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Cour fédérale

Federal Court


 

Date : 20110901

Dossier : IMM-975-11

 

Référence : 2011 CF 1042

 

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 1er septembre 2011

En présence de monsieur le juge Crampton

 

ENTRE :

 

PETER DOERKSEN BUECKERT

DUSTIN CALEB BUECKERT

 

demandeurs

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Le demandeur mineur, Dustin Bueckert, est un citoyen du Belize âgé de sept ans qui a été maltraité physiquement et psychologiquement par sa mère depuis environ l’âge d’un an jusqu’à ce que sa tante paternelle assume sa garde lorsqu’il avait quatre ans. Il y au aussi des éléments de preuve qui indiquent que la mère de Dustin l’a agressé sexuellement.

 

[2]               L’autre demandeur, Peter Bueckert, est le père de Dustin. Il est citoyen du Belize et du Mexique.

 

[3]               Les demandeurs soutiennent que la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a commis une erreur lorsqu’elle a rejeté leurs demandes d’asile, en omettant de traiter suffisamment de leur vulnérabilité particulière et des éléments de preuve qu’ils avaient présentés avant de conclure qu’ils pourraient probablement bénéficier d’une protection adéquate de l’État s’ils retournaient au Belize.

 

[4]               Pour les motifs exposés ci-dessous, la demande de Dustin visant à obtenir le contrôle judiciaire de la décision de la Commission est accueillie et celle de Peter est rejetée.

 

I.          Le contexte

[5]               Peter et son épouse Aganetha ont déménagé au Canada en mai 2007. Ils ont déménagé en partie parce que Peter avait obtenu un permis de travail canadien. Ils espéraient également trouver des services professionnels pour aider Aganetha à composer avec ses problèmes de gestion de la colère et s’éloigner de la mère très contrôlante d’Aganetha.

 

[6]               Lorsqu’Aganetha a continué à maltraiter Dustin, celui-ci a été confié à sa tante paternelle, Helena Bueckert, et son époux, Johan, en novembre 2007.

 

[7]               Helena et Johan sont devenus les tuteurs légaux de Dustin en novembre 2008. Peu après, lorsqu’il est devenu clair que Peter et Aganetha devraient probablement retourner au Belize, Peter a décidé de laisser Dustin aux soins d’Helena et Peter.

 

[8]               La décision de laisser Dustin derrière au Canada a rendu Aganetha furieuse. Lorsqu’elle a informé ses parents que Peter insistait pour retourner sans Dustin, eux aussi se sont mis en colère, et ils ont intimé Aganetha de ne pas revenir sans Dustin. Son frère Bernhard a ensuite dit à Peter que s’il revenait sans Dustin, [traduction] « il arriverait autre chose ». Aganetha a également menacé Peter en lui disant que, si Dustin ne retournait pas avec eux, [traduction] « ses frères et d’autres hommes [l’attacheraient] au sol et [le] fouetteraient. »

 

[9]               En février 2009, après que le permis de travail canadien de Peter eut expiré et que sa demande de renouvellement eut été refusée, lui et Aganetha sont retournés au Belize.

 

[10]           Deux jours plus tard, Peter est revenu au Canada et a demandé l’asile après avoir appris qu’un ou plusieurs membres de la famille d’Aganetha planifiaient de le tuer ou de le blesser grièvement.

 

II.        La décision visée par le présent contrôle

 

[11]           Après avoir examiné le contexte factuel, la Commission a exprimé l’avis que Peter et Helena avaient tous deux présenté « une preuve fiable et digne de foi » et étaient tous deux crédibles. La Commission a ensuite reconnu que « les allégations en l’espèce [étaient] factuelles, soit que [les] beaux-frères de [Peter][avaient] menacé de [le] tuer et que Dustin [avait] été victime de violence de la part de sa mère. »

 

[12]           Cependant, après avoir noté, entre autres choses, que Peter n’avait jamais vérifié l’efficacité de la protection de l’État au Belize, ni en dénonçant les menaces que lui auraient faites ses beaux‑frères ni en dénonçant les mauvais traitements que son épouse avait infligés à Dustin, la Commission a finalement conclu qu’il y avait une protection adéquate de l’État au Belize.

