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Date : 20091015

Dossier : IMM-593-09

Référence : 2009 CF 1047

Ottawa (Ontario), le 15 octobre 2009

En présence de monsieur le juge Russell

 

 

ENTRE :

LAVDIMIR PREKAJ et

EDMONDA PREKAJ

demandeurs

et

 

 LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire, présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), d’une décision rendue le 19 janvier 2009 (la décision), dans laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a refusé de reconnaître aux demandeurs la qualité de réfugié au sens de la Convention ou de personne à protéger au sens des articles 96 et 97 de la Loi.

 

LES FAITS

 

[2]               Les demandeurs, mari et femme, sont citoyens de l’Albanie. Le demandeur a fui aux États­Unis en 2000, où il a demandé l’asile politique après avoir été agressé. La demanderesse a fui aux États­Unis en 2002. Les demandeurs se sont mariés en 2002 et ont maintenant trois enfants. Deux des enfants sont citoyens des États­Unis, et l’un des enfants est citoyen du Canada. Les demandeurs et leurs enfants ont fui au Canada après avoir appris que leur demande d’asile avait été rejetée et qu’ils allaient être expulsés des États­Unis.

 

[3]               Les demandeurs craignent de retourner en Albanie en raison d’une vendetta dont fait l’objet la famille du demandeur. L’oncle du demandeur a tué un homme, et la famille de la victime veut tuer un homme de la famille du demandeur. Par conséquent, les hommes de la famille du demandeur vivent cachés. Les demandeurs ont craint d’être renvoyés dans le pays où la vendetta a lieu et ils sont venus au Canada demander le statut de réfugié.

 

LA DÉCISION SOUMISE AU CONTRÔLE

 

[4]               La Commission a conclu que les demandeurs n’avaient aucune crainte fondée de persécution, qu’ils n’avaient pas la qualité de personne à protéger et que leur renvoi en Albanie ou aux États‑Unis ne les exposerait pas à des menaces à leur vie ou à des risques de traitements ou peines cruels et inusités.

 

[5]               La Commission a conclu que la protection de l’État constituait la question principale en l’espèce. Étant donné que le Parti démocratique albanais n’était plus au pouvoir en Albanie, le demandeur n’appartenait plus à un groupe social particulier et, en outre, il n’y avait plus de menace à leur vie ou de risque de traitements ou peines cruels et inusités.

 

[6]               Citant la décision Zefi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 636 (Zefi), rendue par la Cour, la Commission a conclu qu’il n’y avait aucun lien entre les vendettas et l’un des motifs de la Convention. En outre, le gouvernement de l’Albanie à apporter de grandes modifications à ses lois concernant les vendettas, notamment l’imposition d’une peine d’emprisonnement de 25 ans aux personnes déclarées coupables de meurtre dans le cadre d’une vendetta ainsi que l’imposition de peines sévères visant les personnes qui menacent de se venger. Le recours à la coutume de la vendetta a commencé à diminuer par suite de ces modifications.

 

[7]               La Commission était convaincue que le gouvernement de l’Albanie déployait de grands efforts pour régler le problème des vendettas. Les efforts accrus du gouvernement comprennent notamment une modification visant à rendre les vendettas illégales et un engagement à consacrer 65 000 euros pour promouvoir la réconciliation. La Commission était également convaincue qu’il y avait raisonnablement peu de vendettas. Elle a noté que l’Albanie est une démocratie parlementaire et qu’en général elle respecte les droits de ces citoyens. 

 

[8]               La Commission a estimé que les demandeurs n’avaient pas présenté de preuve claire et convaincante réfutant la présomption de l’existence de la protection de l’État. Bien que la protection offerte par l’Albanie ne soit pas parfaite, la Commission était convaincue que l’Albanie déployait de grands efforts pour y parvenir.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

 

[9]               Les demandeurs soulèvent les questions en litige suivantes dans la présente demande :

 

1)                  La Commission a­t­elle commis une erreur de droit dans son interprétation et son application de la définition de réfugié au sens de la Convention et de personne à protéger au sens des articles 96 et 97 de la Loi?

2)                  La Commission a­t­elle fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée tirée de façon abusive ou arbitraire, sans tenir compte de la preuve dont elle disposait?

