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Date : 20130425

Dossier: IMM-7973-12

Référence : 2013 CF 426

Ottawa (Ontario), le 25 avril 2013

En présence de madame la juge Gagné 

 

ENTRE :

 

WILMAR BURGOS GONZALEZ

MONICA ROCIO BALLESTEROS CLAROS

JERONIMO BURGOS BALLESTEROS

JUAN JACOBO BURGOS BALLESTEROS

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

         MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Introduction

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision de la Section de la protection des réfugiés [SPR] de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, rendue le 11 juillet 2012. La SPR a rejeté la demande d’asile de M. Burgos Gonzalez (M. Gonzalez), de son épouse et de ses deux enfants (collectivement appelés « les demandeurs »), ayant conclu qu’ils n’avaient pas la qualité de personnes à protéger selon les termes de l’article 97 de la Loi sur l’immigration et de la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [LIPR].

 

II.        Les faits

[2]               Les demandeurs sont citoyens de la République de Colombie. M. Gonzalez est un homme d’affaires d’une certaine renommée. Depuis 2002, il est copropriétaire d’une entreprise de vente et distribution des matériaux de construction, d’une valeur de mille millions de pesos colombiens (un peu plus de 550 000,00$ CDN).

[3]               M. Gonzalez allègue qu’à partir de février 2010, il a reçu plusieurs appels anonymes le menaçant et exigeant le paiement de deux cent cinquante millions de pesos (quelques 130 000,00$ CDN). Les demandes d’extorsion se sont poursuivies aux mois de mars et avril 2010. Lorsque M. Gonzalez a voulu signaler l’extorsion à la police, on lui a répondu qu’il fallait une preuve pour faire une dénonciation. Il a donc décidé d’enregistrer les communications téléphoniques subséquentes et a soumis les bandes audio au bureau du Procureur général de la nation.

 

[4]               Peu de temps après, alors qu’il sortait de chez lui, M. Gonzalez s’est aperçu qu’il était suivi par des individus en motocyclette. Les individus auraient ensuite disparu alors qu’il tentait de rejoindre le poste de police le plus proche.

 

[5]               M. Gonzalez et sa famille ont fait l’objet de plusieurs autres menaces téléphoniques aux fins d’extorsion suite à cet incident. Le Corps technique de l’investigation du Bureau d’extorsion et terrorisme a cependant refusé d’accepter les enregistrements téléphoniques de M. Gonzalez, les considérants superficiels. M. Gonzalez a également signalé les évènements à la Fiscalia et alors que cette plainte était toujours sous investigation, les demandeurs ont quitté la Colombie le 26 septembre 2010 pour se rendre aux États-Unis. Ils sont ensuite arrivés au Canada le 3 octobre 2010 et ont sollicité le statut de réfugiés.

[6]               La SPR a trouvé crédible et digne de foi l’ensemble du témoignage de M. Gonzalez et de son épouse.

[7]               La SPR a noté que, selon son témoignage oral, M. Gonzalez a décidé de quitter son pays lorsqu’il a remarqué qu’il commençait à être poursuivi par des individus en motocyclette puisque, selon lui, la plupart des assassinats sont exécutés par des individus qui menacent leur victime en la pourchassant en motocyclette. Par ailleurs, vers la fin d’avril 2010, M. Gonzalez aurait été avisé par ses persécuteurs qu’ils allaient poser une bombe chez lui et l’assassiner.

[8]               La SPR n'a pas été convaincue que ces évènements étaient de nature à rendre le risque des demandeurs personnel. La SPR a plutôt jugé qu’il ressort de l’ensemble de la preuve que les demandeurs ont fait face à une extorsion qui, selon la preuve documentaire, est fréquente et généralisée à l’échelle du pays, d’autant plus que les individus qui ont sollicité M. Gonzalez étaient non identifiés. La SPR a reconnu que M. Gonzalez est un homme d’affaires fortuné et que, de ce fait, il attire la convoitise, mais elle a conclu que ses problèmes étaient dus à une violence généralisée avec de l’extorsion. Selon la SPR, la plupart des personnes riches ou considérées comme telles, font l’objet d’extorsion ou sont kidnappées, sans que l’État colombien puisse assurer une protection parfaite sur l’ensemble du territoire malgré ses efforts.

