Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20120207

Dossier : IMM‑3799‑11

Référence : 2012 CF 162

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 7 février 2012

En présence de monsieur le juge O’Keefe

 

 

ENTRE :

 

NASRULLAH ZAZAI

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La présente demande de contrôle judiciaire présentée conformément au paragraphe 72(1) et à l’alinéa 72(2)b) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi), vise la décision par laquelle une agente de la Direction générale du règlement des cas de Citoyenneté et Immigration Canada (l’agente) a refusé, en date du 27 mai 2011, la demande de résidence permanente du demandeur (la décision). L’agente a conclu que les motifs d’ordre humanitaire étaient insuffisants pour justifier une exception autorisant la présentation d’une demande de résidence permanente à partir du Canada.

 

[2]               Le demandeur prie la Cour d’annuler la décision de l’agente et de renvoyer l’affaire à Citoyenneté et Immigration Canada pour qu’un autre agent procède à un nouvel examen.

 

Contexte

 

[3]               Le demandeur, Nasrullah Zazai, est citoyen afghan. En 2002, il a épousé une résidente permanente du Canada. Leurs trois enfants sont nés au Canada et un quatrième est attendu en février 2012. Le demandeur n’a plus de famille en Afghanistan.

 

[4]               Le demandeur est arrivé au Canada comme passager clandestin le 17 novembre 1993; il était alors âgé de 25 ans. En février 1994, il a présenté une demande d’asile dans laquelle il affirmait avoir fait partie du Khadamat‑e Etela’at‑e Dawlati (le KHAD) pendant cinq ans. Le KHAD, le service de renseignements de l’Afghanistan, a commis des crimes contre l’humanité. Le demandeur a allégué que, lorsqu’il faisait partie du KHAD, il était chargé de faire rapport sur les activités des moudjahidines sur lesquels pesaient des soupçons et il a été promu de lieutenant à capitaine. Outre ses propres déclarations, aucun autre élément de preuve n’a été soumis pour corroborer son appartenance au KHAD.

 

[5]               Se fondant sur l’appartenance alléguée au KHAD, la Section du statut de réfugié (la SSR, maintenant remplacée par la Section de la protection des réfugiés) a rejeté la demande d’asile du demandeur en août 1995 en vertu de la section Fa) de l’article premier de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés.

 

[6]               Le 5 janvier 1996, le demandeur a présenté une demande d’autorisation de contrôle judiciaire de la décision relative à sa demande d’asile. Cette demande a été refusée en décembre 1996. La même année, le demandeur a présenté une demande d’établissement en tant que demandeur non reconnu du statut de réfugié au Canada après qu’un agent chargé d’examiner son cas eut conclu qu’il serait exposé à un risque s’il était renvoyé en Afghanistan. Cette demande a été refusée en février 2001 parce qu’il était interdit de territoire.

 

[7]               En 2000, un rapport visant le demandeur a été établi en vertu de l’article 27 (maintenant l’article 44). À la suite de l’enquête, le demandeur a été jugé interdit de territoire. Une mesure d’expulsion a été prise contre lui le 17 janvier 2002. Le demandeur a présenté une demande d’autorisation de contrôle judiciaire de la décision d’interdiction de territoire, et l’autorisation a été accordée le 21 mai 2003. Le défendeur a toutefois contesté cette décision devant la Cour d’appel fédérale, qui a accueilli l’appel le 4 mars 2004. Lors d’un nouvel examen, la demande d’autorisation de contrôle judiciaire du demandeur a été rejetée. Parallèlement, la juge du procès a certifié la question de savoir si la définition de « crime contre l’humanité » figurant dans la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, LC 2000, c 24, visait le fait d’être complice de ces crimes. Dans Zazai c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CAF 303, [2005] ACF no 1567, la Cour d’appel fédérale a répondu par l’affirmative à cette question (au paragraphe 27).

 

[8]               En juillet 2003, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. Cette demande a été refusée le 25 avril 2004. La demande d’autorisation de contrôle judiciaire de cette décision a été refusée.

 

[9]               En mai 2006, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente fondée sur des considérations d’ordre humanitaire dans laquelle il demandait également que son mariage et son admissibilité en vertu de la politique concernant les époux soient pris en considération. De plus, il y déclarait que les allégations antérieures concernant son appartenance au KHAD étaient fausses. Il avait, paraît‑il, fait ces fausses déclarations parce qu’il avait suivi les conseils de son cousin. Le demandeur a déclaré qu’il était plutôt étudiant universitaire en Afghanistan sans appartenance politique particulière.

