Référence : 2012 CF 310
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Ottawa (Ontario), le 15 mars 2012
En présence de monsieur le juge Zinn
ENTRE :
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LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
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et
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MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
[1] Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire qui vise la décision par laquelle la Section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada a accueilli l’appel interjeté à l’encontre de la décision d’un agent des visas de refuser de délivrer un titre de voyage pour revenir au Canada au motif que le défendeur ne s’était pas conformé à l’obligation de résidence imposée aux résidents permanents par l’article 28 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27.
[2] La Commission a souscrit à la conclusion de l’agent portant que le défendeur ne s’était pas conformé à l’obligation de résidence prévue par la Loi, mais elle a estimé qu’il y avait des motifs d’ordre humanitaire justifiant la prise de mesures spéciales en application de la Loi.
[3] La Commission a indiqué que, pour statuer sur l’appel, elle s’était fondée sur la liste, non exhaustive, des facteurs d’ordre humanitaire énoncés dans les décisions Bufete Arce c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, [2003] DSAI no 370, et Kok c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, [2003] DSAI no 514. La Commission a conclu qu’aucun enfant ne serait touché par la décision et que la situation de la famille du demandeur ne représentait pas un motif d’ordre humanitaire. De plus, elle a conclu que les longues absences du Canada du défendeur s’expliquaient par des choix personnels, ce qui ne représentait pas un motif d’ordre humanitaire. Cependant, la Commission a conclu que deux facteurs militaient en faveur du demandeur : celui des difficultés et celui de l’établissement.
[4] Le ministre soutient que la décision de la Commission à l’égard de ces deux facteurs est déraisonnable.
[5] Lorsqu’elle s’est prononcée sur les difficultés, la Commission a jugé que certaines difficultés étaient révélées par le fait que le défendeur avait rempli les conditions de son établissement, par l’investissement considérable qu’il avait effectué et qui n’avait pas porté fruit, ainsi que par son témoignage attestant qu’il avait consacré beaucoup de temps, d’énergie et de ressources financières pour créer de nouvelles entreprises. La Cour ne peut s’ingérer dans l’appréciation que la Commission a faite de la preuve, même s’il est possible qu’elle ait soupesé et apprécié ces facteurs différemment. À mon avis, la conclusion tirée par la Commission relativement aux difficultés constitue une issue acceptable compte tenu de la preuve et ne justifie pas l’annulation de la décision.
[6] Toutefois, l’analyse et la conclusion de la Commission relativement à l’établissement comportent des lacunes. Elle s’est exprimée ainsi au sujet de l’établissement :
Comme nous l’avons vu, l’appelant s’était établi au Canada grâce à ses investissements. Il est dommage que l’entreprise précédente de l’appelant n’ait pas prospéré comme il l’espérait. D’après son témoignage, l’appelant dispose de fonds minimes dans un compte d’épargne au Canada. L’appelant a déclaré qu’il n’avait pas d’autres avoirs au Canada. Le tribunal admet que l’appelant a démontré son établissement au Canada par les fonds de son compte d’épargne et ses investissements précédent au pays. Le tribunal estime que ce facteur milite en faveur de l’appel. [Non souligné dans l’original.]
[7] Je conviens avec le demandeur que la Commission n’a pas tenu compte adéquatement de l’absence d’éléments de preuve démontrant l’établissement au moment de l’audience, comme l’exige la jurisprudence de la Cour : Ambat c Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2011 CF 292. La Commission avait l’obligation de tenir compte du degré d’établissement du défendeur, initialement et au moment de l’audience; elle n’a pas tenu compte adéquatement de l’établissement au moment de l’audience, soulignant uniquement ses investissements antérieurs.
[8] À l’audience, le défendeur a déclaré avoir environ 3 000 $ dans un compte bancaire canadien. Il n’a pas de famille au Canada, il n’a pas le statut de résident permanent et il n’y avait aucun élément de preuve, à part une brochure et l’acte de vente de l’une de ses propriétés en Inde, démontrant l’existence actuelle de projets d’affaires au Canada. De plus, la Commission a omis de soupeser et d’apprécier la preuve du degré élevé d’établissement du défendeur en Inde au regard de son degré minime d’établissement actuel au Canada.
[9] Pour ces motifs, j’estime que la conclusion de la Commission relativement à l’établissement ne repose sur aucune preuve. La preuve au dossier militerait plutôt à l’encontre d’une conclusion d’établissement au Canada. Par conséquent, j’estime que l’appréciation de la preuve par la Commission et sa décision relativement à l’établissement sont déraisonnables.
[10] Compte tenu de l’obligation de pondérer les facteurs découlant de la jurisprudence et du fait que je rejette la conclusion de la Commission relativement à l’établissement, la majorité des facteurs examinés par la Commission ne militent pas en faveur du défendeur. Par conséquent, la conclusion à laquelle est parvenue la Commission ne saurait être maintenue.
[11] Aucune des parties n’a proposé de question à certifier.
JUGEMENT
LA COUR STATUE comme suit :
1. La présente demande est accueillie;
2. La décision rendue le 14 juillet 2011 par laquelle la Section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada a accueilli, pour des motifs d’ordre humanitaire, l’appel interjeté par le défendeur à l’encontre de la décision d’un agent des visas de lui refuser un titre de voyage pour revenir au Canada est annulée;
3. L’affaire est renvoyée à la Commission pour qu’un tribunal différemment constitué rende une nouvelle décision. Aucune question n’est certifiée.
Traduction certifiée conforme
Jenny Kourakos, LL.L.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM‑4916‑11
INTITULÉ : LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION c. SUBIR MUKERJEE
LIEU DE L’AUDIENCE : Toronto (Ontario)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 29 février 2012
DATE DES MOTIFS : Le 15 mars 2012
COMPARUTIONS :
Leila Jawando
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Felix Hau
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
MYLES J. KIRVAN Sous‑procureur général du Canada Toronto (Ontario)
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GREEN AND SPIEGEL LLP Avocats Toronto (Ontario)
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