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Cour fédérale

 

Federal Court

 Date : 20120227


Dossier : IMM-3343-11

Référence : 2012 CF 266

[traduction française certifiée, non révisée]

 

Ottawa (Ontario), le 27 février 2012

 

En présence de monsieur le juge Russell

 

 

ENTRE :

 

KANAPATHAPILLAI KANDASAMY

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

INTRODUCTION

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’Immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi), à l’encontre de la décision (la décision) par laquelle un conseiller, Section de l’immigration, Haut‑commissariat du Canada au Sri Lanka (l’agent), a refusé, le 29 mars 2011, la demande de résidence permanente du demandeur au titre de la catégorie du regroupement familial.

CONTEXTE ET DÉCISION

[2]               Le demandeur, citoyen du Sri Lanka, est âgé de soixante ans. Il vit actuellement au Sri Lanka avec son épouse et deux de ses filles. Sa troisième fille, qui parraine la demande du demandeur au titre de la catégorie du regroupement familial, vit au Canada à titre de citoyenne (« répondante »).

[3]               En août 1998, la répondante a quitté le Sri Lanka pour venir au Canada à titre de réfugiée, en raison du conflit qui opposait les TLET et les forces gouvernementales du Sri Lanka. Dans son exposé circonstancié, qui se trouve à la page 153 du dossier certifié du tribunal (le DCT ») et qui accompagnait sa demande d’asile, la répondante indiquait qu’on lui avait demandé à plusieurs reprises de se joindre aux TLET, mais qu’elle avait refusé. Chaque fois, on l’avait gardée en détention pendant quelques heures et agressée.  La répondante indiquait également dans son exposé circonstancié que sa famille avait été déplacée, en 1995, d’Idaikkadu, ville du nord du Sri Lanka où ils vivaient dans une ferme, à Madduvil, ville située plus au sud et à bonne distance du conflit. Elle ajoutait que, en juillet 1996, elle et son père avaient été emmenés par l’armée, gardés en détention pendant quelques heures, puis relâchés après avoir été interrogés. La répondante a obtenu le statut de réfugié et est devenue citoyenne canadienne en 2003.

[4]               En 2008, le demandeur, son épouse et les deux filles qui vivaient toujours au Sri Lanka ont demandé la résidence permanente au Canada au titre du regroupement familial. Afin d’étayer cette demande, le demandeur a rempli le formulaire IMM 0008 — Annexe 1 : Antécédents / Déclaration (le formulaire de 2008). Sur ce formulaire, à la question 9, on demandait ceci :

Est‑ce que vous‑même ou, si vous êtes le requérant principal, l’un des membres de votre famille nommés sur la demande de résidence permanente au Canada [...] avez déjà été gardé(e) en détention ou en prison?

                       

[5]               Le demandeur a coché la case « Non » après cette question sur le formulaire de 2008. Il a aussi indiqué, sur ce même formulaire, que, de sa naissance jusqu’en 1998, il avait vécu à Idaikkadu. Après avoir rempli le formulaire, le demandeur y a apposé sa signature, attestant qu’il avait fourni des renseignements véridiques, complets et exacts.

[6]               Le 13 octobre 2010, la Section de l’immigration du Haut‑commissariat de Colombo (la Section de l’immigration) a envoyé une lettre au demandeur lui enjoignant de fournir les précisions suivantes :

[traduction]

3. En ce qui concerne la demande de votre fille Kavitha, qui vit au Canada, veuillez répondre aux questions suivantes :

                                                               i.      Votre famille était‑elle harcelée par les TLET pour que vous leur donniez de l’argent?

                                                             ii.      Est-ce qu’un membre de votre famille ou vous‑même avez déjà été gardé(s) en détention par les TLET ou d’autres forces armées?

                                                            iii.      Avez‑vous travaillé pour les TLET?

                                                           iv.      Est-ce que vous‑même ou un membre de votre famille a été harcelé(s) pour vous joindre aux TLET?

                                                             v.      Votre famille a‑t-elle déjà été déplacée? Si oui, veuillez donner des détails.

                                                           vi.      Quels problèmes votre famille ou vous‑même avez‑vous eus relativement à l’armée?

