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Date : 20110614

Dossier : IMM‑3138‑10

Référence : 2011 CF 691

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 14 juin 2011

En présence de monsieur le juge Russell

 

 

ENTRE :

 

PINDER SINGH BRAR

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire, présentée conformément au paragraphe 72(1) de la Loi sur limmigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), de la décision, en date du 1er avril 2010 (la décision), par laquelle une représentante du ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (la représentante du ministre) a rejeté la demande de statut de résident permanent présentée au Canada par le demandeur sur le fondement de motifs d’ordre humanitaire.

 

CONTEXTE

 

[2]               Le demandeur est un citoyen de l’Inde. Il a été parrainé par son épouse et est entré au Canada à titre de résident permanent en 1993. Il a divorcé d’avec sa femme deux ans plus tard.

 

[3]               En 1995, le demandeur a été arrêté par les United States Immigration and Naturalization Services au Minnesota et a été accusé de s’être soustrait aux lois d’immigration américaines selon trois chefs d’accusation. Il a plaidé coupable à l’un des chefs et a purgé une peine d’emprisonnement de 119 jours. À sa libération en 1995, il a été déporté au Canada. Il a ensuite fait l’objet d’un rapport défavorable rédigé en vertu de l’article 27 de l’ancienne Loi sur l’immigration en raison d’une déclaration de culpabilité, à l’extérieur du Canada, relativement à une infraction qui, si elle avait été commise au Canada, aurait constitué une infraction punissable d’un emprisonnement maximal de dix ans. En 1997, une mesure d’expulsion a été prise contre le demandeur dans le but de le renvoyer du Canada; cette mesure a été déclarée valide par la Section d’appel de l’immigration (la SAI) en 2000. Le demandeur a perdu son statut de résident permanent mais il n’a pas été renvoyé du Canada en raison de sa crainte de retourner en Inde. En 2003, un agent d’examen des risques avant renvoi a statué que le demandeur risquait d’être torturé ou d’être exposé à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités s’il était renvoyé en Inde. Par conséquent, il a été sursis à la mesure d’expulsion prise contre le demandeur en 2008.

 

[4]               En 2000, la SAI a également noté que les autorités allemandes avaient arrêté un homme qui voyageait muni d’un faux passeport et l’avaient interrogé relativement à des accusations en instance dont il faisait l’objet en Inde pour des infractions liées au terrorisme. L’homme a déclaré que le demandeur lui avait fourni le faux passeport.

 

[5]               Le demandeur s’est remarié en 2003, et il habite avec sa nouvelle épouse et leurs trois enfants mineurs. Il déclare qu’il subvient à leurs besoins et s’occupe activement d’eux.

 

[6]               En février 2008, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente fondée sur des considérations d’ordre humanitaire (la demande CH), laquelle était appuyée par une demande de parrainage déposée par son épouse. Il s’agissait d’une deuxième demande de ce genre par le demandeur, la première ayant été rejetée en 2002. Le 1er avril 2010, la représentante du ministre a rejeté sa demande, ayant conclu que les motifs d’ordre humanitaire n’étaient pas suffisants pour lever l’interdiction de territoire du demandeur pour grande criminalité aux fins de la résidence permanente. La présente demande vise cette dernière décision.

 

LA DÉCISION VISÉE PAR LA DEMANDE DE CONTRÔLE JUDICIAIRE

 

[7]               La représentante du ministre a d’abord traité de la conduite criminelle du demandeur et des [traduction] « graves » répercussions qui pouvaient en découler, énoncées dans la décision de 2000 par laquelle la SAI a rejeté l’appel du demandeur à l’égard de la mesure d’expulsion prise à son encontre en 1997. Elle a déclaré que le demandeur semblait mener une vie stable et ne plus participer à des activités criminelles, mais que [traduction] « l’absence de nouvelles déclarations de culpabilité ne permet pas de connaître les croyances, la moralité ou les projets d’une personne ». De plus, selon elle, sa tâche ne consistait pas à voir si le demandeur était réadapté mais plutôt à voir s’il existait des motifs d’ordre humanitaire suffisants pour justifier la levée de son interdiction de territoire.

 

[8]               La représentante du ministre a cité de longs extraits de la décision de la SAI, dans laquelle la SAI a examiné la violation « très grave » par le demandeur des lois d’immigration américaines et a conclu que l’infraction du demandeur n’était pas un incident isolé d’introduction clandestine de migrants (comme il l’avait prétendu). De plus, la décision de la SAI indiquait que les perspectives de réadaptation du demandeur n’étaient pas claires puisqu’il n’avait pas de remords véritables et n’a pas parlé avec sincérité des circonstances de l’infraction commise, plus particulièrement en ce qui a trait à ses liens avec des terroristes connus. La représentante du ministre a conclu qu’il n’y avait eu [traduction] « aucun changement dans l’attitude [du demandeur] sur cette question depuis l’audience devant la SAI en 2000 ». Elle a noté que l’infraction commise par le demandeur était non seulement criminelle mais également directement liée à l’intégrité des lois canadiennes en matière d’immigration.

 

[9]               En ce qui concerne les motifs d’ordre humanitaire, la représentante du ministre a fait observer que le demandeur vivait avec son épouse et leurs enfants mineurs et qu’il était [traduction] « clairement dans l’intérêt supérieur des enfants de résider avec leur père ». Elle a cependant indiqué qu’une décision défavorable sur la demande n’aurait aucune incidence sur la mise en œuvre de son renvoi du Canada et, par conséquent, sur une séparation de son épouse et de ses enfants. La représentante du ministre a une fois de plus renvoyé à la décision rendue par la SAI en 2000, qui indiquait que le premier mariage du demandeur semblait avoir été motivé par des considérations liées à l’immigration et que le demandeur n’a actuellement aucun contact avec l’enfant né de ce mariage.

 

[10]           La représentante du ministre a pris acte des nombreuses lettres d’appui du demandeur provenant de membres de la collectivité, qui le décrivent comme étant un propriétaire d’entreprise pacifique et dévoué à sa famille. Elle a conclu que la crédibilité de certaines de ces lettres était minée par le fait que leur contenu était, à l’exception du nom de l’auteur, identique à celui d’autres lettres. Elle a reconnu que le demandeur était propriétaire d’une maison, qu’il travaillait à son compte au sein de sa propre entreprise et qu’il n’avait jamais perçu d’aide sociale; cependant, selon la comparaison qu’elle a faite de ses revenus mensuels et de ses dépenses mensuelles, il semble que la famille soit aux prises avec des difficultés financières.

