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Date : 20120308

Dossier : IMM‑4207‑11

Référence : 2012 CF 299

[traduction française certifiée, non révisée]

Ottawa (Ontario), le 8 mars 2012

En présence de monsieur le juge Russell

 

 

ENTRE :

 

PROSPER NIYONZIMA

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

Le ministre de la citoyenneté

et de l’IMMIGRATION

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

Motifs du jugement et jugement

 

INTRODUCTION

 

[1]               Il s’agit d’une demande présentée en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi), sollicitant le contrôle judiciaire de la décision d’une agente d’examen des risques avant renvoi (l’agente), datée du 28 avril 2011 (la décision), laquelle a rejeté la demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR) du demandeur.

 

Contexte

 

[2]               Le demandeur est un citoyen tutsi du Burundi, âgé de 29 ans. Il est arrivé au Canada avec sa tante et le mari de cette dernière en 1995, et il est un résident permanent du Canada depuis octobre de cette même année. Il croit que les rebelles hutus chercheront à le tuer s’il est renvoyé au Burundi.

 

[3]               En 1994, les milices hutues du Burundi ont tué plusieurs membres de la famille élargie du demandeur. Sa mère a fui avec lui et ses frères et sœurs pour échapper à la violence et pour assurer sa sécurité elle a envoyé le demandeur chez sa tante. Elle s’y est par la suite rendue pour lui rendre visite, et est partie avec l’intention de revenir à un autre moment, mais elle n’a jamais pu le faire, celle‑ci ainsi que les jeunes frères et sœur du demandeur ayant tous été tués par la suite. Le demandeur affirme que le traumatisme qu’il a subi au Burundi continue de le hanter.

 

[4]               Six ans environ après son arrivée au Canada, le demandeur s’est impliqué dans des activités criminelles. En 2001, il a été déclaré coupable d’introduction par effraction en vertu de l’alinéa 348(1)b) du Code criminel du Canada, LRC 1985, c C‑46 (le Code criminel). Le 30 mars 2005, il a été reconnu coupable de vol qualifié en vertu de l’article 344 du Code criminel; par suite de cette déclaration de culpabilité, la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la CISR) a établi un rapport contre le demandeur en vertu du paragraphe 44(1) de la Loi. Le 16 novembre 2005, la CISR a conclu que le demandeur était interdit de territoire au Canada en vertu de l’alinéa 36(1)a) de la Loi et a pris une mesure d’expulsion contre lui.

 

[5]               Le demandeur a présenté une demande de sursis à l’exécution de la mesure d’expulsion à la Section d’appel de l’immigration (la SAI) en application du paragraphe 63(3) de la Loi. La SAI a tenu une audience le 14 décembre 2007. La décision de la SAI, datée du 3 janvier 2008, accordait un sursis à l’exécution de la mesure d’expulsion, assorti de conditions. Suivant ces conditions, il était interdit au demandeur de posséder une arme offensive et de commettre d’autres infractions criminelles.

 

[6]               En septembre 2010, le demandeur a été déclaré coupable de possession d’une arme à feu. Il s’agissait d’une violation des conditions du sursis à l’exécution de la mesure d’expulsion. Par conséquent, la mesure d’expulsion est devenue exécutoire. Le 16 décembre 2010, l’ASFC a informé le demandeur qu’il avait le droit de présenter une demande d’ERAR, ce qu’il a fait le 30 décembre 2010. L’agente a examiné la demande d’ERAR et, le 28 avril 2011, a conclu qu’il y avait moins qu’une simple possibilité que le demandeur soit persécuté au Burundi. Elle a également conclu qu’il n’y avait aucun motif sérieux de croire que le demandeur était exposé à un risque de torture au Burundi. Enfin, l’agente a conclu qu’il n’existait aucun motif raisonnable de croire que le demandeur était exposé à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités. Elle a donc rejeté la demande d’ERAR. L’agente a avisé le demandeur de la décision dans une lettre datée du 28 avril 2011.

 

La décision faisant l’objet du contrôle

 

[7]               En l’espèce, la lettre transmise au demandeur le 28 avril 2011 (la lettre) ainsi qu’un formulaire d’examen des risques avant renvoi (le formulaire d’ERAR) que l’agente a rempli constituent la décision.

 

[8]               La lettre indique que la demande d’ERAR du demandeur a été rejetée pour le motif suivant :

[traduction] Il a été déterminé que vous ne seriez pas exposé au risque d’être persécuté, au risque d’être soumis à la torture, à une menace à votre vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités si vous retourniez dans votre pays de nationalité ou à votre résidence habituelle.

 

 

[9]               Le formulaire d’ERAR indique que l’agente a conclu que le demandeur n’est pas une personne décrite au paragraphe 112(3) de la Loi, ce qui l’empêcherait d’obtenir la protection. Le demandeur n’était pas non plus visé par l’article 113. L’agente a donc évalué le risque auquel il était exposé au Burundi suivant les articles 96 et 97 de la Loi.

