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Date : 20121210

Dossier : IMM-1734-12

Référence : 2012 CF 1460

[traduction française certifiée, non révisée]

Ottawa (Ontario), le 10 décembre 2012

En présence de monsieur le juge Boivin

 

 

ENTRE :

 

PAULINA ALEXANDRA SANCHEZ MANTILLA (alias PAULINA ALEXAND SANCHEZ MANTILLA), JHONNY JAVIER BILBAO MORILLO, EMILY GIULIANA BILBAO SANCHEZ, et MARIA FABIOLA MANTILLA PROANO

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire, présentée conformément au paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la Loi], de la décision, en date du 20 janvier 2012, par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a refusé de reconnaître aux demandeurs la qualité de réfugiés au sens de l’article 96 et du paragraphe 97(1) de la Loi.

 

Contexte factuel

[2]               Les demandeurs sont des citoyens de l’Équateur et appartiennent tous à la même famille. Paulina Alexandra Sanchez Mantilla (la demanderesse principale) est l’épouse de Jhonny Javier Bilbao Morillo (le demandeur secondaire). Emily Giuliana Bilbao Sanchez (Emily) est leur fille âgée de cinq (5) ans, et Maria Fabiola Mantilla Proano (Maria) est la mère de la demanderesse principale.

 

[3]               La demanderesse principale et le demandeur secondaire sont arrivés au Canada le 23 octobre 2009 en compagnie de leur fille Emily et ont demandé l’asile le jour même. Maria est arrivée au Canada le 5 mai 2010 et a également demandé l’asile (affidavit de la demanderesse principale, dossier de demande des demandeurs, page 17).

 

[4]               Le demandeur secondaire est psychologue. Mettant à profit sa formation, le demandeur secondaire a, avec la demanderesse principale, mis au point un programme de motivation vers la fin de 2003. Ce programme, « Skimming », était inspiré de valeurs chrétiennes et avait une durée de quatorze semaines. Ils ont ouvert leurs premiers centres à Quito et à Ambato en 2005. Comme leur entreprise prenait de l’expansion, ils ont embauché Mme Patricia Mendoza et M. Santiago Lemos Jaramillo (M. Lemos) pour travailler pour eux. M. Lemos a été muté à Ambato, mais les demandeurs ont découvert qu’il ne suivait pas leur programme, qu’il le critiquait et qu’il utilisait leur nom commercial pour faire des achats. Les demandeurs allèguent que M. Lemos n’était pas d’accord avec l’orientation chrétienne du programme. La demanderesse principale et le demandeur secondaire ont congédié M. Lemos et Mme Mendoza le 13 septembre 2005. M. Lemos aurait menacé la demanderesse principale et le demandeur secondaire en leur disant qu’ils regretteraient de l’avoir mis à la porte.

 

[5]               Le 14 septembre 2005, la demanderesse principale et le demandeur secondaire se sont rendus à Riobamba pour louer des locaux supplémentaires pour leur entreprise qui était en pleine croissance. On leur a dit que M. Lemos avait déjà tenté de louer les mêmes locaux, mais le propriétaire a décidé de les louer aux demandeurs parce qu’ils entretenaient déjà des liens d’affaires. Le 15 septembre 2005, la demanderesse principale et le demandeur secondaire ont participé à une foire publique pour faire la promotion de leur entreprise. Ils sont tombés sur M. Lemos, qui les a accusés d’avoir volé ses locaux à Riobamba. Il aurait alors menacé de tuer le demandeur secondaire et aurait commencé à le frapper. La demanderesse principale et le demandeur secondaire ont réussi à quitter la foire avec l’aide de passants. Ils affirment qu’ils se sont présentés au bureau du procureur général pour faire un signalement le lendemain, mais qu’on leur a répondu qu’il leur faudrait payer plus d’argent s’ils voulaient qu’une enquête en bonne et due forme soit menée. Ils ont alors décidé de ne pas pousser les choses plus loin.

 

[6]               En juin 2006, la demanderesse principale s’est fait voler à son bureau son sac à main, dans lequel se trouvaient des documents, des relevés bancaires ainsi que les clés de son bureau. Elle a signalé le vol à la police, mais elle affirme qu’aucune enquête n’a été menée.

 

[7]               La demanderesse principale affirme qu’alors qu’elle était enceinte en 2007, son mari et elle ont commencé à recevoir des appels téléphoniques étranges à la maison et à leur bureau de Quito. Les auteurs de ces appels téléphoniques étaient des hommes qui demandaient à parler à la demanderesse principale ou au demandeur secondaire, pour ensuite raccrocher. Il semble que les hommes qui appelaient étaient au courant des moments où la demanderesse principale était seule à la maison et qu’ils en profitaient pour la menacer en lui disant qu’ils savaient qu’elle était seule et enceinte.

