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Date : 20130220 

Dossiers : T‑484‑11

T‑1‑12

Référence : 2013 CF 177

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 20 février 2013

En présence de monsieur le juge Harrington

 

ENTRE :

 

CAMECO CORPORATION

CAMECO INC. et

CAMECO EUROPE LTD.

 

 

 

demanderesses

 

et

 

 

 

LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE « MCP ALTONA », LE NAVIRE « MCP ALTONA »,

MS MCP ALTONA GMBH & CO KG, HARTMANN SCHIFFAHRTS GMBH & CO, HARTMANN SHIPPING ASIA PTE LTD., FRASER SURREY DOCKS LP et

PACIFIC RIM STEVEDORING LTD.

 

 

 

défendeurs

 

 

 

 

           MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

        (DÉPENS DE LA REQUÊTE VISANT À ÉTABLIR L’ORDRE DE PRIORITÉ)

 

[1]               Après le paiement des frais et les débours engagés par la personne agissant à titre de prévôt relativement à la vente judiciaire du navire MCP Altona, il y avait deux candidats au solde du produit de la vente : Cameco et HSH Nordbank AG (la banque), qui a déposé un caveat. La banque a demandé le paiement, par voie de requête, au motif que Cameco avait, tout au plus, une créance concernant la cargaison, créance qui prend habituellement rang après l’hypothèque. Cameco invoquait quatre moyens pour justifier la préséance sur la banque. Dans les motifs exposés sous la référence 2013 CF 23, j’ai tranché en faveur de la banque. Je suis saisi en l’espèce de la requête relative aux dépens présentée par la banque.

 

[2]               Selon la banque, il faudrait accorder des dépens majorés. Cameco m’invite à n’adjuger aucuns dépens ou, subsidiairement, à adjuger des dépens selon la colonne III du tarif B des Règles des Cours fédérales, soit la colonne par défaut.

 

[3]               Les parties ont été « à couteaux tirés » tout au long de la saga du MCP Altona, commençant par le retour du navire à Vancouver, le déversement d’uranium dans la cale numéro 1, la saisie du navire, sa vente, le montant des débours raisonnablement engagés par le prévôt, et que la banque avait payés, et se poursuivant à présent par la distribution du produit de la vente. Il faut aussi garder à l’esprit qu’en même temps Cameco a intenté une poursuite pour la perte encourue, a été poursuivie par d’autres personnes pour avoir causé la perte en question, et a participé à des discussions constructives, à des échanges d’actes de procédure, de documents, ainsi qu’à des essais scientifiques, dans le but de déterminer la cause du déversement et les responsabilités en découlant. Même si elle n’avait déposé qu’un caveat, la banque n’était pas entièrement à l’abri des présentes procédures; elle a participé à juste titre à plusieurs conférences de gestion de l’instance. Je ne suis cependant saisi que de la question des dépens afférents à la requête de paiement présentée avec succès par la banque. Par exemple, la banque a exprimé ses réserves quant à la contestation par Cameco de certains des débours engagés par la personne agissant à titre de prévôt et que la banque avait payés. Cette contestation a été accueillie, du moins en partie, et c’est l’officier taxateur qui doit trancher la question des dépens afférents.

 

[4]               Chacune des parties a critiqué le comportement de l’autre. Toutefois, compte tenu des motifs concernant la requête visant à établir l’ordre de priorité, je fais abstraction des observations présentées par l’une ou l’autre partie.

 

[5]               La banque souligne avec raison que la procédure que la Cour a établie quant au règlement des différends sur l’ordre de priorité en ce qui concerne le produit de la vente judiciaire des navires est plutôt de nature mixte. Si je me souviens bien, au départ, chaque réclamant devait agir à titre de demandeur et les parties qui contestaient la réclamation à titre de défendeur. Par conséquent, il y avait toute une série de déclarations et de défenses, d’affidavits de documents et d’interrogatoires préalables menant en fin de compte à un procès.

 

[6]               Je crois que c’est le juge Addy qui a décidé que cette procédure était trop lourde et trop coûteuse. Il s’est inspiré des règles sur le champ d’application, en vigueur à l’époque, plutôt que des règles sur les actions. Par conséquent, selon la pratique courante appliquée en l’espèce, chaque partie doit déposer des observations écrites énonçant ses arguments ainsi que des affidavits et des documents à l’appui. Les parties ont le droit de contre‑interroger les auteurs d’affidavit et l’affaire est ensuite instruite en l’absence des témoins. Essentiellement, c’est la procédure applicable à tous types de demandes. En effet, les demandes présentées sous le régime du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) font invariablement l’objet de procédures plus longues que les deux jours consacrés aux plaidoiries en l’espèce.

 

[7]               Cameco a invoqué quatre moyens pour expliquer pourquoi sa créance devait avoir préséance sur la créance de la banque.

 

[8]               Cameco soutenait que le coût de déchargement de sa cargaison devait être considéré comme des frais de prévôt. Ce point n’a jamais été tranché de façon définitive dans la jurisprudence canadienne. Le droit anglais et le droit américain ont retenu des solutions contraires.

 

[9]               Cameco soutenait également qu’elle avait un privilège maritime, conformément à l’article 139 de la Loi sur la responsabilité en matière maritime. Il existe très peu de jurisprudence sur ce point.

 

[10]           Cameco affirmait qu’elle avait un privilège lié à l’assistance, découlant de l’incorporation de la Convention de 1989 sur l’assistance dans le droit canadien. Il s’agissait là d’un point nouveau.

 

[11]           Enfin, Cameco faisait valoir que, dans l’exercice de sa compétence en equity, la Cour devait réarranger l’ordre de priorités. Pour les motifs qui précèdent, j’ai refusé de le faire.