 

[13]           La Commission a donc rejeté les demandes de Peter et Dustin en vertu des articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR).

 

 

III.       La norme de contrôle

[14]           Les questions que les demandeurs ont soulevées au sujet de l’évaluation que la Commission avait faite du caractère adéquat de la protection de l’État sont des questions mixtes de faits et de droit qui sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision raisonnable (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, aux paragraphes 51 à 55).

 

IV.       Analyse

A.La Commission a-t-elle commis une erreur en omettant d’évaluer la vulnérabilité particulière de Dustin et les éléments de preuve présentés pour son compte?

 

[15]           Les demandeurs ont soutenu que la Commission avait commis une erreur en omettant d’examiner et d’évaluer la vulnérabilité particulière de Dustin en tant qu’enfant victime de violence ainsi que certains éléments de preuve qui étayaient sa prétention selon laquelle : (i) il serait susceptible de subir d’autres mauvais traitements aux mains de sa mère s’il retournait au Belize; (ii) le cas échéant, il ne serait pas susceptible de pouvoir se prévaloir d’une protection adéquate de l’État.

 

[16]           Je suis d’accord.

 

[17]           Vers le début de sa décision, la Commission a reconnu que, lors de l’examen de la demande d’asile d’un enfant en vertu de la LIPR, [traduction] « la vulnérabilité particulière des enfants doit […] être prise en compte » (Kim c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 FC 149, aux paragraphes 58 à 61). Cependant, la Commission a ensuite à peu près ignoré la vulnérabilité particulière de Dustin et d’autres éléments de preuve importants qui étayaient sa prétention selon laquelle il subirait probablement des mauvais traitements aux mains de sa mère s’il retournait au Belize.

 

[18]           Lorsqu’elle a conclu que Dustin obtiendrait probablement une protection adéquate de l’État au Belize, la Commission a semblé accorder un poids important au fait que Dustin et son père n’avaient jamais vérifié le caractère adéquat de la protection de l’État au Belize. Cependant, cette conclusion méconnaissait complètement le fait que Dustin n’avait jamais été en mesure de vérifier le caractère adéquat de la protection de l’État à l’époque où il vivait au Belize. Il n’avait que trois ans lorsque ses parents avaient quitté le Belize pour venir au Canada. Je ne vois pas très bien comment quiconque âgé de trois ans pourrait jamais vérifier personnellement le caractère adéquat de la protection de l’État.

 

[19]           La Commission s’est également appuyée sur les constatations suivantes pour en arriver à sa conclusion au sujet de la protection de l’État :

 

i.         Le Belize est une démocratie fonctionnelle dotée d’institutions démocratiques;

 

ii.       Bien qu’il y ait des rapports faisant état de ressources policières inadéquates, d’abus dans l’usage de la force et d’actes de corruption excessifs au Belize, les éléments de preuve dont disposait la Commission ne « justifi[aient] pas une conclusion selon laquelle l’État n’applique généralement pas la loi » de manière à miner « le caractère adéquat des mécanismes de protection étatique de tout le pays » ou l’aptitude et la disposition des autorités à aider les demandeurs;

iii.      Il n’y a aucun cas rapporté d’impunité policière. La police a été accusée et poursuivie relativement à des crimes, notamment des infractions d’agression sexuelle, de corruption et de violence et d’autre abus;

 

iv.     La violence familiale est interdite par une loi qui prévoit des sanctions, notamment l’emprisonnement. La loi permet également au tribunal familial de prononcer des ordonnances de protection contre les contrevenants accusés, et les autorités ont le pouvoir de retirer les enfants du milieu violent où ils vivent. En outre, certains programmes gouvernementaux ont été établis précisément pour traiter les questions relatives aux enfants et pour coordonner des programmes pour les enfants victimes de violence familiale;

 

v.       Tandis qu’une source a rapporté qu’environ 50 % des plaintes de négligence étaient retirées ou ne faisait pas l’objet de poursuites, une autre source a rapporté que les victimes ou leurs familles étaient souvent réticentes à porter des accusations;

 

vi.     Les préoccupations au sujet de la mauvaise qualité des enquêtes étaient insuffisantes pour miner la présomption de la protection de l’État, et elles ne constituaient pas une preuve claire et convaincante de l’incapacité de l’État à protéger Dustin et Peter;

 

vii.    Les omissions locales de maintenir l’ordre de façon efficace n’équivalaient pas à une absence de protection étatique.