 

[10]           Le demandeur a produit des observations additionnelles en mars 2009 à l’appui de la demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire (demande CH), à la suite d’une demande en ce sens. Dans ces observations, le demandeur expliquait que vivre en Afghanistan n’était pas une option viable pour ses enfants, compte tenu de la situation politique et en matière de droits de la personne dans ce pays. De plus, l’épouse du demandeur ne pourrait retourner en Afghanistan parce qu’elle s’est enfuie de ce pays pour éviter un mariage forcé avec Jan Khan, un chef de guerre dangereux et puissant ayant des accointances dans tout le pays. Jan Khan était au courant de leur mariage et il voulait, paraît‑il, se venger de l’affront que lui avait fait subir l’épouse du demandeur en refusant de se marier avec lui.

 

[11]           Après avoir examiné les observations produites en mars 2009, l’agente a décidé qu’un permis de séjour temporaire (PST) pourrait être justifié. Par la suite, soit le 3 février 2010, un PST de trois ans lui a été délivré. Une prolongation de deux ans a également été autorisée à l’avance. La date d’expiration actuelle du PST du demandeur est le 3 février 2015.

 

[12]           En mai 2011, l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC) a ordonné au demandeur de se présenter au Centre d’exécution de la Loi du Grand Toronto. L’ASFC lui a ordonné d’appeler au centre tous les mois et de s’y présenter en personne tous les trois mois.

 

[13]           Finalement, le demandeur a également présenté une demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR) en juin 2006. Aucune décision n’a encore été rendue à l’égard de cette demande.

 

Décision de l’agente

 

[14]           Dans une lettre datée du 27 mai 2011, le demandeur a été avisé que sa demande CH était rejetée. Les motifs du rejet de cette demande étaient exposés dans une note de service ministérielle rédigée par l’agente le 18 mai 2011. Ces motifs font partie de la décision.

 

[15]           L’agente a d’abord résumé le contexte, notamment l’arrivée du demandeur au Canada et les différentes étapes des demandes d’immigration qu’il a présentées.

 

[16]           L’agente a ensuite examiné le motif de l’interdiction de territoire du demandeur, à savoir son appartenance au KHAD dont il avait fait état dans son formulaire de renseignements personnels initial. L’agente a cité des extraits de la décision rendue par la SSR en août 1995 et a souligné que, dans l’enquête qui avait suivi, l’arbitre avait conclu que les éléments de preuve fournis à la SSR étaient plus crédibles que les témoignages donnés à l’audience (à savoir les témoignages des personnes qui avaient connu le demandeur à l’université de Kaboul et qui ne savaient pas qu’il faisait partie du KHAD). Même si la décision d’interdiction de territoire était toujours valide, l’agente a constaté que le demandeur soulevait les mêmes arguments dans ses observations de mars 2009, à savoir que son appartenance au KHAD avait été inventée. Néanmoins, l’agente a souligné que les décisions rendues en vertu de la section Fa) de l’article premier lient les décideurs subséquents. L’agente a conclu qu’il n’existait aucune nouvelle preuve susceptible de remettre en cause de façon crédible les conclusions initiales et elle était donc convaincue que le demandeur était toujours interdit de territoire en vertu de la Loi.

 

[17]           L’agente a ensuite voulu mettre en balance sa conclusion d’interdiction de territoire et les facteurs d’ordre humanitaire. Elle a établi les considérations d’ordre humanitaire suivantes comme étant favorables :

            le temps que le demandeur a passé au Canada (depuis 1993);

            il était marié à une citoyenne canadienne depuis 2002;

            il était le père de trois enfants nés au Canada;

            il travaillait comme chauffeur contractuel pour Pizza Pizza;

            il était propriétaire d’une maison;

            il était la seule source de revenu de la famille;

            il avait un dossier civil et criminel sans tache;

            il faisait partie intégrante de la famille;

            la possibilité qu’il soit séparé de façon permanente de sa famille en cas d’expulsion.

 

[18]           Toutefois, l’agente a souligné que les risques auxquels le demandeur serait exposé en cas de renvoi n’étaient en fait pas pertinents en raison de la validité de son PST. En outre, si son PST devait un jour lui être retiré, le demandeur se verrait offrir la possibilité de demander un ERAR restreint avant son renvoi.

 

[19]           S’appuyant sur cette analyse, l’agente a conclu que l’intérêt supérieur des enfants du demandeur constituait la considération d’ordre humanitaire vraiment impérieuse en l’espèce. Son établissement constituait également une considération favorable.

 

[20]           L’agente a ensuite fait état de deux considérations défavorables. Premièrement, elle a accordé beaucoup d’importance au fait que le demandeur avait fait partie pendant cinq ans du KHAD, organisation ayant des fins limitées et brutales. L’agente s’est appuyée sur des extraits de l’arrêt Zazai, ci‑dessus, (aux paragraphes 25 et 26) rendu par la Cour d’appel fédérale en 2005. Deuxièmement, elle a tenu compte de l’engagement du gouvernement du Canada à ne pas offrir l’asile à ceux qui ont commis des crimes contre l’humanité.