 

[9]               Finalement, la SPR a noté que les demandeurs n’ont pas épuisé leurs recours devant les autorités colombiennes en s’adressant aux échelons supérieurs, et que selon le plumitif de leur dénonciation, datée du 9 septembre 2010, le statut de leur plainte est toujours actif et l’affaire fait l’objet d’une enquête en cours. La SPR a aussi noté qu’étant donné la peur et le danger ressentis et vécus par les demandeurs, il était raisonnable de s’attendre à ce qu’ils demandent la protection du premier État signataire de la Convention de Genève dans lequel ils se sont trouvés, soit les États-Unis.

[10]           Malgré ces points subsidiaires soulevés par la SPR, il faut reconnaître que le refus de la demande d’asile des demandeurs était essentiellement fondé sur les conclusions de la SPR quant au caractère généralisé de leur risque en tant que personnes fortunées susceptibles d’être ciblées à des fins d’extorsion et d’escroquerie par des bandes criminelles. C’est aussi cette conclusion que les demandeurs contestent. Ils prétendent que la SPR a erré, d’une part, dans l’appréciation de leur demande fondée sur l’article 97 de la LIPR en omettant d’effectuer un examen individualisé des circonstances particulières aux demandeurs et, d’autre part, dans l’évaluation du risque, selon eux personnalisé, auquel ils font face s’ils sont renvoyés dans leur pays.

 

III.       Norme de contôle

[11]           L’examen d’une demande sous le régime du paragraphe 97(1) de la LIPR nécessite une enquête individuelle et essentiellement factuelle. En conséquence, la norme de contrôle appropriée est la norme de la raisonnabilité. En d’autres termes « l’omission [de la SPR] d’examiner la demande telle qu’elle a été présentée par [les demandeurs] constitue une mauvaise appréciation des faits et de la preuve, ce qui est susceptible de révision selon la norme de la décision raisonnable » (Turton c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1244 aux para 27-28 [Turton]). De même, l’appréciation du caractère généralisé ou personnalisé des risques allégués constitue une question d’application de la LIPR à une situation factuelle donnée, et les conclusions de la SPR à cet égard sont susceptibles de contrôle selon la norme de la raisonnabilité (Perez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 1029 au para 24 [Perez]).

IV.       Analyse

[12]           La jurisprudence reconnaît que même si le risque était à l’origine généralisé, il peut devenir personnel au cours des circonstances particulières invoquées dans chaque demande d’asile. Si le récit du demandeur est jugé crédible, comme en l'instance, la SPR ne peut se fonder simplement sur le caractère généralisé des menaces qu’elle qualifie comme telles; elle a l’obligation de procéder à un examen individualisé et rigoureux des faits qui lui sont soumis, en se penchant sur tous les aspects du risque qui ressortent de ces faits, pour déterminer si le risque est devenu personnel même si le demandeur a été initialement ciblé de façon aléatoire (Pineda c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 365 [Pineda]; Zacarias c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 62 aux para 15-17).

 

[13]           Tel est le cas lorsqu’un demandeur d’asile est soupçonné d’être responsable de la mort d’un membre d’un gang et risque de subir des représailles (Turton, précitée, au para 100); lorsqu’un demandeur d’asile est spécifiquement et individuellement ciblé et menacé par des membres d’un gang qui le soupçonnaient d’avoir livré des renseignements à la police après avoir prodigué des soins à un membre du gang (Pineda c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 403 aux para 12-13); ou encore lorsqu’un mandat a été donné à un groupe criminalisé de tuer un demandeur d’asile qui a refusé de transporter de la drogue à travers la frontière (Guerrero c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1210 aux para 22-23 [Guerrero]).