 

[7]               Le demandeur a répondu comme suit aux questions, dans une lettre datée du 24 octobre 2011 :

[traduction]

3)         a) Oui

            b) Oui

            c) Oui

            d) Oui

e) Oui, en octobre 1995, en raison d’une opération militaire menée par l’armée du SL. Nous avons été déplacés de notre résidence permanente. Nous sommes d’abord allés à Madduvil, où nous sommes tous demeurés pendant quelques jours. Ayant appris que l’armée se rapprochait de Thenmaradchy, nos deux jeunes filles avaient peur et étaient affolées. Nous les avons envoyées avec ma belle‑mère à Yogapuram pour assurer leur sécurité. Après cela, nous sommes retournés dans notre village, étant donné que l’armée avait pris le contrôle de la péninsule de Jaffna.

f) Après que nous fûmes sortis de Madduvil et retournés dans notre village (moi‑même, mon épouse et ma fille Kavitha), l’armée venait très souvent patrouiller dans notre région. Lors de l’une de ces patrouilles, l’armée m’a emmené à son camp avec ma fille. On nous a interrogés, en nous faisant des menaces, pour que nous révélions des détails au sujet des Tigres. Ma fille et moi avons dit que nous n’étions pas au courant de leurs activités. L’armée nous a ensuite gardés en détention pendant quelques heures, puis nous a autorisés à rentrer à la maison. À plusieurs reprises, alors que ma fille et d’autres filles se rendaient à l’école, l’armée les a interceptées au point de contrôle, les a menacées et agressées et les a emmenées à son camp, où elle les a gardées en détention et interrogées, pour les relâcher après quelques heures. En raison de cette situation, j’étais inquiet pour ma fille, qui elle‑même avait peur et était affolée. J’estimais qu’il était très dangereux et très risqué de continuer de vivre dans le village en raison du harcèlement auquel se livrait l’armée.

 

[8]               La Section de l’immigration a répondu à la lettre du demandeur, le 12 novembre 2010, par une demande de renseignements complémentaires (la lettre de novembre). Elle enjoignait au demandeur de fournir des détails sur le harcèlement auquel s’étaient livrés les TLET à l’égard de sa famille, sur leur détention par les TLET ou d’autres forces armées, et sur tout travail qu’ils avaient effectué pour les TLET. Dans une lettre datée du 23 novembre 2010, le demandeur indiquait qu’il avait été harcelé par les TLET pour qu’il leur donne de l’argent, mais qu’il avait refusé parce que sa situation financière était précaire. Il indiquait également qu’il avait été gardé en détention pendant quelques heures dans un camp des TLET après avoir refusé de leur donner de l’argent. Il ajoutait qu’il avait été emmené à un emplacement des TLET, où on l’avait obligé à creuser un bunker et à fendre du bois. Pour finir, il écrivait que la répondante avait été forcée de se joindre aux TLET, mais qu’elle avait refusé.

[9]               Le 1er janvier 2011, le demandeur a présenté une demande de mise à jour de sa demande de résidence permanente. Il a rempli un deuxième formulaire IMM 0008 à ce moment‑là (le formulaire de 2011). Sur le formulaire de 2011, il a de nouveau déclaré qu’il n’avait pas été gardé en détention ni en prison. Il a également indiqué qu’il avait vécu à Idaikkadu de janvier 1969 à août 1998. Dans ce formulaire, il ne donnait aucun détail sur sa détention par les TLET ni sur le déplacement à Madduvil. Le demandeur a signé le formulaire de 2011, attestant qu’il avait fourni des renseignements véridiques, complets et exacts.

[10]           L’agent a écrit au demandeur le 21 février 2011 pour lui faire part de ses réserves au sujet de sa demande de résidence permanente. L’agent a souligné que le Haut‑commissariat avait reçu deux demandes dûment remplies par le demandeur, ainsi que de la correspondance du demandeur et de sa famille indiquant qu’ils avaient été déplacés à Madduvil en 1995, mais que cette information ne paraissait pas dans les demandes. L’agent indiquait également dans sa lettre que le demandeur avait été gardé en détention par les TLET et par l’armée, mais qu’aucune des demandes ne mentionnait ce fait. Il a ajouté que le demandeur avait même déclaré dans les deux demandes qu’il n’avait jamais été gardé en détention ni arrêté. L’agent a accordé un délai de 30 jours au demandeur pour qu’il explique les incohérences relevées; il a aussi précisé qu’une décision sur le dossier du demandeur serait rendue à l’expiration de ce délai, qu’une réponse ait été reçue ou non.

[11]           Dans une lettre datée du 2 mars 2011, le demandeur a confirmé à l’agent que sa famille et lui avaient été déplacés à Madduvil en raison d’une opération militaire. Il expliquait qu’il n’avait pas mentionné ce fait dans les formulaires parce que leur séjour à Madduvil avait été de courte durée, mais qu’il regrettait d’avoir passé ce fait sous silence. Le demandeur confirmait également que sa famille et lui‑même avaient reçu des demandes d’argent de la part des TLET et que ces derniers l’avaient emmené à leur camp pour l’interroger après qu’ils eurent refusé de les payer. Il ajoutait que sa fille et lui avaient été gardés en détention par l’armée, mais qu’ils avaient été interrogés et relâchés le même jour. Il indiquait qu’il n’avait pas été arrêté ou gardé en détention, sauf pour subir des interrogatoires.