 

[8]               À la mi‑février 2007, alors que la demanderesse principale était seule chez elle, des individus ont tenté de s’introduire par effraction chez elle. La demanderesse principale affirme qu’elle a appelé la police et qu’on lui a répondu qu’il n’y avait personne au poste de disponible pour se porter à son secours. Elle a appelé des voisins qui auraient crié en disant aux hommes de s’en aller, ce qu’ils ont fini par faire. Un épisode semblable se serait reproduit en octobre 2007. Cette fois‑ci, la police est venue. Toutefois, comme personne n’avait été blessé et que rien n’avait été volé, ils n’ont rien pu faire et ils n’ont pas permis à la demanderesse principale de faire un signalement. La demanderesse principale et le demandeur secondaire ont associé ces événements à M. Lemos parce qu’ils étaient tous les deux survenus pendant que le demandeur secondaire était en visite à Latacunga (et que M. Lemos devait savoir que la demanderesse principale était seule). Les demandeurs affirment qu’ils ont souvent appelé la police au cours de la période de 2007-2008, mais affirment que les policiers ne sont jamais venus chez eux.

 

[9]               À la suite d’autres problèmes qu’ils ont eus avec des employés, la demanderesse principale et le demandeur secondaire ont dû congédier plusieurs personnes. Ils ont eu plusieurs problèmes d’ordre financier qu’ils ont attribués à l’influence de M. Lemos.

 

[10]           La demanderesse principale et le demandeur secondaire ont déménagé le 1er janvier 2009 et ont continué à recevoir des menaces par téléphone. En mai 2009, ils sont allés vivre chez la mère de la demanderesse principale, Maria. Les appels téléphoniques auraient continué.

 

[11]           Mme Mendoza aurait dit à la demanderesse principale et au demandeur secondaire que M. Lemos croyait qu’ils lui avaient jeté une malédiction et que la seule façon de rompre cette malédiction était d’avoir des relations sexuelles avec leur fille, Emily. En septembre 2009, la demanderesse principale et le demandeur secondaire ont vu M. Lemos à l’église. Craignant pour sa fille, la demanderesse principale s’est rendue à la garderie où elle affirme avoir vu M. Lemos en train de demander à la personne responsable où se trouvait leur fille. La demanderesse principale a repris sa fille et aurait vu M. Lemos s’enfuir des lieux. Craignant pour leur fille, les demandeurs ont décidé de quitter le pays la dernière semaine de septembre 2009.

 

[12]           En octobre 2009, de l’argent a été dérobé du compte bancaire de la mère de la demanderesse principale, Maria. Cette dernière aurait aussi reçu plusieurs appels téléphoniques de menaces après que la demanderesse principale et le demandeur secondaire eurent quitté le pays avec leur fille, et un véhicule a fait marche arrière devant sa porte principale et l’a endommagée. En janvier 2010, un homme aurait tenté en vain de s’introduire dans la voiture de Maria, mais Maria a réussi à s’échapper en roulant. Le 29 janvier 2010, un homme a réussi à fracasser la fenêtre du passager de sa voiture et à s’emparer du sac à main de Maria dans lequel se trouvait son téléphone cellulaire. Le même soir, un homme aurait appelé le frère et d’autres amis de la demanderesse principale à la recherche de cette dernière et du demandeur secondaire. Maria a réussi à faire un signalement à la police, mais celui‑ci ne portait que sur les pièces d’identité qu’elle avait perdues, étant donné que le vol était jugé mineur. Elle a ensuite été frappée par un taxi et, lorsque trois (3) hommes sont sortis du véhicule, ils lui auraient crié quelque chose comme [traduction] « Saluez bien Paulina [la demanderesse principale] ». Maria a tenté de signaler à la police tous ces événements qu’elle croyait reliés entre eux et elle s’est rendue au bureau du procureur général le 31 mars 2010. Les policiers lui ont dit qu’ils ne pouvaient rien faire à moins qu’elle porte des accusations officielles et qu’elle identifie son agresseur, ce qu’elle ne pouvait faire.

 

[13]           L’audience des demandeurs a eu lieu devant la Commission le 16 septembre 2011 et le 24 novembre 2011. La décision a été rendue le 20 janvier 2012.