 

[14]           La véritable question à laquelle doit répondre la SPR est donc de déterminer si, dans le contexte des risques actuels ou prospectifs allégués, les demandeurs ont apporté la preuve de circonstances qui leur sont particulières et qui peuvent rendre leur risque différent de celui auquel est exposé l’ensemble de la population de leur pays en raison de l’omniprésence des gangs. Si les demandeurs ne réussissent pas à démontrer en quoi leur risque, même généralisé, serait devenu personnel ou personnalisé, il est loisible au tribunal de rejeter leur demande. Plusieurs décisions de cette Cour ont mis l’accent sur le fait qu'en l’absence d’une telle analyse individualisée, la protection du paragraphe 97(1) risque d’être vidée de son contenu chaque fois qu’il existe, dans un pays donné, un danger pouvant être qualifié de généralisé. Je me réfère particulièrement aux commentaires du juge Zinn de cette Cour dans Guerrero, précitée, aux para 32-34, où il a écrit:

Le fait que la Cour fédérale et la Cour d’appel estiment depuis longtemps qu’un tel examen personnalisé est nécessaire explique en partie pourquoi je rejette la thèse du défendeur concernant Baires Sanchez. Le défendeur s’est appuyé sur cette décision pour faire valoir que le risque d’être victime de violence aux mains d’un gang criminel dans l’un des pays d’Amérique centrale ou d’Amérique du Sud où les actes de violence commis par les gangs sont fréquents est un risque auquel sont généralement exposés les citoyens du pays et qui ne donne donc pas droit à la protection offerte par l’article 97 de la Loi. Souscrire à cette proposition audacieuse irait à l’encontre non seulement de l’opinion exprimée par la Cour d’appel, mais aussi des décisions où la Cour fédérale a conclu que le demandeur était personnellement exposé à un risque de ce genre qui n’était pas aussi un risque auquel d’autres personnes étaient généralement exposées : voir, par exemple, Pineda c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 365; Zacarias c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 62; Barrios Pineda c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 403; Alvarez Castaneda c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 724.

 

Au cours des plaidoiries, j’ai demandé au défendeur, vu son interprétation de Baires Sanchez, s’il pouvait me donner un exemple d’un cas où une personne exposée au risque d’être tuée par un gang dans l’un des pays envahis par les gangs pourrait obtenir la protection de l’article 97. Le défendeur a répondu en évoquant le cas où un gang a été chargé de tuer un demandeur d’asile. Il a soutenu que, dans un tel cas, le risque est personnel et la population n’y est généralement pas exposée. Cette situation est exactement celle du demandeur en l’espèce. La vie du demandeur était menacée par un gang chargé par une organisation criminelle de le tuer.

 

À mon avis, la protection offerte par la Loi n’est pas limitée de la manière décrite par le défendeur, ce qui ne veut pas dire que les personnes qui sont exposées au même risque ou à un risque plus grand de violence aveugle commise par des gangs que d’autres personnes ont droit à la protection. Cependant, lorsqu’une personne risque expressément et personnellement d’être tuée par un gang dans des circonstances où d’autres personnes ne sont généralement pas exposées à ce risque, elle a droit à la protection de l’article 97 de la Loi si les autres exigences légales sont remplies.

 

[15]           Les parties ont invoqué, de part et d’autre, des causes qui pourraient paraître contradictoires quant à la portée du sous-alinéa 97(1)b)(ii) de la LIPR, à savoir dans quelles circonstances une personne qui allègue avoir un risque d’être tuée par des membres d’un gang criminel dans l’un des pays envahis par de tels groupes peut être considérée comme étant exposée audit risque « alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas ». Il est clair que la question du ciblage dépend dans une grande mesure des faits spécifiques de chaque cas, d’où la déférence qu’il faut accorder à la SPR. À la lecture de la jurisprudence invoquée par les parties, je souscris entièrement à l’opinion du juge Rennie dans Vivero c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 138 au para 11, où il mentionne que les différentes issues des affaires ayant trait à l’article 97 résultent essentiellement de la nécessité pour la SPR de procéder à une enquête individualisée dans chaque cas.