[12]           Le 28 mars 2011, l’agent a écrit dans les notes du STDI versées au dossier du demandeur que ce dernier n’avait pas nié qu’il avait été gardé en détention par l’armée et par les TLET. L’agent disait que, dans la correspondance antérieure, le demandeur avait indiqué qu’il ne travaillait plus pour les TLET. L’agent a également souligné que le demandeur n’avait pas expliqué pour quelle raison il n’avait pas déclaré ses détentions, ajoutant par contre qu’il trouvait raisonnable de supposer que cette omission pouvait être attribuable au fait que le demandeur estimait que ces détentions ne répondaient pas à la définition de « gardé en détention ». L’agent a souligné, d’une part, que la lettre de novembre enjoignait au demandeur de fournir des renseignements supplémentaires et, d’autre part, que le demandeur avait omis de mentionner les détentions, sur le formulaire de 2011. L’agent indiquait que, même s’il avait été avisé par écrit qu’il devait donner des détails, le demandeur avait de toute évidence déterminé quelle information il devait fournir.

[13]           L’agent ajoutait que les questions posées au demandeur au sujet de la résidence et des détentions étaient claires et simples. Il poursuivait en disant qu’aucune mention relative au type de résidence ou à la durée de celle‑ci ne limitait l’obligation de fournir cette information sur les formulaires de demande. L’agent indiquait que, puisque le demandeur et sa famille venaient d’une région problématique, l’information sur la résidence et les détentions était importante pour déterminer leur admissibilité au Canada. L’agent concluait qu’il y avait une forte possibilité que le demandeur ait fait une présentation erronée sur ses antécédents, si bien qu’il était interdit de territoire au Canada en vertu de l’article 40 de la Loi. L’agent indiquait que, dans ces conditions, la demande était rejetée.

[14]           Le 5 avril 2011, l’agent a écrit au demandeur pour l’informer que sa demande avait été rejetée. Il a souligné que l’alinéa 40(1)a) de la Loi établit que l’étranger est interdit de territoire pour fausses déclarations s’il fait, directement ou indirectement, une présentation erronée sur un fait important, ou une réticence sur ce fait, ce qui risque d’entraîner une erreur dans l’application de la Loi. L’agent écrivait que le demandeur et son fils (bien que le demandeur n’ait que des filles) avaient caché les détails de leurs arrestations et de leurs détentions. Prié de fournir des précisions, le demandeur avait indiqué qu’ils avaient été relâchés le jour même où ils avaient été gardés en détention. Même si le demandeur a fourni ces détails supplémentaires, l’agent a noté qu’il avait omis de mentionner les détentions sur le formulaire de 2011. L’agent a également observé qu’il ne faisait aucune mention, dans ses lettres, du type de résidence ou de détention ou de la durée de celles-ci, qui aurait pu soustraire le demandeur à l’obligation de fournir ces renseignements. L’agent a conclu que, en l’absence de renseignements clairs et factuels, il ne pouvait pas déterminer si le demandeur était admissible à entrer au Canada.

[15]           L’agent a ensuite examiné le paragraphe 11(1) de la Loi, qui dispose que l’agent doit délivrer un visa s’il est convaincu que l’étranger qui demande le visa n’est pas interdit de territoire et se conforme à la Loi. L’agent n’était pas convaincu que le demandeur n’était pas interdit de territoire et il a refusé, en conséquence, de lui délivrer un visa. C’est la décision qui fait l’objet du présent contrôle judiciaire.

[16]           Avant la tenue de la présente audience, le défendeur a déposé une requête en vertu de l’article 87 de la Loi afin de faire interdire la publication d’une partie du DCT. Le demandeur s’y est opposé, mais le juge Simon Noël a accueilli la requête après que le défendeur se fut engagé à ne pas s’appuyer sur le texte expurgé.

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[17]           Les dispositions suivantes de la Loi s’appliquent en l’espèce :

11. (1) L’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les visa et autres documents requis par règlement. L’agent peut les délivrer sur preuve, à la suite d’un contrôle, que l’étranger n’est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

 

 

 

12. (1) La sélection des étrangers de la catégorie « regroupement familial » se fait en fonction de la relation qu’ils ont avec un citoyen canadien ou un résident  permanent, à titre d’époux, de conjoint de fait, d’enfant ou de père ou mère ou à titre d’autre membre de la famille prévu par règlement.

 

[…]

 

16. (1) L’auteur d’une demande au titre de la présente loi doit répondre véridiquement aux

questions qui lui sont posées lors du contrôle, donner les renseignements et tous éléments de preuve pertinents et présenter les visa et documents requis.

 

[…]

 

40. (1) Emportent interdiction de territoire pour fausses déclarations les faits suivants :

 

 

a) directement ou indirectement, faire une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ou une réticence

sur ce fait, ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la présente loi;

 

(2) Les dispositions suivantes s’appliquent au paragraphe (1):

 

a) l’interdiction de territoire court pour les deux ans suivant la décision la constatant en dernier ressort, si le résident permanent ou l’étranger n’est pas au pays, ou suivant l’exécution de la mesure de renvoi;

11. (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document may be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

 

12. (1) A foreign national may be selected as a member of the family class on the basis of their relationship as the spouse, common-law partner, child, parent or other prescribed family member of a Canadian citizen or permanent resident.