 

[20]           Sur le fondement de l’analyse pro forma qui précède, la Commission a conclu que « l’État du Belize [offrait] une protection, et qu’il n’exist[ait] aucune possibilité sérieuse que [les demandeurs soient persécutés], ou, tout compte fait, que [Dustin soit] personnellement exposé à un autre risque de préjudice [s’il retournait] au Belize. »

 

[21]           Pour en arriver à cette conclusion, la Commission n’a tenu que très peu compte de la situation particulière de Dustin. Plus précisément, après avoir affirmé qu’elle n’était pas convaincue que la police n’interviendrait pas si Dustin avait besoin de sa protection, la Commission a affirmé que « la production de documents concernant le transfert de la garde [de Dustin] dans le but de prouver [que sa tante et son oncle en sont les tuteurs légaux] pourrait régler toute question relative à un enlèvement [de Dustin par Peter], mais ces documents n’indiquent pas que la police ne […] protégerait pas [Dustin] […] en cas de […] violence faite à [l’]enfant. »

 

[22]           La Commission a seulement tenu compte de la situation particulière de Dustin lorsqu’elle a reconnu que : (i) Dustin ne répondait pas aux normes canadiennes dans certains domaines de son développement; (ii) l’enfant ne bénéficierait peut-être pas de certaines formes de « soutien dont il a besoin, selon son psychologue ou des travailleurs sociaux au Canada »; (iii) il jouirait « d’une meilleure qualité de vie au Canada, il y recevrait de meilleurs services de soutien social, il y serait davantage aimé et il y recevrait plus de soins. »

 

[23]           Je suis convaincu que l’analyse qui précède était loin de constituer le type d’analyse contextualisée qui était requise dans les circonstances particulières de la présente espèce.

 

[24]           Lorsqu’elle est parvenue à sa conclusion sur la question déterminante de la protection de l’État, la Commission a omis de traiter des éléments de preuve importants qui suivent :

i.         Des éléments de preuve documentaire qui tendent à indiquer que, [traduction] « bien que les lois au Belize confient la responsabilité financière des soins de l’enfant au père, elles exigent que la mère prenne soin de l’enfant. » La Commission aurait dû évaluer ces éléments de preuve ou d’autres documents en vue de déterminer les chances réelles de Peter d’obtenir gain de cause dans le cadre d’un litige relatif à la garde avec la famille d’Aganetha, en particulier compte tenu des éléments de preuve indiquant que la famille d’Aganetha disposait de beaucoup plus de ressources financières que Peter.

 

ii.       Des éléments de preuve testimoniale selon lesquels :

 

a)       Blue Creek, le village où vivent Aganetha et sa famille au Belize, est une petite collectivité mennonite isolée d’environ 700 ou 800 habitants;

 

b)      Blue Creek fait partie d’une plus grande communauté mennonite au Belize, qui compte environ 5 000 personnes sur une population nationale totale d’environ 300 000 habitants et qui est isolée du reste du pays;

 

c)      La collectivité mennonite à Blue Creek possède ses propres écoles, ses propres magasins, ses propres règles communautaires, et ainsi de suite;

 

d)      Les gens à Blue Creek tentent de vivre de manière aussi autonome que possible par rapport au gouvernement – ils tentent de régler eux-mêmes leurs problèmes, et leur culture les incite à s’abstenir de demander de l’aide hors de leur communauté pour régler leurs problèmes;

 

e)      Les gens à Blue Creek ne font pas confiance à la police;

 

f)        Il est très courant que les enfants à Blue Creek soient frappés au moyen [traduction] « d’un bâton ou d’une corde ou d’une ceinture »;

 

g)      Il est aussi très courant que, [traduction] « lorsqu’un enfant crie chez votre voisin depuis un bon moment, vous ne fassiez rien »;

