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 Date : 20120127


Dossier : IMM-600-12

Référence : 2012 CF 111

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 27 janvier 2012

En présence de monsieur le juge Scott

 

ENTRE :

 

 

LOREANNY ARTEAGA BARRERO

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

défendeurs

 

 

 

 

 

         MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

            VU la requête datée du 26 janvier 2012 présentée au nom de la demanderesse en vue d’obtenir un sursis à l’exécution de la mesure de renvoi en Colombie prise contre elle, qui doit avoir lieu le lundi 30 janvier 2012, jusqu’à ce que soit entendue la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la demanderesse visant une décision défavorable rendue par un agent (l’agent) d’examen des risques avant renvoi [ERAR] le 31 octobre 2011, mais signée le 10 novembre 2011, après examen de la preuve supplémentaire présentée;

 

            ET APRÈS examen de la preuve et des observations contenues dans les dossiers de requête présentés par la demanderesse et les défendeurs;

 

ET APRÈS avoir entendu les observations orales des avocats lors de la téléconférence tenue à Ottawa le vendredi 27 janvier 2012;

 

ET APRÈS avoir examiné le critère à trois volets établi dans l’arrêt Toth c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), (1988) 86 NR 302 (CAF), auquel il doit être satisfait avant qu’un sursis à l’exécution d’une mesure de renvoi puisse être accordé;

 

EXPLICATIONS

 

[1]        Pour obtenir gain de cause, la demanderesse doit démontrer qu’il existe une question sérieuse à trancher et qu’il y a des raisons valables expliquant le dépôt tardif de sa demande de contrôle judiciaire. En l’espèce, la demanderesse soutient que l’agent a commis plusieurs erreurs qui justifient l’intervention de la Cour, notamment que l’agent n’avait pas examiné la nouvelle preuve présentée après l’audience tenue le 24 octobre 2012. La demanderesse soutient aussi qu’elle n’a jamais reçu de copie de la décision de l’agent et, plus important encore, que le 23 janvier 2012, Mme Malenfant, l’agente de renvoi, a refusé de lui fournir une copie de la décision de l’agent. La demanderesse soutient qu’il s’agit là d’un manquement à l’équité procédurale;

 

[2]        Compte tenu de la preuve présentée par la demanderesse, notamment son affidavit dans lequel elle déclare qu’elle n’a jamais reçu de copie de la décision et qu’on a refusé de lui donner une copie le 23 janvier, et compte tenu de la réponse des défendeurs, notamment l’affidavit de Mme Liette Malenfant, l’agente de renvoi, dans lequel elle déclare que le 29 novembre, elle a donné une copie de la décision d’ERAR à la famille Barrero. Compte tenu du fait que la demanderesse a demandé un sursis à l’exécution de la mesure de renvoi le 8 janvier, malgré le fait qu’aucune date de renvoi n’avait encore été établie, et qu’elle a ensuite présenté une demande écrite de sursis le 12 janvier 2012. Mme Liette Malenfant nie avoir refusé de voir la demanderesse le 20 et le 23 janvier 2012, parce qu’elle n’était pas à son bureau lorsque la demanderesse a tenté de la voir;

 

[3]        Et compte tenu des observations supplémentaires présentées par l’avocat de la demanderesse à l’audience, de la décision du juge Hughes dans l’affaire Varga c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), CF 2005 1280 [Varga] et des obligations du Canada à titre de signataire de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, et compte tenu du défaut de la demanderesse d’expliquer pourquoi elle a présenté sa demande tardivement;

 