 

 

 

 

16. (1) A person who makes an application must answer truthfully all questions put to them for the purpose of the examination and must produce a visa and all relevant evidence and documents that the officer reasonably requires.

 

 

 

 

40. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible for misrepresentation

 

(a) for directly or indirectly misrepresenting or withholding material facts relating to a relevant matter that induces or could induce an error in the administration of this Act;

 

 

 

(2) The following provisions govern subsection(1):

 

(a) the permanent resident or the foreign national continues to be inadmissible for misrepresentation for a period of two years following, in the case of a determination outside Canada, a final determination of  inadmissibility under subsection (1) or, in the case of a determination in Canada, the date the removal order is  enforced; […]

LA QUESTION EN LITIGE

[18]           La seule question à trancher en l’espèce est celle de savoir si l’agent a violé le droit du demandeur à l’équité procédurale en ne le convoquant pas à une entrevue orale.

LA NORME DE CONTRÔLE

[19]           Dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, la Cour suprême du Canada a statué qu’il n’était pas nécessaire de se livrer à une analyse relative à la norme de contrôle dans tous les cas. En fait, lorsque la norme de contrôle qui s’applique à une question précise que la cour doit trancher est bien établie par la jurisprudence, la cour de révision peut la faire sienne. C’est seulement lorsque cette recherche s’avère infructueuse que la cour de révision doit se livrer à l’examen des quatre facteurs qu’englobe l’analyse relative à la norme de contrôle.

[20]           La question de savoir si l’agent était fondé à ne pas convoquer le demandeur à une entrevue a une incidence sur les occasions de répondre qui sont offertes au demandeur, une question ayant trait à l’équité procédurale. Dans l’arrêt Sketchley c Canada (Procureur général) 2005 CAF 404, la Cour d’appel fédérale a statué, au paragraphe 53, que « [l] a question de l’équité procédurale est une question de droit. Aucune déférence n’est nécessaire. Soit le décideur a respecté l’obligation d’équité dans les circonstances propres à l’affaire, soit il a manqué à cette obligation. » Dans l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor) 2011 CSC 62, la Cour suprême du Canada a confirmé, au paragraphe 19, que la norme de contrôle qui s’applique aux questions d’équité procédurale est celle de la décision correcte. C’est la norme qui s’applique en l’espèce.

LES ARGUMENTS

Le demandeur

[21]           Le demandeur indique que les notes du STDI versées à son dossier ne contiennent pas de remarques négatives découlant de la vérification de ses antécédents et de ceux de sa famille. La demande ne suscite donc aucune question d’ordre criminel ou liée à la sécurité. Le demandeur affirme également que, bien que les notes du STDI indiquent que le FRP était au dossier, rien ne permet de savoir si le FRP a été examiné ou pris en considération ou s’il corroborait les éléments de preuve que le demandeur a fournis à l’agent.

[22]           Les notes du STDI du 31 janvier 2011 indiquent que l’agent avait des réserves à propos de la résidence du demandeur et de ses détentions au Sri Lanka et que ces précisions ne figuraient pas sur le formulaire de 2008 ni sur le formulaire de 2011. Le demandeur note que, même si ces réserves lui ont été signalées par écrit à deux reprises et qu’un délai de trente jours lui a été accordé pour y répondre, l’agent ne l’a jamais appelé pour le convoquer à une entrevue en personne. Bien qu’il fût tenu de fournir des renseignements véridiques et complets sur les formulaires, ce qu’il n’a pas fait, le demandeur affirme que ces formulaires ne visent pas à relater tous les détails de la vie et de la situation des demandeurs dans leurs pays d’origine.

[23]           L’agent a conclu qu’il y avait une forte possibilité que le demandeur ait fait une présentation erronée sur ses antécédents. Malgré le fait qu’il ait omis à deux reprises de déclarer qu’il avait été gardé en détention et déplacé, le demandeur conteste cette constatation. Il soutient qu’il a fourni tous les renseignements requis à la Section de l’immigration dans sa correspondance; il a fini par mentionner le déplacement de la famille et les détentions par l’armée et les TLET.

[24]           Le demandeur soutient que c’est par une entrevue en personne qu’un agent peut le mieux apprécier la crédibilité des demandeurs. Il affirme également que le dossier ne fait état d’aucun problème d’ordre criminel ou lié à la sécurité relativement à cette demande et que la vérification des antécédents en matière de sécurité aurait orienté la décision de l’agent. Compte tenu de ses réserves, l’agent a violé le droit du demandeur à l’équité procédurale en ne convoquant pas ce dernier à une entrevue.