 

[21]           S’appuyant sur l’ensemble de ces considérations, l’agente a conclu qu’une exception aux fins de la résidence permanente au Canada n’était pas justifiée dans les circonstances particulières de l’espèce.

 

Questions en litige

 

[22]           Le demandeur soulève les questions suivantes :

            1.         Quelle est la norme de contrôle applicable?

            2.         L’agente a‑t‑elle commis une erreur de droit dans son analyse de l’intérêt supérieur des enfants du demandeur et des difficultés auxquelles il devrait faire face s’il était renvoyé en Afghanistan, étant donné qu’elle devait apprécier ces facteurs dans le contexte d’une demande CH, sans tenir compte du PST, et qu’elle ne l’a pas fait?

            3.         L’agente a‑t‑elle entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire en mettant en balance le fait que le demandeur était interdit de territoire et les nombreux facteurs d’ordre humanitaire justifiant la levée de l’interdiction de territoire?

            4.         L’agente a‑t‑elle commis une erreur de droit dans son évaluation de l’établissement du demandeur?

 

[23]           Je formulerais les questions en litige comme suit :

            1.         Quelle est la norme de contrôle applicable?

            2.         L’analyse relative à l’intérêt supérieur des enfants était‑elle insuffisante?

            3.         L’agente a‑t‑elle commis une erreur en mettant en balance le fait que le demandeur était interdit de territoire et les facteurs d’ordre humanitaire favorables?

            4.         L’agente a‑t‑elle commis une erreur lorsqu’elle a évalué le degré d’établissement du demandeur au Canada?

 

Observations écrites du demandeur

 

[24]           Le demandeur soutient que la décision raisonnable est la norme de contrôle applicable aux décisions rendues à l’égard des demandes CH en application de l’article 25(1) de la Loi.

 

[25]           Le demandeur soutient que l’intérêt supérieur des enfants constitue un facteur très pertinent dans une demande CH. Toutefois, en l’espèce, l’agente a refusé d’examiner cette question parce que le demandeur détient un PST; le risque de séparation d’avec ses enfants et les difficultés consécutives à un éventuel renvoi étaient donc improbables et dépourvus de pertinence dans l’exercice de mise en balance.

 

[26]           Contrairement à la conclusion de l’agente, le statut du demandeur est, aux dires de celui‑ci, précaire et provisoire étant donné qu’un PST peut être annulé en tout temps. Qui plus est, s’il attend que le PST expire avant de présenter une autre demande CH, celle‑ci ne sera pas examinée avant le renvoi et une demande CH pendante ne surseoirait pas nécessairement à l’exécution de la mesure de renvoi le visant. Le demandeur soutient que le refus d’exercer le pouvoir et d’examiner les questions pertinentes soulevées, particulièrement l’intérêt supérieur des enfants et les difficultés auxquelles le demandeur devrait faire face en cas de renvoi, constitue une erreur.

 

[27]           Selon le demandeur, la décision ne fait pas état des bienfaits pour les enfants associés à la présence de leur père au Canada de façon permanente, du besoin de stabilité émotionnelle des enfants et des difficultés qu’ils éprouveraient s’ils étaient séparés de lui. Elle ne s’attarde pas non plus aux difficultés auxquelles le demandeur serait exposé s’il n’obtenait pas le statut de résident permanent, notamment l’incapacité d’entrer au Canada et d’en sortir et d’acquérir la citoyenneté canadienne.

 

[28]           Le demandeur soutient également que l’agente a commis une erreur de droit en se laissant influencer indûment par les conclusions de la SSR et de la Section de l’immigration concernant son appartenance au KHAD. Ainsi, l’agente a entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire et accordé beaucoup trop d’importance à ce facteur en faisant abstraction de tous les autres. Le demandeur affirme que, si l’agent possède le pouvoir discrétionnaire de mettre en balance l’interdiction de territoire et les considérations d’ordre humanitaire favorables, il doit être possible d’exercer ce pouvoir de façon favorable malgré l’interdiction de territoire. La présente affaire regorge de facteurs d’ordre humanitaire favorables, notamment les faits suivants :

            le demandeur réside au Canada depuis presque deux décennies;

            il a un excellent dossier civil;

            il occupe un emploi rémunéré;

            il subvient seul aux besoins de la famille;

            il est un membre utile de la société;

            il éprouverait de graves difficultés en cas de renvoi;

            il est le père de trois enfants et bientôt d’un quatrième;

            il serait vraisemblablement séparé de sa famille de façon permanente en cas d’expulsion.

 

[29]           Le seul facteur défavorable est qu’il avait par le passé allégué avoir fait partie du KHAN.

 

[30]           Comme l’intérêt supérieur des enfants favorisait nettement la cause du demandeur, l’agente avait l’obligation de justifier de façon convaincante pourquoi les autres facteurs faisaient pencher la balance en faveur d’une décision défavorable.

