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Cour fédérale

 

 

Federal Court


 

Date : 20100421

Dossier : IMM-3239-09

Référence : 2010 CF 431

Ottawa (Ontario), le 21 avril 2010

En présence de monsieur le juge Phelan

 

 

ENTRE :

KAMAL GUIRGUIS

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE
L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          SURVOL

[1]               Le demandeur, citoyen égyptien, sollicite le contrôle judiciaire d’une décision par laquelle la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (CISR) a refusé sa demande d’asile et sa demande de protection à cause de doutes quant à sa crédibilité, ainsi que de l’inexistence d’une possibilité de refuge intérieur (PRI) et d’une protection de l’État adéquate.

 

[2]               Le problème essentiel que pose la position du demandeur est que celui-ci tente d’enfourcher deux chevaux en même temps pour se rendre dans des directions différentes. Il a dit tout d’abord qu’il craignait ses frères mais, comme cette allégation était faible, il a dit craindre une ou plusieurs personnes non identifiées parce qu’il s’était converti pour des raisons de convenance de la religion musulmane à la religion chrétienne. Son récit incohérent a une incidence sur tous les éléments de sa demande, y compris l’absence d’une protection de l’État et l’existence d’une PRI.

 

II.         LES FAITS

[3]               Le demandeur est issu d’une nombreuse famille de chrétiens coptes. Il s’est converti à l’islam pour pouvoir marier son épouse irakienne kurde. Il a également obtenu la citoyenneté irakienne. Ses frères, a-t-il dit, l’ont répudié à cause de sa conversion et le tiennent pour mort.

 

[4]               À cause de la guerre irako-kurde, le demandeur, son épouse et leurs deux filles ont déménagé en Égypte. Il a déclaré que son épouse et ses enfants étaient harcelés par sa famille. Il a vécu séparé d’eux et ces derniers ont demandé l’asile à l’ambassade du Canada, d’où ils ont été admis comme réfugiés.

 

[5]               Le demandeur a fini par obtenir un permis de séjour temporaire (PST) en se fondant sur la demande pendante de parrainage de son épouse. Ce plan a échoué quand leur mariage a connu le même sort et, confronté au non-renouvellement de son PST, il a demandé l’asile.

 

[6]               Le demandeur a soutenu qu’il avait retrouvé ses racines chrétiennes et que les problèmes qu’il avait avec sa famille égyptienne commençaient à s’atténuer. Il a ajouté qu’il était retourné dans son pays pour rendre visite à son frère, qui était en phase terminale, et assister à ses funérailles mais il a aussi prétendu qu’au cours de sa visite il était resté anonyme.

 

[7]               La demande d’asile du demandeur était fondée sur sa reconversion au christianisme et sur sa crainte d’être pris pour cible par des extrémistes islamiques en tant qu’apostat. Dans son témoignage, il a laissé entendre qu’il craignait principalement sa famille, qui, semble-t-il, avait été mécontente au départ de sa conversion à l’islam. Dans son entrevue de premier contact, il a dit qu’il craignait sa famille à cause de son mariage, qu’il craignait un peu le fait d’être un apostat et qu’il craignait aussi qu’une personne le tuerait. Son FRP était axé sur sa crainte de sa famille et des représailles de cette dernière.

 

[8]               La preuve qu’il a fournie à la CISR comportait de nombreuses incohérences, contradictions et dissimulations. Cependant, l’élément central de sa preuve était lié à la relation qu’il avait avec sa famille ainsi qu’à sa crainte de cette dernière.

 

[9]               Le premier motif de refus de la demande du demandeur est la crédibilité, et cela n’est pas surprenant. Le commissaire a fait état d’un certain nombre d’incohérences et de contradictions touchant au cœur même de la demande.

 

[10]           Le commissaire a également conclu que, pour les chrétiens vivant en Égypte, il existait une protection de l’État, même si elle était lacunaire. Le demandeur n’avait pas sollicité une protection à cause de sa crainte mal définie de fanatiques de la police.

 

[11]           Le commissaire a également conclu qu’il existait une PRI à Alexandrie, où nul ne serait au courant de son mariage et de sa conversion, deux faits survenus plus de quatorze ans plus tôt.

 

III.       ANALYSE

[12]           La norme de contrôle qui s’applique aux conclusions relatives à la crédibilité est la décision raisonnable, comme c’est le cas pour la protection de l’État et l’existence d’une PRI.

 

[13]           Même si le commissaire a commis les erreurs de droit alléguées, dont le fait de ne pas examiner si le demandeur était un membre et s’il serait persécuté en tant que tel, ses conclusions concernant la protection de l’État et l’existence d’une PRI règlent entièrement la question de sa demande d’asile.

 

[14]           Le problème que pose l’allégation d’erreur de droit du demandeur est que ce dernier n’a pas indiqué clairement quelle était la nature de sa crainte véritable. Le commissaire n’était pas tenu de clarifier les motifs du demandeur. En fait, il a pris en considération deux aspects de la demande du demandeur : la crainte de sa famille et la crainte des extrémistes en raison de son statut d’apostat.

 

[15]           Le commissaire a conclu qu’il y avait peu de risques que l’on considère le demandeur comme une personne convertie; il ne se rangeait donc pas dans la catégorie – celle des apostats – dont il fallait tenir compte des risques. Il s’agissait là d’une conclusion qu’il était loisible au commissaire de tirer, compte tenu surtout des positions contradictoires du demandeur.

 

[16]           Le commissaire a bel et bien traité de la crainte des extrémistes islamiques et du statut des apostats en examinant la protection de l’État et l’existence d’une PRI. La conclusion qu’il a tirée sur ces deux points était raisonnable. Il a reconnu la réputation douteuse de la police à l’égard des chrétiens mais il a aussi pris note d’une preuve de réaction positive de la part des autorités. L’analyse concernant la protection de l’État est équilibrée et convaincante.

 

[17]           La conclusion relative à l’existence d’une PRI a traité de la tentative du demandeur de réfuter la suggestion d’une telle solution de rechange – une réfutation manifestement influencée par la crédibilité (ou l’absence de crédibilité) du demandeur.

 

IV.       CONCLUSION

[18]           En conséquence, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n’y a pas de question à certifier.

 


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

 

 

 

« Michael L. Phelan »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3239-09

 

INTITULÉ :                                       KAMAL GUIRGUIS

                                                            c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 2 mars 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE PHELAN

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 21 avril 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Bahman Motamedi

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Alison Engel-Yan

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Green and Spiegel

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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