 

[11]           La représentante du ministre n’a pas examiné la situation du pays d’origine, car le demandeur ne risquait pas d’être renvoyé en raison de l’ordonnance de sursis de sa mesure de renvoi prononcée en 2008. Elle a reconnu que la décision de ne pas l’autoriser à demeurer indéfiniment au Canada allait certainement lui causer une certaine incommodité. Toutefois, elle a conclu que cela ne l’emportait pas sur la nature et la gravité des éléments ayant donné lieu à l’interdiction de territoire du demandeur. La représentante du ministre a conclu que le demandeur ne serait confronté à aucune difficulté inhabituelle et injustifiée ou démesurée si une dispense ne lui était pas accordée à ce moment‑là et qu’il n’existait pas de motifs d’ordre humanitaire suffisants pour justifier une levée de son interdiction de territoire.

 

QUESTIONS EN LITIGE

 

[12]           Le demandeur soulève expressément les questions suivantes :

i)                    La représentante du ministre a‑t‑elle entravé son pouvoir discrétionnaire en donnant suite à l’analyse relative aux considérations humanitaires?

ii)                   L’analyse relative aux considérations humanitaires était‑elle raisonnable en ce qui a trait à la réadaptation du demandeur et à son degré d’établissement au Canada, au poids accordé aux facteurs positifs et négatifs, et aux difficultés et risques découlant d’un résultat défavorable?

iii)                 La représentante du ministre a‑t‑elle manqué à un principe de justice naturelle?

 

Le demandeur mentionne toutefois également dans son argumentation d’autres motifs de contrôle, comme la partialité.

 

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

 

[13]           Les dispositions suivantes de la Loi s’appliquent en l’espèce :

 

Séjour pour motif d’ordre humanitaire

 

25. (1) Le ministre doit, sur demande d’un étranger se trouvant au Canada qui est interdit de territoire ou qui ne se conforme pas à la présente loi, et peut, de sa propre initiative ou sur demande d’un étranger se trouvant hors du Canada, étudier le cas de cet étranger et peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables, s’il estime que des circonstances d’ordre humanitaire relatives à l’étranger — compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché — ou l’intérêt public le justifient.

 

 

 

 

[…]

 

Grande criminalité

 

36. (1) Emportent interdiction de territoire pour grande criminalité les faits suivants :

 

 

a) être déclaré coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans ou d’une infraction à une loi fédérale pour laquelle un emprisonnement de plus de six mois est infligé;

 

 

 

b) être déclaré coupable, à l’extérieur du Canada, d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans;

 

c) commettre, à l’extérieur du Canada, une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans.

 

 

 

Criminalité

 

(2) Emportent, sauf pour le résident permanent, interdiction de territoire pour criminalité les faits suivants :

 

a) être déclaré coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation ou de deux infractions à toute loi fédérale qui ne découlent pas des mêmes faits;

 

b) être déclaré coupable, à l’extérieur du Canada, d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation ou de deux infractions qui ne découlent pas des mêmes faits et qui, commises au Canada, constitueraient des infractions à des lois fédérales;

 

c) commettre, à l’extérieur du Canada, une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation;

 

 

 

d) commettre, à son entrée au Canada, une infraction qui constitue une infraction à une loi fédérale précisée par règlement.

 

Application

 

(3) Les dispositions suivantes régissent l’application des paragraphes (1) et (2) :

 

a) l’infraction punissable par mise en accusation ou par procédure sommaire est assimilée à l’infraction punissable par mise en accusation, indépendamment du mode de poursuite effectivement retenu;

 

b) la déclaration de culpabilité n’emporte pas interdiction de territoire en cas de verdict d’acquittement rendu en dernier ressort ou de réhabilitation — sauf cas de révocation ou de nullité — au titre de la Loi sur le casier judiciaire;

 

 

c) les faits visés aux alinéas (1)b) ou c) et (2)b) ou c) n’emportent pas interdiction de territoire pour le résident permanent ou l’étranger qui, à l’expiration du délai réglementaire, convainc le ministre de sa réadaptation ou qui appartient à une catégorie réglementaire de personnes présumées réadaptées;

 

 

Humanitarian and compassionate considerations

 

25. (1) The Minister shall, upon request of a foreign national in Canada who is inadmissible or who does not meet the requirements of this Act, and may, on the Minister’s own initiative or on request of a foreign national outside Canada, examine the circumstances concerning the foreign national and may grant the foreign national permanent resident status or an exemption from any applicable criteria or obligation of this Act if the Minister is of the opinion that it is justified by humanitarian and compassionate considerations relating to them, taking into account the best interests of a child directly affected, or by public policy considerations.

 

[…]

 

Serious criminality

 

36. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on grounds of serious criminality for

 

(a) having been convicted in Canada of an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years, or of an offence under an Act of Parliament for which a term of imprisonment of more than six months has been imposed;

 

(b) having been convicted of an offence outside Canada that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years; or

 

(c) committing an act outside Canada that is an offence in the place where it was committed and that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years.

 

Criminality

 

(2) A foreign national is inadmissible on grounds of criminality for

 

 

(a) having been convicted in Canada of an offence under an Act of Parliament punishable by way of indictment, or of two offences under any Act of Parliament not arising out of a single occurrence;

 

(b) having been convicted outside Canada of an offence that, if committed in Canada, would constitute an indictable offence under an Act of Parliament, or of two offences not arising out of a single occurrence that, if committed in Canada, would constitute offences under an Act of Parliament;

 

 

(c) committing an act outside Canada that is an offence in the place where it was committed and that, if committed in Canada, would constitute an indictable offence under an Act of Parliament; or

 

(d) committing, on entering Canada, an offence under an Act of Parliament prescribed by regulations.

 

Application

 

(3) The following provisions govern subsections (1) and (2):

 

 

(a) an offence that may be prosecuted either summarily or by way of indictment is deemed to be an indictable offence, even if it has been prosecuted summarily;

 

 

 

(b) inadmissibility under subsections (1) and (2) may not be based on a conviction in respect of which a pardon has been granted and has not ceased to have effect or been revoked under the Criminal Records Act, or in respect of which there has been a final determination of an acquittal;

 

(c) the matters referred to in paragraphs (1)(b) and (c) and (2)(b) and (c) do not constitute inadmissibility in respect of a permanent resident or foreign national who, after the prescribed period, satisfies the Minister that they have been rehabilitated or who is a member of a prescribed class that is deemed to have been rehabilitated; …

 

 

NORME DE CONTRÔLE

 

[14]           La Cour suprême du Canada a statué, dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, qu’il n’était pas nécessaire d’effectuer une analyse de la norme de contrôle dans tous les cas. Lorsque la norme de contrôle applicable à une question précise soumise au tribunal est bien établie dans la jurisprudence, la cour procédant au contrôle peut adopter cette norme. C’est seulement lorsque cette recherche est infructueuse que la cour de révision se livre à l’examen des quatre facteurs que comporte l’analyse relative à la norme de contrôle.