 

[31]           Enfin, le demandeur soutient que l’agente a fait erreur en effectuant une analyse incorrecte de son établissement. Sans analyse convenable de l’établissement, il était impossible de rendre une décision judicieuse sur la question de savoir s’il éprouverait des difficultés s’il était tenu de présenter une demande de résidence permanente à partir de l’étranger.

 

Observations écrites du défendeur

 

[32]           Le défendeur convient que la norme de contrôle applicable aux décisions fondées sur des considérations d’ordre humanitaire est celle de la décision raisonnable. Toutefois, cette norme n’exige pas un examen approfondi de la décision; elle limite plutôt l’intervention de la Cour à l’annulation des décisions qui n’étaient pas raisonnables compte tenu des circonstances de l’espèce et du droit applicable. Dans la présente affaire, le caractère raisonnable de la décision de l’agente doit être examiné en tenant compte de la nature exceptionnelle et discrétionnaire de la dispense pour motifs d’ordre humanitaire, des motifs graves sous‑jacents à l’interdiction de territoire du demandeur et des mesures prises pour faciliter la présence du demandeur au Canada par l’octroi d’un PST d’une durée de cinq ans. Considérés dans leur ensemble, ces facteurs jouent contre l’octroi de la dispense pour motifs d’ordre humanitaire en l’espèce.

 

[33]           Le défendeur affirme que le fait que le demandeur détient un PST valide est un élément important parce que ce permis lui accorde le droit de séjourner au Canada, écarte le risque qu’il soit séparé de ses enfants, élimine les difficultés liées à la réinstallation de la famille et lui permet de continuer de bénéficier des avantages de l’établissement au Canada. Le PST constitue également une mesure importante dans la demande CH. Le caractère raisonnable de la décision relative à la demande CH devrait donc être apprécié en tenant compte du PST.

 

[34]           Le défendeur soutient que l’agente n’a pas omis d’examiner le facteur de l’intérêt supérieur des enfants. Elle a souligné que le demandeur avait trois enfants qui étaient nés au Canada, qu’il s’occupait de ses enfants et que le bien‑être des enfants serait compromis si leur père était expulsé ou si la famille devait s’établir en Afghanistan. Par conséquent, l’agente a jugé qu’il fallait accorder beaucoup d’importance à l’intérêt supérieur des enfants parce qu’il s’agissait d’une considération impérieuse. Toutefois, les difficultés potentielles découlant d’une éventuelle séparation constituent un risque hypothétique étant donné que le demandeur détient un PST d’une durée de cinq ans. Le défendeur avance que l’agente ne peut évaluer ce type de facteur qui tient entièrement de la conjecture. La véritable question qui se pose est plutôt de savoir si les enfants éprouveraient des difficultés excessives si le demandeur n’obtenait pas le statut de résident permanent, et non s’il devait quitter le Canada.

 

[35]           Le défendeur soutient que les faits de la présente espèce sont différents de ceux de l’affaire Brar c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 691, [2011] ACF no 891, sur laquelle s’est fondé le demandeur. Contrairement à la situation du demandeur en l’espèce, le demandeur dans Brar, ci‑dessus, avait seulement obtenu un sursis à l’exécution de la mesure de renvoi. Le renvoi est beaucoup plus improbable en l’espèce et l’agente n’était pas tenue d’examiner la thèse d’un éventuel renvoi. De plus, contrairement à Brar, ci‑dessus, l’agente dans la présente affaire n’a pas minimisé l’importance de l’intérêt supérieur des enfants; elle a au contraire souligné que ce facteur favorisait fortement une dispense pour motifs d’ordre humanitaire. En outre, si le demandeur devait perdre son PST, il ne serait pas immédiatement renvoyé étant donné que la décision de donner suite au renvoi devrait d’abord être prise et qu’on lui offrirait d’abord de demander un ERAR.

 

[36]           Le défendeur soulève des doutes quant à la proposition énoncée dans Brar, ci‑dessus. Il soutient qu’il n’existe en droit canadien ou en droit international aucun fondement pour étayer la proposition que l’analyse relative à l’intérêt supérieur des enfants doit être effectuée avant le renvoi d’un parent du Canada. De plus, exiger des agents qu’ils tiennent compte des difficultés susceptibles de survenir advenant un éventuel changement dans le statut d’un étranger revient à les inviter à formuler des hypothèses inappropriées.

 

[37]           Le défendeur soutient également que la possibilité que le PST soit annulé tient de la conjecture. Comme le PST a été délivré pour une longue période en raison de considérations valables et permanentes relatives à l’intérêt supérieur des enfants, il n’existe aucun risque important qu’il soit annulé. Le défendeur est d’avis que le demandeur n’a pas établi que son PST est précaire. Comme l’agente ne disposait d’aucun élément de preuve sur la nature précaire du PST, on ne peut lui reprocher de ne pas en avoir tenu compte.

