promis, [traduction] « des renseignements sur le programme de congé de transition préalable à la retraite ». Compte tenu du fait que l’employeur aurait pu prévoir de façon raisonnable le risque que courrait le demandeur, la Cour peut conclure que la relation d’emploi a donné lieu à une obligation de diligence dans les circonstances.

 

[54]           Même si dans ses échanges de courriels avec Mme Plescia, le demandeur a fait part de son intention d’assumer une charge de travail de 40 p. 100 au cours de son congé de transition, il a reçu de Rémunération et avantages sociaux du CNRC tous les renseignements précis qui auraient dû lui faire comprendre que la politique n’autorisait qu’une réduction de 40 p. 100 de son horaire travail. Fait plus important encore, le demandeur savait qu’à partir du moment où sa demande de CTPR était autorisée, il était tenu de démissionner de son poste à la fin de la période de congé.

 

[55]           S’agissant des deuxième et troisième critères, il faut souligner que le demandeur n’a jamais reçu de renseignements qui divergent du contenu de la politique. De plus, sa demande telle que remplie a été autorisée. Si cette autorisation reposait sur une inexactitude ou la tromperie, ce qui n’est pas nécessairement le cas, le demandeur doit en assumer la responsabilité.

 

[56]           La transmission par l’employeur des hyperliens sur les politiques pertinentes suffit-elle pour le relever de son obligation de diligence raisonnable? Dans les circonstances de l’espèce, je suis d’avis qu’elle suffit. Le demandeur avait travaillé pour le CNRC pendant plus de 27 ans; par conséquent, il connaissait bien l’organisation et ses politiques générales. Selon les courriels échangés entre le demandeur et la conseillère de Rémunération et avantages sociaux du CNRC, le demandeur s’est informé du salaire qu’il recevrait s’il effectuait 40 p. 100 de son horaire de travail habituel. Au lieu de corriger ce que le demandeur avait décrit ou de le contredire, Mme Plescia a répondu qu’elle devait être informée des jours de semaine pendant lesquels il avait l’intention de prendre congé. Voici un extrait du paragraphe 29 de l’arrêt Spinks, précité : « Une personne peut être "induite en erreur" tant par l’omission de divulguer que par des avis inexacts ou faux. De même que l’absence de renseignements peut être assimilable à des renseignements “erronés”, comme il a été discuté ci‑dessus, des renseignements manquants peuvent être trompeurs. […] En conséquence, l’obligation peut être violée non seulement par des déclarations inexactes effectivement faites, mais aussi par des omissions, car celles‑ci peuvent être tout aussi trompeuses. » Si les courriels ont permis à l’employeur de le relever de son obligation de diligence, une omission trompeuse dans l’un de ces courriels aurait soulevé un problème important. Or, ce n’est pas le cas. Il ressort du courriel du 13 juillet que le demandeur lui‑même s’est appuyé principalement sur les renseignements qu’il avait demandé à recevoir par écrit. Cette constatation est confirmée par le premier refus de M. Zan de signer la demande de CTPR avant que le demandeur se soit familiarisé avec les conditions du CTPR.

 

[57]           Comme il est dit dans la décision Cognos, précitée, au paragraphe 121, « [l]a norme de diligence applicable devrait être celle qui est utilisée dans toute affaire de négligence, à savoir celle universellement reconnue, quoique hypothétique, de la “personne raisonnable”. La norme de diligence requise d’une personne qui fait des déclarations est objective. » Appliquant cette norme, je conclus que l’employeur a fait preuve de diligence en recommandant au demandeur de se familiariser avec le programme de CTPR et en vérifiant qu’il en comprenait bien les modalités. Le simple fait que le demandeur ait choisi de ne pas prendre connaissance de la documentation qui lui avait été envoyée et de ne pas informer Mme Plescia qu’il ne pouvait pas ouvrir l’hyperlien menant au site Web – ce qui aurait donné à cette dernière la possibilité de lui transmettre les renseignements d’une autre façon, comme elle l’a probablement fait en ce qui concerne la formule de demande – n’équivaut pas à une négligence ni à une omission de la part de l’employeur.