 

La décision contestée

[14]           La Commission a exposé de façon détaillée les faits et les allégations contenus dans le dossier des demandeurs (dossier du tribunal, aux pages 4 à 9). Elle n’a pas remis en question leur identité. La Commission a conclu que les demandeurs n’avaient pas la qualité de réfugiés au sens de la Convention, étant donné qu’ils auraient été persécutés par M. Lemos en tant que victimes de crime, de corruption et de vendetta et qu’il s’agit de motifs qui ne répondent en général pas à la définition de « réfugié » au sens de la Convention en raison de l’absence de lien avec l’un des cinq motifs énumérés à l’article 96.

 

[15]           La Commission a donc ensuite effectué une analyse des facteurs prévus à l’article 97, laquelle est contenue dans une même section intitulée « Crédibilité ». La Commission a mentionné les menaces de mort dont les demandeurs avaient fait l’objet ainsi que l’agression dont M. Lemos avait été l’instigateur à l’occasion de la foire publique en septembre 2005. La Commission s’est finalement dite d’avis qu’elle ne disposait d’aucun élément de preuve convainquant que M. Lemos avait participé à la série d’événements qui, selon les demandeurs, s’étaient produits, hormis l’incident survenu à la foire publique et à l’église. La Commission a jugé sur le fondement de ses hésitations lors de son interrogatoire à l’audience, que l’affirmation que Maria avait faite dans son FPR suivant laquelle les individus étaient sortis d’un taxi pour lui dire [traduction] « Saluez bien Paulina » n’était qu’un embellissement de sa version des faits.

 

[16]           La Commission a conclu, suivant la prépondérance des probabilités, qu’il n’était pas crédible que les demandeurs d’asile soient exposés à une menace à leur vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités s’ils devaient retourner en Équateur. Les demandeurs n’avaient donc ni la qualité de réfugiés au sens de la Convention ni celle de personnes à protéger.

 

Question en litige

[17]           La seule question à laquelle la Cour doit répondre dans le cas qui nous occupe est celle de savoir si la décision de la Commission est déraisonnable. Les demandeurs ne contestent pas la conclusion tirée par la Commission au sujet de l’article 96 de la Loi, mais ils soutiennent que la conclusion de la Commission suivant laquelle ils ne sont exposés à aucun risque au sens de l’article 97 de la Loi est déraisonnable.

Dispositions législatives applicables

[18]           Les dispositions suivantes de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés s’appliquent à la présente instance :

PARTIE 2

Section 1

Notions d’asile, de réfugié et de personne à protéger

 

 

 

Définition de « réfugié »

 

A qualité de réfugié au sens de la Convention – le réfugié – la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

 

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

PART 2

Division 1

Refugee Protection, Convention Refugees and Persons in Need of Protection

 

Convention refugee

 

A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

 

 

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

Personne à protéger

 

(1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

 

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales – et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

 

Personne à protéger

 

(2) A également qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et fait partie d’une catégorie de personnes auxquelles est reconnu par règlement le besoin de protection.

Person in need of protection

 

(1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

 

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

 

 

Person in need of protection

 

(2) A person in Canada who is a member of a class of persons prescribed by the regulations as being in need of protection is also a person in need of protection.

 

 

Norme de contrôle

[19]           Les parties s’entendent pour dire que la norme de contrôle applicable dans le cas des questions d’appréciation de la crédibilité est la raisonnabilité (Dunsmuir c Nouveau- Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190). La décision doit donc appartenir aux « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 47).

 

Analyse

[20]           La Cour prend acte de l’argument du défendeur qu’il convient de faire preuve d’un degré élevé de déférence envers les tribunaux administratifs en ce qui concerne les questions de crédibilité. La Cour estime toutefois que la présente affaire justifie son intervention.

 

[21]           Bien qu’une partie importante de la décision de la Commission se trouve dans la section intitulée « Crédibilité », il ressort d’une lecture attentive des motifs de la Commission que celle-ci a ajouté foi aux faits relatés par les demandeurs. La Commission n’a toutefois pas cru que M. Lemos était impliqué dans tous les événements relatés. Il ne s’agit pas là d’une conclusion négative en ce qui concerne la crédibilité du demandeur, étant donné que ces derniers n’avaient pas de connaissance directe ou ni de preuve de l’implication personnelle de M. Lemos dans ces événements. Ils ont toutefois affirmé qu’ils croyaient que c’était lui qui était à l’origine des incidents survenus au cours des dernières années. Sans tirer quelque conclusion négative que ce soit en ce qui concerne la crédibilité des demandeurs, la Commission poursuit en rejetant la demande des demandeurs au motif qu’elle n’est pas convaincue que la même personne est derrière tous les incidents qui ont empoisonné la vie des demandeurs. La Cour estime que cette conclusion était déraisonnable. La Cour est d’accord avec les demandeurs pour dire que la Commission a tiré une « conclusion négative au sujet de la vraisemblance » sans citer de contradictions ou d’incohérences qui auraient justifié sa conclusion (Mahmood c Canada (Ministre  de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1526, aux paragraphes 14 et 16, 143 ACWS (3d) 1091 [décision Mahmood]).

