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Cour fédérale

 

Federal Court

 


Date : 20090924

Dossier : IMM-1532-09

Référence : 2009 CF 964

Ottawa (Ontario), 24 septembre 2009

En présence de monsieur le juge Harrington

 

ENTRE :

BALWAAN CHAND

CAMEL CHAND

CAYNOR CHAND

JAVIER CHAND

 

demandeurs

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Balwaan Chand, sa femme et ses deux enfants ont fui le Guyana pour trouver refuge au Canada. Là-bas, ils ont été victimes d’un cambriolage à domicile et plus d’une vingtaine de personnes auraient été assassinées lors de deux incidents dans des villages voisins, l’activité criminelle est répandue et ils risquent plus que d’autres d’être pris pour cibles à cause de leur origine indo‑guyanienne et de leur richesse relative. Bien que les demandeurs aient été crédibles, leur demande d’asile a été rejetée et leur examen des risques avant renvoi a donné lieu à une décision défavorable.

 

[2]               Les demandeurs ont fait de l’intérieur du Canada une demande de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. Il s’agit d’une exception au Règlement, qui exige que cette demande soit faite hors du Canada. Toutefois, en vertu de l’article 25 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, le ministre peut lever les exigences applicables pour des motifs d’ordre humanitaire et doit tenir compte de l’intérêt supérieur des enfants directement touchés. Leur demande a été refusée; le présent contrôle judiciaire conteste cette décision.

 

[3]               Les Chand ont allégué que trois erreurs donnant lieu à révision ont été commises. L’intérêt supérieur des enfants (les deux nés au Guyana et celui né au Canada par la suite) n’a pas été pris en considération, le rapport psychologique effectué par une dénommée Mme Pilowski portant tant sur les enfants que sur leurs parents a été mis de côté, rejeté ou considéré au regard de motifs inappropriés et l’agent a évalué leur situation probable s’ils retournaient au Guyana en fonction des risques plutôt que des difficultés.

 

[4]               Même s’il est tout à fait compréhensible dans les circonstances que les Chand préféreraient rester au Canada, et bien qu’il n’y ait pas de raisons de penser qu’ils n’apporteraient pas une contribution positive à notre société, je ne peux pas dire que la décision de l’agent, selon laquelle les Chand ne seraient pas exposés à des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives s’ils faisaient une demande de visas de résident permanent hors du Canada, est déraisonnable. Leur enfant né au Canada est citoyen canadien et n’est évidemment pas exposé à la mesure de renvoi. Je ne crois pas non plus que l’agent n’ait pas été « réceptif, attentif et sensible » à l’intérêt supérieur des trois enfants, pour reprendre les mots de madame la juge L’Heureux-Dubé dans Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817.

 

[5]               Les Chand sont ici depuis deux ans. Leurs deux enfants aînés ont commencé leurs études au Guyana.  L’intérêt supérieur du jeune enfant est évidemment de demeurer auprès de ses parents.

 

[6]               Pour examiner l’intérêt supérieur des enfants, l’agent n’a pas seulement tenu compte de l’opinion de Mme Pilowski, mais aussi de la situation dans leur pays. Il a admis que les enfants de même que leurs parents pourraient subir un traumatisme s’ils retournaient au Guyana et qu’ils sont excessivement inquiets de leur avenir. Toutefois, l’agent a fait une remarque tout à fait raisonnable, selon laquelle il y a un grand nombre de victimes d’actes criminels au Guyana et que si, comme l’indique le dossier d’information sur le pays, les agressions sont fréquentes dans les écoles, les Chand ne se trouveraient pas dans une situation spéciale. Ils ne devraient pas être dans une meilleure posture parce qu’ils ont quitté le Guyana, alors que d’autres ont dû y rester. Comme il est dit dans Ramotar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 362, [2009] A.C.F. nº 472, être la victime probable d’activités criminelles généralisées ne suffit pas. Il doit y avoir autre chose.

 

[7]               L’agent dont la décision est en question a aussi fait l’examen des risques avant renvoi.  L’avocat du demandeur a avancé que dans un ERAR, c’est le risque qui est évalué, mais qu’une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire est jugée en fonction des difficultés. Bien que le facteur du risque puisse être pris en compte, le risque n’a pas à être aussi important que celui qui justifierait une décision favorable à l’égard d’un ERAR. Il existe de nombreuses décisions qui abordent la question dans l’abstrait. Monsieur le juge de Montigny a expliqué clairement la distinction dans Ramirez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1404, 304 F.T.R. 136, au paragraphe 41 et suivants.

 

[8]               Dans la présente affaire, l’agent a bel et bien évalué l’établissement au Canada par rapport aux difficultés au Guyana, et non pas par rapport aux risques. Même si un autre agent aurait pu arriver à une autre conclusion basée sur les mêmes faits, la norme est la raisonnabilité. Il est possible qu’il existe plus d’une décision raisonnable. La décision n’était pas déraisonnable, et la Cour suprême a mis en garde contre le fait de simplement substituer son opinion à celle du décideur (Canada (Directeur des enquêtes et recherches, Loi sur la concurrence) c. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748, au paragr. 80).


ORDONNANCE

      POUR LES MOTIFS EXPOSÉS;

LA COUR ORDONNE que :

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

 

 

 

« Sean Harrington »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1532-09

 

INTITULÉ :                                       Chand et al. c. MCI

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 17 septembre 2009

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE HARRINGTON

 

DATE DES MOTIFS :                      le 24 septembre 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

D. Clifford Luyt

 

POUR LES DEMANDEURS

Manuel Mendelzon

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

D. Clifford Luyt

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

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