 

[38]           De plus, comme il a été établi que le demandeur craignait avec raison d’être exposé à des dangers en Afghanistan, on lui offrirait la possibilité de demander qu’il soit procédé à un ERAR avant tout renvoi éventuel (paragraphe 112(1) de la Loi). En outre, compte tenu du fait qu’il s’est écoulé plus de cinq ans depuis sa dernière demande d’ERAR et de la situation en constante évolution en Afghanistan, il est presque certain qu’on lui proposerait de présenter une demande d’ERAR. Le demandeur pourrait également présenter une demande de sursis à l’exécution de la mesure de renvoi fondée sur des considérations liées à l’intérêt supérieur des enfants.

 

[39]           Le défendeur soutient qu’on ne peut reprocher à l’agente de ne pas avoir expressément fait état des bienfaits pour les enfants associés à la présence de leur père au Canada, de leur besoin de stabilité émotionnelle ou des difficultés qu’ils éprouveraient si leur père était renvoyé. On peut présumer que ces points ont tous été acceptés dans la conclusion de l’agente selon laquelle l’intérêt supérieur des enfants constituait le facteur vraiment impérieux militant en faveur d’une dispense pour motifs d’ordre humanitaire. De la même manière, l’agente n’a pas commis d’erreur en n’examinant pas les conséquences qu’aurait le fait que le demandeur ne possède pas le statut de résident permanent sur sa capacité à voyager à l’étranger et à obtenir la citoyenneté canadienne. Ces facteurs ne justifient pas une dispense pour motifs d’ordre humanitaire. De plus, le PST permet au demandeur de sortir du Canada et d’y entrer.

 

[40]           Le défendeur affirme que l’agente n’a pas commis d’erreur en n’évaluant pas les difficultés auxquelles le demandeur pourrait faire face s’il était renvoyé en Afghanistan. Étant donné que le demandeur détient un PST, ces difficultés sont trop hypothétiques. En outre, si jamais le renvoi était un jour envisagé, les risques auxquels il serait exposé en Afghanistan seraient évalués dans le cadre d’un ERAR.

 

[41]           Le défendeur fait également valoir que l’agente n’a pas entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire. Les décisions de la SSR et de la Section de l’immigration sont toujours valides à moins qu’elles ne soient annulées dans un contrôle judiciaire. Il était loisible à l’agente d’accorder beaucoup d’importance aux conclusions relatives à l’interdiction de territoire dans son évaluation du bien‑fondé de la demande CH. Ces conclusions sont de première importance pour l’application de la Loi. De plus, l’agente n’a pas traité l’interdiction de territoire du demandeur comme un facteur décisif; elle en a plutôt tenu compte avec tous les autres facteurs à la lumière du PST du demandeur. L’agente savait que l’interdiction de territoire pouvait être levée pour des motifs d’ordre humanitaire, mais elle a conclu raisonnablement que pareille mesure spéciale n’était pas justifiée.

 

[42]           En résumé, le défendeur fait valoir que l’agente savait que l’interdiction de territoire pouvait être levée pour des motifs d’ordre humanitaire, mais elle a conclu raisonnablement qu’une mesure spéciale pour motifs d’ordre humanitaire n’était pas justifié en l’espèce.

 

[43]           Le défendeur avance également qu’il existe trois raisons pour lesquelles le demandeur ne peut reprocher à l’agente de ne pas avoir fourni des motifs suffisants :

            1.         Rien n’indique que le défendeur ait réclamé des motifs plus détaillés, condition préalable pour avancer un argument fondé sur l’insuffisance des motifs.

            2.         Le demandeur n’a pas établi que l’agente n’avait rationnellement pas satisfait à la norme judiciaire de suffisance des motifs.

            3.         L’argumentation du demandeur reposait sur la thèse qu’il avait droit à une dispense pour motifs d’ordre humanitaire, de sorte que l’agente se devait d’expliquer pourquoi la dispense n’était pas accordée. Cela n’équivaut pas à la prise d’une mesure exceptionnelle et discrétionnaire.

 

[44]           Enfin, le défendeur soutient que, dans sa décision, l’agente ne s’est pas peu souciée de l’établissement du demandeur ou que l’analyse qu’elle en a faite n’était pas insuffisante. En effet, l’agente a plutôt bien souligné les facteurs pertinents et a conclu que l’établissement du demandeur constituait un facteur militant en faveur d’une dispense pour motifs d’ordre humanitaire. Les conséquences du PST sur l’établissement doivent également être prises en considération. Le PST permet au demandeur de rester au Canada et de profiter de son établissement. Il était donc raisonnable de la part de l’agente de conclure que l’établissement du demandeur ne faisait pas pencher la balance en faveur d’une dispense pour motifs d’ordre humanitaire.

