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Date : 20130305

Dossier : IMM-1530-13

Référence : 2013 CF 220

Montréal (Québec), le 5 mars 2013

En présence de monsieur le juge Roy

 

ENTRE :

 

AMATH DIOUF

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Le demandeur, M. Amath Diouf, présente une requête afin d’obtenir un sursis à l’exécution de l’ordre de déportation qui est prévue le 9 mars 2013.

[2]               Pour obtenir ledit sursis, le demandeur doit satisfaire la Cour qu’une question sérieuse doit être débattue, que le sursis est nécessaire pour éviter qu’un préjudice irréparable ne lui soit causé et que la balance des inconvénients le favorise (R.J.R. - Macdonald Inc. c Canada (Procureur général), [1994] 1 RCS 311; Toth c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1988), 86 N.R. 302 (C.A.F.)).

[3]               Les faits de cette affaire peuvent, aux fins de la demande de sursis, se résumer ainsi :

a.       le demandeur arrive au Canada le 24 janvier 2006, porteur d’un permis d’études valide;

b.      le demandeur se marie le 13 avril 2007 avec une citoyenne canadienne. Une demande de résidence permanente en sa faveur est déposée en 2007 par l’épouse du demandeur;

c.       ladite demande de résidence permanente est refusée le 7 décembre 2009. Un appel est lancé de ce refus le 27 janvier 2010, mais l’épouse du demandeur se désiste de cet appel plus tard en 2010;

d.      le demandeur revendique le statut de réfugié le 6 juin 2011; il est débouté de sa demande le 24 août 2012, le jour même où la demande est entendue, et aucun contrôle judiciaire de cette décision n’est demandé;

e.       le demandeur est en instance de divorce depuis le 17 novembre 2011; il allègue que des questions pourront devoir être débattues quant au partage du patrimoine familial. L’avocat du demandeur notait aussi dans sa lettre du 21 février 2013 à l’Agence des services frontaliers du Canada, par laquelle il demandait sursis d’exécution de l’ordonnance de renvoi, « (M)onsieur est en droit de demander une pension alimentaire de madame ».

[4]               La demande de sursis a été faite le 21 février 2013, à la suite de la décision du 13 février 2013 de fixer la date de départ au 9 mars 2013.

[5]               Le demandeur  présente deux arguments au soutien de sa demande de sursis. D’abord, il dit craindre pour sa vie s’il retourne au Sénégal. Il s’agit essentiellement de l’argument présenté pour la demande de statut de réfugié : cette demande a été rejetée du banc le 24 août 2012. La demande de sursis n’est pas aux fins d’en appeler d’une décision au sujet du statut de réfugié : la demande en contrôle judiciaire est le remède approprié. Il est donc facile de disposer de cet argument.

[6]               Le deuxième argument se résume à demander à rester au Canada pour compléter les procédures en divorce intentées il y a déjà 15 mois.

[7]               L’agent d’exécution de la loi a exposé les raisons pour lesquelles il refusait de surseoir à l’ordre d’expulsion prévue pour le 9 mars 2013 dans un écrit daté du 27 février 2013. L’agent d’exécution conclut « (Q)u’il n’existe aucun obstacle au renvoi ». Constatant son pouvoir d’intervention limité, il rappellera l’alinéa 48(2) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et déclare que le « renvoi ne lui causera pas de préjudice irréparable ». En effet, l’agent d’exécution de la loi avait affirmé que le demandeur peut faire valoir ses arguments quant à son affaire de divorce après son expulsion du pays.

[8]               Le demandeur plaide en cette Cour que la décision de l’agent d’exécution de la loi était déraisonnable. La question sérieuse porte sur la nécessité de contester les motifs de divorce et les mesures accessoires au divorce (partage du patrimoine et droit de demander une pension alimentaire); le demandeur prétend que l’agent d’exécution de la loi a manqué au principe de justice naturelle, prétendument parce qu’il a refusé d’exercer sa discrétion de reporter le renvoi. On allègue que l’agent n’a pas évalué correctement la preuve.

[9]               Je rejetterais sur cette seule base la demande de sursis en cette Cour. Le demandeur ne m’a pas convaincu qu’il y a une question sérieuse pouvant donner ouverture à un sursis. Le demandeur déclare à son affidavit qu’il devrait rester au pays « pour me permettre de régler mon divorce selon la loi » (affidavit du 26 février 2013, paragraphe 27). La Cour ne voit pas en quoi l’agent d’exécution de la loi pourrait avoir manqué à l’observation d’un principe de justice naturelle (Wang c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] 3 CF 682). De plus, les motifs donnés par l’agent, au regard de la discrétion limitée qui est sienne, satisfont les prescriptions de l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve et Labrador, [2011] 3 RCS 708, et en particulier les paragraphes 14 à 16.

[10]           Mais il y a plus. Tant les critères du préjudice irréparable que la balance des inconvénients ne favorisent pas le demandeur. Or, c’est au demandeur qu’incombe le fardeau d’en satisfaire la Cour.

[11]           Le demandeur voudrait que la Cour décide que l’inconvénient de ne pas être au Canada pour assister aux procédures en divorce ne devienne un préjudice irréparable. Avec égard, il eut fallu une démonstration plus robuste du demandeur avec preuve à l’appui pour démontrer préjudice irréparable. La seule déclaration, par ailleurs vague, ne saurait suffire.

[12]           Il s’ensuivra que la balance des inconvénients ne favorise pas le demandeur. La loi prévoit que la mesure de renvoi doit être relativement expéditive (article 48). L’intérêt public à ce que le renvoi ait lieu pour maintenir l’intégrité du système (Membreno-Garcia c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration, [1992] 3 CF 306) l’emporte d’emblée lorsqu’il n’y a ni question sérieuse, ni dommage irréparable.

[13]           En conséquence, la demande de sursis d’exécution de la mesure de renvoi prévue le 9 mars 2013 est rejetée.


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que la demande de sursis d’exécution de la mesure de renvoi prévue le 9 mars 2013 soit rejetée.

 

 

« Yvan Roy »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1530-13

 

INTITULÉ :                                      Amath Diouf c.

                                                            Le Ministre de la sécurité publique

                                                            et de la protection civile

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 4 mars 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT :           LE JUGE ROY

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 5 mars 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Dorin Cosescu

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Margarita Tzavelakos

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Dorin Cosescu

Montréal (Québec)

POUR LE DEMANDEUR

 

 

William F. Pentney

 Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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