3)                  La Commission a­t­elle fondé sa décision sur des conclusions de vraisemblance reposant sur des inférences qu’elle ne pouvait pas raisonnablement tirer?

4)                  La Commission a­t­elle omis de respecter un principe de justice naturelle, d’équité procédurale ou une autre procédure qu’elle est obligée de respecter selon la Loi?

 

Cependant, les demandeurs n’ont pas soulevé dans leurs observations tous les moyens de contrôle formels invoqués. Essentiellement, les demandeurs soutiennent que les conclusions tirées par la Commission au sujet de la protection de l’État ne sont pas raisonnables.

 

LES DISPOSITIONS LÉGALES

 

[10]           Les articles suivants de la Loi s’appliquent en l’espèce :

Définition de « réfugié »

 

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

 

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

 

 

Personne à protéger

 

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

Personne à protéger

 

(2) A également qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et fait partie d’une catégorie de personnes auxquelles est reconnu par règlement le besoin de protection.

 

 

 Convention refugee

 

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

 

 

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

Person in need of protection

 

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

 

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

 

Person in need of protection

 

(2) A person in Canada who is a member of a class of persons prescribed by the regulations as being in need of protection is also a person in need of protection.

 

LA NORME DE CONTRÔLE

 

[11]           Dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, 2008 CSC 9, la Cour suprême du Canada a admis que, même si la décision raisonnable simpliciter et la décision manifestement déraisonnable sont des normes théoriquement différentes, « les difficultés analytiques soulevées par l’application des différentes normes réduisent à néant toute utilité conceptuelle découlant de la plus grande souplesse propre à l’existence de normes de contrôle multiples » : Dunsmuir, paragraphe 44. La Cour suprême a donc conclu que les deux normes de contrôle relatives au caractère raisonnable de la décision devaient être fondues pour n’en former qu’une seule : « la raisonnabilité ».

 

[12]           Dans l’arrêt Dunsmuir, la Cour suprême du Canada a également statué qu’il n’était pas toujours nécessaire de se livrer à une analyse de la norme de contrôle. Plutôt, si la norme de contrôle applicable à la question particulière dont la cour de révision est saisie est bien établie par la jurisprudence, la cour de révision peut adopter cette norme de contrôle. Ce n’est que si cette démarche se révèle infructueuse que la cour de révision doit entreprendre l’analyse des quatre facteurs qui permettent de déterminer la norme de contrôle applicable.

 

[13]           La norme de contrôle applicable à l’interprétation de la Loi effectuée par la Commission est la décision correcte, alors que celle applicable en ce qui concerne l’application de la règle de droit aux faits est la raisonnabilité (Dunsmuir, paragraphe 164) et que celle applicable à la question de savoir si la Commission a commis une erreur dans sa conclusion relative à la crédibilité est aussi la raisonnabilité : Aguirre c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 571.

 

[14]           La raisonnabilité est la norme applicable lors du contrôle de conclusions portant sur la protection de l’État tirées par la Commission, car la protection de l’État constitue une question mixte de fait et de droit : Guzman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 490. La norme de contrôle applicable aux questions de fait est également la raisonnabilité (Dunsmuir, paragraphe 51). Par conséquent, la raisonnabilité est la norme de contrôle qui sera appliquée par la Cour dans le cadre de l’examen quant à savoir si la Commission a commis une erreur dans ses conclusions de fait.

 

[15]           Lorsque la Cour contrôle une décision selon la raisonnabilité, son analyse tient « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » : Dunsmuir, paragraphe 47. Autrement dit, la Cour ne devrait intervenir que si la décision est déraisonnable en ce sens qu’elle n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

 

[16]           Les demandeurs ont également soulevé des questions concernant une erreur de droit et un manquement à l’équité procédurale, et la norme applicable à ces questions est la décision correcte : voir Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1, et Dunsmuir, paragraphe 60.