 

Réponse du demandeur

 

[45]           En réponse, le demandeur fait valoir que la norme du caractère raisonnable exige de voir si la décision de l’agente comportait une appréciation intelligible et transparente des considérations d’ordre humanitaire.

 

[46]           Le demandeur soutient que l’agente n’a pas justifié pourquoi l’interdiction de territoire l’emportait sur l’intérêt supérieur des enfants. L’agente a fait erreur en n’expliquant pas en quoi le demandeur ne répondait pas aux critères applicables pour obtenir la résidence permanente au Canada alors qu’il répondait aux critères du PST avec prolongation automatique. De plus, en se contentant d’insister sur le PST, l’agente a fait erreur en ne tenant pas suffisamment compte de l’intérêt supérieur des enfants et en n’évaluant pas ce facteur convenablement. Elle a également commis une erreur en ne tenant pas compte du fait que le PST peut être annulé en tout temps et des conséquences qu’une annulation imprévue ou une annulation imminente possible aurait sur les enfants du demandeur.

 

[47]           Enfin, le demandeur affirme que la possibilité du renvoi équivaut à la possibilité à laquelle le demandeur dans Brar, ci‑dessus, a dû faire face. En fait, le statut du demandeur en l’espèce est beaucoup plus précaire parce qu’il n’est pas protégé par une décision concluant à l’existence d’un risque de torture qui lui permettrait de présenter des observations avant le renvoi.

 

Analyse et décision

 

[48]           Question 1

      Quelle est la norme de contrôle applicable?

            Lorsque la jurisprudence établit la norme de contrôle applicable à une question particulière, la cour de révision peut adopter cette norme (voir Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 57).

 

[49]           Les parties conviennent que les conclusions d’un agent dans une décision relative à une demande de résidence permanente présentée au Canada sur le fondement de considérations d’ordre humanitaire sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision raisonnable (voir Kisana c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 189, [2009] ACF no 713, au paragraphe 18; Adams c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 1193, [2009] ACF no 1489, au paragraphe 14; De Leiva c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 717, [2010] ACF no 868, au paragraphe 13).

 

[50]           En appliquant la norme du caractère raisonnable à la décision de l’agente, la Cour s’abstient d’intervenir sauf si l’agente a tiré une conclusion qui n’est pas transparente, justifiable et intelligible et qui n’appartient pas aux issues acceptables compte tenu de la preuve dont elle disposait (voir Dunsmuir, ci‑dessus, au paragraphe 47; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] ACF no 12, au paragraphe 59). Comme la Cour suprême l’a dit dans Khosa, ci‑dessus, « la cour de révision ne peut […] substituer [à une issue raisonnable] l’issue qui serait à son avis préférable » et il ne rentre dans les attributions de la cour de révision de soupeser à nouveau les éléments de preuve (voir le paragraphe 59).

 

[51]           Question 2

            L’analyse relative à l’intérêt supérieur des enfants était‑elle insuffisante?

            Les tribunaux ont élaboré une jurisprudence abondante sur l’appréciation de l’intérêt supérieur des enfants sous le régime du paragraphe 25(1) de la Loi. Des décisions ont été jugées déraisonnables quand l’intérêt des enfants est minimisé d’une manière incompatible avec la tradition humanitaire du Canada (voir Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817, aux paragraphes 73 et 75). Il ne suffit pas de simplement dire que l’intérêt des enfants a été pris en compte ou de se contenter de mentionner l’intérêt des enfants ou la relation avec les enfants visés (voir Hawthorne c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 475, [2003] 2 CF 555, au paragraphe 32). L’intérêt des enfants doit être bien identifié et être défini et examiné avec beaucoup d’attention (voir Hawthorne, ci‑dessus, au paragraphe 32; Legault c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 125, [2002] ACF no 457, aux paragraphes 12 et 31).

 

[52]           L’analyse relative à l’intérêt supérieur des enfants exige que les agents démontrent qu’ils étaient réceptifs, attentifs et sensibles à cet intérêt. Dans Kolosovs c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 165, [2008] ACF no 211, le juge Douglas Campbell a expliqué que le fait d’être réceptif signifie que l’agent doit montrer qu’il est « au courant de l’intérêt supérieur de l’enfant en indiquant les manières dont cet intérêt entre en jeu » (au paragraphe 9). Le fait d’être « attentif » à l’intérêt supérieur des enfants signifie que l’agent doit montrer qu’il comprend le point de vue de chacun des participants dans un ensemble donné de circonstances, y compris le point de vue de l’enfant s’il est raisonnablement possible de le connaître (voir Kolosovs, ci‑dessus, au paragraphe 11). Enfin, le fait d’être « sensible » signifie que l’agent doit pouvoir exposer clairement les épreuves qui résulteraient pour l’enfant d’une décision défavorable et dire si, compte tenu également des autres facteurs, les épreuves en question justifient une dispense pour motifs d’ordre humanitaire (voir Kolosovs, ci‑dessus, au paragraphe 12).