 

[15]           La norme de contrôle applicable à une décision fondée sur des considérations d’ordre humanitaire rendue en vertu du paragraphe 25(1) de la LIPR est celle de la décision raisonnable. Voir Barzegaran c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 681, aux paragraphes 15 à 20; Zambrano c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 481, au paragraphe 31.

 

[16]           Lorsqu’une décision est contrôlée suivant la norme de la raisonnabilité, l’analyse s’intéresse à « la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Voir l’arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 47; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 59. En d’autres mots, la Cour ne devrait intervenir que si la décision de l’agent est déraisonnable en ce sens qu’elle n’appartient pas aux « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

 

[17]           La norme de contrôle applicable à une allégation de manquement à la justice naturelle est la décision correcte et, advenant un tel manquement, la décision sera annulée. Voir l’arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 129.

 

ARGUMENT

            Le demandeur

                        La décision était déraisonnable

                                    La représentante du ministre a entravé son pouvoir discrétionnaire

 

[18]           Le demandeur prétend que la représentante du ministre a entravé son pouvoir discrétionnaire en accordant trop d’importance à la décision rendue par la SAI en 2000. Les quinze années durant lesquelles le demandeur n’a commis aucun acte répréhensible et a contribué de façon continue à la société canadienne l’emportent sur cette évaluation désuète de la probabilité de réadaptation du demandeur. La représentante du ministre a elle‑même reconnu qu’il serait dans l’intérêt supérieur des enfants du demandeur que leur père reste avec eux au Canada. Le demandeur soutient qu’il est [traduction] « absurde » de supposer qu’une absence présumée de regrets en 2000 devrait avoir une incidence sur une demande présentée en 2010. Voir Dee c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] 3 C.F. 345, [2000] A.C.F. n° 223 (QL), au paragraphe 19.

 

[19]           Le demandeur déclare que l’importance accordée à son passé criminel en faisant abstraction de tous les autres facteurs révèle une absence de pondération de toutes les circonstances de l’affaire et équivaut à une entrave au pouvoir discrétionnaire. S’appuyant sur l’arrêt de la Cour d’appel fédérale Lau c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1984] 1 C.F. 434, [1984] A.C.F. n° 57 (QL), la juge Karen Sharlow de la Cour a indiqué, dans la décision Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1999), 50 Imm LR (2d) 74, [1999] A.C.F. n° 380 (QL), aux paragraphes 11 à 15, qu’un appel « serait futile si le fait même que l’infraction a été commise suffisait à refuser l’appel ».

 

                                    Des erreurs factuelles ont influencé la pondération des facteurs

 

[20]           Le demandeur prétend que la représentante du ministre a commis plusieurs erreurs factuelles graves. Elle a supposé que le premier mariage du demandeur n’était pas authentique en dépit du fait qu’elle ne disposait d’aucune preuve à l’appui de cette conclusion. Elle a inféré que le demandeur n’était pas réadapté alors qu’en réalité, il l’est. Enfin, elle a exagéré la gravité des accusations criminelles à l’égard desquelles il a été déclaré coupable; il n’y avait aucune preuve relativement à des activités en cours en vue de faciliter le passage de clandestins.

 

[21]           Le demandeur fait observer que, dans l’arrêt Legault c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 125, la Cour d’appel fédérale a conclu qu’il était approprié de la part d’un agent de mettre en balance les aspects positifs d’une demande et les activités criminelles. Bien que la représentante du ministre ait eu cette intention, elle a si mal interprété les faits liés à l’infraction que les facteurs positifs (soit l’intérêt supérieur des enfants, l’établissement, le mariage authentique, les risques et la réadaptation) n’ont pas été correctement soupesés par rapport aux activités criminelles du demandeur.

 

Défaut de prendre en compte la réadaptation

 

[22]           Le demandeur soutient que la réadaptation est le facteur clé pour évaluer si une dispense de l’interdiction de territoire est justifiée. L’alinéa 36(3)c) de la Loi indique qu’un demandeur doit être libéré de son interdiction de territoire en attendant que s’écoule le délai prescrit après qu’il a purgé sa peine et ensuite en convaincant le ministre qu’il est réadapté. Dans la décision Thamber c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 177, au paragraphe 16, le juge William McKeown s’est appuyé sur la définition suivante de réadaptation :

Par réadaptation, on entend simplement que le risque de récidive est jugé minimal. Les requérants peuvent être considérés comme réadaptés lorsqu’ils font la preuve qu’ils mènent une vie stable, sans autre forme de participation à des activités criminelles […] Le temps écoulé et les activités de la personne ainsi que son mode de vie depuis que l’infraction a été commise peuvent faire la preuve qu’une réadaptation a eu lieu. La réadaptation signifie non pas que la personne ne risque plus de se livrer à des activités criminelles, mais tout simplement que le risque est considéré comme minimal. Les motifs qui font qu’une personne souhaite venir au Canada ne sont pas pris en considération en ce qui a trait à la réadaptation; ils constituent cependant un facteur important lorsqu’il s’agit de faciliter le traitement de la demande.

 

 

[23]           Le demandeur prétend que la période de 15 ans pendant laquelle il n’a commis aucun acte criminel n’a aucun poids pour de la représentante du ministre, malgré la jurisprudence qui indique qu’un casier judiciaire « vierge » constitue une preuve convaincante de réadaptation. Voir Velupillai c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2002] D.S.A.I. no 863, au paragraphe 20.

 

L’établissement n’a pas été évalué correctement

 

[24]           Dans la décision Raudales c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 385, au paragraphe 19, la juge Eleanor Dawson a indiqué que « [s]ans une bonne évaluation du niveau d’établissement, il était impossible […] de dire si le fait d’obliger [le demandeur] à demander la résidence permanente depuis l’étranger entraînerait pour lui des difficultés inhabituelles, injustes ou indues ».

 

[25]           Le demandeur fait valoir que la représentante du ministre a commis une erreur dans son évaluation en permettant que [traduction] « l’ombre interminable du passé influence son évaluation de la situation actuelle ». Le premier mariage du demandeur a peu de rapport avec la demande. Le seul facteur pertinent en matière de mariage constitue sa famille actuelle, dont les intérêts ont été minimisés et traités avec une extrême brièveté par la représentante du ministre. La décision fait peu de cas des avantages que tireraient ces enfants de la présence de leur père au Canada et ne dit rien sur leur besoin de stabilité émotionnelle ni sur les difficultés auxquelles ils seront confrontés s’ils doivent aller dans un pays étranger ou être séparés de leur père. Dans l’arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, [1999] A.C.S. n° 39 (QL), la Cour suprême du Canada a statué qu’un agent qui minimise l’importance de l’intérêt supérieur de l’enfant agit de manière déraisonnable. En outre, lorsque l’intérêt supérieur de l’enfant milite en faveur d’une demande (comme c’est le cas en l’espèce), l’agent doit fournir des motifs convaincants pour expliquer pourquoi les autres facteurs commandent une décision défavorable. Voir Hawthorne c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 475.

