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Cour fédérale

 

Federal Court

 


Date : 20110614

Dossier : IMM-6671-10

Référence : 2011 CF 678

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 14 juin 2011

en présence de Monsieur le juge O’Reilly

 

 

ENTRE :

 

ERMENEGILDO ROCCA GARCIA

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L’IMMIGRATION

 

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Aperçu

[1]               En 2008, M. Ermenegildo Rocca Garcia s’est enfui du Pérou après avoir reçu des menaces du groupe de guérilleros connu sous le nom de Sentier lumineux. Il a demandé l’asile au Canada, mais une formation de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a rejeté sa demande après avoir conclu qu’il pouvait se prévaloir de la protection de l’État au Pérou.

 

[2]               M. Garcia soutient que la Commission a commis une erreur dans le traitement des éléments de preuve concernant la protection de l’État. Plus précisément, il souligne qu’il est allé voir la police au Pérou, mais que les policiers lui ont dit qu’ils ne pouvaient pas l’aider et qu’il devrait quitter le pays. En conséquence, il affirme que le Pérou n’était pas disposé à le protéger ni ne serait en mesure de le faire si le Sentier lumineux tentait de mettre ses menaces à exécution. M. Garcia me demande d’annuler la décision de la Commission et d’ordonner la tenue d’une nouvelle audience. Cependant, je ne puis voir aucun motif justifiant l’annulation de la décision et je dois donc rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[3]               La seule question à trancher est la suivante : la conclusion de la Commission selon laquelle M. Garcia pouvait se prévaloir de la protection de l’État était-elle déraisonnable?

 

II.         La décision de la Commission

[4]               La Commission a d’abord passé en revue les différents principes juridiques applicables à la protection de l’État, soulignant que cette question concerne l’élément objectif de la définition de réfugié. La Commission a ensuite donné une description très détaillée des différents organismes de l’État chargés de l’application de la loi et de la lutte contre le terrorisme au Pérou.

 

[5]               Après cette description, la Commission a résumé les événements mettant en cause M. Garcia. Le demandeur a reçu des menaces de certains membres du Sentier lumineux qui l’ont pris à tort pour son neveu, lequel était propriétaire d’une entreprise spécialisée dans la pose de vitres. M. Garcia s’est fait dire qu’il devait payer une somme de 20 000 $ en moins de deux jours, faute de quoi sa fille et lui-même seraient tués. M. Garcia est allé voir la police, qui lui a dit qu’elle ne pouvait pas le protéger et lui a recommandé de s’en aller le plus loin possible. M. Garcia a demandé à un agent plus haut placé de l’aider, mais il a obtenu la même réponse. L’agent lui a tout de même dit qu’il mènerait une enquête.

 

[6]               La Commission a souligné qu’il y avait au Pérou des organismes qui reçoivent les plaintes des personnes insatisfaites de la réponse de la police. De plus, M. Garcia n’est jamais retourné voir la police pour savoir si l’enquête avait donné des résultats. Lorsque sa soeur a subséquemment reçu des appels de menaces, M. Garcia ne les a pas signalés à la police. Compte tenu de ces circonstances, la Commission a conclu que M. Garcia n’avait pas présenté une preuve claire et convaincante du fait qu’il ne pouvait pas se prévaloir de la protection de l’État au Pérou.

 

III.       La conclusion de la Commission selon laquelle M. Garcia pouvait se prévaloir de la protection de l’État était-elle déraisonnable?

 

[7]               La Commission a d’abord formulé correctement la question à trancher, soulignant que la question de savoir s’il est possible de se prévaloir de la protection de l’État concerne l’élément objectif de la définition de réfugié. Lorsque la protection de l’État est une question en litige, la crainte subjective de persécution que prétend avoir le demandeur ne sera pas jugée bien fondée, à moins que celui-ci n’établisse par des éléments de preuve clairs et convaincants l’absence de protection de l’État. La question ultime à trancher dans toute demande d’asile est de savoir si le demandeur a établi qu’il craignait avec raison d’être persécuté, c’est-à-dire qu’il serait exposé à davantage qu’à un risque raisonnable d’être persécuté s’il retournait dans son pays d’origine.

 

[8]               À mon avis, la Commission a agi raisonnablement en concluant que M. Garcia ne s’était pas acquitté du fardeau qu’il avait d’établir le bien-fondé de sa demande. Il avait communiqué une fois avec un poste de police local pour signaler des menaces reçues d’une organisation terroriste. Il appert de la preuve documentaire que le Pérou a mis sur pied un appareil étatique complexe pour lutter contre le crime et le terrorisme. Même si différents problèmes persistent, y compris la corruption et le manque de ressources, il existe des organismes vers lesquels les citoyens peuvent se tourner s’ils reçoivent des menaces du Sentier lumineux ou qu’ils sont insatisfaits de la réponse qu’ils obtiennent de la police locale.

 

[9]               Citant la décision rendue dans Barajas c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 21, M. Garcia a fait valoir qu’en raison du caractère immédiat de la menace, il serait déraisonnable de s’attendre à ce qu’il s’adresse à d’autres organismes pour obtenir la protection de l’État plutôt que de se tourner simplement vers la police locale. Dans les circonstances, étant donné qu’il a réussi à échapper à la menace et qu’il a eu la possibilité de se tourner vers d’autres sources de protection, je ne puis conclure que raisonnement de la Commission a eu pour effet de lui imposer un fardeau excessif.

 

[10]           Compte tenu de la preuve dont elle était saisie, je ne puis conclure que la décision de la Commission était déraisonnable. Elle appartenait aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

 

IV.       Conclusion et décision

[11]           La décision de la Commission selon laquelle M. Garcia n’avait pas réussi à établir l’absence de protection offerte par l’État n’était pas déraisonnable, eu égard à la preuve dont elle était saisie. En conséquence, je dois rejeter la demande de contrôle judiciaire. Aucune partie n’a demandé que soit certifiée une question de portée générale et aucune n’est certifiée.

 

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE :

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Aucune question de portée générale n’est certifiée.

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                              IMM-6671-10

 

INTITULÉ :                                             ERMENEGILDO ROCCA GARCIA c. MCI

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                       Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                     Le 1er juin 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                    LE JUGE O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS ET

DU JUGEMENT :                                   Le 14 juin 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

J. Byron Thomas

POUR LE DEMANDEUR

 

 

John Loncar

 

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

J. Byron M. Thomas Esq. M.A., LL.B

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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