 

Risque invoqué par le demandeur

 

[10]           L’agente a examiné les circonstances entourant la mort des membres de la famille du demandeur. Elle s’est reportée à ses observations dans lesquelles il déclarait que les événements qu’il avait vécus au Burundi continuaient de le hanter et qu’il craignait d’être ciblé s’il était renvoyé. Elle a aussi relevé qu’il disait être exposé à des risques au Burundi parce qu’il avait survécu à des crimes de guerre, sans aucune famille ni d’autres liens avec ce pays.

 

[11]           L’agente a déclaré qu’elle avait examiné tous les éléments de preuve présentés dans le cadre de la demande d’ERAR, à l’exception des éléments de preuve que le demandeur a présentés pour montrer qu’il est établi au Canada. L’agente a conclu qu’il n’avait pas démontré comment cette preuve était liée au risque auquel il était exposé au Burundi. Le demandeur a par ailleurs indiqué que sa femme et son enfant résident tous deux au Canada, mais l’agente a constaté qu’aucun d’eux ne faisait l’objet d’une mesure de renvoi, de sorte qu’ils n’étaient pas visés par la demande d’ERAR.

 

Évaluation des risques

 

[12]           L’agente a examiné les faits entourant la demande d’ERAR du demandeur. Elle a indiqué qu’elle avait examiné ses observations, de même que les motifs fournis par la SAI au soutien de sa décision d’accorder le sursis à l’exécution de la mesure d’expulsion en 2008 (les motifs de la SAI). Ces motifs indiquent que le demandeur a obtenu le statut de résident permanent en même temps que sa tante et les quatre enfants biologiques de celle‑ci. Les motifs de la SAI indiquent également qu’il a été reconnu coupable d’une infraction criminelle pour la première fois en 2001 et que les déclarations de culpabilité qui ont suivi constituaient le fondement de la mesure d’expulsion prononcée contre lui. L’agente a pris note du sursis de cinq ans accordé par la SAI et de la déclaration de culpabilité prononcée en septembre 2010.

 

[13]           L’agente a ensuite examiné la question de savoir si le demandeur était exposé à des risques au sens des articles 96 ou 97 de la Loi. Elle a constaté qu’au Burundi les tensions entre Hutus et Tustis existent depuis longtemps. Elle a conclu que les événements que le demandeur a décrits s’inscrivaient dans la violence qui marque les rapports entre les deux groupes, et qui a éclaté après l’élection du président Ndadaye du Burundi, un Hutu, qui a par la suite été assassiné. En ce qui a trait au détail du conflit ethnique au Burundi au cours de la période pertinente, l’agente s’est appuyée sur un rapport du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés publié en 2004 et intitulé Minorities at Risk Project: Chronology for Tutsis in Burundi.

 

[14]           L’agente a également mentionné un document de BBC News Country Profile Burundi, mis à jour le 11 décembre 2010, lequel indiquait qu’il y avait un cessez‑le‑feu entre les Tutsis et les Hutus. Un rapport du département d’État des États‑Unis indiquait aussi que des élections, qui étaient de façon générale jugées libres et justes, avaient eu lieu en 2010. L’agente a également noté que l’on signalait des exécutions extrajudiciaires effectuées par les forces de sécurité burundaises et qu’il y avait des problèmes de responsabilité en ce qui concerne les forces de sécurité. Bien que plusieurs organismes non gouvernementaux exercent leurs activités au Burundi, les critiques à l’égard du gouvernement n’étaient pas tolérés en règle générale.

 

[15]           L’agente a conclu que la preuve documentaire qui lui avait été présentée indiquait qu’il y avait au Burundi des centres de transfert où les réfugiés qui revenaient pouvaient recevoir de l’aide, notamment de la nourriture, des outils agricoles et des subventions en argent. Elle a également examiné des éléments de preuve qui donnaient à penser que ceux qui retournaient au Burundi étaient aux prises avec des différends fonciers et que la corruption constituait un problème. Elle a relevé qu’en 2009, le gouvernement canadien avait levé la suspension temporaire des renvois au Burundi.

 

[16]           Dans ses observations, le demandeur a présenté à l’agente un avis aux voyageurs du département d’État des États‑Unis, daté du 4 novembre 2010. L’agente a conclu que cet avis aux voyageurs visait les citoyens des États‑Unis et les membres du personnel de l’ambassade américaine qui ne se trouvaient pas dans une situation semblable à celle du demandeur.

 

[17]           L’agente a indiqué que le demandeur croit que sa famille a été tuée non pas parce qu’elle était tutsie, mais pour une raison autre. Elle a constaté qu’il n’avait pas établi comment il était arrivé à cette conclusion et qu’il n’avait présenté aucune preuve objective à l’appui de cette croyance. L’agente a conclu qu’il était raisonnable de croire que sa tante connaissait les activités politiques de sa famille, le cas échéant, mais le demandeur n’avait fourni aucun renseignement sur cette question.