[25]           Des éléments de preuve irréfutables doivent exister pour établir qu’un demandeur de résidence permanente est interdit de territoire au Canada. Le demandeur s’appuie sur les arrêts Kanapathipillai c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] ACF no 1110, Ali c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2003 CF 982, et Armson c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1989] ACF no 800 (CAF). Comme la décision ne peut être portée en appel devant la Commission d’appel de l’immigration, l’agent avait l’obligation de fonder la conclusion que le demandeur était interdit de territoire sur des éléments de preuve irréfutables.

[26]           Au lieu de simplement traiter la demande sur papier, l’agent était tenu de convoquer le demandeur à une entrevue et de lui fournir des renseignements et des documents supplémentaires. À l’entrevue, le demandeur aurait pu fournir des détails sur la demande d’asile antérieure de la répondante et sur le fait qu’il n’avait pas fait état de ses détentions et de son déplacement. N’ayant pas convoqué le demandeur à une entrevue, l’agent ne lui a pas donné la possibilité de répondre aux interrogations que suscitait sa demande.

[27]           Dans l’arrêt Wong c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] ACF no 24, la juge Barbara Reed a statué, au paragraphe 26, que :

Mais ce qui est encore plus important, c'est qu'on n'a pas communiqué au requérant des renseignements concernant le fondement sur lequel cet avis a été rendu. Le requérant et son avocat souhaitaient répondre à la conclusion selon laquelle l'admission de la fille du requérant au Canada entraînerait, en raison de son état de santé, un fardeau excessif pour les services sociaux. Pour être en mesure de le faire d'une façon logique et intelligente, ils devaient être informés des facteurs considérés comme pertinents. À mon avis, la non-communication des renseignements demandés constitue un manquement aux principes de justice naturelle et aux règles d'équité.

 

[28]           Le demandeur attire également l’attention sur l’arrêt Gedeon c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2004 CF 1245, et affirme que l’agent avait l’obligation de lui faire part des interrogations que suscitait sa demande et de le convoquer à une entrevue pour y répondre. Le demandeur note qu’à la page 32 du manuel de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC), OP1 — Procédures, il est écrit que « [les agents] doivent expliquer clairement aux demandeurs les documents qu’ils doivent soumettre pour répondre à leurs questions. » Il renvoie également à la page 45 du manuel de CIC, OP2 – Traitement des demandes présentées par des membres de la catégorie du regroupement familial, où il est écrit que « [l]es agents ne doivent voir en entrevue les demandeurs et les membres de leur famille que dans les cas où un examen de leur demande est indispensable. Toutes les fois où c’est possible, on doit laisser faire l’entrevue. »

[29]           Selon le demandeur, ces deux manuels indiquent que les agents qui évaluent les demandes doivent écrire aux demandeurs pour les informer de problèmes possibles et les convoquer à des entrevues pour tirer au clair les questions relatives à l’admissibilité. L’agent n’a pas convoqué le demandeur à une entrevue pour tirer au clair les questions ayant trait à sa demande, ce qui constitue une violation de son droit à l’équité procédurale. Le demandeur affirme qu’il a répondu avec diligence aux lettres de l’agent l’informant de ses préoccupations au sujet des détentions et du déplacement du demandeur au Sri Lanka.

[30]           Le demandeur soutient que le traitement des demandes au titre du regroupement familial n’est pas simplement un processus de vérification de documents. Pour évaluer les demandes de ce genre, il faut apprécier les nuances relatives aux familles en question. De plus, comme les demandes au titre du regroupement familial portent sur des sujets très personnels, les agents ont l’obligation dans ces cas‑là de communiquer tous les renseignements nécessaires. Bien qu’il puisse être suffisant, dans certains cas, de traiter les demandes sur papier, l’agent n’aurait pas agi de manière déraisonnable, dans la présente affaire, en convoquant le demandeur à une entrevue afin de tirer au clair les présentations erronées possibles. En ne convoquant pas le demandeur à une entrevue, l’agent a violé le droit de ce dernier à l’équité procédurale.

Le défendeur

[31]           Le défendeur avance l’argument qu’il n’y a aucune erreur susceptible de révision dans la présente affaire. L’agent a rejeté la demande du demandeur pour deux motifs : il n’était pas convaincu que le demandeur n’était pas interdit de territoire, ce qui l’empêchait de délivrer un visa en vertu de l’article 11 de la Loi, et il a conclu que le demandeur était interdit de territoire en vertu de l’alinéa 40(1)a) de la Loi pour avoir fait des présentations erronées sur des faits. Dans l’arrêt Sivayogaraja c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2010 CF 1112, le juge Yvon Pinard a confirmé la décision de l’agent des visas dans les termes suivants :

[5]     L’agent des visas a conclu qu’il lui était impossible d’établir les antécédents des demandeurs en raison de l’incohérence des renseignements fournis lors de l’entrevue du 5 novembre 2009. Il a estimé qu’il ne disposait pas du tableau complet de la situation de la demanderesse et de son fils et considéré qu’il ne pouvait avoir la conviction qu’ils n’étaient pas interdits de territoire au Canada, du fait que les renseignements fournis manquaient de crédibilité en raison des contradictions internes des témoignages.