 

[26]           Le demandeur ajoute que la représentante du ministre a minimisé ses accomplissements en tant qu’entrepreneur et le respect dont il bénéficie au sein de la collectivité. Il allègue que la décision ne tient pas compte de l’ensemble de la preuve. La décision est en outre entachée de partialité tout à fait inadéquate et ne prend en considération que les conséquences immédiates, sans égard aux répercussions à long terme qu’aurait le rejet de la demande.

 

La décision minimise les difficultés que connaîtrait le demandeur

 

[27]           Comme le demandeur ne peut être renvoyé, la représentante du ministre estime que les questions liées aux difficultés et au risque sont théoriques, ce qui minimise grandement les difficultés auxquelles est confronté le demandeur. Il ne peut pas retourner en Inde pour faire une demande de résidence permanente car il y est exposé à des risques. Par conséquent, son épouse ne peut pas le parrainer. Sans statut de résident permanent, le demandeur ne peut pas quitter et revenir au Canada et il ne pourra jamais acquérir la citoyenneté. La décision ne tient pas compte de ces faits.

 

[28]           Pour les motifs susmentionnés, le demandeur prétend que la décision de la représentante du ministre est déraisonnable et devrait être annulée.

 

Le défaut d’informer le demandeur d’un changement de politique constitue un manquement à la justice naturelle

 

[29]           Le demandeur soutient qu’en juillet 2009, il y a eu un changement de politique qui l’autorisait à remplacer sa demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire (qui l’obligeait à demander d’être dispensé des conditions habituelles) par une demande parrainée par le conjoint (remplacement de demande auquel il avait indiscutablement droit). Il soutient de plus qu’il est de pratique courante de fournir aux demandeurs l’occasion de mettre à jour leurs observations lorsqu’il s’est écoulé un délai important entre la présentation de la demande et le prononcé de la décision. En l’espèce, le demandeur a fait sa demande en 2008 mais la décision n’a été rendue qu’en 2010. Le demandeur fait valoir qu’on aurait dû lui offrir cette occasion de remplacer sa demande par une demande parrainée par le conjoint. Dans une demande parrainée par le conjoint, il devrait quand même demander d’être dispensé de l’interdiction de territoire, mais la dispense serait examinée dans le contexte d’une demande présentée par le conjoint, ce qui lui donnerait le droit d’être parrainé. Le demandeur soutient que la mise en balance dans ce contexte est différente.

 

[30]           Le demandeur admet que le défaut de lui fournir l’occasion de mettre à jour ses renseignements ne constitue pas en soi un manquement à la justice naturelle. Il y a cependant eu selon lui un tel manquement en l’espèce. Premièrement, la représentante du ministre a privé le demandeur de la possibilité de mettre à jour les renseignements fournis et s’est ensuite appuyée sur le défaut du demandeur de fournir cette mise à jour. Deuxièmement, il y a eu un changement de politique et le demandeur n’a pas eu la possibilité de choisir d’avoir son dossier traité en vertu de la politique la plus favorable. Voir Rogers c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 26.

 

Le défendeur

            Justice naturelle

 

[31]           Le défendeur soutient que le changement de politique n’a eu aucun effet substantiel sur la demande de résidence permanente du demandeur. Le demandeur souhaitait avoir la possibilité d’être libéré de son interdiction de territoire pour criminalité au Canada et d’obtenir le statut de résident permanent, et c’est exactement ces questions qu’a examinées la représentante du ministre dans le cadre de sa demande CH et de la demande parrainée par sa conjointe. Informer le demandeur du changement de politique signifierait seulement que, au lieu de faire deux demandes (soit une demande parrainée par le conjoint et une demande CH), le demandeur aurait pu demander une dispense de son interdiction de territoire dans le cadre de la demande parrainée par sa conjointe. Même si la représentante du ministre a commis une erreur en faisant défaut d’informer le demandeur du changement de politique, cette erreur n’a eu aucune incidence importante; le résultat aurait été le même. Pour cette raison, le défendeur soutient qu’il est justifiable de ne pas tenir compte de cette erreur. Voir Cartier c. Canada (Procureur général), 2002 CAF 384, aux paragraphes 32 et 33.

 

La représentante du ministre n’a pas entravé son pouvoir discrétionnaire

 

[32]           Le défendeur soutient que pour parvenir à sa décision, il incombait à la représentante du ministre d’examiner les activités criminelles du demandeur décrites dans la décision de la SAI rendue en 2000 ainsi que les facteurs d’ordre humanitaire. Comme le démontre la décision, la représentante du ministre a procédé à une appréciation détaillée des observations du demandeur et de ses motifs d’ordre humanitaire. L’allégation selon laquelle la représentante du ministre a entravé son pouvoir discrétionnaire est non fondée. Le demandeur n’est pas d’accord avec l’appréciation des éléments de preuve et l’issue de la décision, mais, étant donné que ces tâches relèvent de l’expertise de l’instance décisionnelle, la Cour ne devrait pas intervenir. Voir Sema c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1995), 30 Imm L.R. (2d) 249, [1995] A.C.F. n° 1148 (QL) (C.F. 1re inst.); Sidhu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000), 97 A.C.W.S. (3d) 740, [2000] A.C.F. n° 741 (QL) (C.F. 1re inst.).

 

Les erreurs factuelles ne sont pas importantes

 

[33]           Le défendeur soutient que, même si la représentante du ministre a commis une erreur en soulevant la question du mariage précédent du demandeur, la décision dans son ensemble s’appuie sur la preuve; le mariage précédent du demandeur ne pouvait avoir d’aucune manière un effet déterminant sur les résultats de la demande. Voir Nyathi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1119; Law Society of Upper Canada c. Ryan, 2003 CSC 20; l’arrêt Cartier, précité. Le défendeur soutient de plus que les observations du demandeur en ce qui a trait à l’appréciation eu égard aux motifs d’ordre humanitaire effectuée par la représentante du ministre équivalent là encore à demander à la Cour de soupeser à nouveau la preuve.