 

[18]           Le demandeur a affirmé qu’il subissait encore les contrecoups des événements dont il a été témoin au Burundi, mais l’agente a conclu qu’il n’avait pas fourni de preuve objective à l’appui de cette affirmation. L’agente a déclaré que le demandeur l’avait invitée à inférer qu’il existait des raisons impérieuses pour ne pas le renvoyer au Burundi, mais qu’elle ne pouvait conclure en ce sens.

 

[19]           L’agente a également examiné une lettre fournie par le demandeur provenant du Centre Canadien pour Victimes de Torture (CCVT), signée par Ezat Mossallanejad (M. Mossallanejad), un conseiller en établissement et en traumatisme et analyste des politiques au CCVT. Dans cette lettre, il indiquait qu’il avait accepté le demandeur comme client pour du counseling après avoir évalué ce qu’il avait vécu au Burundi. L’agente a accordé peu de valeur probante à cette lettre parce que son contenu n’était que le reflet de ce que le demandeur avait dit à M. Mossallanejad. De plus, la lettre n’indiquait pas le genre de traitement que recevait le demandeur, les types de tests diagnostiquent administrés ni que des diagnostics médicaux ou cliniques avaient été posés.

 

[20]           L’agente a conclu que le demandeur n’avait pas fourni de preuve objective pour prouver que les conditions existant au Burundi ou son expérience passée dans ce pays constituaient des raisons impérieuses pour ne pas le renvoyer. Elle a également indiqué que l’évaluation du risque dans un ERAR est prospective et a conclu que même si les conditions n’étaient pas idéales au Burundi, elles s’amélioraient. La preuve documentaire présentée par le demandeur pour montrer qu’il courrait des risques ne mentionnait pas sa famille ou lui directement et il n’avait pas indiqué le lien entre cette preuve et son risque personnel.

 

Conclusion

 

[21]           Vu l’ensemble de la preuve qui lui a été présentée, l’agente a conclu que le demandeur n’était pas exposé à un risque d’être persécuté au sens de l’article 96 ou à un risque de menaces à sa vie ou à un risque de traitements ou peines inhabituels et inusités au sens de l’article 97. Elle a donc rejeté sa demande d’ERAR.

 

Questions en litige

 

[22]           Le demandeur soulève les questions en litige suivantes :

a.       L’agente a‑t‑elle omis de tirer une conclusion quant aux raisons impérieuses sous le régime du paragraphe 108(4)?

b.      L’agente avait‑elle à l’égard du demandeur des attentes déraisonnables quant à la preuve objective à soumettre à l’appui de sa demande d’ERAR?

c.       La conclusion de l’agente selon laquelle il n’y avait pas de raisons impérieuses en vertu du paragraphe 108(4) était‑elle raisonnable?

 

 

Norme de contrôle

 

[23]           Dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, la Cour suprême du Canada a statué qu’il n’était pas dans tous les cas nécessaire de se livrer à l’analyse visant à déterminer la norme de contrôle applicable. Lorsque la norme de contrôle applicable à une question dont le tribunal est saisi est bien établie par la jurisprudence, le tribunal de contrôle peut y recourir. Ce n’est que lorsque cette recherche jurisprudentielle se révèle infructueuse que le tribunal de contrôle doit entreprendre l’examen des quatre éléments que comporte l’analyse relative à la norme de contrôle.

 

[24]           La première question en l’espèce concerne l’omission de l’agente de tirer une conclusion en fonction de la preuve présentée. Comme je l’ai statué dans Lezama c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 986, au paragraphe 22, ce genre de question concerne le caractère adéquat des motifs. Récemment, dans l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, au paragraphe 14, la Cour suprême du Canada a statué que l’insuffisance des motifs ne permettait pas à elle seule de casser une décision. Selon la Cour suprême, « les motifs doivent [plutôt] être examinés en corrélation avec le résultat et ils doivent permettre de savoir si ce dernier fait partie des issues possibles. »

 

[25]           Dans Echeverri c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 390, le juge Paul Crampton a statué, au paragraphe 24, que la norme de contrôle de la décision raisonnable était celle qu’il convient d’appliquer au sujet de l’applicabilité du paragraphe 108(4). Le juge Crampton a également traité de cette question dans Alharazim c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1044, aux paragraphes 16 à 25, et a conclu que la norme de contrôle applicable à cette question était la norme de la raisonnabilité. Le juge Richard Boivin a également statué que l’applicabilité du paragraphe 108(4) est une question assujettie à la norme de la décision raisonnable dans S.A. c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 344, au paragraphe 22 (voir également Kotorri c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1195, aux paragraphes 14 à 23). La norme de contrôle applicable aux première et troisième questions en litige est donc la norme de la décision raisonnable.