[6]     Les présentations erronées relevées par l’agent des visas ont trait aux endroits où ont vécu les demandeurs, aux écoles fréquentées par le fils de la demanderesse et aux dates où il y était inscrit. L’agent des visas a estimé que la présentation erronée ou les réticences à propos de ces faits pourraient mener à une décision incorrecte en matière d’admissibilité des demandeurs.

 

[32]           La présente affaire est semblable à celle décrite dans l’arrêt Sivayogaraja; elle devrait donc être tranchée de la même manière. L’agent était préoccupé par les renseignements contradictoires que le demandeur avait fournis au sujet de sa résidence, de ses activités et de ses détentions. Il en a avisé le demandeur, mais les réponses reçues de ce dernier étaient insuffisantes pour dissiper ses doutes. Comme il est établi dans l’arrêt Gnanaguru c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2011 CF 536, l’information au sujet des activités, des adresses et des détentions est importante pour traiter une demande de résidence permanente; les présentations erronées sur ces faits empêchent l’agent de tirer une conclusion légitime quant à l’admissibilité du demandeur.

[33]           L’article 16 de la Loi oblige les demandeurs à répondre véridiquement à toutes les questions qui leur sont posées. L’article 11 établit que l’agent ne peut pas délivrer un visa au demandeur s’il n’est pas convaincu que celui-ci n’est pas interdit de territoire. L’agent n’était pas convaincu que le demandeur n’était pas interdit de territoire; il ne pouvait donc pas lui délivrer un visa. Il n’y a aucune erreur susceptible de révision dans la présente affaire.

Le mémoire complémentaire du défendeur

[34]           Le défendeur souligne que le demandeur a indiqué, sur le formulaire de 2008, que ni lui ni aucun membre de sa famille n’avaient été gardés en détention ou en prison. Le défendeur note également que la question 11 du formulaire de 2008 avise les demandeurs de « préciser vos antécédents personnels depuis l’âge de 18 ans [...] Si vous ne travailliez pas, donnez des renseignements sur ce que vous faisiez (par exemple, chômage, études, voyages, en détention, etc.) ». Sur le formulaire de 2008, le demandeur avait déclaré qu’il travaillait de façon continue comme agriculteur à Yogapuram, Sri Lanka, depuis 1967 et que les renseignements fournis sur le formulaire étaient véridiques, complets et exacts. Le demandeur a fait les mêmes déclarations sur le formulaire de 2011, même s’il avait reçu des lettres l’avisant que l’agent le soupçonnait d’avoir fait des présentations erronées.

[35]           Le défendeur note que les étrangers qui demandent l’entrée au Canada ont une obligation de franchise, en ce qu’ils doivent divulguer tous les faits se rapportant à leur demande. Le défendeur affirme que la Cour a reconnu l’importance de la divulgation complète des faits pour l’application de la loi (voir les arrêts Bodine c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2008 CF 848, et Baro c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2007 CF 1299). L’alinéa 40(1)a) de la Loi vise à ce que les demandeurs fournissent des renseignements complets, exacts et véridiques à toutes les étapes du processus de traitement de leurs demandes d’entrée au Canada. De plus, il n’appartient pas aux demandeurs de décider quelle information est importante ou utile et laquelle ne l’est pas.

            La décision est raisonnable

[36]           Tout au long du traitement de sa demande, le demandeur avait le fardeau de fournir des éléments de preuve suffisants pour établir à la satisfaction de l’agent qu’il n’était pas interdit de territoire au Canada et qu’il répondait aux exigences de la Loi. Il est évident que le demandeur n’a pas fourni des renseignements complets et exacts dans sa demande; l’agent n’a donc pas été en mesure d’établir qu’il n’était pas interdit de territoire.

[37]           Dans l’arrêt Sinnathamby c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2011 CF 1421, le juge Leonard Mandamin a confirmé la décision de l’agent des visas qui avait rejeté une demande de visa de résident permanent. Dans cette décision, les demandeurs modifiaient constamment les renseignements fournis dans leur demande et dans la correspondance ultérieure en ajoutant de nouveaux détails. L’agent des visas responsable du dossier a été incapable d’établir avec certitude s’il avait un tableau complet et exact de la situation des demandeurs. La présente affaire est similaire et, à l’instar de celle décrite dans l’arrêt Sivayogaraja, précité, elle devrait être tranchée de la même manière. Des renseignements contradictoires ont été communiqués à l’agent lors d’une série d’échanges, et le demandeur n’a pas fourni des renseignements complets sur ses antécédents personnels. Il s’ensuit que la décision est raisonnable et qu’elle ne devrait pas être modifiée dans le cadre d’un contrôle judiciaire.