 

Difficultés

 

[34]           Le défendeur soutient que le demandeur, dans ses observations concernant les difficultés, prétend en quelque sorte que son sursis permet d’accueillir sa demande CH et de lui accorder le statut de résident permanent au Canada. Il n’a rien offert au soutien de cette prétention. La représentante du ministre était consciente de la question des difficultés; elle l’a examinée et en est arrivée à une conclusion raisonnable. Par conséquent, l’intervention de la Cour n’est aucunement justifiée.

 

La réponse du demandeur

 

[35]           Le défendeur ne conteste pas le manquement à la justice naturelle mais fait valoir que cela ne fait aucune différence car le résultat aurait été le même. Le demandeur n’est pas d’accord. Tant pour une demande parrainée par le conjoint que pour une demande CH, le demandeur doit convaincre l’agent qu’une dispense des exigences liées à l’interdiction de territoire est justifiée. Cependant, dans le contexte d’une demande parrainée par le conjoint, le demandeur a le droit absolu de demander le statut de résident permanent en étant au Canada et n’a pas à établir les motifs d’ordre humanitaire. Dans le contexte d’une demande CH cependant, le demandeur doit convaincre l’agent qu’il est approprié d’accorder une dispense de l’exigence normale de demander le statut de résident permanent de l’extérieur du Canada. Une demande CH est ainsi plus onéreuse pour le demandeur.

 

[36]           Le demandeur conteste l’affirmation du défendeur selon laquelle il ne fait que demander à la Cour de soupeser à nouveau la preuve. Le demandeur a soulevé des erreurs factuelles graves, l’omission de tenir compte d’éléments de preuve pertinents et l’omission d’examiner la demande CH en s’appuyant sur les circonstances actuelles. Contrairement aux déclarations du défendeur, ces erreurs sont importantes et la représentante du ministre s’est appuyée sur ces erreurs. L’ensemble de ces erreurs vicie la décision.

 

Le mémoire supplémentaire du défendeur

 

[37]           Le défendeur fait observer que la décision d’accorder ou de refuser une dispense de l’interdiction de territoire sur le fondement de motifs d’ordre humanitaire est très discrétionnaire. Bien que le demandeur conteste l’appréciation de la preuve par la représentante du ministre, le défendeur soutient que les conclusions de celle‑ci étaient raisonnables, justifiées et conformes à l’obligation qui lui incombait.

 

[38]           La représentante du ministre avait dûment à sa disposition la décision de la SAI de 2000. Il lui était loisible de faire observer que certaines décisions du demandeur avaient été motivées par des considérations en matière d’immigration; par exemple, en ce qui a trait au premier mariage du demandeur, son épouse et lui n’ont jamais vécu ensemble. Il lui était également loisible de noter que la SAI avait fait des remarques en 2000 quant à l’absence de remords du demandeur, étant donné que la représentante du ministre avait elle‑même remarqué en 2010 que le demandeur ne montrait toujours pas de remords. De plus, il a nié avoir eu quelque contact que ce soit avec un groupe terroriste, il a refusé de reconnaître les possibles répercussions graves découlant de sa tentative d’introduire illégalement des présumés terroristes sikhs au Canada, infraction à l’égard de laquelle il a plaidé coupable aux États‑Unis, et il n’a fourni aucune explication quant aux raisons pour lesquelles il a commis cette infraction et pourquoi il n’allait pas agir de façon semblable à l’avenir. Le défendeur soutient que l’absence de progrès du demandeur à cet égard était pertinente et la représentante du ministre a bien noté que l’absence de déclarations de culpabilité ne donnait pas un aperçu suffisant de ses croyances, de sa moralité ou de ses projets d’avenir.

 

[39]           Le défendeur prétend que le demandeur a omis de démontrer que la représentante du ministre n’a pas tenu compte de renseignements pertinents et qu’elle est, par conséquent, présumée avoir examiné tous les éléments de preuve. Par exemple, contrairement aux observations du demandeur, la représentante du ministre a reconnu qu’il était propriétaire de sa propre entreprise et que, en 2007, le total de ses profits nets s’élevait à 988 $. Elle a expressément reconnu qu’il était dans l’intérêt supérieur des enfants que le demandeur réside avec eux. Elle n’avait aucune obligation d’apprécier une situation hypothétique dans laquelle le demandeur serait expulsé à une date ultérieure; il n’y a pas de danger de ce côté‑là actuellement et, si la situation devait changer, le demandeur pourra alors faire d’autres demandes. Il était également raisonnable qu’elle conclue que l’incapacité actuelle de renvoyer le demandeur du Canada allège les difficultés liées au fait de ne pas acquérir la résidence permanente pour des motifs d’ordre humanitaire. La représentante du ministre a reconnu que le demandeur sera exposé à des risques s’il retourne en Inde. Cependant, le fait que le demandeur ne peut pas retourner en Inde ne l’oblige pas à lui accorder le statut de résident permanent.

 

[40]           En ce qui a trait aux arguments liés à la justice naturelle soulevés par le demandeur, la représentante du ministre désigne, dans son affidavit daté du 16 décembre 2010, le Bulletin opérationnel 126 (le BO 126), en date de juillet 2009, comme étant le document qui prévoit le changement de politique auquel le demandeur renvoie. Elle note que le BO 126 n’oblige pas le ministre à informer les demandeurs du changement de politique. En outre, elle indique que l’examen de la demande présentée par le demandeur aurait été le même, que la demande ait été faite au titre de la catégorie des époux au Canada ou de la catégorie des demandes fondées sur des motifs d’ordre humanitaire.

 

[41]           Par conséquent, le défendeur conteste l’argument du demandeur voulant que l’exercice du pouvoir discrétionnaire ait été quelque peu différent dans le cadre d’une demande parrainée par le conjoint par rapport à une demande CH. Dans le cas du demandeur, l’exercice du pouvoir discrétionnaire est le même dans les deux demandes car, en demandant l’examen des motifs d’ordre humanitaire, le demandeur ne fait pas que demander de demeurer au Canada pendant le traitement de sa demande mais d’être dispensé de l’interdiction de territoire pour grande criminalité. Ce genre de demande CH est différent d’une demande où les mesures d’ordre humanitaire sont demandées dans le seul but de demeurer au Canada durant le traitement de la demande. Cette demande est tranchée non pas dans un bureau local de Citoyenneté et Immigration Canada mais bien à l’administration centrale à Ottawa en raison de la question liée à la grande criminalité.

 

ANALYSE

 

[42]           Le demandeur a soulevé un large éventail de questions à examiner. Bien que je ne sois pas d’accord avec le demandeur sur certaines questions, je conviens néanmoins qu’il y a suffisamment d’erreurs dans la décision pour justifier son renvoi pour réexamen.