 

[16]           En l’espèce, il est faux de prétendre que la SPR a fondé sa décision simplement sur le constat que le risque auquel les demandeurs d’asile faisaient face découlait d’activités criminelles répandues en Colombie (contrairement à Lovato c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 143 au para 14 et Beltran (Tutrice à l’instance de) c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 275 au para 18). En l'instance, bien que dans les brefs motifs de sa décision, la SPR n’a pas spécifiquement énoncé sa conclusion par rapport à l’absence de risque personnel pour les demandeurs; elle a fait état de tous les faits allégués au soutien de leur demande (y compris les nombreuses demandes d’extorsion et menaces que M. Gonzalez a reçues et le fait qu’il a été poursuivi à une occasion par des individus en motocyclette), et s’est ensuite interrogée à savoir si d’autres personnes bien nanties du pays seraient généralement exposées à ce risque. De plus, la SPR a souligné que M. Gonzalez ne connaissait pas l’identité des individus qui l’avaient menacé par téléphone ou ceux qui le suivaient. Dans l’ensemble, contrairement aux décisions mentionnées au paragraphe 13 des présents motifs, rien dans la preuve ne m’indique que la SPR aurait dû conclure que le risque prospectif auquel les demandeurs feraient face, en retournant dans leur pays, serait différent de celui auquel tous les citoyens fortunés font face. En d'autres termes, le simple fait que le risque se soit matérialisé dans le passé, de façon relativement aléatoire, n'en fait pas un risque prospectif personnalisé.

 

[17]           Essentiellement, il ressort de notre jurisprudence que le risque allégué peut être personnalisé soit de par sa nature ciblée et inhabituelle (par opposition à un risque aléatoire et systématique), soit de par son étendue. Dans Perez, précitée, au para 34, la Cour a mentionné que le caractère répétitif des menaces dont avait fait l’objet le demandeur constituait plutôt une prolongation de l’extorsion et de la violence généralisée dont tous les habitants de son pays pouvaient faire l’objet. De la même façon dans Pineda, précitée, aux para 12-15, la Cour a jugé que les menaces insistantes et les agressions dont le demandeur avait été victime pendant une période prolongée devaient être prises en compte par la SPR avant qu’elle décide que le demandeur n’était pas exposé à un risque supérieur à celui auquel était exposée la population en général (voir aussi Ventura c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1107 au para 19). Dans Perez, précitée, au para 34, le juge Kelen a distingué Pineda en mentionnant que contrairement à cette dernière, « rien ne donne à penser que les maras avaient ciblé personnellement les demandeurs ou que les demandeurs étaient exposés à un plus grand risque que les autres propriétaires de petites entreprises ou les autres personnes considérées comme étant relativement riches ».

[18]           En l’espèce, la SPR a tenu compte du fait que les demandes d’extorsion étaient multiples et parfois accompagnées de menaces de mort. Cependant, il lui était loisible de conclure que ces faits étaient insuffisants pour situer les demandeurs en dehors du cadre du risque généralisé de violence et pour démontrer que, selon la prépondérance des probabilités, M. Gonzalez avait été ciblé par un gang ou risquait de l’être dans le futur. Les demandeurs n’ont soulevé aucun fait autre que ceux qui ont été notés par la SPR et ne m’ont pas convaincue en quoi, ou à partir de quel moment, leur risque serait devenu personnalisé. En l’absence de tels faits, je ne puis conclure que la conclusion de la SPR n’appartient pas aux « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 au para 47).

V.        Conclusion

[19]           Par conséquent, j’estime que les autres conclusions de la SPR, concernant la protection de l’État et l’absence de crainte subjective chez les demandeurs, n’étaient que subsidiaires et, même si elles étaient erronées, elles seraient somme toute insuffisantes pour casser la décision contestée.

[20]           Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Les parties n’ont proposé aucune question d’importance générale aux fins de certification et cette cause n'en soulève aucune.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

a.                   La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

b.                   Aucune question n’est certifiée.

 

« Jocelyne Gagné »

Juge

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER:                                         IMM-7973-12

 

INTITULÉ:                                       WILMAR BURGOS GONZALEZ ET AL c MCI

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE:               Montréal, Québec

 

DATE DE L’AUDIENCE:              Le 26 mars 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT &

JUGEMENT :                                   L’HONORABLE JUGE GAGNÉ

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 25 avril 2013

 

 

 

COMPARUTIONS:

 

Me Alain Vallières

 

POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Me Charles Jr. Jean

 

POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

 

Me Alain Vallières

Montréal (Québec)

POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Me Charles Jr. Jean

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

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