ANALYSE

[38]           Le demandeur prétend qu’on ne lui a pas offert une juste occasion de répondre aux préoccupations de l’agent à propos de son admissibilité ainsi qu’à la preuve sur laquelle l’agent a fondé son évaluation. Il soutient que si l’agent entretenait des doutes, il aurait dû lui donner l’occasion de les dissiper dans le cadre d’une entrevue; en ne le convoquant pas à une entrevue, l’agent a violé son droit à l’équité procédurale. Je ne partage pas ce point de vue, pour les motifs exposés ci-après.

[39]           La Loi indique clairement que, pour délivrer un visa, l’agent doit être convaincu que l’étranger n’est pas interdit de territoire :

 (1) L’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les visa et autres documents requis par règlement. L’agent peut les délivrer sur preuve à la suite d’un contrôle, que l’étranger n’est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi

 (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document may be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

 

[40]           L’une des exigences les plus importantes de la Loi, dans le contexte d’une demande de visa de résident permanent, est l’obligation de fournir des renseignements véridiques, exacts et complets. Voir les arrêts Uppal c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2009 CF 445, au paragraphe 25, et Nazim c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2009 CF 471, au paragraphe 20.

[41]           Le paragraphe 16(1) de la Loi impose explicitement aux demandeurs l’obligation de fournir des renseignements véridiques :

 (1) L’auteur d’une demande au titre de la présente loi doit répondre véridiquement aux questions qui lui sont posées lors du contrôle, donner les renseignements et tous éléments de preuve pertinents et présenter les visa et documents requis.

 

 (1) A person who makes an application must answer truthfully all questions put to them for the purpose of the examination and must produce a visa and all relevant evidence and documents that the officer reasonably requires.

 

[42]           Aux termes de l’alinéa 40(1)a) de la Loi, une personne est interdite de territoire au Canada si elle « fai[t] une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent [...], ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application » de la Loi :

40. (1) Emportent interdiction de territoire pour fausses déclarations les faits suivants :

 

 

a) directement ou indirectement, faire une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ou une réticence sur ce fait, ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la présente loi;

 

40. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible for misrepresentation

 

(a) for directly or indirectly misrepresenting or withholding material facts relating to a relevant matter that induces or could induce an error in the administration of this Act;

 

 

 

 

[43]           Le Guide d’exécution de la loi de Citoyenneté et Immigration Canada décrit comme suit l’objet de la politique qui sous-tend l’article 40 de la Loi :

9.1. Objet de la politique

 

Les dispositions concernant les fausses déclarations ont pour but de veiller à ce que les demandeurs donnent des renseignements honnêtes, complets et véridiques en tout point dans leurs demandes d’entrée au Canada.

 

Ces dispositions sont suffisamment larges pour couvrir toute une gamme de scénarios afin d’encourager l’observation de la Loi et préserver l’intégrité du programme. Cela dit, il est toutefois impératif de les appliquer avec discernement pour respecter les objectifs de la Loi et garantir un processus décisionnel juste et équitable. [Non souligné dans l’original.]

 

[44]           Pour reprendre l’argument du défendeur, l’étranger qui veut entrer au Canada a une obligation de franchise, en ce qu’il doit divulguer tous les faits importants. La Cour a reconnu l’importance de la divulgation complète par les demandeurs aux fins de l’application régulière et équitable du régime d’immigration. L’alinéa 40(1)a) de la Loi vise à ce que les demandeurs fournissent des renseignements complets, exacts et véridiques, peu importe la manière utilisée, lorsqu’ils présentent une demande pour entrer au Canada (voir Bodine, précitée, aux paragraphes 41, 42 et 44, Baro, précitée, au paragraphe 15, et Haque c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2011 CF 315).

[45]           Ce n’était pas au demandeur de décider quelles réponses il devait donner ni quels renseignements étaient importants ou pertinents. Il n’avait pas le droit de faire obstacle aux enquêtes qui pouvaient être jugées nécessaires. Pour reprendre les propos tenus par le juge Richard Mosley, au paragraphe 14 de la décision Haque :

L’article 3 de la LIPR énumère des objectifs en matière d’immigration qu’il ne faut pas perdre de vue dans l’application de la Loi. Ces objectifs comprennent l’enrichissement et le développement du Canada socialement, économiquement et culturellement tout en assurant la protection et la sécurité des Canadiens. Les décisions en matière d’admissibilité, dont dépend la protection efficace des frontières canadiennes, reposent nécessairement, pour une bonne part, sur la capacité des agents d’immigration de vérifier les renseignements donnés par les demandeurs. Les omissions ou les fausses déclarations risquent d’engendrer des erreurs dans l’application de la Loi. [Non souligné dans l’original.]