 

[26]           Dans la décision Figurado c Canada (Procureur général), 2005 CF 347, antérieure à l’arrêt Dunsmuir, le juge Luc Martineau a statué, au paragraphe 51, que la norme de contrôle applicable à une décision d’ERAR est la norme de la décision raisonnable simpliciter. Le juge Yves de Montigny a suivi la décision Figurado dans Lai c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 361, mais a indiqué au paragraphe 55 que la norme devait tenir compte de la question précise soumise à l’examen de la cour. La question de savoir si l’agente devait exiger du demandeur une preuve objective à l’appui de ses allégations est une question mixte de fait et de droit qui, depuis l’arrêt Dunsmuir, doit être examinée selon la norme de la raisonnabilité (voir le paragraphe 51). La norme de contrôle applicable à la deuxième question est donc la norme de la raisonnabilité.

 

[27]           Lors de l’examen d’une décision selon la norme de la raisonnabilité, l’analyse s’attache « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (voir l’arrêt Dunsmuir, ci‑dessus, au paragraphe 47, et l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 59). En d’autres termes, la Cour ne devrait intervenir que si la décision est déraisonnable en ce qu’elle n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. »

 

Dispositions législatives

 

[28]           Les dispositions suivantes de la Loi s’appliquent en l’espèce :

108. (1) Est rejetée la demande d’asile et le demandeur n’a pas qualité de réfugié ou de personne à protéger dans tel des cas suivants :

 

 

 

[…]

 

e) les raisons qui lui ont fait demander l’asile n’existent plus.

 

(4) L’alinéa (1)e) ne s’applique pas si le demandeur prouve qu’il y a des raisons impérieuses, tenant à des persécutions, à la torture ou à des traitements ou peines antérieurs, de refuser de se réclamer de la protection du pays qu’il a quitté ou hors duquel il est demeuré.

 

 

 

 

 

[…]

 

112. (1) La personne se trouvant au Canada et qui n’est pas visée au paragraphe 115(1) peut, conformément aux règlements, demander la protection au ministre si elle est visée par une mesure de renvoi ayant pris effet ou nommée au certificat visé au paragraphe 77(1).

 

[…]

 

(3) L’asile ne peut être conféré au demandeur dans les cas suivants:

 

a) il est interdit de territoire pour raison de sécurité ou pour atteinte aux droits humains ou internationaux ou criminalité organisée;

 

b) il est interdit de territoire pour grande criminalité pour déclaration de culpabilité au Canada punie par un emprisonnement d’au moins deux ans ou pour toute déclaration de culpabilité à l’extérieur du Canada pour une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans;

108. (1) A claim for refugee protection shall be rejected, and a person is not a Convention refugee or a person in need of protection, in any of the following circumstances:

 

[…]

 

(e) the reasons for which the person sought refugee protection have ceased to exist.

 

(4) Paragraph (1)(e) does not apply to a person who establishes that there are compelling reasons arising out of previous persecution, torture, treatment or punishment for refusing to avail themselves of the protection of the country which they left, or outside of which they remained, due to such previous persecution, torture, treatment or punishment.

 

[…]

 

112. (1) A person in Canada, other than a person referred to in subsection 115(1), may, in accordance with the regulations, apply to the Minister for protection if they are subject to a removal order that is in force or are named in a certificate described in subsection 77(1).

 

[…]

 

(3) Refugee protection may not result from an application for protection if the person

 

(a) is determined to be inadmissible on grounds of security, violating human or international rights or organized criminality;

 

(b) is determined to be inadmissible on grounds of serious criminality with respect toa conviction in Canada punished by a term of imprisonment of at least two years or with respect to a conviction outside Canada for an offence that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of  Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years;

 

 

ARGUMENTS

Le demandeur

            L’agente a omis de tirer une conclusion quant aux raisons impérieuses

 

[29]           Dans la décision, l’agente a reconnu que les événements qu’aurait subis le demandeur s’inscrivent dans la violence qui marque les rapports entre Hutus et Tutsis au Burundi. L’agente n’a pas non plus conclu que le récit du demandeur n’était pas crédible. Le demandeur soutient qu’après avoir accepté la véracité de son récit, l’agente était tenue de déterminer si des raisons impérieuses justifiaient de lui accorder la protection demandée. L’agente a omis de tirer une conclusion, favorable ou défavorable, quant aux raisons impérieuses, ce qui constitue une erreur de droit exigeant que la décision soit renvoyée pour nouvel examen.