 

[43]           En ce qui a trait aux allégations d’erreurs factuelles sur l’authenticité du premier mariage et des conclusions selon lesquelles les accusations criminelles qui pesaient contre le demandeur étaient plus graves, j’estime que la représentante du ministre avait le droit de s’appuyer sur la décision antérieure de la SAI, qui lui fournissait suffisamment de renseignements et d’éléments pour conclure comme elle l’a fait, et il n’y avait rien de déraisonnable à cet égard.

 

[44]           En ce qui concerne l’entrave au pouvoir discrétionnaire et l’allégation selon laquelle la représentante du ministre s’est appuyée sur un seul fait, soit la perpétration de l’infraction en 1995, à l’exclusion de tous les autres faits, je ne pense pas que la décision permette de soutenir cette affirmation. Laissant de côté le problème lié à la réadaptation, la représentante du ministre mentionne également la gravité de l’infraction, l’absence de preuve quant à l’existence de remords, le défaut du demandeur de reconnaître ses liens avec des groupes terroristes, le manque d’explications quant aux raisons pour lesquelles il a commis l’infraction, et la menace que représente cette infraction au regard de l’intégrité des lois canadiennes en matière d’immigration, et elle fonde sa décision sur ces éléments. Par conséquent, je ne vois aucune entrave au pouvoir discrétionnaire de la façon que le décrit le demandeur autre que ce qui a pu se produire quant à la question de la réadaptation, dont je discute ci‑dessous.

 

[45]           La représentante du ministre n’a pas estimé nécessaire d’examiner pleinement l’intérêt supérieur des enfants et de l’épouse du demandeur car [traduction] « une décision défavorable sur la présente demande particulière n’aura aucune incidence sur le renvoi de M. Brar du Canada et donc, sur une séparation de son épouse et de ses enfants ».

 

[46]           Le demandeur affirme que cela ne suffit pas car le sursis pourrait être levé ultérieurement. Par conséquent, la représentante du ministre aurait dû évaluer les répercussions que tout renvoi futur pourrait avoir sur les enfants et sur l’épouse.

 

[47]           L’approche de la représentante du ministre face à cette question est que l’intérêt des enfants et de l’épouse du demandeur peut être mis de côté car [traduction] « une décision défavorable sur la présente demande particulière n’aura aucune incidence sur le renvoi de M. Brar du Canada et donc, sur une séparation de son épouse et de ses enfants ».

 

[48]           En refusant de traiter de l’intérêt supérieur des enfants, la représentante du ministre ne tient pas compte du fait que le sursis pourrait être levé à une date ultérieure. Le statut du demandeur au Canada est conditionnel et provisoire. Si le défendeur demande son renvoi, il n’est pas clairement établi comment et quand l’intérêt supérieur des enfants entrera en jeu et sera dûment pris en considération. En théorie du moins, il serait possible pour le demandeur de présenter une autre demande CH si le sursis est levé et qu’il fait face à un renvoi mais, à tout le moins, la représentante du ministre aurait dû examiner et expliquer de quelle façon l’intérêt supérieur des enfants allait être traité avant le renvoi, ou si l’intérêt supérieur des enfants justifie que le père continue de jouir d’un statut conditionnel au Canada et qu’il puisse faire l’objet d’une mesure de renvoi si le défendeur décide que les conditions en Inde ne présentent plus de risque. Il ressort de la décision Simoes c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000), 187 F.T.R. 219, [2000] A.C.F. n° 936 (QL) et d’affaires connexes que la simple existence d’une demande CH en instance n’empêchera pas un renvoi. La représentante du ministre reconnaît qu’[traduction] il est clairement dans l’intérêt supérieur de ces enfants de résider avec leur père, surtout pendant qu’ils sont d’âge mineur ». Or, la représentante du ministre fait ensuite abstraction de l’intérêt des enfants car une décision défavorable [traduction] « n’aura aucune incidence sur le renvoi de M. Brar du Canada […] ». À mon avis, cela ne répond tout simplement pas à la question de savoir comment et quand l’intérêt supérieur des enfants sera traité et pourquoi, étant donné qu’il est dans leur intérêt que leur père réside avec eux, cet intérêt ne devrait pas être pris en compte lors de l’examen de son droit précaire et conditionnel de demeurer au Canada. À mon avis, le refus de la représentante du ministre de traiter ces questions liées à l’intérêt supérieur des enfants constitue une erreur susceptible de révision.

 

[49]           En ce qui concerne le fait que la représentante du ministre a considéré les difficultés et les risques comme étant essentiellement des questions théoriques puisque le demandeur ne peut pas être renvoyé en Inde, je ne suis pas sûr de bien comprendre ce que le demandeur veut dire lorsqu’il se plaint du fait que le risque [traduction] « a une incidence importante sur la capacité des membres de la famille de s’intégrer pleinement ». La famille vit peut‑être dans l’insécurité parce que le demandeur n’a pas le droit de séjourner en permanence au Canada et pourrait, si les conditions changent en Inde, y être renvoyé dans le futur. Cependant, la preuve semble indiquer que la famille se porte bien dans les conditions actuelles.

 

[50]           La famille est présentement bien intégrée. Ainsi, le demandeur semble dire que la représentante du ministre devrait tirer des conclusions quant à ce qui pourrait arriver si le sursis est examiné de nouveau et qu’il fait l’objet d’une mesure de renvoi à une date ultérieure. Si jamais le sursis est levé, cela signifie que le risque a été examiné et qu’il a été décidé que le demandeur n’est exposé à aucun risque s’il retourne en Inde. Bien entendu, cela ne voudra pas dire qu’il n’y aura aucune difficulté, de sorte que là encore, par son approche, la représentante du ministre n’examine pas, ou n’explique pas, comment ce facteur sera traité avant le renvoi du demandeur. La représentante du ministre présume‑t‑elle que, avant tout renvoi futur, le demandeur pourra bénéficier d’une autre évaluation fondée sur les motifs humanitaires qui tiendra compte des difficultés? On ne sait pas avec certitude si cette présomption sous‑tend la décision. Le défendeur cherche peut‑être à renvoyer le demandeur avant qu’une demande fondée sur des considérations humanitaires ne soit présentée ou examinée, ce qui signifierait que le demandeur se trouverait hors du Canada même si aucune décision n’a réellement traité la question de l’intérêt supérieur de ses enfants ou des difficultés inhabituelles et injustifiées ou démesurées. J’aurais été moins préoccupé par la décision de la représentante du ministre de ne pas tenir compte de ces facteurs si elle avait expliqué comment et quand ces facteurs seront examinés avant un éventuel renvoi.