 

[53]           Même s’il s’agit d’un facteur important, il n’existe aucune présomption prima facie que l’intérêt des enfants doit avoir préséance et l’emporter sur d’autres considérations (voir Legault, ci‑dessus, au paragraphe 13; Okoloubu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CAF 326, [2008] ACF no 1495, au paragraphe 48). Il revient à l’agent de déterminer le poids qu’il convient d’attribuer à l’intérêt des enfants touchés (voir Sinniah c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1285, [2011] ACF no 1568, au paragraphe 57).

 

[54]           Dans la présente affaire, l’agente a tenu compte du fait que le demandeur avait trois enfants mineurs et qu’il était la seule source de revenu de la famille. L’agente a également souligné que le demandeur faisait partie intégrante de la vie familiale et qu’il veillait au bien‑être de ses enfants. Compte tenu de ces observations, l’agente a conclu que la considération d’ordre humanitaire vraiment impérieuse était l’intérêt supérieur des enfants du demandeur et qu’elle justifiait qu’il reste au Canada. Toutefois, étant donné qu’un PST d’une durée de cinq ans avait été délivré au demandeur, l’agente a conclu qu’il ne courait pas actuellement le risque d’être renvoyé. Par conséquent, ces circonstances particulières ne justifiaient pas l’octroi d’une dispense en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi.

 

[55]           Le demandeur soutient que l’agente a fait erreur en ne tenant pas compte de la nature précaire d’un PST, à savoir qu’il peut être annulé en tout temps. De plus, il avance que l’agente a commis une erreur en ne faisant pas état des avantages pour les enfants d’avoir un père qui peut demeurer au Canada de façon permanente, de leur besoin de stabilité émotionnelle et des difficultés qu’ils éprouveraient s’ils étaient séparés de lui.

 

[56]           Pour étayer cet argument, le demandeur invoque la récente décision Brar, ci‑dessus. Dans Brar, le demandeur avait été reconnu coupable de s’être soustrait aux lois américaines en matière d’immigration et une mesure d’expulsion a été prise contre lui au Canada. Il a par la suite été sursis à l’exécution de cette mesure parce qu’un agent d’ERAR a conclu que le demandeur risquait d’être torturé ou d’être exposé à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités s’il était renvoyé en Inde. De la même manière que le demandeur dans la présente affaire, le demandeur dans Brar, ci‑dessus, était marié et devait subvenir aux besoins de ses trois enfants mineurs au Canada. Toutefois, étant donné que, dans Brar, ci‑dessus, il avait été sursis à l’exécution de la mesure d’expulsion visant le demandeur, l’agente a conclu qu’une décision défavorable à l’égard de la demande CH n’aurait aucune incidence sur son renvoi du Canada. Par conséquent, l’agente n’a pas estimé nécessaire d’examiner en profondeur l’intérêt supérieur des enfants.

 

[57]           Lors du contrôle, la Cour a conclu que l’agente dans Brar, ci‑dessus, n’avait pas tenu compte du fait que le sursis pouvait être levé ultérieurement, ce qui rendait le statut du demandeur au Canada conditionnel et provisoire. La Cour a déclaré au paragraphe 48 que l’agente :

[…] aurait dû examiner et expliquer de quelle façon l’intérêt supérieur des enfants allait être traité avant le renvoi, ou si l’intérêt supérieur des enfants justifie que le père continue de jouir d’un statut conditionnel au Canada et qu’il puisse faire l’objet d’une mesure de renvoi si le défendeur décide que les conditions en Inde ne présentent plus de risque.

[…]

 

L’omission de l’agente de traiter de ces questions a été assimilée à une erreur susceptible de contrôle.

 

[58]           Dans Brar, ci‑dessus, la Cour a également examiné la façon dont l’agente avait traité des autres options advenant l’annulation du sursis. La Cour a fait remarquer ce qui suit (au paragraphe 50) :

[…] La représentante du ministre présume‑t‑elle que, avant tout renvoi futur, le demandeur pourra bénéficier d’une autre évaluation fondée sur les motifs humanitaires qui tiendra compte des difficultés? On ne sait pas avec certitude si cette présomption sous‑tend la décision. Le défendeur cherche peut‑être à renvoyer le demandeur avant qu’une demande fondée sur des considérations humanitaires ne soit présentée ou examinée, ce qui signifierait que le demandeur se trouverait hors du Canada même si aucune décision n’a réellement traité la question de l’intérêt supérieur de ses enfants ou des difficultés inhabituelles et injustifiées ou démesurées. J’aurais été moins préoccupé par la décision de la représentante du ministre de ne pas tenir compte de ces facteurs si elle avait expliqué comment et quand ces facteurs seront examinés avant un éventuel renvoi. [Non souligné dans l’original.]