 

h)      Peter est seulement au courant d’une seule occasion où les autorités du Belize sont intervenues dans un cas de violence contre un enfant, et il s’agissait d’un cas particulièrement grave;

 

i)        Aganetha a menacé de tuer Dustin à plusieurs occasions – par exemple, lorsque Peter est rentré du travail un jour, elle a crié [traduction] « si j’avais écouté mes sentiments, j’aurais tué Dustin aujourd’hui »;

 

j)        À l’époque où Dustin vivait avec Aganetha, celle-ci lui donnait chaque jour de longues fessées, souvent jusqu’à ce qu’il tombe endormi, épuisé d’avoir pleuré;

 

k)      La famille d’Aganetha est très motivée à ravoir la garde de Dustin parce qu’elle est humiliée et sa situation au sein de la collectivité a souffert du fait qu’Aganetha n’avait plus la garde de Dustin;

 

l)        La violence d’Aganetha envers Dustin pendant qu’il vivait au Canada était telle que, lorsqu’elle lui rendait visite, elle était constamment supervisée.

 

iii.      Un rapport psychologique qui confirmait qu’Aganetha :

 

a)       [traduction] « contrôle mal sa colère »;

 

b)      [traduction] « exprime facilement sa colère en réaction à peu de provocation »;

 

c)      a [traduction] « des symptômes de trouble d’adaptation, d’anxiété généralisée, de phobie spécifique et d’anxiété sociale »;

 

d)      a des tendances suicidaires.

 

iv.     D’autres éléments de preuve qui rapportaient qu’Aganetha devrait répondre à une accusation d’agression sexuelle si elle tentait de revenir au Canada.

 

[25]           Pris ensemble, les éléments de preuve qui précèdent corroborent fortement les craintes exprimées par Peter et sa sœur Helena, tutrice de l’enfant, qu’il y ait un risque très réel que : (i) si Dustin est renvoyé au Belize, sa mère en recouvre la garde complète ou partielle; (ii) le cas échéant, elle recommence probablement à exercer de la violence physique et psychologique contre lui, sinon pire; (iii) personne au sein de la communauté mennonite ne soit susceptible de demander la protection de l’État pour Dustin. Cela explique sans aucun doute pourquoi l’avocat de Peter et de Dustin a prié la Commission de ne pas rejeter la demande de Dustin même si elle rejetait celle de Peter.

 

[26]           Compte tenu de ce qui précède, la Commission aurait dû traiter des éléments de preuve susmentionnés dans sa décision et expliquer pourquoi elle avait néanmoins conclu que Dustin ne serait pas exposé à une possibilité sérieuse de persécution ou, selon la prépondérance des probabilités, au risque de subir un préjudice personnalisé du genre de ceux visés à l’article 97 de la LIPR s’il retournait au Belize (Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 157 FTR 35; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Ryjkov, 2005 CF 1540; Ahmed c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1076, aux paragraphes 13 à 15; Surajnarain c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1165, aux paragraphes 6 et 7; Uluk c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 122, aux paragraphes 16 et 32).

 

[27]           Le défaut de la Commission de traiter des éléments de preuve résumés ci-dessus au paragraphe 24 constitue une erreur susceptible de contrôle. En conséquence, la décision de la Commission sera annulée en ce qui a trait à la demande de Dustin.

 

B. La Commission a-t-elle commis une erreur en omettant d’évaluer la situation particulière de Peter?

 

[28]           Les observations écrites des demandeurs concernaient presqu’entièrement les demandes de Dustin. Elles ne traitaient précisément d’aucun aspect particulier des demandes de Peter. D’ailleurs, dans ses observations finales à l’audience devant la Commission, l’avocat de Peter et Dustin a concédé que le fondement de la demande de protection de Peter n’était [TRADUCTION] « pas aussi évident » que le fondement de la demande de Dustin, en particulier parce qu’il n’y avait pas encore eu de nombreuses menaces à la sécurité physique de Peter et il n’y avait aucun élément de preuve indiquant que les gens qui auraient proféré des menaces à l’endroit de Peter avaient déjà eu un comportement violent dans le passé. En outre, Peter a la citoyenneté mexicaine, et il ne semble pas avoir présenté beaucoup d’éléments de preuve pour démontrer qu’il serait exposé à un des risques visés aux articles 96 et 97 de la LIPR s’il retournait au Mexique.