 

[12]           Malgré la décision défavorable à Cameco, j’estime que la position de celle‑ci était loin d’être frivole ou vexatoire. Cameco a invoqué des points légitimes.

 

[13]           La banque a raison de dire que, afin de bien comprendre la demande de priorité de Carmeco, elle a dû examiner l’affidavit de documents concernant la créance relative à la cargaison. Il y avait plus de 20 000 de documents, ce qui n’est pas inhabituel. Dans le cadre des demandes présentées sous le régime du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) susmentionné, le dossier peut facilement comprendre 40 volumes ou plus.

 

[14]           La banque se plaint qu’elle a dû faire traduire certains de ces documents en anglais. Il s’agit d’une règle de pratique voulant que les documents présentés à l’appui et rédigés dans une langue étrangère soient traduits en anglais ou en français.

 

[15]           La banque fait aussi valoir que, n’eût été la saisie par Cameco, et la saisie connexe par Tam International, dans le dossier T‑424‑11, elle aurait pu déplacer le navire en Extrême‑Orient et obtenir un meilleur prix. Ce n’est tout simplement pas le cas. Cameco avait une cause d’action raisonnablement défendable et avait le droit de saisir le navire. Elle aurait accordé la mainlevée si les propriétaires avaient fourni une garantie d’exécution correspondant à la valeur d’une cause d’action raisonnablement défendable plus les intérêts et les dépens, ou à la valeur du navire, selon le montant le moins élevé. Ils ne l’ont pas fait. De plus, d’autres parties ont déposé des caveat‑mainlevées.

 

[16]           Quoi qu’il en soit, le navire ne pouvait pas être déplacé entre janvier et mai 2011 parce qu’il était contaminé. Carmeco a d’ailleurs nettoyé la contamination.

 

[17]           Il est illusoire de penser qu’aux termes d’un pouvoir de vente attaché à l’hypothèque, la banque aurait pu obtenir un meilleur prix. Elle pouvait seulement vendre le navire à ses débiteurs, c.‑à‑d. ses propriétaires et les ayants droit. La banque ne pouvait pas vendre le navire libre de charges et de sûretés, pourtant nombreuses, lesquelles ont été essuyées par suite de la vente devant la Cour.

 

[18]           Cameco souligne qu’aucune ébauche de mémoire de dépens et aucun affidavit à l’appui n’ont été fournis. Bien que la Cour ait tendance à accorder les dépens sous forme globale dans la mesure du possible, les éléments au dossier ne me permettent pas d’arriver à une conclusion. Par conséquent, je donnerai des directives à l’officier taxateur.

 

[19]           La banque soulève plusieurs questions complexes. La célérité requiert des dépens majorés. Les questions soulevées étaient complexes et intéressantes, mais, pour les motifs exposés dans la décision Universal Sales, Ltd c Edinburgh Assurance Co, 2012 CF 1192, [2012] ACF no 1292 (QL), et la jurisprudence qui y est citée, je devrais me rapporter au tarif susmentionné. N’eût été l’offre de règlement pertinente dans l’affaire précitée, j’aurais accordé les dépens selon le montant minimal prévu à la colonne IV. C’est ce que je ferai en l’espèce.

 

[20]           La banque a également droit à des débours raisonnables, dont les frais raisonnables liés à la traduction de l’allemand vers l’anglais et les frais de déplacement de Vancouver à Ottawa pour plaider la requête visant à établir l’ordre de priorité.

 


ORDONNANCE

 

POUR LES MOTIFS ÉNONCÉS;

LA COUR ORDONNE que l’officier taxateur taxe les dépens en faveur de HSH Nordbank AG conformément à ces motifs.

 

 

« Sean Harrington »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Semra Denise Omer

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIERS :                                                  T‑484‑11

                                                                        T‑1‑12

 

INTITULÉ :                                                  CAMECO CORPORATION, CAMECO INC. et CAMECO EUROPE LTD. c
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE « MCP ALTONA », le navire « MCP ALTONA », MS MCP ALTONA GMBH & CO KG, HARTMANN SCHIFFAHRTS GMBH & CO, HARTMANN SHIPPING ASIA PTE LTD., FRASER SURREY DOCKS LP et PACIFIC RIM STEVEDORING LTD.

 

 

REQUÊTE EXAMINÉE SUR DOSSIER À OTTAWA (ONTARIO) CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 369 DES RÈGLES DES COURS FÉDÉRALES

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE

(DÉPENS DE LA REQUÊTE

VISANT À ÉTABLIR

L’ORDRE DE

PRIORITÉ):                                                  LE JUGE HARRINGTON

 

 

DATE DES MOTIFS

ET DE L’ORDONNANCE :                       Le 20 février 2013

 

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

 

Marc D. Isaacs

 

POUR LES DEMANDERESSES

David F. McEwen, c.r.

 

POUR HSH NORDBANK AG (PERSONNE QUI A DÉPOSÉ UN CAVEAT)

 


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Isaacs & Co.

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDERESSES

 

Borden Ladner Gervais LLP

Avocats

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

POUR LES DÉFENDEURS

LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE « MCP ALTONA », LE NAVIRE « MCP ALTONA », MS MCP ALTONA GMBH & CO KG, HARTMANN SCHIFFAHRTS GMBH & CO,

HARTMANN SHIPPING ASIA PTE LTD.

 

Fasken Martineau

Avocats

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

POUR LES DÉFENDERESSES

FRASER SURREY DOCKS LP ET PACIFIC RIM STEVEDORING LTD.

Alexander Holburn Beaudin & Lang LLP

Avocats

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

POUR HSH NORDBANK AG (PERSONNE QUI A DÉPOSÉ UN CAVEAT)

 

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