 

[59]           Dans la présente affaire, l’agente a de fait expressément affirmé que [traduction] « [s]i jamais le PST de M. Zazai n’était pas renouvelé dans le futur, il se verrait offrir la possibilité de demander un [ERAR] restreint avant son renvoi ». Cependant, tel qu’il a été expliqué dans Hinzman c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CAF 177, [2010] ACF no 838, l’ERAR diffère de l’évaluation des considérations d’ordre humanitaire. En évaluant les demandes d’ERAR, les agents doivent tenir compte de tout nouvel élément de preuve crédible, pertinent et substantiel qui aurait pu influer sur l’issue de la demande d’asile si cet élément de preuve avait été présenté et ainsi évaluer le risque en fonction du pays vers lequel il y aurait renvoi (au paragraphe 25). Inversement, en évaluant les demandes CH, les agents doivent « tenir compte des circonstances d’ordre humanitaire ainsi que de l’intérêt public, et notamment des intérêts relatifs à la famille » (au paragraphe 26). Comparativement à l’ERAR, l’évaluation des considérations d’ordre humanitaire répond à un critère moins rigoureux et ne se limite pas aux paramètres particuliers de la persécution.

 

[60]           En raison de ces différences entre les deux processus, le fait que l’agente se soit appuyée en l’espèce sur un éventuel ERAR, qui serait « restreint », n’indique pas de quelle manière l’intérêt supérieur des enfants serait examiné avant le renvoi. En outre, même si l’agente a clairement affirmé que l’intérêt supérieur des enfants était la considération d’ordre humanitaire vraiment impérieuse en l’espèce, sa courte analyse de cet intérêt ne permet pas de satisfaire à la norme de l’examen très détaillé de cet intérêt (voir Hawthorne, ci‑dessus, au paragraphe 32). L’existence d’un PST qui peut être annulé en tout temps (comme le précise la section 5.17 du Guide opérationnel IP1 – Permis de séjour temporaires) ne permet pas d’écarter l’exigence relative à un examen approfondi et attentif de cet intérêt. La nature précaire du statut du demandeur qui détient un PST est accentuée par les récentes ordonnances rendues par l’ASFC à l’endroit du demandeur.

 

[61]           En résumé, même s’il revenait à l’agente de déterminer le poids qu’il convenait d’accorder à l’intérêt supérieur des enfants, je ne suis pas d’avis que l’analyse qu’elle a faite de cet intérêt avant de procéder à l’exercice de mise en balance était suffisante. Le fait que l’agente se soit appuyée sur un éventuel ERAR restreint ne garantit pas que cet intérêt sera traité avant un renvoi futur, qui demeure une possibilité en raison de la nature non permanente des PST (voir Brar, ci‑dessus, au paragraphe 48).

 

[62]           Puisque l’agente a commis une erreur susceptible de contrôle, sa décision doit être annulée et l’affaire, renvoyée à un autre agent pour qu’il effectue un nouvel examen.

 

[63]           Compte tenu de la conclusion que j’ai tirée concernant la deuxième question, il n’est pas nécessaire d’examiner les autres questions.

 

[64]           Ni l’une ni l’autre des parties n’a manifesté l’intention de proposer une question grave de portée générale pour examen aux fins de certification.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est accueillie, que la décision de l’agente est annulée et que l’affaire est renvoyée à un autre agent pour qu’il effectue un nouvel examen.

 

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 


ANNEXE

 

Dispositions législatives pertinentes

 

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27.

 

25. (1) Le ministre doit, sur demande d’un étranger se trouvant au Canada qui est interdit de territoire ou qui ne se conforme pas à la présente loi, et peut, sur demande d’un étranger se trouvant hors du Canada, étudier le cas de cet étranger; il peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables, s’il estime que des considérations d’ordre humanitaire relatives à l’étranger le justifient, compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché.

 

 

 

 

72. (1) Le contrôle judiciaire par la Cour fédérale de toute mesure – décision, ordonnance, question ou affaire – prise dans le cadre de la présente loi est subordonné au dépôt d’une demande d’autorisation.

 

25. (1) The Minister must, on request of a foreign national in Canada who is inadmissible or who does not meet the requirements of this Act, and may, on request of a foreign national outside Canada, examine the circumstances concerning the foreign national and may grant the foreign national permanent resident status or an exemption from any applicable criteria or obligations of this Act if the Minister is of the opinion that it is justified by humanitarian and compassionate considerations relating to the foreign national, taking into account the best interests of a child directly affected.

 

72. (1) Judicial review by the Federal Court with respect to any matter — a decision, determination or order made, a measure taken or a question raised — under this Act is commenced by making an application for leave to the Court.

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    IMM‑3799‑11

 

INTITULÉ :                                                   NASRULLAH ZAZAI

                                                                        - et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET
DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 16 janvier 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                          LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 7 février 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Krassina Kostadinov

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Martin Anderson

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Waldman & Associates

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.