 

            L’agente a déraisonnablement exigé une preuve objective

 

[30]           Le demandeur fait remarquer que les événements qui lui ont causé un traumatisme et qui sous‑tendent les raisons impérieuses pour lesquelles il devrait être autorisé à demeurer au Canada se sont produits il y a près de 20 ans. Dans la décision, l’agente a conclu qu’il était raisonnable de s’attendre à ce que la tante du demandeur fournisse des renseignements pertinents pour l’ERAR, ce qu’elle n’a pas fait. Le demandeur fait valoir que cette conclusion était déraisonnable parce qu’elle ne prenait pas en compte la preuve qui montrait que la relation du demandeur avec sa tante était difficile et que les communications étaient rompues entre eux. Il était question de cette preuve dans les motifs de la SAI, dont disposait l’agente. Cette dernière aurait donc dû la prendre en compte.

 

[31]           Le demandeur soutient également que les décisions Jimenez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] ACF no 87, et Kotorri, ci‑dessus, établissent qu’il n’existe pas de critère distinct en ce qui concerne les traumatismes psychologiques permanents vécus dans le passé. Il était donc déraisonnable que l’agente s’attende à une preuve objective concernant l’état psychologique du demandeur.

 

Le défendeur

Le demandeur n’a pas fourni une preuve suffisante des risques

 

[32]           À l’appui de sa demande d’ERAR, la seule preuve qu’a fournie le demandeur à l’agente était une déclaration non assermentée et une lettre du CCVT qui reprenait simplement ce qu’il avait dit à M. Mossallanejad. Le défendeur soutient que cette preuve ne justifiait pas une décision d’ERAR favorable, et qu’il était raisonnable pour l’agente de vouloir compter sur davantage d’éléments de preuve concernant les risques auxquels le demandeur était exposé pour être en mesure de lui accorder la protection.

 

[33]           Selon le défendeur, il n’y avait rien de déraisonnable dans la façon dont l’agente a traité les éléments de preuve à sa disposition. Voici ce qu’a écrit le juge Russell Zinn dans Ferguson c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1067, au paragraphe 27 :

La preuve présentée par un témoin qui a un intérêt personnel dans la cause peut aussi être évaluée pour savoir quel poids il convient d’y accorder, avant l’examen de sa crédibilité, parce que généralement, ce genre de preuve requiert une corroboration pour avoir une valeur probante. S’il n’y a pas corroboration, alors il pourrait ne pas être nécessaire d’évaluer sa crédibilité puisque son poids pourrait ne pas être suffisant en ce qui concerne la charge de la preuve des faits selon la prépondérance de la preuve. Lorsque le juge des faits évalue la preuve de cette manière, il ne rend pas de décision basée sur la crédibilité de la personne qui fournit la preuve; plutôt, le juge des faits déclare simplement que la preuve qui a été présentée n’a pas de valeur probante suffisante, soit en elle‑même, soit combinée aux autres éléments de preuve, pour établir, selon la prépondérance de la preuve, les faits pour lesquels elle est présentée. Selon moi, c’est l’analyse qu’a menée l’agent dans la présente affaire.

 

 

[34]           Le défendeur fait également valoir que Ferguson enseigne que la déclaration d’un tiers, comme celle provenant du CCVT fournie par le demandeur, ne doit pas recevoir plus de poids qu’il n’en serait accordé à une déclaration faite par ce dernier (voir le paragraphe 31). Puisque l’agente a traité la preuve de façon raisonnable en l’espèce, la Cour ne devrait pas modifier la décision.

 

            Aucune obligation de prendre en compte des circonstances impérieuses

 

[35]           Selon le défendeur, les décisions Nadjat c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 302, Cardenas c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 537, et B.R. c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 269, établissent que pour que l’exception des circonstances impérieuses prévue au paragraphe 108(4) s’applique, il doit être constaté que le demandeur avait soit la qualité de réfugié au sens de la Convention ou celle de personne à protéger. En l’espèce, le demandeur n’a jamais été réputé avoir la qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger. En conséquence, l’exception ne s’applique pas à la présente affaire et l’agente n’a pas commis d’erreur en ne la prenant pas en compte.

 

[36]           Les arguments du demandeur sont fondés sur une mauvaise compréhension de l’exception relative aux raisons impérieuses. Le défendeur indique qu’outre une conclusion antérieure relative à la qualité de réfugié au sens de la Convention ou à celle de personne à protéger, l’exception des raisons impérieuses exige une [traduction] « conclusion selon laquelle les conditions ont cessé d’exister ». L’agent doit conclure que les raisons à l’origine de la décision d’accorder la protection ont cessé d’exister (voir Guzman c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] ACF no 1545 (CF), aux paragraphes 6 et 7, Brovina c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2004 CF 635). Une telle conclusion n’ayant pas été tirée en l’espèce, l’exception des circonstances impérieuses n’entrait pas en jeu.