 

LES OBSERVATIONS

            Les demandeurs

 

[17]           Les demandeurs reconnaissent qu’une crainte raisonnable de persécution est fondée sur l’existence de deux éléments, l’un subjectif, l’autre objectif. Ils ont cité et fait valoir à ce sujet l’arrêt Adjei c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1989] 2 C.F. 680, dans lequel la Cour d’appel fédérale a conclu que l’élément objectif du critère était défini comme étant la « possibilité raisonnable » que les demandeurs fassent l’objet de persécution s’ils retournaient dans leur pays. La Cour d’appel fédérale a précisé ce critère dans l’arrêt Ponniah c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration (1991), 13 Imm. L.R. (2d) 241, dans laquelle elle a tiré la conclusion suivante :

Il ressort de la définition des expressions « avec raison » et « possibilité raisonnable » […] [que] [l]’exigence est moindre qu’une possibilité à 50 % (c.-à-d. une probabilité), mais supérieure à une possibilité minimale ou à une simple possibilité. Il n’y a pas d’exigence intermédiaire : entre ces deux limites, le demandeur craint « avec raison ». Si, comme la Commission l’a écrit, le demandeur [traduction] « [ ... ] peut faire face à plus qu’une simple possibilité [ ... ] » de persécution, il a franchi la limite inférieure et a établi qu’il craignait « avec raison » d’être persécuté ou qu’il y avait une « possibilité raisonnable » de persécution.

 

[18]           Les demandeurs soutiennent que la protection de l’État constitue une question de fait parce que la sollicitation de la protection de l’État dépend des circonstances uniques de chaque affaire. En l’espèce, la Commission a noté que la protection de l’État était négligeable, que le degré de professionnalisme au sein de la police était peu élevé et que la police n’offrait que peu d’aide.

 

[19]           Les demandeurs soutiennent qu’ils ont réfuté la présomption de la protection de l’État. Leur preuve documentaire faisait état d’assassinats dans le cadre de vendettas et de meurtres par vengeance. En outre, la preuve documentaire révélait que les vendettas avaient pour conséquence que plus d’un millier de familles étaient emprisonnées dans leur maison par crainte de représailles.

 

[20]           Les demandeurs affirment que le nombre de familles emprisonnées dans leur maison montre que la protection de l’État en Albanie n’est pas efficace en ce qui concerne les vendettas. En outre, la preuve montre que la police de l’Albanie préfère ne pas intervenir dans les situations concernant les vendettas. D’autres éléments de preuve fournis par les demandeurs révèlent que, dans certaines situations, quitter l’Albanie est la seule solution aux vendettas.

 

[21]           Enfin, les demandeurs allèguent que le Comité national de la réconciliation aide à régler les vendettas parce que la protection de l’État est inefficace dans ces circonstances.

 

[22]           Les demandeurs croient que la Commission a mal interprété la preuve sur la protection de l’État. En outre, les inférences portant sur la preuve documentaire tirées par la Commission n’étaient pas raisonnables et la décision devrait être annulée. Voir Giron c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1992), 143 N.R. 239.

 

            Le défendeur

 

[23]           Le défendeur soutient que l’examen de la protection de l’État effectué par la Commission était correct. En particulier, la Commission note que, l’année dernière en Albanie, seulement 2 des 96 meurtres étaient liés à des vendettas. La Commission a également tenu compte d’éléments de preuve selon lesquels le gouvernement avait imposé des pénalités sévères dans le cas des meurtres liés à des vendettas, lesquelles pénalités avaient aidé à faire diminuer la coutume. Selon le défendeur, les motifs de la Commission établissent que cette dernière était pleinement au fait de la preuve documentaire.

 

[24]           Afin d’établir que la Commission a commis une erreur dans sa conclusion relative à la protection de l’État, les demandeurs doivent montrer que certains éléments de preuve fiables et probants n’ont pas été examinés par la Commission. En outre, les demandeurs doivent établir que la protection ne serait pas offerte par l’État : Carillo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CAF 94.

 

[25]           La preuve sur laquelle les demandeurs se sont fondés ne révèle pas que la Commission a commis une erreur dans son analyse et que la protection de l’État était inadéquate. Le simple fait d’établir que des vendettas constituent toujours un problème en Albanie ne décharge pas les demandeurs de leur fardeau.