 

[29]           Par contraste avec ses défauts de traiter des éléments de preuve les plus importants produits au soutien de la demande d’asile de Dustin, la Commission a traité des éléments de preuve les plus importants produits au soutien de la demande de Peter. Bien que le traitement de ces éléments de preuve par la Commission soit loin de constituer un exemple à suivre, je suis convaincu que son analyse et les conclusions auxquelles elle est parvenue relativement aux demandes de Peter en vertu des articles 96 et 97 de la LIPR n’étaient pas déraisonnables.

 

[30]           Au début de son analyse, la Commission a affirmé qu’elle admettait l’allégation de Peter selon laquelle ses beaux-frères avaient menacé de le tuer. Elle a ensuite conclu que Peter avait produit peu d’éléments de preuve pour montrer « qu’il serait objectivement déraisonnable » qu’il ait dû tenter d’obtenir la protection de la police au Belize avant de demander l’asile au Canada.

 

[31]           Comme je l’ai noté ci-dessus au paragraphe 21, la Commission a également traité précisément de l’allégation de Peter selon laquelle les frères d’Aganetha tenteraient peut-être de convaincre la police au Belize de l’arrêter pour avoir enlevé Dustin.

 

[32]           Le défaut de Peter de déployer quelque effort que ce soit pour obtenir la protection de l’État, notamment avant de revenir au Canada pour déposer ses demandes en vertu de la LIPR, était incompatible avec son obligation de se prévaloir de la protection de l’État dans son pays avant de demander une protection internationale (Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689, 103 DLR (4th) 1, à la page 724; Santiago c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 247, au paragraphe 23; Sanchez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 66, aux paragraphes 11 à 13; Sanchez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 134, aux paragraphes 9 et 10).

 

[33]           À mon avis, compte tenu des faits particuliers de la présente espèce, il n’était pas déraisonnable que la Commission conclue que la « croyance [de Peter], qui n’[était] fondée sur aucune expérience personnelle, selon laquelle la police n’interviendrait pas, ainsi que le fait qu’[il craignait] que [ses] beaux-parents aient porté des accusations contre [lui] à la police pour enlèvement n’[étaient] pas convaincants. » Je suis convaincu que cette conclusion appartenait « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, précité, au paragraphe 47).

 

[34]           En conséquence, la demande de Peter en vue du contrôle judiciaire de la décision de la Commission sera rejetée.

 

V.        Conclusion

[35]           La présente demande de contrôle judiciaire est accueillie en partie. La décision de la Commission, datée du 19 janvier 2011, sera annulée en ce qui a trait aux demandes de Dustin en vertu des articles 96 et 97 de la LIPR, et ce volet de l’affaire sera renvoyé à un tribunal différemment constitué de la Commission pour que celui-ci rende une nouvelle décision en conformité avec les présents motifs. La décision de la Commission sera maintenue en ce qui a trait aux demandes d’asile de Peter.


JUGEMENT

 

            LA COUR ORDONNE :

 

1.                  la décision de la Commission, datée du 19 janvier 2011, est annulée en ce qui a trait aux demandes de Dustin en vertu des articles 96 et 97 de la LIPR et ce volet de l’affaire est renvoyé à un tribunal différemment constitué de la Commission pour que celui-ci rende une nouvelle décision en conformité avec les présents motifs;

2.                  la décision de la Commission est maintenue en ce qui a trait aux demandes d’asile de Peter;

 

3.                   aucune question de portée générale n’est certifiée.

 

 

 

« Paul S. Crampton »

                                                                                                ___________________________

                                                                                                                        Juge

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice-conseil


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-975-11

 

INTITULÉ :                                       PETER DOERKSEN BUECKERT et al. c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

                                                           

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Calgary (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 18 août 2011

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Crampton

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 1er septembre 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Bjorn Harsanyi

POUR LES DEMANDEURS

 

 

Camille Audain

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Bjorn Harsanyi

Avocat

Calgary (Alberta)

 

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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