 

L’agente a conclu qu’il n’y avait pas de circonstances impérieuses

 

[37]           Même si les conditions préalables à l’application du paragraphe 108(4) de la Loi existaient en l’espèce, l’agente a expressément conclu que des circonstances impérieuses n’existaient pas dans la présente affaire. L’agente a en effet conclu comme suit :

[traduction] Le [demandeur] n’a fourni aucune preuve objective pour étayer un changement de situation au Burundi ou le fait que « la persécution, la torture, les traitements ou les peines antérieurs » [subis par le demandeur] sont tels qu’ils constituent des raisons impérieuses pour ne pas être renvoyé au Burundi. [En italique dans l’original.]

 

 

[38]           L’arrêt Yamba c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] ACF no 457 (CAF), statue qu’un demandeur doit s’acquitter du fardeau d’établir l’existence de raisons impérieuses. Le demandeur n’a pas présenté de preuve objective qui établissait l’existence des raisons impérieuses qu’il invoquait. La Cour a statué dans le passé que l’absence de preuve objective est suffisante pour rejeter une allégation selon laquelle des circonstances impérieuses existent (voir Oprysk c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 326, aux paragraphes 30 et 31). La conclusion de l’agente concernant les circonstances impérieuses était raisonnable. La Cour ne devrait donc pas intervenir.

 

La réponse du demandeur

 

[39]           Dans sa réponse, le demandeur a reconnu que l’agente n’était pas d’emblée tenue de faire mention de l’exception relative aux raisons impérieuses, mais il a soutenu qu’à compter du moment où il l’a invoquée, l’agente était tenue de se prononcer sur cette question. En soulevant cette question dans la décision, l’agente a fait naître chez le demandeur l’attente légitime qu’elle traiterait de la question. En ne répondant pas à l’attente légitime à laquelle elle avait donné lieu, l’agente a violé le droit à l’équité procédurale du demandeur. Le demandeur a abandonné cet argument lors de l’audience.

 

[40]           Certes, le défendeur s’est appuyé sur des décisions visant à établir que le paragraphe 108(4) ne s’appliquait pas en l’espèce, mais selon le demandeur il n’en demeure pas moins que qu’il revenait à l’agente d’indiquer le droit applicable dans la décision qu’elle a rendue. Le demandeur fait aussi remarquer que l’agente a conclu que la situation au Burundi s’était améliorée depuis son départ, ce qui, selon lui, signifie qu’il a été satisfait à l’exigence que les conditions liées au statut de réfugié aient cessé d’exister.

 

[41]           Enfin, le demandeur conteste les arguments que le défendeur tire de la décision Ferguson, ci‑dessus. Le demandeur soutient que le passage mentionné par le défendeur concernait la nécessité d’évaluer la crédibilité d’une déclaration non assermentée. L’agente a accepté la véracité de la lettre provenant du CCVT. La décision Ferguson ne s’applique donc pas en l’espèce.

 

ANALYSE

 

[42]           Lors de l’audition de la présente affaire le 12 janvier 2012, le demandeur a adopté à l’égard de la présente demande une approche substantiellement différente de celle adoptée dans ses observations écrites. Essentiellement, il a abandonné l’argument de [traduction] « l’attente raisonnable » et il a retiré l’admission que contenait sa réponse, selon laquelle [traduction] « le défendeur a raison de dire que l’agente d’ERAR n’était pas tenue de mentionner les raisons impérieuses ». L’avocat a expliqué qu’il s’était rendu compte à la lecture de l’exposé des arguments et de la jurisprudence du défendeur qu’il disposait de meilleurs arguments. Cela n’est pas sans causer de difficultés étant donné que le demandeur a obtenu une autorisation sur la foi des arguments contenus dans ses observations écrites.

 

[43]           Le défendeur ne s’est toutefois pas opposé au changement de position du demandeur, et lors de l’audience, il a fourni une réponse aux nouveaux éléments invoqués par le demandeur. Cela étant, je suis disposé à examiner les nouvelles questions soulevées par le demandeur.

 

[44]           Le demandeur soutient maintenant que l’agente était tenue d’examiner l’existence de raisons impérieuses, qu’elle les a examinées et les a mal appréciées.

 

[45]           Voici ce que la Cour d’appel fédérale a indiqué dans l’arrêt Yamba, ci‑dessus, au paragraphe 6 :

En bref, lorsqu’elle conclut qu’un demandeur de statut a déjà été persécuté, mais qu’il y a eu un changement de situation dans le pays en question conformément à l’alinéa 2(2)e), la Section du statut de réfugié a, en vertu du paragraphe 2(3), l’obligation de se demander si les éléments de preuve soumis établissent l’existence de « raisons impérieuses ». Elle est soumise à cette obligation, que le demandeur de statut invoque ou non expressément le paragraphe 2(3). Cela étant dit, il incombe toujours au demandeur de statut de présenter les éléments de preuve nécessaires pour établir qu’il est fondé à invoquer cette disposition.