 

ANALYSE

 

[26]           La présente affaire doit être renvoyée pour nouvel examen. Une analyse de la preuve dont disposait la Commission révèle le caractère extrêmement sélectif de la Commission dans le choix de la preuve sur laquelle elle s’est fondée pour étayer ses conclusions, lesquelles pourraient bien être contredites par la preuve dans son ensemble.

 

[27]           Par exemple, la Commission a cité et a fait valoir la citation suivante tirée de la pièce C­10 :

[traduction]

[…] [L]es statistiques sur les vendettas varient. D’après le ministère de l’Intérieur, 2 des 96 meurtres survenus pendant l’année étaient liés à des vendettas. L’accroissement du nombre d’enquêtes a fait diminuer le nombre de meurtres d’honneur […].

 

 

[28]           Cependant, il est très révélateur que la Commission n’ait pas cité la phrase qui suit la dernière citation tirée de la pièce C‑10 :

[traduction]

Cependant, le Comité national pour la réconciliation, une organisation non gouvernementale (ONG), continue de citer les hauts taux d’activité en matière de vendettas, notamment le fait que plus de 1 000 familles sont emprisonnées dans leur maison de peur de faire l’objet de vendettas.

 

 

[29]           L’avocat du défendeur a fait valoir à la Cour que cet élément de preuve avait été écarté en raison de sa source : le Comité national pour la réconciliation. La Commission a bien entendu le droit de privilégier certains éléments de preuve. Cependant, si la Commission n’explique pas pourquoi elle n’a pas tenu compte de la preuve contradictoire, alors la Cour peut très bien conclure que cette preuve a simplement été négligée ou ignorée. Voir Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), (1998) 157 F.T.R. 35.

 

[30]           Les réponses aux demandes d’information (RDI), qui faisaient partie de la série d’éléments de preuve documentaire, établissaient sans équivoque que « les autorités albanaises n’étaient pas en mesure de protéger les victimes de vendettas » et que les « vendettas se poursuivent, malgré les améliorations, car l’État albanais demeure en quelque sorte inefficace ». Des éléments de preuve établissaient également que la police et la magistrature étaient inefficaces et qu’elles hésitaient à intervenir dans les vendettas parce qu’elles craignaient de devenir elles‑mêmes des cibles.

 

[31]           Aucun des éléments de preuve contradictoires n’est traité dans la décision. L’avocat du défendeur soutient que la raison pour laquelle la Commission n’a pas tenu compte de ces éléments de preuve est que la RDI avait été publiée en septembre 2006 et que, par conséquent, la Commission avait le droit de se fonder sur des documents plus récents qui mentionnaient que la situation s’était améliorée et que le gouvernement de l’Albanie prenait des mesures pour s’attaquer aux vendettas. Cependant, la Commission a totalement ignoré l’avis de l’agent de protection des réfugiés qui se trouve à la page 270 du dossier certifié du tribunal, qui mentionne un exposé publié en mai 2008 et qui établit très clairement que, malgré les initiatives du gouvernement et les modifications législatives, le gouvernement de l’Albanie « est incapable de gérer le problème efficacement ou d’offrir une protection appréciable aux citoyens touchés. Les législateurs albanais ont reconnu qu’en Albanie, il y a absence de primauté du droit. » La Commission n’a tenu compte d’aucun de ces éléments. Le commissaire a simplement choisi des documents et des éléments de preuve étayant une conclusion selon laquelle les demandeurs n’avaient pas réfuté la présomption de la protection de l’État. Pour cette raison, la décision est entièrement déraisonnable. Voir King c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 774.


 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

 

1.                  La demande est accueillie. La décision est annulée, et l’affaire est renvoyée à un autre commissaire pour nouvel examen.

2.                  Il n’y a aucune question à certifier.

 

« James Russell »

Juge

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jean-François Martin, LL.B., M.A.Trad.jur.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-593-09

 

INTITULÉ :                                       LAVDIMIR PREKAJ ET EDMONDA PREKAJ

                                                            c.        

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 1ER OCTOBRE 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :            LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 15 OCTOBRE 2009

 

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

 

John Rokakis                                        POUR LES DEMANDEURS

 

Bridget A. O’Leary                              POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John Rokakis                                        POUR LES DEMANDEURS

Avocat

Windsor (Ontario)                   

 

John Sims, c.r.                                      POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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