 

[58]           Le quatrième critère de responsabilité en ce qui concerne une allégation de déclaration inexacte faite par négligence suppose que la personne visée par la déclaration s’est réellement fiée, de façon raisonnable, à la déclaration inexacte. Le demandeur déclare s’être fié à la fois aux courriels échangés avec la conseillère de Rémunération et avantages sociaux du CNRC et au fait que sa formule de demande avait été autorisée par son superviseur immédiat, M. Zan. Dans les circonstances, il aurait été plus raisonnable que le demandeur s’appuie sur les renseignements et les documents fournis et sur les recommandations de M. Zan plutôt que sur quelques courriels ambigus qui ont entretenu un véritable malentendu entre toutes les parties. Dans ses courriels, Mme Plescia ne confirme pas la compréhension qu’avait le demandeur des modalités et elle ne répond pas à sa demande concernant le salaire qu’il gagnerait s’il effectuait 40 p. 100 de son horaire de travail. Essentiellement, dans son courriel du 20 juillet, Mme Plescia demandait au demandeur de lui préciser les jours qu’il comptait prendre comme congé sans traitement et le demandeur répondait, ce qui confirme ce que je viens de dire à ce sujet, qu’il travaillerait les mardi et jeudi. Ce renseignement contredit le contenu de sa formule de demande dans lequel il déclarait plutôt qu’il prendrait congé le mardi et le jeudi.

 

[59]           Le demandeur, en alléguant qu’il s’était fié à l’autorisation de sa formule de demande par le CNRC, confirme la thèse du défendeur plutôt que la sienne. Étant donné que le CNRC avait des raisons de croire que le demandeur avait pris connaissance de la politique relative au CTPR, il était raisonnable qu’il considère la formule de demande comme conforme aux modalités du programme, soit que le demandeur avait l’intention de prendre [traduction] « 40 p. 100 de l’horaire de travail, à discuter avec le superviseur » comme période de congé correspondant à une absence les mardi et jeudi.

 

[60]           Enfin, le demandeur soutient que par suite de la déclaration inexacte du CNRC faite par négligence, il y a perdu son emploi à temps plein. Je répète qu’il avait accepté un poste à VKI trois mois avant de demander un CTPR et trois mois avant que l’employeur eût fait quelque déclaration que ce soit à ce sujet. De plus, il avait décidé de démissionner de son poste à VKI à cause d’un changement dans sa situation personnelle et avant d’avoir constaté qu’il avait mal compris les modalités du programme de CTPR. Par conséquent, le malentendu relatif au pourcentage de l’horaire de travail à effectuer dans le cadre du programme de CTPR n’est pas la causa causans des dommages qu’aurait subis le demandeur.

 

[61]           Je suis donc d’avis qu’aucun des cinq éléments constitutifs permettant de conclure à la responsabilité du CNRC en raison d’une déclaration inexacte faite par négligence n’a été suffisamment établi compte tenu des faits de l’espèce.

 

ii)                  Défense partielle de négligence contributive

[62]           Ayant conclu que le CNRC n’a pas, en droit, formulé d’assertion négligente et inexacte à l’égard du demandeur, il n’est pas nécessaire d’établir si ce dernier a fait preuve de négligence contributive et a joué un rôle dans la survenance des dommages qu’il a subis.

 

[63]           La demande sera donc rejetée. Les dépens suivront l’issue de la cause.


JUGEMENT

LA COUR :

1.      REJETTE la demande de contrôle judiciaire.

 

2.      ADJUGE au défendeur ses dépens afférents à la demande.

 

 

« Jocelyne Gagné »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    T‑1296‑11

 

 

INTITULÉ :                                                  MAHMOOD KHALID c CCNRC

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 30 janvier 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                        LA JUGE GAGNÉ

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 29 avril 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Steven Welchner

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Adrian Bieniasiewicz

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Steven Welchner

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Adrian Bieniasiewcz

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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