 

 

[46]           Dans la présente affaire, le demandeur n’a pas invoqué de raisons impérieuses mais, comme il ressort clairement de la décision, l’agente a relevé ce qu’elle a estimé être une [traduction] « inférence » à cet égard dans les observations du demandeur, qui avait indiqué [traduction] « qu’il estimait que l’effet des événements traumatisants dont il avait été témoin au Burundi alors qu’il était si jeune persistait. »

 

[47]           Le demandeur soutient également que le dossier indique qu’il a satisfait aux deux conditions énoncées au paragraphe 108(4) en ce que l’agente a conclu qu’il y avait eu de la persécution, de la torture, des traitements ou des peines antérieurs et qu’il y avait eu un changement dans la situation.

 

[48]           Le demandeur reconnaît que la décision ne comporte pas de conclusion explicite concernant la persécution qu’il aurait subie par le passé, mais fait valoir que c’est ce qui ressort implicitement des propos de l’agente :

[traduction] Les événements décrits par le [demandeur] s’inscrivaient dans la violence qui a éclaté après l’élection du président Melchior Ndadaye.

 

 

[49]           Le demandeur soutient que les événements en cause étaient si horribles qu’ils constituent de toute évidence de la persécution et que l’agente le reconnaît parce qu’il n’y a pas de conclusion défavorable en matière de crédibilité.

 

[50]           À mon avis, on ne peut interpréter les propos relevés par le demandeur comme une conclusion implicite de persécution antérieure. Ils figurent dans une partie de la décision où l’agente fait état des événements invoqués par le demandeur et de leur lien avec les documents sur la situation au pays. Selon moi, l’agente explique tout simplement les allégations de risque avancées par le demandeur dans le cadre de son analyse des motifs l’ayant amenée à conclure que le demandeur n’est pas exposé à des risques. Plus loin dans l’analyse, l’agente indique clairement qu’elle considère ces renseignements comme étant un aspect des risques futurs. Elle n’entreprend aucune analyse des raisons impérieuses parce que comme elle l’explique, [traduction] « aucune preuve objective à l’appui d’une telle conclusion n’a été présentée » et elle poursuit comme suit :

[traduction] Le [demandeur] n’a fourni aucune preuve objective pour étayer un changement de situation au Burundi ou le fait que « la persécution, la torture, les traitements ou les peines antérieurs » [subis par le demandeur] sont tels qu’ils constituent des raisons impérieuses pour ne pas être renvoyé au Burundi.

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[51]           À mon avis, l’agente examine de toute évidence la question de savoir si une analyse des raisons impérieuses est nécessaire, mais conclut qu’il n’y a pas suffisamment de preuve objective pour étayer une conclusion de [traduction] « persécution, […] torture, […] traitements ou […] peines antérieurs » qui donneraient lieu à des raisons impérieuses.

 

[52]           Il me semble que l’agente ne tire pas ensuite une conclusion, implicite ou autre, selon laquelle le demandeur a été persécuté antérieurement. Le nouvel argument que le demandeur invoque devant moi fait valoir qu’une telle conclusion a été tirée, donnant ainsi lieu à l’application du paragraphe 108(4). L’agente n’a cependant pas accepté l’allégation du demandeur selon laquelle il avait été persécuté auparavant. Étant donné que le demandeur affirme qu’une telle conclusion a été tirée, et parce qu’il a maintenant abandonné la plus grande partie de l’approche qu’il avait précédemment adoptée dans ses documents écrits, il ne m’a pas réellement présenté une argumentation complète visant à démontrer que la conclusion de l’agente était déraisonnable en ce qui a trait à l’absence de persécution antérieure. Dans ses documents écrits, il indique que l’agente a accepté le récit de ce qu’avait subi sa famille, mais cela ne permet pas, à mon avis, de dire qu’elle a déraisonnablement conclu que le demandeur n’a pas fait l’objet de persécution antérieure. Comme l’arrêt Yamba, ci‑dessus, l’établit clairement, il incombe toujours au demandeur de présenter les éléments de preuve nécessaires pour établir qu’il est fondé à invoquer l’exception maintenant prévue au paragraphe 108(4). L’agente a raisonnablement conclu qu’il ne l’avait pas fait.

 

[53]           J’ai également examiné la question sous un autre angle. Il se peut que l’agente ait estimé que peu importe ce qui est arrivé au demandeur, il n’y a aucune preuve que cela continue d’avoir des effets sur lui justifiant qu’il ne soit pas renvoyé au Burundi.

 

[54]           À la page 7 de la décision, avant le passage que j’ai cité précédemment, l’agente déclare ce qui suit :

[traduction] Le [demandeur] a indiqué qu’il estimait que les événements traumatisants dont il a été témoin au Burundi alors qu’il était si jeune avaient des effets persistants sur lui. Cela suppose qu’il existe des raisons impérieuses de ne pas le renvoyer au Burundi. Je conclus qu’aucune preuve objective n’a été présentée pour appuyer une telle conclusion. [Non souligné dans l’original.]