 

[51]           Je ne pense pas que les faits permettent de conclure à un manquement à la justice naturelle. Le demandeur renvoie à des différences conceptuelles entre deux types de demande, mais il me semble que la réalité en l’espèce est que le demandeur devrait remplir l’exigence de dispense, que sa demande CH ait été convertie ou non en demande parrainée par le conjoint par suite du changement de politique qui est entré en vigueur en juillet 2009. Le défaut de permettre au demandeur de choisir quel type de demande il pouvait présenter ne peut avoir aucune conséquence pratique sur les présents faits.

 

[52]           Je suis d’accord avec le demandeur pour dire que la représentante du ministre a omis de tenir compte de la question importante de la réadaptation lorsqu’elle a mis en balance les facteurs positifs et négatifs pour décider si une dispense était appropriée.

 

[53]           La représentante du ministre a commis une erreur à cet égard car une longue période de temps au cours de laquelle une personne n’est pas accusée ou déclarée coupable constitue une preuve convaincante de réadaptation, de sorte que la représentante du ministre aurait dû accorder à ce facteur le poids qui lui convient au lieu de fonder ses conclusions sur la situation qui existait lorsqu’a été rendue la décision de la SAI en 2000.

 

[54]           La représentante du ministre affirme qu’elle prend en compte l’observation de l’avocat sur la réadaptation mais ajoute ceci : [traduction] « Je n’ai pas à tenter de tirer des conclusions précises quant au risque de récidive de M. Brar. »

 

[55]           La représentante du ministre a ensuite ajouté ce qui suit :

[traduction]

 

À mon avis, l’absence de nouvelles déclarations de culpabilité ne permet pas en soi de connaître les croyances, la moralité ou les projets d’avenir d’une personne.

 

 

[56]           C’est peut‑être vrai, mais la réadaptation et le risque de récidive de M. Brar sont des facteurs importants à considérer lorsqu’on examine les gestes que M. Brar est susceptible de poser à l’avenir, et ils ne peuvent pas être écartés de la manière dont la représentante du ministre a tenté de le faire. Les années pendant lesquelles M. Brar a agi en tant que pourvoyeur responsable auprès de sa famille et membre productif de sa collectivité ne se voient accorder aucun poids dans cette décision. L’infraction a été commise il y a 15 ans et la SAI a fourni son analyse en 2000. Depuis ce temps, il y a eu bien des choses positives qui ne peuvent être exclues lors de l’examen de la dispense. Le défendeur reconnaît que la représentante du ministre devrait tenir compte de la réadaptation mais soutient que cela a été le cas et que, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, elle a conclu que les facteurs négatifs, comme l’absence de remords, l’emportaient sur les aspects positifs de la réadaptation du demandeur. À la lecture de la décision, j’estime toutefois que ce facteur positif d’une grande importance ne se voit accorder aucun poids : [traduction] « l’absence de nouvelles déclarations de culpabilité ne permet pas en soi de connaître les croyances, la moralité ou les projets d’avenir d’une personne ». Ce que la représentante du ministre n’explique pas, c’est quelle importance elle a accordée à la réadaptation positive du demandeur étant donné son opinion selon laquelle elle n’a [traduction] « pas à tenter de tirer des conclusions précises quant au risque de récidive de M. Brar ». Si la représentante du ministre ne tire aucune conclusion quant à savoir s’il est probable que le demandeur récidive, il n’y a rien de positif à mettre en balance avec les facteurs négatifs qu’elle cite et sur lesquels elle s’appuie. En effet, cela signifie qu’aucun poids n’a été accordé aux années de réadaptation du demandeur, qui ont été mises de côté.

 

[57]           La représentante du ministre affirme qu’elle n’a pas à examiner la question de la réadaptation lorsqu’elle examine une demande de dispense. En tout cas, elle prête si peu attention aux réalisations positives du demandeur depuis la décision de la SAI en 2000 qu’ils ne se voient accorder aucune importance. À mon avis, il s’agit d’une erreur susceptible de contrôle. Cette erreur vicie la décision tout entière et la rend déraisonnable.

 

[58]           En l’espèce, la décision n’indique pas si le demandeur, dans le cadre de sa demande de résidence permanente, a expressément demandé une dispense de l’interdiction de territoire sur le fondement de sa réadaptation. Cependant, comme le prévoit l’article 5.27 du guide de Citoyenneté et Immigration Canada IP5 concernant le traitement des demandes au Canada, Demande présentée par des immigrants au Canada pour des motifs d’ordre humanitaire (le « guide IP5 »), cela n’a pas d’importance :

Si l’étranger ne demande pas directement une dispense, mais que les faits dans la demande portent à croire qu’il demande la levée de l’interdiction de territoire, l’agent doit traiter la demande comme si une dispense avait été demandée. [Souligné dans l’original]

 

 

[59]           En faisant des commentaires sur le dossier qu’elle examinait, la représentante du ministre a reconnu que [traduction] « l’observation écrite de l’avocat datée du 6 mars 2008 soulève la question de la réadaptation de M. Brar ». Dans ces circonstances, tout semble indiquer que la représentante du ministre avait l’obligation d’examiner la réadaptation de M. Brar. Lorsqu’un agent s’acquitte de cette obligation, le guide IP5 indique ce qui suit :

[L’agent] […] peut tenir compte de facteurs tels que les actes du demandeur, y compris ceux ayant conduit et fait suite à la déclaration de culpabilité. L’agent doit examiner : le type de déclaration de culpabilité; la peine infligée; le temps écoulé depuis la déclaration de culpabilité; si l’infraction est un incident isolé ou dénote un profil de comportement récidiviste; tout autre renseignement pertinent sur les circonstances du crime.

 

 

[60]           En l’espèce, l’agent aurait dû tout d’abord traiter la demande de résidence permanente du demandeur comme une demande de dispense de son interdiction de territoire fondée sur sa réadaptation. Ensuite, elle aurait dû examiner entre autres la période de temps qui s’est écoulée depuis la déclaration de culpabilité ainsi que les mesures prises par le demandeur après la déclaration de culpabilité, y compris le fait qu’il a un emploi stable, une vie familiale et participe à la vie de la collectivité.

 

[61]           La preuve révèle que le demandeur a eu un mode de vie stable et n’a pas été impliqué dans des activités criminelles depuis 15 ans. Dans la décision Thamber c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 177, aux paragraphes 17 et 18, le demandeur, qui avait été déclaré coupable de trafic de stupéfiants, avait fait une demande de résidence permanente en invoquant sa réadaptation en tant qu’ancien criminel n’ayant pas récidivé pendant une période de dix ans. Le juge William McKeown a fait observer que, en rejetant la demande faite par le demandeur, la ministre avait agi de façon déraisonnable. Le juge McKeown a qualifié le fait que le demandeur n’a pas été impliqué dans des activités criminelles comme étant « le facteur qui est peut‑être le plus important », ajoutant :

L’agente mentionne d’autres facteurs dont elle pouvait parfaitement tenir compte mais le fait qu’elle ait omis le facteur qui est peut‑être le plus important dans ce genre de décisions constitue une erreur susceptible de contrôle judiciaire.