 

[22]           La Commission a déclaré ceci : « aucun élément de preuve convaincant ne permet de croire que Lemos ait été lié à l’une au l’autre de ces affaires » [Non souligné dans l’original]; (décision de la Commission au paragraphe 37, dossier du Tribunal à la page 14). Il n’en demeure pas moins qu’il y avait un grand nombre d’« incidents » de ce genre et que les demandeurs croyaient fermement que M. Lemos en était l’instigateur. La Commission a omis de mentionner et d’examiner la preuve (Cepeda-Gutierrez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 157 CFTI 35, 1998 CanLII 8667) même si de nombreux documents lui avaient été soumis :

a.       un bail indiquant que les demandeurs avaient déménagé le 1er janvier 2009 (dossier de demande des demandeurs, page 106);

b.      une déclaration de la femme de ménage de Maria concernant les appels téléphoniques reçus au domicile de Maria et les embuscades qui lui avaient été tendues dans les véhicules (dossier de demande des demandeurs, page 110);

c.       une lettre de l’église concernant l’incident qui aurait impliqué M. Lemos et leur fille Emily (dossier de demande des demandeurs, page 135);

d.      une lettre d’un employé concernant les menaces qu’aurait proférées M. Lemos après avoir été congédié et les appels téléphoniques qu’il aurait par la suite faits au bureau (dossier de demande des demandeurs, page 139);

e.       une lettre d’un voisin au sujet de l’introduction par effraction de certains individus au domicile de la demanderesse principale et du demandeur secondaire (dossier de demande des demandeurs, page 146);

f.       une plainte formulée au sujet de l’incident de septembre 2005 à la foire (dossier de demande des demandeurs, page 175);

g.      une plainte portée à la police au sujet du vol du sac à main et des documents de la demanderesse principale (dossier de demande des demandeurs, page 177);

h.      une plainte portée à la police au sujet de l’argent volé dans le compte bancaire de Maria (dossier de demande des demandeurs, page 179);

i.        une plainte portée à la police au sujet des appels téléphoniques reçus au domicile de Maria (dossier de demande des demandeurs, page 184);

j.        une plainte portée à la police au sujet du vol de documents de Maria (dossier de demande des demandeurs, page 187).

 

[23]           Toutefois, malgré ces éléments de preuve, la Commission a conclu qu’« il n’est pas crédible que les demandeurs d’asile soient exposés à une menace à leur vie […] s’ils retournaient en Équateur » (décision de la Commission, au paragraphe 39, dossier du Tribunal, à la page 13). La Cour estime qu’il était déraisonnable de la part de la Commission d’accepter la série d’incidents dont ont été victimes les demandeurs tout en ne tirant aucune conclusion négative au sujet de leur crédibilité et en concluant, selon la prépondérance des probabilités, que les demandeurs ne courraient aucun risque, et ce, simplement parce qu’elle avait des réserves au sujet de l’implication de M. Lemos. Dans Theophile c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 961, 396 FTR 33, le juge Russell a jugé qu’il convient de procéder à une analyse en bonne et due forme de l’article 97 même si le demandeur n’arrive pas à démontrer l’identité de l’auteur de l’agression. Le juge Russell a également jugé que la preuve semblait « indiquer que le demandeur a[vait] effectivement été ciblé et qu’on a[vait] tenté avec acharnement de le tuer » (décision Theophile, précitée, au paragraphe 62).

 

[24]           Dans le cas qui nous occupe, la Cour est d’avis que la Commission a tiré une conclusion contradictoire et déraisonnable en semblant accepter le fondement factuel sur lequel reposait la demande des demandeurs pour ensuite conclure qu’il n’était pas crédible que les demandeurs soient exposés à un risque. La décision n’appartient pas aux « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 47). La demande de contrôle judiciaire sera par conséquent accueillie.


JUGEMENT

 

LA COUR ACCUEILLE la demande de contrôle judiciaire. Aucune question n’est certifiée.

 

 

« Richard Boivin »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1734-12

 

INTITULÉ :                                      Paulina Alexandra Sanchez Mantilla et autres c MCI

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 10 octobre 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :           LE JUGE BOIVIN

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 10 décembre 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Erin Christine Roth

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Neeta Logsetty

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Bellissimo Law Group

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

Myles J. Kirvan 

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

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