 

 

Dans ce passage, l’agente entend d’une [traduction] « preuve objective » une preuve objective établissant les effets persistants des événements au Burundi. Ce passage est suivi du paragraphe dans lequel elle traite de la lettre du CCVT (la preuve de l’effet persistant), qui est à son tour suivi de la conclusion que lesdits événements ne constituent pas des raisons impérieuses justifiant de ne pas renvoyer le demandeur au Burundi.

 

[55]           Il ressort de ce qui précède que l’agente a examiné la question de savoir s’il existait des raisons impérieuses, mais qu’elle a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment de preuve pour conclure à leur existence. Si le demandeur a raison de dire que la décision pouvait comporter une conclusion implicite de persécution antérieure faisant entrer en jeu l’obligation de prendre en compte les raisons impérieuses, il s’ensuit alors que l’agente pouvait aussi conclure de façon implicite à l’inexistence de raisons impérieuses. Je ne crois pas que le demandeur puisse raisonnablement dire qu’une conclusion implicite est acceptable, mais que l’autre ne l’est pas.

 

[56]           Cela dit, je ne crois pas que le demandeur ait traité de l’exigence établie par la jurisprudence, selon laquelle il faut qu’une conclusion claire quant à la qualité de réfugié ait été tirée. Les décisions S.A., ci‑dessus, M.C.L. c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 826, J.N.J. c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2010 CF 1088, Kozyreva c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1013, Cardenas, ci‑dessus, et Liu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 819, indiquent toutes qu’un agent doit conclure de façon explicite que le demandeur avait la qualité de réfugié au sens de la Convention pour que le paragraphe 108(4) s’applique. Les propos du juge John O’Keefe, au paragraphe 41 de la décision J.N.J., ci‑dessus, sont représentatifs :

Il faut donc qu’il soit explicitement confirmé que le demandeur d’asile a eu antérieurement droit au statut de réfugié et qu’il soit reconnu qu’il n’a plus cette qualité du fait d’un changement de circonstances.

 

 

Le demandeur n’a pas établi l’existence en l’espèce d’une conclusion, même implicite, de persécution permettant de satisfaire au critère préliminaire, et je ne vois aucun motif de m’écarter de la jurisprudence existante.

 

[57]           Nous nous trouvons donc devant l’une ou l’autre des situations suivantes : la décision de l’agente comporte une conclusion implicite de persécution, ce qui est acceptable, et donne lieu à l’obligation d’examiner la question des raisons impérieuses, mais l’agente a conclu, également de façon implicite, qu’il n’existait pas de raisons impérieuses, ou encore l’agente n’a pas clairement conclu que le demandeur avait eu par le passé la qualité de réfugié et alors, elle n’était pas tenue d’examiner la question de savoir si des circonstances impérieuses existaient. D’une façon ou d’une autre, la demande ne peut être accueillie.

 

[58]           Par conséquent, à mon avis, la conclusion de l’agente selon laquelle les faits de l’espèce ne donnaient pas lieu à une analyse relative aux raisons impérieuses doit être maintenue et je ne puis relever aucune erreur susceptible de contrôle à l’égard des autres motifs allégués par le demandeur.

 

Certification

 

[59]           Le demandeur propose la question suivante pour certification :

[traduction] La signature d’une déclaration dans une demande d’ERAR, selon laquelle les renseignements contenus dans une déclaration sont véridiques, complets et exacts, équivaut‑elle à jurer de la véracité du contenu de la déclaration?

 

 

[60]           La question n’est pas importante quant à mes motifs et ne permettrait pas de trancher un appel (voir Varela c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 145, au paragraphe 28). L’agente n’a ni explicitement ni implicitement fait de distinction entre signer une déclaration dans une demande d’ERAR et jurer de la véracité du contenu d’une déclaration. De plus, rien n’indique que l’absence de signature ou de serment n’a eu d’incidence sur l’appréciation de la preuve par l’agente dans le cadre de sa décision.


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

 

1.                  La demande est rejetée.

2.                  Il n’y aucune question à certifier.

 

 

« James Russell »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Chantal DesRochers, LL.B., D.E.S.S. en trad.

 


cour fédérale

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    IMM‑4207‑11

 

Intitulé :                                                  PROSPER NIYONZIMA

                                                                        demandeur

 

                                                                        ‑ et ‑

 

                                                                        le ministre de la citoyenneté et de l’IMMIGRATION

                                                                        défendeur

 

 

Lieu de l’audience :                          Toronto (Ontario)

 

Date de l’audience :                         Le 12 janvier 2012

 

 

Motifs du jugement

et jugement :                                        le juge RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 8 mars 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Mordechai Wasserman

 

pour le demandeur

 

Daniel Engel

 

pour le défendeur

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Mordechai Wasserman

Avocat

Toronto (Ontario)

 

pour le demandeur

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

 

pour le défendeur

 

 

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