 

[46]           L’examen que j’ai fait du dossier m’indique que, si l’agent n’a pas convoqué le demandeur à une entrevue complémentaire, il lui a néanmoins exposé explicitement, par écrit, les problèmes découlant des renseignements contradictoires sur les détentions et la résidence. Il lui a également donné toutes les occasions possibles de répondre et il a tenu compte de ses réponses. Le dossier montre que l’agent a raison lorsqu’il déclare qu’il a expliqué les points litigieux par écrit au demandeur et que les questions étaient « simples et claires ». Rien dans le dossier n’indique que le demandeur n’a pas compris les points litigieux ni n’explique pourquoi il n’a pas fourni les détails demandés relativement à sa deuxième demande.  

[47]           Les notes du STIDI indiquent clairement que les renseignements fournis par le demandeur ne correspondent pas à l’information sur les détentions et la résidence contenue dans le FRP de la répondante, ni avec les déclarations antérieures du demandeur. De plus, le demandeur a omis de déclarer [traduction] « tous les lieux de résidence, ainsi que les détentions et les séjours en prison » même après avoir été informé des détails qu’il devait fournir. En raison des contradictions entre les demandes et la correspondance du demandeur, l’agent n’a pas pu établir ses véritables antécédents et a conclu qu’[traduction] « il y a[vait] une forte possibilité que le [demandeur] a[it] fait des présentations erronées sur ses antécédents [...] ».

[48]           À la lumière de l’information dont il disposait, l’agent a rejeté la demande parce que le demandeur n’avait pas répondu de manière adéquate aux questions de l’agent. Il va de soi que les agents ne peuvent pas appliquer la Loi s’ils ne disposent pas de renseignements clairs et cohérents. L’agent aurait pu faire une entrevue, mais il en a décidé autrement; cela ne veut pas dire qu’il y a eu violation du droit à l’équité procédurale dans la présente affaire. Le demandeur n’a fourni aucun élément de preuve, en l’espèce, expliquant pour quelles raisons il jugeait essentiel d’être convoqué à une entrevue pour faciliter l’évaluation de sa demande, ou pour quelles raisons il ne pouvait pas répondre de manière adéquate aux questions de l’agent, par écrit.

[49]           Dans une situation comme celle qui nous occupe, où l’agent fait part de ses préoccupations par écrit et offre au demandeur la possibilité de soumettre des renseignements complémentaires (et la déclaration requise), je ne peux pas dire qu’il y a eu violation du droit à l’équité procédurale. Malgré toutes les possibilités qui lui ont été offertes de corriger les lacunes relevées par l’agent, le demandeur n’a pas fourni les renseignements demandés sur les détentions et la résidence. Il ne m’a pas expliqué pour quelles raisons il avait rempli la deuxième demande de la manière dont il l’a fait.

[50]           J’estime que la lettre du demandeur à l’agent, qui figure à la page 111 du DCT, appuie les conclusions de l’agent selon lesquelles le demandeur a appliqué sa propre définition de « gardé en détention » aux renseignements qu’il a fournis et qu’il y avait une forte possibilité qu’il ait fait une présentation erronée. Il s’ensuit que l’agent n’était pas en mesure de déterminer l’admissibilité, ce qui signifie que la conclusion à laquelle il est arrivé, soit que les exigences du paragraphe 11(1) de la Loi n’ont pas été respectées, était raisonnable.

[51]           À la lumière des faits dont disposait l’agent et du processus qu’il a appliqué, je ne peux pas dire que sa décision était déraisonnable ou qu’il a privé le demandeur de son droit à l’équité procédurale. En l’absence de violation du droit à l’équité procédurale ou d’une décision déraisonnable, la demande de contrôle judiciaire doit être rejetée.

[52]           Les avocats ont convenu qu’il n’y avait aucune question à certifier, et la Cour partage cet avis.

 


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

 

1.                  La demande est rejetée.

2.                  Aucune question n’est certifiée.

 

    « James Russell »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3343-11

 

INTITULÉ :                                       KANAPATHAPILLAI KANDASAMY

                                           

                                                                                                                                    demandeur               

                                                            -   c   -

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

                  

                                                                                                                        défendeur

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 30 janvier 2012

                                                           

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 27 février 2012

 

 

COMPARUTIONS :   

 

Robert Blanshay                                                                                   POUR LE DEMANDEUR

                                                                                               

Kareena Wilding                                                                                   POUR LE DÉFENDEUR

                            

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :    

 

BLANSHAY & LEWIS                                                                       POUR LE DEMANDEUR

Avocats

Toronto (Ontario)

                                                                                        

Myles J. Kirvan                                                                                    POUR LE DÉFENDEUR

Sous‑procureur général du Canada

 

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