[4]        La Cour n’est pas convaincue que la demanderesse a démontré qu’il existait une question sérieuse à trancher. La Cour ne peut pas conclure, selon la prépondérance des probabilités, que l’agent a essentiellement fait une erreur susceptible de révision lorsqu’il a traité la preuve de la demanderesse ou qu’il a omis de tenir compte de la totalité de la preuve présentée par la demanderesse, ou même qu’il a tiré des conclusions défavorables quant à la crédibilité. La Cour rejette l’argument de la demanderesse fondé sur la décision Varga, parce que cette décision a été annulée par la Cour d’appel fédérale. Les obligations du Canada en vertu de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant ne dispensent pas la demanderesse de présenter un dossier susceptible de révision et de satisfaire au critère à trois volets pour obtenir un sursis. Par conséquent, la Cour n’est pas convaincue que la demanderesse a soulevé une question sérieuse à trancher en ce qui a trait à la question de savoir si l’agent a commis une erreur;

 

[5]        Bref, la demanderesse n’a pas soulevé de question sérieuse en ce qui a trait à la question de savoir si la décision de l’agent appartient « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47) ou qu’elle cadre « bien avec les principes de justification, de transparence et d’intelligibilité » (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339, au paragraphe 59).

 

[6]        La demanderesse ne s’est pas acquittée du fardeau d’établir qu’elle sera exposée à un risque de préjudice irréparable si elle est renvoyée du Canada. Je note que cette conclusion recoupe les conclusions tirées séparément par l’agent et par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada, après examen minutieux de toute la preuve présentée à l’appui de la demande d’ERAR et des demandes d’asile de la demanderesse;

 

[7]        Le fait que la demande de statut de résidente permanente de la demanderesse deviendra théorique est malheureux, mais n’est pas suffisant pour constituer un préjudice irréparable. Le fait que les enfants de la demanderesse ont respectivement un et deux ans n’est pas suffisant non plus. La Cour a apprécié la preuve présentée par les deux parties en ce qui a trait à l’état de santé de la fille de la demanderesse et elle a conclu que les soins médicaux appropriés sont disponibles en Colombie et au Venezuela. La séparation des familles est une lourde conséquence des mesures de renvoi et la jurisprudence de la Cour établit clairement qu’elle ne constitue pas un préjudice irréparable (voir Baron c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2009 CAF 81, au paragraphe 69);

 

[8]        La Cour a aussi tenu compte du fait que des mesures ont été prises afin d’aider la demanderesse à amener ses enfants nés au Canada avec elle, après qu’elle a mentionné qu’elle avait l’intention de le faire. À ce sujet, l’agente de renvoi a repoussé la date qui avait d’abord été prévue pour le renvoi, permettant ainsi à la demanderesse d’obtenir des passeports canadiens pour ses enfants nés au Canada. La Cour note aussi que l’agente de renvoi a accepté de reporter le renvoi de la mère de la demanderesse, qui était d’abord prévu le 23 décembre 2011, au 30 janvier 2012 pour lui permettre de voyager avec la demanderesse et ses enfants;

 

[9]        Enfin, la demanderesse n’a pas réussi à démontrer que la prépondérance des inconvénients penche en sa faveur pour que la Cour lui accorde le sursis demandé;

 

[10]      En conclusion, la Cour n’a d’autre choix, en application de la loi, que de rejeter la demande de sursis, compte tenu du fait que la demande présentée se limitait à la décision de l’agent d’ERAR.


 

            LA COUR ORDONNE que la requête en sursis soit rejetée.

 

 

« André F. J. Scott »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme,

Evelyne Swenne, traductrice-conseil


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-600-12

 

INTITULÉ :                                      LOREANNY ARTEAGA BARRERO

                                                            c

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

                                                            et

                                                            LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

                                                            ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

REQUÊTE ENTENDUE PAR TÉLÉCONFÉRENCE LE 27 JANVIER 2012 À MONTRÉAL (QUÉBEC) ET OTTAWA (ONTARIO)

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                      LE JUGE SCOTT

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 27 janvier 2012

 

 

 

OBSERVATIONS ORALES ET ÉCRITES :

 

William Sloan

 

POUR LA DEMANDERESSE

Daniel Baum et Sébastien Dasylva

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

William Sloan

Avocat

Montréal (Québec)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

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