 

Dans l’affaire Dee c. M.C.I., [2000] 3 C.F. 345 (1re inst.), une affaire très semblable à la présente espèce, le demandeur n’avait exercé aucune activité criminelle depuis dix‑sept ans et avait près de 60 ans. Dans la présente affaire, le demandeur est un peu plus jeune et n’a pas récidivé depuis dix ans. Cependant, les principes en jeu dans ces affaires sont identiques. Compte tenu des faits de l’affaire Dee, la question a été renvoyée au ministre pour nouvel examen. Je vais également délivrer une ordonnance faisant droit à la présente demande et invitant le ministre à réexaminer l’affaire en conformité avec les présents motifs.

 

 

[62]           À mon avis, l’analyse de l’établissement effectuée par la représentante du ministre contient une autre erreur susceptible de contrôle. La représentante du ministre s’est simplement appuyée sur des chiffres relatifs au profit de l’entreprise et aux revenus personnels. Elle indique que le demandeur semble avoir certaines difficultés sur le plan financier. D’autres facteurs comme son engagement communautaire sont laissés de côté.

 

[63]           Dans la décision Raudales, précitée, la juge Dawson a statué que l’établissement est un facteur à considérer dans l’évaluation d’une demande fondée sur des considérations humanitaires et que, sans une bonne évaluation du niveau d’établissement, il est impossible de dire si le fait d’obliger un demandeur à revendiquer la résidence permanente de l’étranger entraînerait pour lui des difficultés. Voir également Jamrich c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 804.

 

[64]           Dans Raudales, Jamrich et les décisions subséquentes, la Cour a cité avec approbation les lignes directrices sur l’évaluation de l’établissement au Canada contenues dans le guide IP5 :

1.                  Le demandeur a‑t‑il des antécédents d’emploi stable?

2.                  Le demandeur a‑t‑il des antécédents de bonne gestion financière?

3.                  Le demandeur est‑il demeuré dans la même collectivité ou a‑t‑il déménagé souvent?

4.                  Le demandeur s’est‑il intégré à la collectivité en s’impliquant auprès d’organismes communautaires, en faisant du bénévolat ou par d’autres activités?

5.                  Le demandeur a‑t‑il entrepris des études professionnelles, linguistiques ou autres qui montrent une intégration à la société canadienne?

6.                  Le demandeur et les membres de sa famille ont‑ils un bon dossier civil au Canada?

 

[65]           Au paragraphe 19 de la décision Raudales, la Cour indique :

L’établissement est, d’après les lignes directrices du ministre qui figurent au chapitre 5 du Guide du traitement des demandes au Canada, un facteur à considérer dans l’évaluation d’une demande fondée sur des considérations humanitaires. Sans une bonne évaluation du niveau d’établissement, il était impossible à mon avis, dans le cas présent, de dire si le fait d’obliger M. Figueroa Raudales à demander la résidence permanente depuis l’étranger entraînerait pour lui des difficultés inhabituelles, injustes ou indues.

 

 

[66]           Dans la décision Jamrich, aux paragraphes 24, 28 et 29, la Cour a réaffirmé la proposition énoncée dans la décision Raudales et a confirmé que l’évaluation de la demande doit être faite conformément à la preuve présentée à l’agent :

Il demeure que les preuves présentées à la CI étaient fortes et convaincantes. En fait, j’éprouve une certaine difficulté à concilier les conclusions de fait auxquelles est arrivée la CI et sa conclusion finale. Les parents demandeurs ont tous les deux travaillé régulièrement depuis janvier 1996 jusqu’à la date de l’audience, à l’exception de brèves périodes au cours desquelles ils ont reçu de l’aide sociale.

 

[…]

 

La présente espèce est semblable à l’affaire Raudales, précitée. La CI possède un très large pouvoir discrétionnaire pour évaluer la demande des demandeurs. Cet examen doit toutefois être fondé sur les éléments de preuve présentés.

 

J’estime que la CI en est arrivée à une conclusion de fait qui n’est pas raisonnable : les conclusions de la CI selon laquelle « leur degré d’établissement n’est pas supérieur à celui auquel on peut s’attendre à l’égard d’un réfugié qui aurait eu les mêmes possibilités au Canada » et selon laquelle elle n’est pas convaincue que dans leur cas, « leur degré d’établissement est suffisamment différent ou important pour que l’on puisse dire que la famille Jamrich est mieux établie que toute autre famille qui réside au Canada en attendant que se déroule le processus de détermination du statut de réfugié » sont manifestement déraisonnables, compte tenu des circonstances de l’espèce.

 

 

[67]           De plus, dans la décision Amer c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 713, aux paragraphes 13 et 14, la Cour confirme l’opinion exprimée dans les décisions Raudales et Jamrich selon laquelle une erreur susceptible de contrôle judiciaire dans l’examen de l’établissement constitue un motif suffisant pour accueillir une demande de contrôle judiciaire :

La décision Jamrich a été rendue en application de la Loi et du Guide de l’immigration : Traitement des demandes au Canada – 5 : Demande présentée par des immigrants au Canada pour des motifs d’ordre humanitaire. Je ne vois aucun motif pour ne pas souscrire à l’approche prise par la Cour dans la décision Jamrich et je suis convaincue que la demanderesse a établi que l’agent avait commis une erreur susceptible de contrôle dans la façon dont il avait traité la question de l’établissement.

 

Bien que cette erreur constitue un motif suffisant pour accueillir la présente demande de contrôle judiciaire, j’examinerai brièvement les arguments soulevés par la demanderesse et portant sur le traitement par l’agent de l’intérêt supérieur des enfants de la demanderesse ainsi que du caractère adéquat des motifs.

 

 

[68]           À mon avis, le traitement de l’établissement par la représentante du ministre dans la présente affaire est beaucoup trop sélectif et superficiel pour répondre aux exigences de la jurisprudence pertinente.


 

 

JUGEMENT

 

 

LA COUR STATUE :

 

1.                  La demande est accueillie. La décision est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre représentant du ministre pour qu’il procède à un nouvel examen.

 

2.                  Il n’y a aucune question à certifier.

 

« James Russell »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    IMM‑3138‑10

 

INTITULÉ :                                                   PINDER SINGH BRAR c.
LE MINISTRE DE
LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 9 février 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT                           LE JUGE RUSSELL

ET JUGEMENT :

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 14 juin 2011

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Krassina Kostadinov

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Ladan Shahrooz

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

LORNE WALDMAN

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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